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+The Project Gutenberg EBook of Tendresses impériales, by Napoléon Bonaparte
+
+This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
+almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
+re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
+with this eBook or online at www.gutenberg.org
+
+
+Title: Tendresses impériales
+
+Author: Napoléon Bonaparte
+
+Release Date: November 2, 2006 [EBook #19700]
+
+Language: French
+
+Character set encoding: ISO-8859-1
+
+*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK TENDRESSES IMPÉRIALES ***
+
+
+
+
+Produced by Chuck Greif, Mireille Harmelin and the Online
+Distributed Proofreading Team at http://dp.rastko.net
+(Produced from images of the Bibliothèque nationale de
+France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr)
+
+
+
+
+
+[Note du transcripteur:
+
+Ce livre présente des lettres de Napoléon Bonaparte à sa première femme,
+Joséphine de Beauharnais, et à la Comtesse Marie de Walewska.
+
+Rappelons que Napoléon Bonaparte eut deux épouses:
+
+--Joséphine Tascher de la Pagerie, veuve du général Beauharnais, qu'il
+épousa en 1796 et dont il divorça en 1809 car Joséphine ne lui avait pas
+donné l'héritier à la dynastie qu'il souhaitait;--Marie-Louise, fille
+de l'empereur d'Autriche, qu'il épousa en 1810 et dont il eut un fils,
+le roi de Rome (1811-1832), surnommé l'Aiglon.
+
+C'est pendant les pourparlers qui conduisirent au Traité de Tilsitt
+signé en 1807 entre Napoléon 1er et le tsar Alexandre 1er de Russie,
+traité qui eut pour conséquences le démembrement de la Prusse et la
+reconstitution d'un État polonais (le Grand Duché de Varsovie), que
+Napoléon fit la connaissance de la Comtesse Marie de Walewska, à
+laquelle furent adressées quelques unes des lettres présentées dans ce
+livre.
+
+Rappelons brièvement les épisodes successifs de la vie politique et
+militaire de Napoléon Bonaparte:
+
+--en mars 1796, Bonaparte venait d'être nommé général en chef de
+l'armée d'Italie pour combattre les Autrichiens. Il y remporta des
+victoires restées fameuses: Castiglione, Arcole, Rivoli. Le Traité de
+Campoformio (octobre 1797) mit fin à la guerre avec les Autrichiens.
+
+--en 1798-1799, ce fut la Campagne d'Égypte où Bonaparte fut vainqueur
+aux Pyramides; mais la flotte française fut détruite par Nelson, à
+Aboukir.
+
+--en 1800, ce fut la 2ème campagne d'Italie avec la victoire de
+Marengo sur les Autrichiens.
+
+--Bonaparte devint premier Consul à la suite du coup d'État du 18
+brumaire an VIII (9 novembre 1799) puis fut sacré Napoléon 1er, Empereur
+des Français, le 2 décembre 1804.
+
+--Ce fut ensuite une succession de batailles victorieuses, Austerlitz
+(1805), Iéna (1806), Eylau et Friedland (1807), Wagram (1809). Mais il y
+eut la défaite de Trafalgar (1805) où la flotte française fut détruite
+par les Anglais. La Paix de Vienne fut signée le 14 octobre 1809. Puis
+vinrent les désastres avec la Campagne de Russie (1812), la Campagne
+d'Allemagne et la Défaite de Leipzig (octobre 1813), la Prise de Paris
+par les Alliés (mars 1814), le Traité d'abdication de Fontainebleau
+(avril 1814), l'exil à l'île d'Elbe, le Congrès de Vienne qui opéra la
+liquidation du régime napoléonien en Europe, les Cent Jours (mars à
+juillet 1815) après le retour de Napoléon de l'Ile d'Elbe, la Défaite de
+Waterloo (juin 1815), la 2ème abdication, le 22 juin 1815 et le départ
+pour son exil à Sainte-Hélène où il mourra en 1821.]
+
+ * * * * *
+
+
+
+
+ NAPOLÉON BONAPARTE
+
+ TENDRESSES IMPÉRIALES
+
+ AVEC UNE LETTRE-PRÉFACE PAR ABEL GRI
+
+ L'Amour est l'occupation de l'homme
+ oisif, la distraction du guerrier, l'écueil
+ du souverain.
+ (Napoléon Bonaparte)
+
+ PARIS
+ BIBLIOTHÈQUE INTERNATIONALE D'ÉDITION
+ E. SANSOT & Cie
+ 9, rue de l'Éperon, 9
+ MCMXIII
+
+ IL A ÉTÉ TIRÉ DE CET OUVRAGE
+25 EXEMPLAIRES NUMÉROTÉS SUR HOLLANDE
+ VAN GELDER ZONEN
+
+_Que diriez-vous d'une série qui grouperait les récits envoyés du
+théâtre de leurs exploits à leurs maîtresses par nos héros et qui nous
+les ferait voir dans l'instant où l'amour agit sur eux comme un ferment
+d'héroïsme? Les lettres du jeune général en chef de l'armée d'Italie
+ouvriraient cette collection._
+
+ (MAURICE BARRÈS)
+
+(Préface des «_Lettres du lieutenant-colonel Moll_».)
+
+ * * * * *
+
+
+
+
+TABLE DES MATIÈRES
+
+
+Lettre-préface à M. Maurice Barrès
+Lettres du Général en chef de l'armée d'Italie
+Lettres de Bonaparte, Premier Consul
+Lettres de Napoléon, Empereur
+Lettres de Napoléon à Joséphine après le divorce
+APPENDICES:
+Dialogue sur l'amour
+La femme et le Code Napoléon: Code civil
+Code pénal
+Lettres à Mme Walewska
+
+ * * * * *
+
+
+
+
+LETTRE-PRÉFACE À MAURICE BARRÈS
+
+
+_Voir réunies, en une page d'héroïsme et de passion, les lettres d'amour
+du jeune général en chef de l'armée d'Italie, c'est une idée qui vous
+fut chère et que voici réalisée._
+
+_En y joignant le «Dialogue sur l'Amour» qu'écrivit le jeune lieutenant
+d'artillerie et les billets fiévreux que l'Empereur fit parvenir à Marie
+Walewska, nous ajoutons les clartés et les ombres qui feront mieux
+valoir la figure du héros._
+
+_Il n'est pas jusqu'à cet âpre énoncé des articles du Code qui, comme la
+gravure sévère de quelque eau-forte, ne puisse fixer dans notre cerveau
+la pensée austère du Maître._
+
+_Nous ne dirons pas l'histoire de ses amours. Si nous les savons
+multiples, nous avons retenu qu'elles ne l'obsédèrent pas. Sans les
+considérer comme une tare, il pensait justement qu'elles étaient un mal
+inévitable à l'homme sans foyer, et que, pour cette raison, mieux valait
+les taire et les cacher._
+
+_C'est encore l'aimer que de ne pas attacher d'importance aux actes de
+sa vie qu'il estimait négligeables._
+
+_Aussi, sa tendresse pour Marie Walewska n'aura-t-elle que l'agrément
+d'une faiblesse s'entourant de romantisme._
+
+_Elle aura le charme troublant d'une page de littérature où l'amour
+discute l'être aimé à la curiosité des foules et à la raillerie des
+pamphlétaires. Malgré ses moments de véritable grandeur et malgré
+l'inaltérable souvenir qu'il lui garda, l'aventure polonaise ne restera
+qu'une aventure, sans doute plus longue, plus relevée parmi les autres,
+mais dont on n'a pas à chercher les conséquences, parce qu'elle ne
+pouvait pas en avoir dans la pensée et par la volonté du héros._
+
+_L'idée du rétablissement d'un royaume par l'intervention de l'amour ne
+sera qu'une chimère conçue par l'héroïne et narrée avec volupté par les
+écrivains épris de son histoire._
+
+_L'ascension au trône d'une concubine n'est qu'une autre folie de ceux
+qui s'ingénièrent à voir un passionné chez Napoléon._
+
+_Il eût été plus vrai de dire que par Napoléon l'amour n'est ni
+recherché, ni surtout glorifié. Il est combattu. L'Empereur ne l'accepte
+que dans le mariage, sans l'y croire nécessaire. Pour lui, le mariage
+est un devoir social. C'est un acte légitime que nous devons accomplir,
+que le souverain doit imposer à ses sujets et à l'accomplissement duquel
+il prêtera son encouragement. C'est un moyen de fonder une famille, une
+nation, une dynastie. Si fragiles que soient des unions que, seule, la
+volonté explique, il les veut définitives. Si le divorce est inscrit
+dans ses lois, ce n'est qu'entouré de mille entraves qui le rendent
+difficile à appliquer et d'aspect si redoutable que la plupart des
+solliciteurs s'en détournent. Il croit qu'il n'est rien de durable que
+ce qu'a bâti la volonté tenace. Il sait que les énergies sont rares et
+que la foule, quoique mobile, est soumise, parce que craintive. La
+rigueur de ses lois forcera son peuple à la vertu._
+
+_Aussi l'amour n'apparaît à ses yeux que comme un libertinage. Il le
+voit sous son aspect physique, et de suite il entrevoit les déchéances
+où conduisent les passions. Économe de l'énergie de son peuple comme de
+la sienne, il utilise même les circonstances quotidiennes pour bannir de
+son entourage l'idée de l'amour et l'habituer à des pensées plus
+austères. La perte d'une amante provoque-t-elle un suicide parmi ses
+troupes, de suite il fait lire une proclamation dans laquelle il est dit
+qu'«un soldat doit vaincre la douleur et la mélancolie de ses passions».
+L'histoire ne dit pas quelle femme fut cause de ce drame. Maîtresse ou
+épouse, la proclamation eût été la même. Dans sa pensée, l'homme se doit
+à une tâche plus sévère que celle d'aimer. L'amour est l'affaire des
+femmes, dont il exige la fidélité. Non pas qu'en soi il donne une grande
+importance à l'adultère. Il le dit «commun» et c'est une «affaire de
+canapé». Mais s'il le comprend, il ne l'excuse pas et les moeurs
+qu'imposera son exemple contribueront à en diminuer les causes. Il veut
+les épouses respectées. Il écarte d'elles les galants, supprimant ainsi
+toutes excuses à leur faute. Si malgré tant de soins la trahison n'a pu
+être évitée, il se gardera bien de l'ébruiter, d'user même de l'autorité
+de ses lois. Il sait qu'un malheur conjugal ne doit pas s'avouer._
+
+_Ceci explique le ton enjoué de ses lettres à Joséphine, où les rares
+menaces sont plutôt des avis de discrétion. Alors il écrit: «Ne te fie
+pas, et je te conseille de te bien garder la nuit, car une de ces
+prochaines tu entendras grand bruit.»_
+
+_Aussi sa correspondance est-elle d'une lecture passionnante et
+triste._
+
+_Bonaparte, à vingt-six ans_[1], _se marie avec Joséphine, âgée de
+quelques années de plus que lui_[2]. _Elle est veuve. Elle est créole.
+Elle a passé sa vie dans l'oisiveté. Celle du jeune Bonaparte s'est
+passée dans l'étude et dans les combats. Il ne sait des femmes et de
+l'amour que ce qu'il en a observé avec une amère justesse. Mais que peut
+l'observation d'un jeune homme quand, pour la combattre, on a le visage,
+la grâce de séduction et l'expérience de Joséphine._
+
+[Note 1: Né en 1769.]
+
+[Note 2: Née à la Martinique en 1763. Elle avait 32 ans.]
+
+_Pour conquérir une place, une fortune, un droit aux honneurs, elle usa
+de la seule arme qui était en son pouvoir. Une prescience lui disait que
+tout cela, ce jeune homme timide avec elle, mais énergique avec les
+événements, saurait le lui offrir._
+
+_Et il en fut ainsi._
+
+_Dès le soir du mariage, c'est, de la rue Chante-reine, le hâtif départ
+vers la gloire. Et bientôt les nouvelles parviennent, apportant chacune
+l'annonce d'un triomphe, d'un pas vers l'empire dont elle rêve peut-être
+dans son imagination orientale, mais certainement l'assurance d'un peu
+plus de cet argent dont elle se montrera si prodigue._
+
+_Pendant qu'il écrit ces fiévreux billets le soir, sous la tente, parmi
+l'éparpillement des cartes et des rapports, lorsque dorment ses soldats
+harassés, Joséphine, oublieuse des promesses récentes, se laisse aller à
+l'ardeur de son tempérament. Bonaparte en reçoit la nouvelle en Égypte.
+De suite il songe au divorce. Ce qu'il y a de brutal et d'orgueilleux
+dans son caractère lui présente ce moyen prompt de sauver son honneur._
+
+_Mais bientôt il fait un lent et puissant effort sur lui-même,
+s'appliquant à discuter, à peser la gravité et les conséquences de la
+rupture._
+
+_Il commande un corps d'expédition. Il a décidé d'atteindre le pouvoir à
+son retour en France. Des ennemis l'entourent. Ira-t-il prêter le flanc
+aux railleries en faisant connaître à tous ce qui n'est su que de
+quelques-uns? Ainsi les années passent. Il grandit dans sa puissance. En
+Italie, il est trop tard déjà pour exiger cette réparation. La blessure
+est plus ancienne aussi. Il la pourra supporter. Les efforts faits pour
+reconquérir Joséphine sont restés vains. Il eût fallu qu'il demeurât
+près d'elle à la distraire, à la choyer. Mais son destin l'appelait aux
+armées._
+
+_La certitude de toute maternité impossible chez l'Impératrice, seule,
+le détermina à la rupture. Encore ne put-il l'accepter définitive. Il
+sentit le besoin de la savoir proche de lui et heureuse par ses soins._
+
+_Perpétuel combat entre l'amour et la destinée, voilà toute la vie de
+Napoléon avec Joséphine._
+
+_Maintenant que nous connaissons les idées de l'Empereur sur l'amour et
+le mariage, on peut demeurer surpris de voir sa conduite._
+
+_Quand on songe qu'il avoua ses maîtresses à Joséphine, lui présenta
+Mme Walewska, et que l'ayant répudiée il ne voulut cesser de la voir,
+quelle extraordinaire complexité de caractère ne découvre-t-on pas en
+lui!_
+
+_Deux causes expliquent cette conduite; l'éducation littéraire de
+Bonaparte et le rôle d'initiatrice de Joséphine._
+
+_Napoléon dans sa rudesse garde un fond de rêverie qui combat sans cesse
+son positivisme natif. Cela il le doit à sa jeunesse isolée, malheureuse
+même, dépourvue de caresses et de cet argent avec lequel s'achètent les
+illusions de celles-ci. Il a vu des femmes, sans doute, mais leurs rangs
+si supérieurs au sien l'ont forcé à n'être que tendre et «troubadour»
+auprès d'elles. Ce furent les idylles de Valence. De celles qui se
+donnent, il connaît seulement les filles vénales comme celle interrogée
+un soir de fièvre sous les galeries du Palais-Royal._
+
+_La lecture de Rousseau l'exalta. Il a rêvé une Mme de Warens. Il
+croit la découvrir dans cette créole s'offrant à lui, prestigieuse,
+entourée du souvenirs de son Orient natal. Il l'aime d'autant plus qu'il
+n'osait espérer lui plaire._
+
+_De son côté, Joséphine trouva de l'agrément à séduire ce jeune homme
+qu'elle savait chaste. Pour cette voluptueuse c'était une conquête bien
+tentante. Ce que furent leur fièvre, nous le devinons. Dans leur hâte de
+possession, ils ne surent attendre leur mariage._
+
+_Tout ce qu'une femme dont l'amour est la seule pensée peut mettre de
+science, de raffinement, de recherche dans l'étreinte, il est certain
+que Joséphine le révéla à Bonaparte étonné et ravi. Pour elle il fut un
+jouet. Elle le trouva même «drôle» et par ce plaisir qu'elle donnait
+contre toute attente elle le posséda. De lui avoir fait connaître un
+amour qu'il imaginait seulement dans les romans, Bonaparte lui en fut
+toute sa vie reconnaissant. Ce conquérant l'aime parce qu'elle l'a
+vaincu, qu'elle l'a su tenir, lassé, près d'elle et cependant heureux._
+
+_Aussi il aura pour elle des empressements de petit-maître, de délicates
+attentions, des pardons même. Elle peut tout faire: le tromper, se
+vendre et s'endetter. Qu'importe! Il sait qu'il trouvera en elle un
+superbe instrument de plaisir plus vibrant et plus riche que tous les
+autres._
+
+_Aux heures de réflexion, dans les nuits aux camps, sa pensée s'applique
+à comprendre Joséphine. Il évoque les amants à qui elle se donne avec la
+même fougue qu'à lui-même. Si, dans son instinct de mâle, il est jaloux,
+sa fierté d'homme ne se révolte pas. Il sait qu'il n'a qu'à reparaître
+pour les lui faire oublier tous. Sa gloire, sa richesse lui ajoutent un
+prestige dont il connaît la force. «Ce qu'on aime en nous c'est notre
+bonheur», pense-t-il. Il se dit aussi qu'une femme dont les sens sont si
+prompts ne pourra jamais commander à l'esprit d'un homme. Pas plus
+qu'elle ne se souvient de lui absent, il ne redoute de subir son action
+quand il l'a quittée. Cela le séduit d'avoir une femme ne songeant qu'à
+le distraire sans penser à le commander. Enfin c'est surtout parce
+qu'elle fut l'initiatrice qu'il ne l'oublie jamais. Elle peut vieillir
+et avec l'âge voir s'éteindre la possibilité des étreintes. Qu'importe!
+Elle l'a fait vibrer avant toutes les autres. S'il n'hésite pas même à
+lui avouer ses infortunes galantes, c'est qu'il est certain de trouver
+sur son sein un mol oreiller pour sa peine et dans ses mains, qui eurent
+tant de luxurieuses caresses, une dernière étreinte pour apaiser son
+coeur. Il sait qu'elle l'aidera à dénouer d'aventureuses liaisons,
+trouvant dans cette compromission l'agrément de se voir rechercher
+encore._
+
+_Vu de la sorte, le caractère de Napoléon apparaît sans étrangeté. Il
+s'est imposé, où son esprit le conduisait de n'avoir d'autre maître que
+lui et à laisser la femme en marge de sa pensée._
+
+_Une conception de la vie entièrement consacrée à la réalisation ferme
+d'un grand projet oblige à ne considérer les autres sentiments que comme
+des plaisirs et à faire que ceux qui les éveillent en nous ne puissent
+devenir rien autre que des amuseurs._
+
+_L'esprit pourra s'ingénier à concevoir une vie calme où les droits de
+la famille et ceux du devoir seront Justement équilibrés, il semble
+qu'une loi conduise les êtres supérieurs à ne pas s'y arrêter. Ce calme,
+ce repos familial, dans les minutes de découragement ils regretteront
+parfois de ne l'avoir pas, mais ne s'attarderont pas à cette mélancolie.
+Immenses dans leurs besoins, ceux dont Napoléon a dit qu'ils «étaient
+des météores, destinés à brûler pour éclairer la terre» seront toujours
+conduits à s'éprendre de et qui sera énervant comme le sont la lutte et
+les courtisanes, si l'on veut entendre par courtisanes non les filles
+simplement vénales, mais celles qui trouvent à se donner une
+satisfaction aussi vive que le guerrier à vaincre. Pour les courtisanes
+et pour le conquérant, l'or et le butin de l'amant et du vaincu sont les
+conséquences naturelles, mais négligeables d'une action puissante.
+Offrandes et rançons seront vite dissipées, et de tant de fortunes et de
+conquêtes il ne ratera pour l'éternité que l'immense souvenir de leur
+agitation._
+
+_Napoléon cherchant la femme qui l'aimera pour lui-même et n'aimera que
+lui, l'artiste demandant celle qui le comprendra et lui construira un
+foyer, obéissent à une loi de contraste de notre esprit. En donnant
+Joséphine à Napoléon et d'ardentes maîtresses aux chastes artistes, les
+lois surnaturelles semblent avoir voulu surchauffer les sens de ces
+héros pour mieux libérer leurs esprits en leur présentant de la femme
+une idée physique et irrespectueuse à laquelle ils ne sauraient
+s'attacher sans déchoir._
+
+Abel GRI.
+
+ * * * * *
+
+
+
+
+ TENDRESSES IMPÉRIALES
+
+ ***
+
+
+LETTRES DU GÉNÉRAL EN CHEF DE L'ARMÉE D'ITALIE
+
+
+
+
+LETTRE I
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Marmirolo, le 29 messidor, 6 heures du soir
+ (17 Juillet 1796).
+
+
+Je reçois ta lettre, mon adorable amie; elle a rempli mon coeur de joie.
+Je te suis obligé de la peine que tu as prise de me donner de tes
+nouvelles; ta santé doit être meilleure aujourd'hui; je suis sûr que tu
+es guérie. Je t'engage fort à monter à cheval, cela ne peut pas manquer
+de te faire du bien.
+
+Depuis que je t'ai quittée, j'ai toujours été triste. Mon bonheur est
+d'être près de toi. Sans cesse je repasse dans ma mémoire tes baisers,
+tes larmes, ton aimable jalousie, et les charmes de l'incomparable
+Joséphine allument sans cesse une flamme vive et brûlante dans mon coeur
+et dans mes sens. Quand, libre de toute inquiétude, de toute affaire,
+pourrai-je passer tous mes instants près de toi, n'avoir qu'à t'aimer,
+et ne penser qu'au bonheur de te le dire et de te le prouver? Je
+t'enverrai ton cheval; mais j'espère que tu pourras me rejoindre. Je
+croyais t'aimer il y a quelques jours; mais, depuis que je t'ai vue, je
+sens que je t'aime mille fois plus encore. Depuis que je te connais, je
+t'adore tous les jours davantage: cela prouve combien la maxime de La
+Bruyère, que _l'amour vient tout d'un coup_, est fausse. Tout, dans la
+nature, a un cours et différents degrés d'accroissement. Ah! je t'en
+prie, laisse-moi voir quelques-uns de tes défauts; sois moins belle,
+moins gracieuse, moins tendre, moins bonne surtout; surtout ne sois
+jamais jalouse, ne pleure jamais; tes larmes m'ôtent la raison, brûlent
+mon sang. Crois bien qu'il n'est plus en mon pouvoir d'avoir une pensée
+qui ne soit pas a toi, et une idée qui ne te soit pas soumise.
+
+Repose-toi bien. Rétablis vite ta santé. Viens me rejoindre; et, au
+moins, qu'avant de mourir, nous puissions dire: «Nous fûmes tant de
+jours heureux!!»
+
+Millions de baisers et même à Fortuné[3], en dépit de sa méchanceté.
+
+BONAPARTE.
+
+[Note 3: Petit chien de Joséphine.]
+
+
+
+
+LETTRE II
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Marmirolo, le 19 messidor, 9 heures après-midi
+ (18 juillet 1796).
+
+
+J'ai passé toute la nuit sous les armes. J'aurais eu Mantoue par un coup
+hardi et heureux; mais les eaux du lac ont promptement baissé, de sorte
+que ma colonne qui était embarquée n'a pu arriver. Ce soir, je
+recommence d'une autre manière, mais cela ne donnera pas des résultats
+aussi satisfaisants.
+
+Je reçois une lettre d'Eugène, que je t'envoie. Je te prie d'écrire de
+ma part à ces aimables enfants et de leur envoyer quelques bijoux.
+Assure-les bien que je les aime comme mes enfants. Ce qui est à toi ou à
+moi se confond tellement dans mon coeur, qu'il n'y a aucune différence.
+
+Je suis fort inquiet de savoir comment tu te portes, ce que tu fais.
+J'ai été dans le village de Virgile, sur les bords du lac, au clair
+argentin de la lune, et pas un instant sans songer à Joséphine!
+
+L'ennemi a fait le 28 une sortie générale; il nous a tué ou blessé deux
+cents hommes, il en a perdu cinq cents en rentrant avec précipitation.
+
+Je me porte bien. Je suis tout à Joséphine, et je n'ai de plaisir ni de
+bonheur que dans sa société.
+
+Trois régiments napolitains sont arrivés à Brescia; ils se sont séparés
+de l'armée autrichienne, en conséquence de la convention que j'ai
+conclue avec M. Pignatelli.
+
+J'ai perdu ma tabatière; je te prie de m'en choisir une un peu plate, et
+d'y faire écrire quelque chose dessus, avec tes cheveux.
+
+Mille baisers aussi brûlants que tu es froide. Amour sans bornes et
+fidélité à toute épreuve. Avant que Joseph[4] parte, je désire lui
+parler.
+
+BONAPARTE.
+
+[Note 4: Frère aîné de Napoléon, devenu roi d'Espagne.]
+
+
+
+
+LETTRE III
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Marmirolo, 1er thermidor an IV (19 juillet 1790).
+
+
+Il y a deux jours que je suis sans lettres de toi. Voilà trente fois
+aujourd'hui que je me suis fait cette observation, tu sens que cela est
+bien triste; tu ne peux pas douter cependant de la tendre et unique
+sollicitude que tu m'inspires.
+
+Nous avons attaqué hier Mantoue. Nous l'avons chauffée avec deux
+batteries à boulets rouges et des mortiers. Toute la nuit cette
+misérable ville a brûlé. Ce spectacle était horrible et imposant. Nous
+nous sommes emparés de plusieurs ouvrages extérieurs, nous ouvrons la
+tranchée cette nuit. Je vais partir pour Castiglione demain avec le
+quartier général, et je compte y coucher.
+
+J'ai reçu un courrier de Paris. Il y avait deux lettres pour toi; je les
+ai lues. Cependant, bien que cette action me paraisse toute simple et
+que tu m'en aies donné la permission l'autre jour, je crains que cela ne
+te fâche, et cela m'afflige bien. J'aurais voulu les recacheter: fi! ce
+serait une horreur. Si je suis coupable, je te demande grâce; je te jure
+que ce n'est pas par jalousie; non, certes, j'ai de mon adorable amie
+une trop grande opinion pour cela. Je voudrais que tu me donnasses
+permission entière de lire tes lettres; avec cela il n'y aurait plus de
+remords ni de crainte.
+
+Achille arrive en courrier de Milan; pas de lettres de mon adorable
+amie! Adieu, mon unique bien. Quand pourras-tu venir me rejoindre? Je
+viendrai te prendre moi-même à Milan.
+
+Mille baisers aussi brûlants que mon coeur, aussi purs que toi.
+
+Je fais appeler le courrier; il me dit qu'il est passé chez toi, et que
+tu lui as dit que tu n'avais rien à lui ordonner. Fi! méchante, laide,
+cruelle, tyranne, petit joli monstre! Tu te ris de mes menaces, de mes
+sottises; ah! si je pouvais, tu sais bien, t'enfermer dans mon coeur, je
+t'y mettrais en prison.
+
+Apprends-moi que tu es gaie, bien portante et bien tendre.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE IV
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Castiglione, le 9 thermidor an IV, 8 heures du matin
+ (21 juillet 1796).
+
+
+J'espère qu'en arrivant ce soir je recevrai une de tes lettres. Tu sais,
+ma chère Joséphine, le plaisir qu'elles me font, et je suis sûr que tu
+te plais à les écrire. Je partirai cette nuit pour Peschiera, pour les
+montagnes de..., pour Vérone et de là j'irai à Mantoue et peut-être à
+Milan, recevoir un baiser, puisque tu m'assures qu'ils ne sont pas
+glacés; j'espère que tu seras parfaitement rétablie alors, et que tu
+pourras m'accompagner à mon quartier général pour ne plus me quitter.
+N'es-tu pas l'âme de ma vie et le sentiment de mon coeur?
+
+Tes protégés sont un peu vifs, ils sentent l'ardent. Combien je leur
+suis obligé de faire en eux quelque chose qui te soit agréable. Ils se
+rendront à Milan. Il faut en tout un peu de patience.
+
+Adieu, belle et bonne, toute non pareille, toute divine; mille baisers
+amoureux.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE V
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Castiglione, 4 thermidor an IV (22 juillet 1796).
+
+
+Les besoins de l'armée exigent ma présence dans ces environs; il est
+impossible que je puisse m'éloigner jusqu'à venir à Milan; il me
+faudrait cinq à six jours et il peut arriver pendant ce temps-là des
+mouvements où ma présence pourrait être urgente ici.
+
+Tu m'assures que ta santé est bonne; je te prie en conséquence de venir
+à Brescia. J'envoie à l'heure même Murat pour t'y préparer un logement
+dans la ville, comme tu le désires.
+
+Je crois que tu feras bien d'aller coucher le 6 à Cassano, en partant
+fort tard de Milan, et de venir le 7 à Brescia, où le plus tendre des
+amants t'attend. Je suis désespéré que tu puisses croire, ma bonne amie,
+que mon coeur puisse s'ouvrir à d'autres qu'à toi; il t'appartient par
+droit de conquête et cette conquête sera solide, et éternelle. Je ne
+sais pourquoi tu me parles de Mme Te..., dont je me soucie fort peu,
+ainsi que des femmes de Brescia. Quant à tes lettres qu'il te fâche que
+j'ouvre, celle-ci sera la dernière; ta lettre n'était pas arrivée.
+
+Adieu, ma tendre amie, donne-moi souvent de tes nouvelles. Viens
+promptement me joindre et sois heureuse et sans inquiétude; tout va
+bien, et mon coeur est à toi pour la vie.
+
+Aie soin de rendre à l'adjudant général Miollis la boîte de médailles
+qu'il m'écrit t'avoir remise. Les hommes sont si mauvaise langue et si
+méchants qu'il faut se mettre en règle sur tout.
+
+Santé, amour et prompte arrivée à Brescia.
+
+J'ai à Milan une voiture à la fois de ville et de campagne; tu te
+serviras de celle-là pour venir. Porte avec toi ton argenterie et une
+partie des objets qui te sont nécessaires. Voyage à petites journées et
+pendant le frais, afin de ne pas te fatiguer. La troupe ne met que trois
+jours pour se rendre à Brescia. Il y a, en poste, pour quatorze heures
+de chemin. Je t'invite à coucher le 6 à Cassano; je viendrai à ta
+rencontre le 7, le plus loin possible.
+
+Adieu, ma Joséphine. Mille tendres baisers.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE VI
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Brescia, le 13 fructidor an IV (10 août 1796).
+
+
+J'arrive, mon adorée amie, ma première pensée est de t'écrire. Ta santé
+et ton image ne sont pas sorties un instant de ma mémoire pendant toute
+la route. Je ne serai tranquille que lorsque j'aurai reçu des lettres de
+toi. J'en attends avec impatience. Il n'est pas possible que tu te
+peignes mon inquiétude. Je t'ai laissée triste, chagrine et demi-malade.
+Si l'amour le plus profond et le plus tendre pouvait te rendre heureuse,
+tu devrais l'être.... Je suis accablé d'affaires.
+
+Adieu, ma douce Joséphine; aime-moi, porte-toi bien et pense souvent,
+souvent à moi.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE VII
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Brescia, le 14 fructidor an IV (31 août).
+
+
+Je pars à l'instant pour Vérone. J'avais espéré recevoir une lettre de
+toi; cela me met dans une inquiétude affreuse. Tu étais un peu malade
+lors de mon départ; je t'en prie, ne me laisse pas dans une pareille
+inquiétude. Tu m'avais promis plus d'exactitude; ta langue était
+cependant bien d'accord alors avec ton coeur... Toi, à qui la nature a
+donné douceur, aménité et tout ce qui plaît, comment peux-tu oublier
+celui qui t'aime avec tant de chaleur? Trois jours sans lettres de toi;
+je t'ai cependant écrit plusieurs fois. L'absence est horrible, les
+nuits sont longues, ennuyeuses et fades; la journée est monotone.
+
+Aujourd'hui, seul avec les pensées, les travaux, les écritures, les
+hommes et leurs fastueux projets, je n'ai pas même un billet de toi que
+je puisse presser contre mon coeur.
+
+Le quartier général est parti; je pars dans une heure. J'ai reçu cette
+nuit un exprès de Paris; il n'y avait pour toi que la lettre ci-jointe
+qui te fera plaisir.
+
+Pense à moi, vis pour moi, sois souvent avec ton bien-aimé et crois
+qu'il n'est pour lui qu'un seul malheur qui l'effraie, ce serait de
+n'être plus aimé de sa Joséphine. Mille baisers bien doux, bien tendres,
+bien exclusifs.
+
+Fais partir de suite M. Monclas pour Vérone; je le placerai. Il faut
+qu'il soit arrivé avant le 18.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE VIII
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Ala, le 17 fructidor an IV (3 septembre 1796).
+
+
+Nous sommes en pleine campagne, mon adorable amie; nous avons culbuté
+les postes ennemis; nous leur avons pris huit ou dix chevaux avec un
+pareil nombre de cavaliers. La troupe est très gaie et bien disposée.
+J'espère que nous ferons de bonnes affaires et que nous entrerons dans
+Trente le 10.
+
+Point de lettres de toi; cela m'inquiète vraiment; l'on m'assure
+cependant que tu te portes bien et que même tu as été te promener au lac
+de Côme. J'attends tous les jours et avec impatience le courrier où tu
+m'apprendras de tes nouvelles; tu sais combien elles me sont chères. Je
+ne vis pas loin de toi; le bonheur de la vie est près de ma douce
+Joséphine. Pense à moi! Écris-moi souvent, bien souvent; c'est le seul
+remède à l'absence; elle est cruelle, mais sera, j'espère, momentanée.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE IX
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Montebello, le 24 fructidor an IV, à midi
+ (10 septembre 1796).
+
+
+L'ennemi a perdu, ma chère amie, dix-huit mille hommes prisonniers; le
+reste est tué ou blessé. Wurmser, avec une colonne de quinze cents
+chevaux et cinq mille hommes d'infanterie, n'a plus d'autre ressource
+que de se jeter dans Mantoue.
+
+Jamais nous n'avons eu de succès aussi constants et aussi grands.
+L'Italie, le Frioul, le Tyrol sont assurés à la République. Il faut que
+l'empereur crée une seconde armée; artillerie, équipages de pont,
+bagages, tout est pris.
+
+Sous peu de jours nous nous verrons; c'est la plus douce récompense de
+mes fatigues et de mes peines.
+
+Mille baisers ardents et bien amoureux.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE X
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Ronco, le 26 fructidor an IV, à 10 heures du matin
+ (12 septembre 1706).
+
+
+Je suis ici, ma chère Joséphine, depuis deux jours, mal couché, mal
+nourri et bien contrarié d'être loin de toi.
+
+Wurmser est cerné; il a avec lui trois mille hommes de cavalerie et cinq
+mille hommes d'infanterie. Il est à Porto-Legagno; il cherche à se
+retirer à Mantoue; mais cela lui devient désormais impossible. Dès
+l'instant que cette affaire sera terminée, je serai dans tes bras.
+
+Je t'embrasse un million de fois.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XI
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Vérone, premier Jour complémentaire an IV
+ (le 17 septembre 1796).
+
+
+Je t'écris, ma bonne amie, bien souvent, et toi peu. Tu es une méchante
+et une laide, bien laide, autant que tu es légère. Cela est perfide,
+tromper un pauvre mari, un tendre amant! Doit-il perdre ses droits parce
+qu'il est loin, chargé de besogne, de fatigue et de peine? Sans sa
+Joséphine, sans l'assurance de son amour, que lui reste-t-il sur la
+terre? Qu'y ferait-il?
+
+Nous avons eu hier une affaire très sanglante; l'ennemi a perdu beaucoup
+de monde et a été complètement battu. Nous lui avons pris le faubourg de
+Mantoue.
+
+Adieu, adorable Joséphine; une de ces nuits, les portes s'ouvriront avec
+fracas: comme un jaloux, et me voilà dans tes bras.
+
+Mille baisers amoureux.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XII
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Modène, le 23 vendémiaire an V, à 9 heures du soir.
+ (17 octobre 1796).
+
+
+J'ai été avant-hier toute la journée en campagne. J'ai gardé hier le
+lit. La fièvre et un violent mal de tête, tout cela m'a empêché d'écrire
+à mon adorable amie; mais j'ai reçu ses lettres; je les ai pressées
+contre mon coeur et mes lèvres, et la douleur de l'absence, cent milles
+d'éloignement, ont disparu. Dans ce moment je t'ai vue près de moi, non
+capricieuse et fâchée, mais douce, tendre, avec cette onction de bonté
+qui est exclusivement le partage de ma Joséphine. C'était un rêve; juge
+si cela m'a guéri de la fièvre. Tes lettres sont froides comme cinquante
+ans, elles ressemblent à quinze ans de mariage. On y voit l'amitié et
+les sentiments de cet hiver de la vie. Fi! Joséphine!... C'est bien
+méchant, bien mauvais, bien traître à vous. Que vous reste-t-il pour me
+rendre bien à plaindre? Ne plus m'aimer? Eh! c'est déjà fait. Me haïr?
+Eh bien! je le souhaite, tout avilit hors la haine; mais l'indifférence
+au pouls de marbre, à l'oeil fixe, à la démarche monotone!...
+
+Mille, mille baisers bien tendres, comme mon coeur.
+
+Je me porte un peu mieux, je pars demain. Les Anglais évacuent la
+Méditerranée. La Corse est à nous. Bonne nouvelle pour la France et pour
+l'armée.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XIII
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Vérone, le 10 brumaire an V (9 novembre 1790).
+
+
+Je suis arrivé depuis avant-hier à Vérone, ma bonne amie. Quoique
+fatigué, je suis bien portant, bien affairé et je t'aime toujours à la
+passion. Je monte à cheval.
+
+Je t'embrasse mille fois.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XIV
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Vérone, le 3 frimaire an V (13 novembre 1796).
+
+
+Je ne t'aime plus du tout; au contraire, je te déteste. Tu es une
+vilaine, bien gauche, bien bête, bien cendrillon. Tu ne m'écris pas du
+tout, tu n'aimes pas ton mari; tu sais le plaisir que tes lettres lui
+font, et tu ne lui écris pas six lignes jetées au hasard.
+
+Que faites-vous donc toute la journée, madame? Quelle affaire si
+importante vous ôte le temps d'écrire à votre bien bon amant? Quelle
+affection étouffe et met de côté l'amour, le tendre et constant amour
+que vous lui avez promis? Quel peut être ce merveilleux, ce nouvel amant
+qui absorbe tous vos instants, tyrannise vos journées et vous empêche de
+vous occuper de votre mari? Joséphine, prenez-y garde, une belle nuit
+les portes enfoncées et me voilà.
+
+En vérité, je suis inquiet, ma bonne amie, de ne pas recevoir de tes
+nouvelles; écris-moi vite quatre pages et de ces aimables choses qui
+remplissent mon coeur de sentiment et de plaisir.
+
+J'espère qu'avant peu je te serrerai dans mes bras, et je te couvrirai
+d'un million de baisers brûlants comme sous l'équateur.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XV
+
+À Joséphine, à Milan.
+
+ Vérone, le 4 frimaire an V (24 novembre 1796).
+
+
+J'espère bientôt, ma douce amie, être dans tes bras. Je t'aime à la
+fureur. J'écris à Paris par ce courrier. Tout va bien. Wurmser a été
+battu hier sous Mantoue. Il ne manque à ton mari que l'amour de
+Joséphine pour être heureux.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XVI
+
+À Joséphine, à Gênes.
+
+ Milan, le 7 frimaire an V, à trois heures
+ après-midi (27 novembre 1796).
+
+
+J'arrive à Milan, je me précipite dans ton appartement, j'ai tout quitté
+pour te voir, te presser dans mes bras;... tu n'y étais pas: tu cours
+les villes avec des fêtes; tu t'éloignes de moi lorsque j'arrive, tu ne
+te soucies plus de ton cher Napoléon. Un caprice te l'a fait aimer,
+l'inconstance te le rend indifférent.
+
+Accoutumé aux dangers, je sais le remède aux ennuis et aux maux de la
+vie. Le malheur que j'éprouve est incalculable; j'avais droit de n'y pas
+compter.
+
+Je serai ici jusqu'au 9 dans la journée. Ne te dérange pas; cours les
+plaisirs; le bonheur est fait pour toi. Le monde entier est trop heureux
+s'il peut te plaire, et ton mari seul est bien, bien malheureux.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XVII
+
+À Joséphine, à Gênes.
+
+ Milan, le 8 frimaire an V, 8 heures du soir
+ (28 novembre 1796).
+
+
+Je reçois le courrier que Berthier avait expédié à Gênes. Tu n'as pas eu
+le temps de m'écrire, je le sens facilement. Environnée de plaisirs et
+de jeux, tu aurais tort de me faire le moindre sacrifice.
+
+Berthier a bien voulu me montrer la lettre que tu lui as écrite. Mon
+intention n'est pas que tu déranges rien à tes calculs, ni aux parties
+de plaisir qui te sont offertes; je n'en vaux pas la peine et le bonheur
+ou le malheur d'un homme que tu n'aimes pas n'a pas le droit
+d'intéresser.
+
+Pour moi, t'aimer seule, te rendre heureuse, ne rien faire qui puisse te
+contrarier, voilà le destin et le but de ma vie.
+
+Sois heureuse, ne me reproche rien, ne t'intéresse pas à la félicité
+d'un homme qui ne vit que de ta vie, ne jouit que de tes plaisirs et de
+ton bonheur. Quand j'exige de toi un bonheur pareil au mien, j'ai tort:
+pourquoi vouloir que la dentelle pèse autant que l'or? Quand je te
+sacrifie tous mes désirs, toutes mes pensées, tous les instants de ma
+vie, j'obéis à l'ascendant que tes charmes, ton caractère et toute ta
+personne ont su prendre sur mon malheureux coeur. J'ai tort, si la
+nature ne m'a pas donné les attraits pour te captiver; mais ce que je
+mérite de la part de Joséphine ce sont des égards, de l'estime, car je
+l'aime à la fureur et uniquement.
+
+Adieu, femme adorable; adieu, ma Joséphine. Puisse le sort concentrer
+dans mon coeur tous les chagrins et toutes les peines, mais qu'il donne
+à ma Joséphine des jours prospères et heureux. Qui le mérita plus
+qu'elle? Quand il sera constaté qu'elle ne peut plus aimer, je
+renfermerai ma douleur profonde, et je me contenterai de pouvoir lui
+être utile et bon à quelque chose.
+
+Je rouvre ma lettre pour te donner un baiser... Ah! Joséphine!...
+Joséphine!...
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XVIII
+
+À Joséphine, à Bologne.
+
+ Le 28 pluviôse an V (16 février 1797).
+
+
+Tu es triste, tu es malade, tu ne m'écris plus, tu veux t'en aller à
+Paris. N'aimerais-tu plus ton ami? Cette idée me rend malheureux. Ma
+douce amie, la vie est pour moi insupportable depuis que je suis
+instruit de ta tristesse.
+
+Je m'empresse de t'envoyer Moscati, afin qu'il puisse te soigner. Ma
+santé est un peu faible; mon rhume dure toujours. Je te prie de te
+ménager, de m'aimer autant que je t'aime, et de m'écrire tous les jours.
+Mon inquiétude est sans égale.
+
+J'ai dit à Moscati de t'accompagner à Ancône, si tu veux y venir. Je
+t'écrirai là pour te faire savoir où je suis.
+
+Peut-être ferai-je la paix avec le Pape et serai-je bientôt près de toi;
+c'est le voeu le plus ardent de mon âme.
+
+Je te donne cent baisers. Crois que rien n'égale mon amour, si ce n'est
+mon inquiétude. Écris-moi tous les jours toi-même. Adieu, très chère
+amie.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XIX
+
+À Joséphine, à Bologne.
+
+ Tolentino, 1er ventôse an V (19 février 1797).
+
+
+La paix avec Rome vient d'être signée. Bologne, Ferrare, la Romagne sont
+cédées à la République. Le Pape nous donne 30 millions dans peu de temps
+et des objets d'art.
+
+Je pars demain matin pour Ancône, et, de là, pour Rimini, Ravenne et
+Bologne. Si ta santé ta le permet, viens à Rimini ou Ravenne; mais
+ménage-toi, je t'en conjure.
+
+Pas un mot de ta main, bon Dieu! qu'ai-je donc fait? Ne penser qu'à toi,
+n'aimer que Joséphine, ne vivre que pour ma femme, ne jouir que du
+bonheur de mon amie, cela doit-il me mériter de sa part un traitement si
+rigoureux? Mon amie, je t'en conjure, pense souvent à moi et écris-moi
+tous les jours. Tu es malade ou tu ne m'aimes pas! Crois-tu donc que mon
+coeur soit de marbre? Et mes peines t'intéressent-elles si peu? Tu me
+connaîtrais bien mal! Je ne le puis croire. Toi, à qui la nature a donné
+l'esprit, la douceur et la beauté, toi qui seule pouvais régner dans mon
+coeur, toi qui sais trop, sans doute, l'empire absolu que tu as sur moi!
+
+Écris-moi, pense à moi et aime-moi.
+
+Pour la vie tout à toi,
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRES DE BONAPARTE, PREMIER CONSUL
+
+
+
+
+LETTRE XX
+
+À Joséphine, à Paris.
+
+ Le 26 florial an VIII (10 mai 1800)
+
+
+Je pars dans l'instant pour aller coucher à Saint-Maurice. Je n'ai point
+reçu de lettres de toi, cela n'est pas bien; je t'ai écrit tous les
+courriers.
+
+Eugène doit arriver après-demain. Je suis un peu enrhumé, mais cela ne
+sera rien.
+
+Mille choses tendres à toi, ma bonne petite Joséphine, et à tout ce qui
+t'appartient.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XXI
+
+À Joséphine, à Plombières.
+
+ Paris, le 27.....an X (1801).
+
+
+Il fait si mauvais temps ici que je suis resté à Paris. Malmaison, sans
+toi, est trop triste. La fête a été belle, elle m'a un peu fatigué. Le
+vésicatoire que l'on m'a mis au bras me fait toujours souffrir beaucoup.
+
+J'ai reçu pour toi, de Londres, des plantes que j'ai envoyées à ton
+jardinier. S'il fait aussi mauvais à Plombières qu'ici, tu souffriras
+beaucoup des eaux.
+
+Mille choses aimables à maman et à Hortense.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XXII
+
+À Joséphine, à Plombières.
+
+ Malmaison, 30 prairial an XI (10 juin 1803).
+
+
+Je n'ai pas encore reçu de tes nouvelles; je pense cependant que tu as
+déjà dû commencer à prendre les eaux. Nous sommes ici un peu tristes,
+quoique l'aimable fille fasse les honneurs de la maison à merveille. Je
+me sens depuis deux jours légèrement tourmenté de ma douleur. Le gros
+Eugène est arrivé hier au soir, il se porte à merveille.
+
+Je t'aime comme le premier jour, parce que tu es bonne et aimable
+par-dessus tout.
+
+Hortense m'a dit qu'elle t'écrivait souvent.
+
+Mille choses aimables, et un baiser d'amour. Tout à toi.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XXIII
+
+À Joséphine, à Plombières.
+
+ Malmaison, 4 messidor an XI (23 juin 1803).
+
+
+J'ai reçu ta lettre, ma bonne petite Joséphine. Je vois avec peine que
+tu as souffert de la route; mais quelques jours de repos te feront du
+bien. Je suis assez bien portant. J'ai été hier à la chasse à Marly et
+je m'y suis blessé très légèrement à un doigt en tirant un sanglier.
+
+Hortense se porte assez bien. Ton gros fils a été un peu malade, mais il
+va mieux. Je crois que ce soir ces dames jouent le _Barbier de Séville_.
+Le temps est très beau. Je te prie de croire que rien n'est plus vrai
+que les sentiments que j'ai pour ma petite Joséphine.
+
+Tout à toi.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XXIV
+
+À Joséphine, à Plombières.
+
+ Malmaison, le 3 messidor an XI (27 juin 1803).
+
+
+Ta lettre, bonne petite femme, m'a appris que tu étais incommodée.
+Corvisart m'a dit que c'était un bon signe, que les bains te feraient
+l'effet désiré et qu'ils te mettraient dans un bon état. Cependant,
+savoir que tu es souffrante est une peine sensible pour mon coeur.
+
+J'ai été voir hier la manufacture de Sèvres et Saint-Cloud.
+
+Mille choses aimables pour tous.
+
+Pour la vie.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRE XXV
+
+À Joséphine, à Plombières.
+
+ Malmaison, 12 messidor an XI (1er juillet 1803).
+
+
+J'ai reçu ta lettre du 10 messidor. Tu ne me parles pas de ta santé ni
+de l'effet des bains. Je vois que tu comptes être de retour dans huit
+jours; cela fait grand plaisir à ton ami qui s'ennuie d'être seul!...
+
+Tu dois avoir vu le général Ney qui part pour Plombières: il se mariera
+à son retour.
+
+Hortense a joué hier Rosine dans le _Barbier de Séville_ avec son
+intelligence ordinaire.
+
+Je te prie de croire que je t'aime et suis fort impatient de te revoir.
+Tout est triste ici sans toi.
+
+BONAPARTE.
+
+
+
+
+LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR
+
+
+
+
+LETTRE XXVI
+
+À l'Impératrice, à Aix-la-Chapelle.
+
+ Boulogne, le 15 thermidor an XII
+ (3 août 1804).
+
+
+Mon amie, j'espère apprendre bientôt que les eaux t'ont fait beaucoup de
+bien. Je suis peiné de toutes les contrariétés que tu as éprouvées. Je
+désire que tu m'écrives souvent. Ma santé est très bonne, quoique un peu
+fatiguée. Je serai sous peu de jours à Dunkerque, d'où je t'écrirai.
+
+Eugène est parti pour Blois.
+
+Je te couvre de baisers.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXVII
+
+À l'Impératrice, à Aix-la-Chapelle.
+
+ Calais, 18 thermidor an XII (6 août 1804).
+
+
+Mon amie, je suis à Calais depuis minuit; je pense en partir ce soir
+pour Dunkerque. Je suis content de ce que je vois et assez bien de
+santé. Je désire que les eaux te fassent autant de bien que m'en font le
+mouvement, la vue des camps et la mer.
+
+Eugène est parti pour Blois. Hortense se porte bien. Louis est à
+Plombières.
+
+Je désire beaucoup te voir. Tu es toujours nécessaire à mon bonheur.
+Mille choses aimables chez toi.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXVIII
+
+À Joséphine, à Strasbourg.
+
+ Louisbourg, 13 vendémiaire an XIV (5 octobre 1805).
+
+
+Je pars à l'instant pour continuer ma marche. Tu seras, mon amie, cinq
+ou six jours sans avoir de mes nouvelles; ne t'en inquiète pas, cela
+tient aux opérations qui vont avoir lieu. Tout va bien, et comme je le
+pouvais espérer.
+
+J'ai assisté ici à une noce du fils de l'électeur avec une nièce du roi
+de Prusse. Je désire donner une corbeille de trente-six mille à quarante
+mille francs à la jeune princesse. Fais-la faire et envoie-la par un de
+mes chambellans à la nouvelle mariée, lorsque ces chambellans viendront
+me rejoindre. Il faut que ce soit fait sur-le-champ.
+
+Adieu, mon amie, je t'aime et t'embrasse.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXIX
+
+À l'Impératrice, à Strasbourg.
+
+ Augsbourg, le 1er brumaire an XIV (23 octobre 1805).
+
+
+Les deux dernières nuits m'ont bien reposé, et je vais partir demain
+pour Munich. Je mande M. Talleyrand et M. Maret près de moi; je les
+verrai peu et je vais me rendre sur l'Inn pour attaquer l'Autriche au
+sein de ses États héréditaires. J'aurais bien désiré te voir, mais ne
+compte pas que je t'appelle, à moins qu'il n'y ait un armistice ou des
+quartiers d'hiver.
+
+Adieu, mon amie, mille baisers. Mes compliments à ces dames.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXX
+
+À l'Impératrice, à Strasbourg.
+
+ Munich, le dimanche 5 brumaire an XIV (27 octobre 1805).
+
+
+J'ai reçu par Lemarois ta lettre. J'ai vu avec peine que tu t'étais trop
+inquiétée. L'on m'a donné des détails qui m'ont prouvé toute la
+tendresse que tu me portes; mais il faut plus de force et de confiance.
+J'avais d'ailleurs prévenu que je serais six jours sans l'écrire.
+
+J'attends demain l'électeur. À midi je pars pour confirmer mon mouvement
+sur l'Inn. Ma santé est assez bonne. Il ne faut pas penser à passer le
+Rhin avant quinze ou vingt jours. Il faut être gaie, t'amuser, et
+espérer qu'avant la fin du mois nous nous verrons.
+
+Je m'avance contre l'armée russe. Dans quelques jours j'aurai passé
+l'Inn.
+
+Adieu, ma bonne amie, mille choses aimables à Hortense, à Eugène et aux
+deux Napoléon.
+
+Garde la corbeille quelque temps encore.
+
+J'ai donné hier aux dames de cette cour un concert. Le maître de
+chapelle est un homme de mérite.
+
+J'ai chassé à une faisanderie de l'électeur: tu vois que je ne suis pas
+si fatigué.
+
+M. de Talleyrand est arrivé.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXXI
+
+À l'Impératrice, à Strasbourg.
+
+ Haag, le 11, à 10 heures du soir, brumaire an XIV
+ (3 novembre 1805).
+
+
+Je suis en grande marche; le temps est très froid, la terre couverte
+d'un pied de neige. Cela est un peu rude. Il ne manque heureusement pas
+de bois; nous sommes ici toujours dans les forêts. Je me porte assez
+bien. Mes affaires vont d'une manière satisfaisante; mes ennemis doivent
+avoir plus de soucis que moi.
+
+Je désire avoir de tes nouvelles et apprendre que tu es sans inquiétude.
+
+Adieu, mon amie, je vais me coucher.
+
+Napoléon.
+
+
+
+
+LETTRE XXXII
+
+À l'Impératrice, à Strasbourg.
+
+ Mardi, 14 brumaire an XIV (5 novembre 1805).
+
+
+Je suis à Lintz. Le temps est beau. Nous sommes à vingt-huit lieues de
+Vienne. Les Russes ne tiennent pas; ils sont en grande retraite. La
+maison d'Autriche est fort embarrassée; à Vienne, on évacue tous les
+bagages de la cour. Il est probable que d'ici à cinq ou six jours il y
+aura du nouveau, je désire bien te revoir. Ma santé est bonne.
+
+Je t'embrasse.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXXIII
+
+À l'impératrice, à Strasbourg.
+
+ Le 24 brumaire, à 9 heures du soir, an XIV
+ (15 novembre 1805).
+
+
+Je suis à Vienne depuis deux jours, ma bonne amie, un peu fatigué. Je
+n'ai pas encore vu la ville de jour; je l'ai parcourue la nuit. Demain
+je reçois les notables et les corps. Presque toutes mes troupes sont au
+delà du Danube, à la poursuite des Russes.
+
+Adieu, ma Joséphine; du moment que cela sera possible, je te ferai
+venir. Mille choses aimables pour toi.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXXIV
+
+À l'Impératrice, à Strasbourg.
+
+ Vienne, 25 brumaire an XIV (18 novembre 1805).
+
+
+J'écris à M. d'Harville pour que tu partes et que tu te rendes à Bade,
+de là à Stuttgard et de là à Munich. Tu donneras, à Stuttgard, la
+corbeille à la princesse Paul. Il suffit qu'il y ait pour quinze mille à
+vingt mille francs; le restant sera pour faire des présents, à Munich,
+aux filles de l'électrice de Bavière. Tout ce que tu as su pour Mme
+de Serrent est définitivement arrangé. Porte de quoi faire des présents
+aux dames et aux officiers qui seront de service près de toi. Sois
+honnête, mais reçois tous les hommages: l'on te doit tout et tu ne dois
+rien que par honnêteté. L'électrice de Wurtemberg est fille du roi
+d'Angleterre, c'est une bonne femme, tu dois bien la traiter, mais
+cependant sans affectation.
+
+Je serai bien aise de te voir du moment que mes affaires me le
+permettront. Je pars pour mon avant-garde. Il fait un temps affreux, il
+neige beaucoup; du reste, toutes mes affaires vont bien.
+
+Adieu, ma bonne amie.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXXV
+
+À l'Impératrice, à Munich.
+
+ Austerlitz, 14 frimaire an XIV
+ (4 décembre 1805).
+
+
+J'ai conclu une trêve. Les Russes s'en vont. La bataille d'Austerlitz
+est la plus belle de toutes celles que j'ai données: quarante-cinq
+drapeaux, plus de cent cinquante pièces de canon, les étendards de la
+garde de Russie, vingt généraux, trente mille prisonniers, plus de vingt
+mille tués; spectacle horrible!
+
+L'empereur Alexandre est au désespoir et s'en va en Russie. J'ai vu hier
+à mon bivouac l'empereur d'Allemagne; nous causâmes deux heures; nous
+sommes convenus de faire vite la paix.
+
+Le temps n'est pas encore très mauvais. Voilà enfin le repos rendu au
+continent, il faut espérer qu'il va l'être au monde: les Anglais ne
+sauraient nous faire front.
+
+Je verrai avec bien du plaisir le moment qui me rapprochera de toi.
+
+Il court un petit mal d'yeux qui dure deux jours, je n'en ai pas encore
+été atteint.
+
+Adieu, ma bonne amie, je me porte assez bien et suis fort désireux de
+t'embrasser.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXXVI
+
+À l'impératrice, à Munich.
+
+ Schoenbrunn, 29 frimaire an XIV (20 décembre 1803).
+
+
+Je reçois ta lettre du 25. J'apprends avec peine que tu es souffrante;
+ce n'est pas là une bonne disposition pour faire cent lieues dans cette
+saison. Je ne sais ce que je ferai: je dépends des événements; je n'ai
+pas de volonté; j'attends tout de leur issue. Reste à Munich, amuse-toi;
+ce n'est pas difficile, lorsqu'on a tant de personnes aimables et dans
+un si beau pays. Je suis, moi, assez occupé. Dans quelques jours je
+serai décidé.
+
+Adieu, mon amie; mille choses aimantes et tendres.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXXVII
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Géra, le 13, à 2 heures du matin, 1806.
+
+
+Je suis aujourd'hui à Géra, ma bonne amie; mes affaires vont fort bien
+et tout comme je pouvais l'espérer. Avec l'aide de Dieu, en peu de jours
+cela aura pris un caractère bien terrible, je crois, pour le pauvre roi
+de Prusse, que je plains personnellement, parce qu'il est bon. La reine
+est à Erfurt avec le roi. Si elle veut voir une bataille, elle aura ce
+cruel plaisir. Je me porte à merveille; j'ai déjà engraissé depuis mon
+départ; cependant je fais, de ma personne, vingt et vingt-cinq lieues
+par jour, à cheval, en voiture, de toutes les manières. Je me couche à
+huit heures et suis levé à minuit; je songe quelquefois que tu n'es pas
+encore couchée.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXXVIII
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ 1er novembre, 2 heures du matin, 1806.
+
+
+Talleyrand arrive et me dit, mon amie, que tu ne fais que pleurer. Que
+veux-tu donc? Tu as ta fille, tes petits-enfants, et de bonnes
+nouvelles; voilà bien des moyens d'être contente et heureuse.
+
+Le temps est ici superbe; il n'a pas encore tombé de toute la campagne
+une seule goutte d'eau. Je me porte fort bien, et tout va au mieux.
+
+Adieu, mon amie; j'ai reçu une lettre de M. Napoléon; je ne crois pas
+qu'elle soit de lui, mais d'Hortense.
+
+Mille choses à tout le monde.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XXXIX
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Le 6 novembre, à 9 heures du soir, 1806.
+
+
+J'ai reçu ta lettre où tu me parais fâchée du mal que je dis des femmes;
+il est vrai que je hais les femmes intrigantes au delà de tout. Je suis
+accoutumé à des femmes bonnes, douces et conciliantes; ce sont celles
+que j'aime. Si elles m'ont gâté, ce n'est pas ma faute, mais la tienne.
+Au reste, tu verras que j'ai été fort bon pour une qui s'est montrée
+sensible et bonne, Mme d'Hatzfeld. Lorsque je lui montrai la lettre
+de son mari, elle me dit en sanglotant, avec une profonde sensibilité,
+et naïvement: _Ah! c'est bien là son écriture!_ Lorsqu'elle lisait, son
+accent allait à l'âme; elle me fit peine. Je lui dis: _Eh bien! madame,
+jetez cette lettre au feu, je ne serai plus assez puissant pour faire
+punir votre mari._ Elle brûla la lettre et me parut bien heureuse. Son
+mari est depuis fort tranquille: deux heures plus tard, il était perdu.
+Tu vois donc que j'aime les femmes bonnes, naïves et douces; mais c'est
+que celles-là seules te ressemblent.
+
+Adieu, mon amie, je me porte bien.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XL
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Le 18 novembre 1806.
+
+
+Je reçois ta lettre du 11 novembre. Je vois avec satisfaction que mes
+sentiments te font plaisir. Tu as tort de penser qu'ils puissent être
+flattés; je t'ai parlé de toi comme je te vois. Je suis affligé de
+penser que tu t'ennuies à Mayence. Si le voyage n'était pas si long, tu
+pourrais venir jusqu'ici, car il n'y a plus d'ennemis, ou il est au delà
+de la Vistule, c'est-à-dire à plus de cent vingt lieues d'ici.
+J'attendrai ce que tu en penses. Je serai bien aise aussi de voir M.
+Napoléon.
+
+Adieu, ma bonne amie.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+J'ai ici encore trop d'affaires pour que je puisse retourner à Paris.
+
+
+
+
+LETTRE XLI
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Le 22 novembre, à 10 heures du soir, 1806.
+
+
+Je reçois ta lettre. Je suis fâché de te voir triste; tu n'as cependant
+que des raisons d'être gaie. Tu as tort de montrer tant de bonté à des
+gens qui s'en montrent indignes. Mme L... est une sotte, si bête que
+tu devrais la connaître et ne lui prêter aucune attention. Sois
+contente, heureuse de mon amitié, de tout ce que tu m'inspires. Je me
+déciderai dans quelques jours à t'appeler ici ou à t'envoyer à Paris.
+
+Adieu, mon amie; tu peux actuellement aller, si tu veux, à Darmstadt, à
+Francfort; cela te dissipera.
+
+Mille choses à Hortense.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XLII
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Posen, le 2 décembre 1806.
+
+
+C'est aujourd'hui l'anniversaire d'Austerlitz. J'ai été à un bal de la
+ville. Il pleut. Je me porte bien. Je t'aime et te désire. Mes troupes
+sont à Varsovie. Il n'a pas encore fait froid. Toutes ces Polonaises
+sont Françaises; mais il n'y a qu'une femme pour moi. La connaîtrais-tu?
+Je te ferais bien son portrait, mais il faudrait trop le flatter pour
+que tu te reconnusses; cependant, à dire vrai, mon coeur n'aurait que de
+bonnes choses à en dire. Ces nuits-ci sont longues, tout seul.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XLIII
+
+À l'Impératrice, 4 Mayence.
+
+ Le 3 décembre, à midi, 1806.
+
+
+Je reçois ta lettre du 26 novembre, j'y vois deux choses: tu me dis que
+je ne lis pas tes lettres; cela est mal pensé. Je te sais mauvais gré
+d'une si mauvaise opinion. Tu me dis que ce pourrait être par quelque
+rêve de la nuit et tu ajoutes que tu n'es pas jalouse. Je me suis aperçu
+depuis longtemps que les gens colères soutiennent toujours qu'ils ne
+sont pas colères, que ceux qui ont peur disent souvent qu'ils n'ont pas
+peur; tu es donc convaincue de jalousie: j'en suis enchanté! Du reste,
+tu as tort; je ne pense à rien moins et dans les déserts de la Pologne
+l'on songe peu aux belles... J'ai eu hier un bal de la noblesse de la
+province d'assez belles femmes, assez riches, assez mal mises, quoique à
+la mode de Paris.
+
+Adieu, mon amie; je me porte bien.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XLIV
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Posen, le 3 décembre, à 6 heures du soir.
+
+
+Je reçois ta lettre du 27 novembre, où je vois que ta petite tête s'est
+montée. Je me suis souvenu de ce vers:
+
+ Désir de femme est un feu qui dévore.
+
+Il faut cependant te calmer. Je t'ai écrit que j'étais en Pologne, que
+lorsque les quartiers d'hiver seraient assis, tu pourrais venir; il faut
+donc attendre quelques jours. Plus on est grand et moins on doit avoir
+de volonté; l'on dépend des événements et des circonstances. Tu peux
+aller à Francfort et à Darmstadt. J'espère sous peu de temps t'appeler;
+mais il faut que les événements le veuillent. La chaleur de ta lettre me
+fait voir que vous autres jolies femmes vous ne connaissez pas de
+barrières; ce que vous voulez doit être; mais moi, je me déclare le plus
+esclave des hommes: mon maître n'a pas d'entrailles, et ce maître c'est
+la nature des choses.
+
+Adieu, mon amie; porte-toi bien. La personne dont j'ai voulu te parler
+est Mme L... dont tout le monde dit bien du mal: l'on m'assure
+qu'elle était plus Prussienne que Française. Je ne le crois pas; mais je
+la crois une sotte qui ne dit que des bêtises.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XLV
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Le 10 décembre, 5 heures du soir, 1806.
+
+
+Un officier m'apporte un tapis de ta part; il est un peu court et
+étroit; je ne t'en remercie pas moins. Je me porte assez bien. Le temps
+est fort variable. Mes affaires vont assez bien. Je t'aime et te désire
+beaucoup.
+
+Adieu, mon amie; je t'écrirai de venir avec au moins autant de plaisir
+que tu voudras.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+Un baiser à Hortense, à Stéphanie et à Napoléon.
+
+
+
+
+LETTRE XLVI
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Pultusk, le 31 décembre 1806.
+
+
+J'ai bien ri en recevant tes dernières lettres. Tu te fais des belles de
+la Pologne une idée qu'elles ne méritent pas. J'ai eu deux ou trois
+jours de plaisir d'entendre Paër et deux chanteuses qui m'ont fait de
+très bonne musique. J'ai reçu ta lettre dans une mauvaise grange, ayant
+de la boue, du vent et de la paille pour tout lit. Je serai demain à
+Varsovie. Je crois que tout est fini pour cette année. L'armée va entrer
+en quartiers d'hiver. Je hausse les épaules de la bêtise de Mme de
+L...; tu devrais cependant te fâcher et lui conseiller de n'être pas si
+sotte. Cela perce dans le public et indigne bien des gens.
+
+Quant à moi, je méprise l'ingratitude comme le plus vilain défaut du
+coeur. Je sais qu'au lieu de te consoler ils t'ont fait de la peine.
+
+Adieu, mon amie; je me porte bien. Je ne pense pas que tu doives aller à
+Cassel; cela n'est pas convenable. Tu peux aller à Darmstadt.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XLVII
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Varsovie, le 3 janvier 1807.
+
+
+J'ai reçu ta lettre, mon amie. Ta douleur me touche; mais il faut bien
+se soumettre aux événements. Il y a trop de pays à traverser depuis
+Mayence jusqu'à Varsovie; il faut donc que les événements me permettent
+de me rendre à Berlin pour que je t'écrive d'y venir. Cependant l'ennemi
+battu s'éloigne, mais j'ai bien des choses à régler ici. Je serais assez
+d'opinion que tu retournasses à Paris, où tu es nécessaire. Renvoie ces
+dames qui ont leurs affaires; tu gagneras d'être débarrassée de gens qui
+ont dû bien te fatiguer.
+
+Je me porte bien; il fait mauvais. Je t'aime de coeur.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XLVIII
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Varsovie, 7 Janvier 1807.
+
+
+Mon amie, je suis touché de tout ce que tu me dis; mais la saison
+froide, les chemins très mauvais, peu sûrs, je ne puis donc consentir à
+t'exposer à tant de fatigues et de dangers. Rentre à Paris pour y passer
+l'hiver. Va aux Tuileries, reçois et fais la même vie que tu as
+l'habitude de mener quand j'y suis; c'est là ma volonté. Peut-être ne
+tarderai-je pas à t'y rejoindre, mais il est indispensable que tu
+renonces à faire trois cents lieues dans cette saison, à travers des
+pays ennemis, et sur les derrières de l'armée. Crois qu'il m'en coûte
+plus qu'à toi de retarder de quelques semaines le bonheur de te voir,
+mais ainsi l'ordonnent les événements et le bien des affaires.
+
+Adieu, ma bonne amie; sois gaie et montre du caractère.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XLIX
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Varsovie, le 8 janvier 1807.
+
+
+Ma bonne amie, je reçois ta lettre du 27 avec celles de M. Napoléon et
+d'Hortense qui y étaient jointes. Je t'avais priée de rentrer à Paris.
+La saison trop mauvaise, les chemins peu sûrs et détestables, les
+espaces trop considérables pour que je permette que tu viennes jusqu'ici
+où mes affaires me retiennent. Il te faudrait au moins un mois pour
+arriver. Tu y arriveras malade; il faudrait peut-être repartir alors; ce
+serait donc folie. Ton séjour à Mayence est trop triste; Paris te
+réclame; vas-y, c'est mon désir. Je suis plus contrarié que toi; j'eusse
+aimé à partager les longues nuits de cette saison avec toi, mais il faut
+obéir aux circonstances.
+
+Adieu, mon amie.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE L
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Varsovie, le 11 Janvier 1807.
+
+
+J'ai reçu ta lettre du 27, où je vois que tu étais un peu inquiète sur
+les événements militaires. Tout est fini, comme je te l'ai mandé à ma
+satisfaction, mes affaires vont bien. L'éloignement est trop
+considérable pour que je permette que, dans cette saison, tu viennes si
+loin. Je me porte fort bien, un peu ennuyé quelquefois de la longueur
+des nuits.
+
+Je vois ici, jusqu'à cette heure, assez peu de monde.
+
+Adieu, mon amie; je désire que tu sois gaie et que tu donnes un peu de
+vie à la capitale. Je voudrais fort y être.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+J'espère que la reine est allée à La Haye avec M. Napoléon.
+
+
+
+
+LETTRE LI
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Le 16 Janvier 1807.
+
+Ma bonne amie, j'ai reçu ta lettre du 5 janvier; tout ce que tu me dis
+de ta douleur me peine. Pourquoi des larmes, du chagrin? N'as-tu donc
+plus de courage? Je te verrai bientôt; ne doute jamais de mes sentiments
+et, si tu veux m'être plus chère encore, montre du caractère et de la
+force d'âme. Je suis humilié de penser que ma femme puisse se méfier de
+mes destinées.
+
+Adieu, mon amie; je t'aime, je désire te voir et veux te savoir contente
+et heureuse.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LII
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Varsovie, le 18 janvier 1807.
+
+
+Je crains que tu n'aies bien du chagrin de notre séparation qui doit
+encore se prolonger de quelques semaines et de ton retour à Paris.
+J'exige que tu aies plus de force. L'on me dit que tu pleures toujours:
+fi! que cela est laid! Ta lettre du 7 janvier me fait de la peine. Sois
+digne de moi et prends plus de caractère. Fais à Paris la représentation
+convenable et surtout sois contente.
+
+Je me porte très bien et je t'aime beaucoup; mais, si tu pleures
+toujours, je te croirai sans courage et sans caractère; je n'aime pas
+les lâches, une impératrice doit avoir du coeur.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LIII
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Varsovie, le 19 janvier 1807.
+
+
+Mon amie, je reçois ta lettre; j'ai ri de ta peur du feu. Je suis
+désespéré du ton de tes lettres et de ce qui me revient. Je te défends
+de pleurer, d'être chagrine et inquiète; je veux que tu sois gaie,
+aimable et heureuse.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LIV
+
+À l'Impératrice, à Mayence.
+
+ Le 23 janvier 1807.
+
+
+Je reçois ta lettre du 15 janvier. Il est impossible que je permette à
+des femmes un voyage comme celui-ci: mauvais chemins, chemins peu sûrs
+et fangeux. Retourne à Paris, sois-y gaie, contente; peut-être y
+serai-je aussi bientôt. J'ai ri de ce que tu me dis que tu as pris un
+mari pour être avec lui; je pensais, dans mon ignorance, que la femme
+était faite pour le mari, le mari pour la patrie, la famille et la
+gloire; pardon de mon ignorance, l'on apprend toujours avec nos belles
+dames.
+
+Adieu, mon amie; crois qu'il m'en coûte de ne pas te faire venir;
+dis-toi: c'est une preuve combien je lui suis précieuse.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LV
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Le 26, à midi, 1807.
+
+
+Ma bonne amie, j'ai reçu ta lettre; je vois avec peine comme tu
+t'affliges. Le pont de Mayence ne rapproche ni n'éloigne les distances
+qui nous séparent. Rentre donc à Paris. Je serais fâché et inquiet de te
+savoir si malheureuse et si isolée à Mayence. Tu comprends que je ne
+dois, que je ne puis consulter que mon coeur, je serais avec toi ou toi
+avec moi; car tu serais bien injuste si tu doutais de mon amour et de
+tous mes sentiments.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LVI
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Wittemberg, le 1er février, à midi, 1807.
+
+
+Ta lettre du 11, de Mayence, m'a fait rire. Je suis aujourd'hui à
+quarante lieues de Varsovie; le temps est froid mais beau.
+
+Adieu, mon amie; sois heureuse, aie du caractère.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LVII
+
+ À l'Impératrice, à Paris.
+
+
+Mon amie, ta lettre du 20 janvier m'a fait de la peine; elle est trop
+triste. Voilà le mal de ne pas être un peu dévote! Tu me dis que ton
+bonheur fait ta gloire, cela n'est pas généreux; il faut dire: le
+bonheur des autres fait ma gloire, cela n'est pas conjugal; il faut
+dire: le bonheur de mon mari fait ma gloire, cela n'est pas maternel; il
+faudrait dire: le bonheur de mes enfants fait ma gloire; or, comme les
+peuples, ton mari, tes enfants ne peuvent être heureux qu'avec un peu de
+gloire, il ne faut pas tant en faire fi! Joséphine, votre coeur est
+excellent et votre raison faible; vous sentez à merveille, mais vous
+raisonnez moins bien.
+
+Voilà assez de querelle; je veux que tu sois gaie, contente de ton sort,
+et que tu obéisses, non en grondant et en pleurant, mais de gaité de
+coeur et avec un peu de bonheur.
+
+Adieu, mon amie; je pars cette nuit pour parcourir mes avant-postes.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LVIII
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Eylau, 3 heures du matin, 9 février 1807.
+
+
+Mon amie, il y a eu hier une grande bataille; la victoire m'est restée,
+mais j'ai perdu bien du monde; la perte de l'ennemi, qui est plus
+considérable encore, ne me console pas. Enfin, je t'écris ces deux
+lignes moi-même, quoique je sois bien fatigué, pour te dire que je suis
+bien portant et que je t'aime.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LIX
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Eylau, le 9 février, à 6 heures du soir, 1807.
+
+
+Je t'écris un mot, mon amie, afin que tu ne sois pas inquiète. L'ennemi
+a perdu la bataille, quarante pièces de canon, dix drapeaux, douze mille
+prisonniers; il a horriblement souffert. J'ai perdu du monde: seize
+mille tués, trois mille ou quatre mille blessés.
+
+Ton cousin Tascher se porte bien; je l'ai appelé près de moi avec le
+titre d'officier d'ordonnance.
+
+Corbineau a été tué d'un obus; je m'étais singulièrement attaché à cet
+officier qui avait beaucoup de mérite; cela me fait de la peine. Ma
+garde à cheval s'est couverte de gloire. D'Allemagne est blessé
+dangereusement.
+
+Adieu, mon amie.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LX
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Eylau, le 11 février, à 8 heures du matin, 1807.
+
+
+Je t'écris un mot, mon amie; tu dois avoir été bien inquiète. J'ai battu
+l'ennemi dans une mémorable journée, mais qui m'a coûté bien des braves.
+Le mauvais temps qu'il fait me force à prendre mes cantonnements.
+
+Ne te désole pas, je te prie; tout cela finira bientôt et le bonheur de
+te voir me fera promptement oublier mes fatigues. Au reste, je n'ai
+jamais été si bien portant.
+
+Le petit Tascher, du 4e de ligne, s'est bien comporté; il a eu une
+rude épreuve. Je l'ai appelé près de moi, je l'ai fait officier
+d'ordonnance; ainsi, voilà ses peines finies. Ce jeune homme
+m'intéresse.
+
+Adieu, ma bonne amie; mille baisers.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXI
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Eylau, le 14 février 1807.
+
+Mon amie, je suis toujours à Eylau. Ce pays est couvert de morts et de
+blessés. Ce n'est pas la belle partie de la guerre; l'on souffre et
+l'âme est oppressée de voir tant de victimes. Je me porte bien. J'ai
+fait ce que je voulais et j'ai repoussé l'ennemi en faisant échouer ses
+projets.
+
+Tu dois être inquiète, et cette pensée m'afflige. Toutefois,
+tranquillise-toi, mon amie, et sois gaie.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+Dis à Caroline et à Pauline que le grand-duc et le prince se portent
+très bien.
+
+
+
+
+LETTRE LXII
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Liebstadt, le 21, à 2 heures du matin, 1807.
+
+Je reçois ta lettre du 4 février; j'y vois avec plaisir que ta santé est
+bonne. Paris achèvera de te rendre la gaieté et le repos, le retour à
+tes habitudes, la santé.
+
+Je me porte à merveille. Ce temps et le pays sont mauvais. Mes affaires
+vont assez bien; il dégèle et gèle dans vingt-quatre heures: l'on ne
+peut voir un hiver aussi bizarre.
+
+Adieu, mon amie; je t'aime, je pense à toi et désire te savoir contente,
+gaie et heureuse.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXIII
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Osterode, le 2 mars 1807.
+
+Mon amie, il y a deux ou trois jours que je ne t'ai écrit; je me le
+reproche; je connais tes inquiétudes. Je me porte fort bien; mes
+affaires sont bonnes. Je suis dans un mauvais village, où je passerai
+encore bien du temps: cela ne vaut pas la grande ville. Je te le répète,
+je ne me suis jamais si bien porté; tu me trouveras fort engraissé.
+
+Il fait ici un temps de printemps; la neige fond, les rivières dégèlent,
+cela me fait plaisir.
+
+J'ai ordonné ce que tu désires pour Malmaison; sois gaie et heureuse,
+c'est ma volonté.
+
+Adieu, mon amie; je t'embrasse de coeur.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXIV
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Le 27, à 7 heures du soir, 1807.
+
+
+Mon amie, ta lettre me fait de la peine. Tu ne dois pas mourir; tu te
+portes bien, et tu ne peux avoir aucun sujet raisonnable de chagrin.
+
+Je pense que tu dois aller au mois de mai à Saint-Cloud; mais il faut
+rester tout le mois d'avril à Paris.
+
+Ma santé est bonne. Mes affaires vont bien.
+
+Tu ne dois pas penser à voyager cet été; tout cela n'est pas possible;
+tu ne dois pas courir les auberges et les camps. Je désire, autant que
+toi, te voir, et même vivre tranquille.
+
+Je sais faire autre chose que la guerre, mais le devoir passe avant
+tout. Toute ma vie, j'ai tout sacrifié, tranquillité, intérêt, bonheur,
+à ma destinée.
+
+Adieu, mon amie. Vois peu cette Mme de P..., c'est une femme de
+mauvaise société; cela est trop commun et trop vil.
+
+Napoléon.
+
+J'ai eu lieu de me plaindre de M. T..., je l'ai envoyé dans sa terre, en
+Bourgogne; je ne veux plus en entendre parler.
+
+
+
+
+LETTRE LXV
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Le 10 mai 1807.
+
+
+Je reçois ta lettre. Je ne sais ce que tu me dis des dames en
+correspondance avec moi. Je n'aime que ma petite Joséphine, bonne,
+boudeuse et capricieuse, qui sait faire une querelle avec grâce, comme
+tout ce qu'elle fait; car elle est toujours aimable, hors cependant
+quand elle est jalouse: alors elle devient toute diablesse. Mais
+revenons à ces dames. Si je devais m'occuper de quelqu'une d'entre
+elles, je t'assure que je voudrais qu'elles fussent de jolis boutons de
+rose. Celles dont tu parles sont-elles dans ce cas?
+
+Je désire que tu ne dînes jamais qu'avec des personnes qui ont dîné avec
+moi; que ta liste soit la même pour tes cercles, que tu n'admettes
+jamais à Malmaison, dans ton intimité, des ambassadeurs et des
+étrangers. Si tu faisais différemment, tu me déplairais; enfin ne te
+laisse pas circonvenir par des personnes que je ne connais pas et qui ne
+viendraient pas chez toi si j'y étais.
+
+Adieu, mon amie.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXVI
+
+À l'Impératrice, à Saint-Cloud.
+
+ Friedland, le 15 juin 1807.
+
+
+Mon amie, je ne t'écris qu'un mot, car je suis bien fatigué; voilà bien
+des jours que je bivouaque. Mes enfants ont dignement célébré
+l'anniversaire de la bataille de Marengo.
+
+La bataille de Friedland sera aussi célèbre et est aussi glorieuse pour
+mon peuple. Toute l'armée russe est en déroute, quatre-vingts pièces de
+canon, trente mille hommes pris ou tués; vingt-cinq généraux russes
+tués, blessés ou pris; la garde russe écrasée: c'est une digne soeur de
+Marengo, Austerlitz, Iéna. Le bulletin te dira le reste. Ma perte n'est
+pas considérable; j'ai manoeuvré l'ennemi avec succès.
+
+Sois sans inquiétude et contente.
+
+Adieu, mon amie; je monte à cheval.
+
+NAPOLÉON.
+
+L'on peut donner cette nouvelle comme une notice, si elle est arrivée
+avant le bulletin. On peut aussi tirer le canon, Cambacérès fera la
+notice.
+
+
+
+
+LETTRE LXVII
+
+À l'Impératrice, à Saint-Cloud.
+
+ Le 6 juillet 1807.
+
+
+J'ai reçu ta lettre du 25 juin. J'ai vu avec peine que tu étais égoïste
+et que les succès de mes armes seraient pour toi sans attraits.
+
+La belle reine de Prusse doit venir dîner avec moi aujourd'hui.
+
+Je me porte bien et désire beaucoup te revoir, quand le destin l'aura
+marqué. Cependant, il est possible que cela ne tarde pas.
+
+Adieu, mon amie; mille choses aimables.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXVIII
+
+À l'Impératrice, à Saint-Cloud.
+
+ Le 7 juillet 1807.
+
+
+Mon amie, la reine de Prusse a dîné hier avec moi. J'ai eu à me défendre
+de ce qu'elle voulait m'obliger à faire encore quelques concessions à
+son mari; mais j'ai été galant, et me suis tenu à ma politique. Elle est
+fort aimable. J'irai te donner des détails qu'il me serait impossible de
+te donner sans être bien long. Quand tu liras cette lettre, la paix avec
+la Prusse et la Russie sera conclue et Jérôme reconnu roi de Westphalie,
+avec trois millions de population. Ces nouvelles pour toi seule.
+
+Adieu, mon amie; je t'aime et veux te savoir contente et gaie.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXIX
+
+À l'Impératrice, à Saint-Cloud.
+
+ Le 18, à midi, 1807.
+
+
+Mon amie, je suis arrivé hier à cinq heures du soir à Dresde, fort bien
+portant, quoique je sois resté cent heures en voiture, sans sortir. Je
+suis ici chez le roi de Saxe, dont je suis fort content. Je suis donc
+rapproché de toi de plus de moitié du chemin.
+
+Il se peut qu'une de ces belles nuits je tombe à Saint-Cloud comme un
+jaloux; je t'en préviens.
+
+Adieu, mon amie; j'aurai grand plaisir à te voir.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXX
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Le 9 janvier 1809.
+
+
+Moustache m'apporte une lettre de toi du 31 décembre. Je vois, mon amie,
+que tu es triste et que tu as l'inquiétude très noire. L'Autriche ne me
+fera pas la guerre. Si elle me la fait, j'ai cent cinquante mille hommes
+en Allemagne, et autant sur le Rhin, et quatre cent mille Allemands pour
+lui répondre. La Russie ne se séparera pas de moi. On est fou à Paris;
+tout marche bien.
+
+Je serai à Paris aussitôt que je le croirai utile. Je te conseille de
+prendre garde aux revenants; un beau jour, à deux heures du matin...
+
+Mais adieu, mon amie; je me porte bien, et suis tout à toi.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXI
+
+À l'Impératrice, à Plombières.
+
+ Le 19 juin, à midi, 1809.
+
+
+Je reçois ta lettre, où tu m'annonces ton départ pour Plombières. Je
+vois ce voyage avec plaisir, parce que j'espère qu'il te fera du bien.
+
+Eugène est en Hongrie, et se porte bien. Ma santé est fort bonne, et
+l'armée en bon état.
+
+Je suis bien aise de savoir le grand-duc de Berg avec toi.
+
+Adieu, mon amie; tu connais mes sentiments pour Joséphine; ils sont
+invariables.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXII
+
+À l'Impératrice, à Paris.
+
+ Schoenbrunn, le 21 août 1809.
+
+
+J'ai reçu ta lettre du 14 août, de Plombières; j'y vois que tu seras
+arrivée le 18 à Paris ou à Malmaison. Tu auras été malade de la chaleur,
+qui est bien grande ici. Malmaison doit être bien sec et brûlé par ce
+temps-là.
+
+Ma santé est bonne. Je suis cependant un peu enrhumé de la chaleur.
+
+Adieu, mon amie.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXIII
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Le 31 août 1809.
+
+
+Je n'ai pas reçu de lettres de toi depuis plusieurs jours; les plaisirs
+de Malmaison, les belles serres, les beaux jardins, font oublier les
+absents; c'est la règle, dit-on, chez vous autres. Tout le monde ne
+parle que de ta bonne santé; tout cela m'est fort sujet à caution.
+
+Je vais demain faire une absence de deux jours en Hongrie avec Eugène.
+Ma santé est bonne.
+
+Adieu, mon amie.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXIV
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Kems, le 9 septembre 1809.
+
+
+Mon amie, je suis ici depuis hier à deux heures du matin; j'y suis pour
+voir mes troupes. Ma santé n'a jamais été meilleure. Je sais que tu es
+bien portante.
+
+Je serai à Paris au moment où personne ne m'attendra plus.
+
+Tout va ici fort bien, et à ma satisfaction.
+
+Adieu, mon amie.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXV
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Le 23 septembre 1809.
+
+
+J'ai reçu ta lettre du 16, je vois que tu te portes bien. La maison de
+la vieille fille ne vaut que cent vingt mille francs; ils n'en
+trouveront jamais plus. Cependant, je te laisse maîtresse de faire ce
+que tu voudras, puisque cela t'amuse, mais, une fois achetée, ne fais
+pas démolir pour y faire quelques rochers.
+
+Adieu, mon amie.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXVI
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Le 25 septembre 1809.
+
+
+J'ai reçu ta lettre. Ne te fie pas, et je te conseille de te bien garder
+la nuit; car une des prochaines, tu entendras grand bruit.
+
+Ma santé est bonne; je ne sais ce que l'on débite; je ne me suis jamais
+mieux porté depuis bien des années: Corvisart ne m'était point utile.
+
+Adieu, mon amie; tout va ici fort bien.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXVII
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Nymphenbourg, près Munich, le 21 octobre 1809.
+
+
+Je suis ici depuis hier bien portant; je ne partirai pas encore demain.
+Je m'arrêterai un jour à Stuttgard. Tu seras prévenue vingt-quatre
+heures d'avance de mon arrivée à Fontainebleau. Je me fais une fête de
+te revoir, et j'attends ce moment avec impatience.
+
+Je t'embrasse.
+
+Tout à toi,
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRES DE NAPOLÉON À JOSÉPHINE APRÈS LE DIVORCE
+
+
+
+
+LETTRE LXXVIII
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ 8 heures du soir, décembre 1809.
+
+
+Mon amie, je t'ai trouvés aujourd'hui plus faible que tu ne devais être.
+Tu as montré du courage, il faut que tu en trouves pour te soutenir; il
+faut ne pas te laisser aller à une funeste mélancolie, il faut te
+trouver contente, et surtout soigner ta santé, qui m'est si précieuse.
+Si tu m'es attachée et si tu m'aimes, tu dois te comporter avec force et
+te juger heureuse. Tu ne peux pas mettre en doute ma constante et tendre
+amitié, et tu connaîtrais bien mal tous les sentiments que je te porte
+si tu supposais que je puis être heureux si tu n'es pas heureuse, et
+content, si tu ne te tranquillises.
+
+Adieu, mon amie, dors bien; songe que je le veux.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXIX
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ 7 heures du soir.
+
+
+Je reçois ta lettre, mon amie. Savary me dit que tu pleures toujours;
+cela n'est pas bien. J'espère que tu auras pu te promener aujourd'hui.
+Je t'ai envoyé de ma chasse. Je viendrai te voir lorsque tu me diras que
+tu es raisonnable et que ton courage prend le dessus.
+
+Demain, toute la journée, j'ai les ministres.
+
+Adieu, mon amie; je suis triste aussi aujourd'hui; j'ai besoin de te
+savoir satisfaite et d'apprendre que tu prends de l'aplomb.
+
+Dors bien.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXX
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Jeudi, à midi, 1809.
+
+
+Je voulais venir te voir aujourd'hui, mon amie; mais je suis très occupé
+et un peu indisposé. Je vais cependant aller au conseil. Je te prie de
+me dire comment tu te portes.
+
+Ce temps est bien humide et pas du tout sain.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXXI
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Vendredi, à 8 heures, 1810.
+
+
+Je voulais venir te voir aujourd'hui, mais je ne le puis; ce sera,
+j'espère, pour demain. Il y a bien longtemps que tu m'as donné de tes
+nouvelles.
+
+J'ai appris avec plaisir que tu t'étais promenée dans ton jardin pendant
+ces froids.
+
+Adieu, mon amie; porte-toi bien, et ne doute jamais de mes sentiments.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXXII
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Dimanche, à 8 heures du soir, 1810.
+
+
+J'ai été bien content de t'avoir vue hier; je sens combien ta société a
+de charmes pour moi. J'ai travaillé aujourd'hui avec Estève. J'ai
+accordé cent mille francs pour 1810, pour l'extraordinaire de Malmaison.
+Tu peux donc faire planter tant que tu voudras; tu distribueras cette
+somme comme tu l'entendras. J'ai chargé Estève de te remettre deux cent
+mille francs aussitôt que le contrat de la maison Julien sera fait. J'ai
+ordonné que l'on paierait ta parure de rubis, laquelle sera évaluée par
+l'intendance, car je ne veux pas de voleries de bijoutiers. Ainsi, voilà
+quatre cent mille francs que cela me coûte.
+
+J'ai ordonné que l'on tînt le million que la liste civile te doit, pour
+1810, à la disposition de ton homme d'affaires, pour payer tes dettes.
+
+Tu dois trouver dans l'armoire de Malmaison cinq cent mille à six cent
+mille francs; tu peux les prendre pour faire ton argenterie et ton
+linge.
+
+J'ai ordonné qu'on te fit un très beau service de porcelaine; l'on
+prendra tes ordres pour qu'il soit très beau.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXXIII
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Mercredi, 6 heures du soir, 1810.
+
+
+Mon amie, je ne vois pas d'inconvénient que tu reçoives le roi de
+Wurtemberg quand tu voudras. Le roi et la reine de Bavière doivent aller
+te voir après-demain.
+
+Je désire fort aller à Malmaison: mais il faut que tu sois forte et
+tranquille: le page de ce matin dit qu'il t'a vue pleurer.
+
+Je vais dîner tout seul.
+
+Adieu, mon amie; ne doute jamais de mes sentiments pour toi; tu serais
+injuste et mauvaise.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXXIV
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Samedi, à 1 heure après-midi, 1810.
+
+
+Mon amie, j'ai vu hier Eugène qui m'a dit que tu recevrais les rois.
+J'ai été au concert jusqu'à huit heures; je n'ai dîné, tout seul, qu'à
+cette heure-là.
+
+Je désire bien te voir. Si je ne viens pas aujourd'hui, je viendrai
+après la messe.
+
+Adieu, mon amie; j'espère te trouver sage et bien portante. Ce temps-là
+doit bien te peser.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXXV
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Trianon, le 17 janvier 1810.
+
+
+Mon amie, d'Audenarde, que je t'ai envoyé ce matin, me dit que tu n'as
+plus de courage depuis que tu es à Malmaison. Ce lieu est cependant tout
+plein de nos sentiments, qui ne peuvent et ne doivent jamais changer, du
+moins de mon côte.
+
+J'ai bien envie de te voir, mais il faut que je sois sûr que tu es
+forte, et non faible; je le suis aussi un peu, et cela me fait un mal
+affreux.
+
+Adieu, Joséphine; bonne nuit. Si tu doutais de moi, tu serais bien
+ingrate.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXXVI
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ 30 Janvier 1810.
+
+
+Mon amie, je reçois ta lettre. J'espère que la promenade que tu as faite
+aujourd'hui, pour montrer ta serre, t'aura fait du bien.
+
+Je te saurai avec plaisir à l'Élysée, et fort heureux de te voir plus
+souvent; car tu sais combien je t'aime.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXXVII
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Mardi, à midi, 1810.
+
+
+J'apprends que tu t'affliges, cela n'est pas bien. Tu es sans confiance
+en moi, et tous les bruits que l'on répand te frappent; ce n'est pas me
+connaître, Joséphine. Je t'en veux, et si je n'apprends que tu es gaie
+et contente, j'irai te gronder bien fort.
+
+Adieu, mon amie.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXXVIII
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Samedi, à 6 heures du soir, 1810.
+
+
+J'ai dit à Eugène que tu aimais plutôt à écouter les bavards d'une
+grande ville que ce que je te disais; qu'il ne faut pas permettre que
+l'on te fasse des contes en l'air pour t'affliger.
+
+J'ai fait transporter tes effets à l'Élysée. Tu viendras incessamment à
+Paris; mais sois tranquille et contente, et aie confiance entière en
+moi.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE LXXXIX
+
+À l'Impératrice, à l'Élysée-Napoléon.
+
+ Vendredi, 6 heures du soir, 1810.
+
+
+Savary me remet, en arrivant, ta lettre; je vois avec peine que tu es
+triste; je suis bien aise que tu ne te sois pas aperçue du feu.
+
+J'ai eu beau temps à Rambouillet.
+
+Hortense m'a dit que tu avais eu le projet de venir dîner chez Bessières
+et de retourner coucher à Paris. Je suis fâché que tu n'aies pas pu
+exécuter ton projet.
+
+Adieu, mon amie; sois gaie, songe que c'est le moyen de me plaire.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XC
+
+À l'Impératrice, à l'Élysée-Napoléon.
+
+ 19 février 1810.
+
+
+Mon amie, j'ai reçu ta lettre. Je désire te voir; mais les réflexions
+que tu me fais peuvent être vraies. Il y a peut-être quelque
+inconvénient à nous trouver sous le même toit pendant la première année.
+Cependant la campagne de Bessières est trop loin pour pouvoir revenir;
+d'un autre côté, je suis un peu enrhumé et je ne suis pas sûr d'y aller.
+
+Adieu, mon amie.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XCI
+
+À l'Impératrice, à Malmaison.
+
+ Le 12 mars 1810.
+
+
+Mon amie, j'espère que tu auras été contente de ce que j'ai fait pour
+Navarre. Tu y auras vu un nouveau témoignage du désir que j'ai de t'être
+agréable.
+
+Fais prendre possession de Navarre; tu pourras y aller le 25 mars passer
+le mois d'avril.
+
+Adieu, mon amie.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XCII
+
+De l'Impératrice Joséphine à l'Empereur Napoléon.
+
+ Navarre, le 19 avril 1810.
+
+
+Sire,
+
+Je reçois, par mon fils, l'assurance que Votre Majesté consent à mon
+retour à Malmaison, et qu'elle veut bien m'accorder les avances que je
+lui ai demandées pour rendre habitable le château de Navarre.
+
+Cette double faveur, Sire, dissipe en grande partie les inquiétudes et
+même les craintes que le long silence de Votre Majesté m'avait
+inspirées. J'avais peur d'être entièrement bannie de son souvenir: je
+vois que je ne le suis pas. Je suis donc aujourd'hui moins malheureuse,
+et même aussi heureuse qu'il m'est désormais possible de l'être.
+
+J'irai à la fin du mois à Malmaison, puisque Votre Majesté n'y voit
+aucun obstacle. Mais, je dois vous le dire, Sire, je n'aurais pas si tôt
+profité de la liberté que Votre Majesté me laisse à cet égard, si la
+maison de Navarre n'exigeait pas, pour ma santé, et pour celle des
+personnes de ma maison, des réparations qui sont urgentes. Mon projet
+est de demeurer à Malmaison fort peu de temps; je m'en éloignerai
+bientôt pour aller aux eaux. Mais, pendant que je serai à Malmaison,
+Votre Majesté peut être sûre que j'y vivrai comme si j'étais à mille
+lieues de Paris. J'ai fait un grand sacrifice, Sire, et chaque jour je
+sens davantage toute son étendue. Cependant, ce sacrifice sera ce qu'il
+doit être, il sera entier de ma part. Votre Majesté ne sera troublée,
+dans son bonheur, par aucune expression de mes regrets.
+
+Je ferai sans cesse des voeux pour que Votre Majesté soit heureuse,
+peut-être même en ferai-je pour la revoir; que Votre Majesté en soit
+convaincue, je respecterai toujours sa nouvelle situation, je la
+respecterai en silence; confiante dans les sentiments qu'elle me portait
+autrefois, je n'en provoquerai aucune preuve nouvelle; j'attendrai tout
+de sa justice et de son coeur.
+
+Je me borne à lui demander une grâce, c'est qu'elle daigne chercher
+elle-même un moyen de convaincre quelquefois, et moi-même et ceux qui
+m'entourent, que j'ai toujours une petite place dans son souvenir et une
+grande place dans son estime et dans son amitié. Ce moyen, quel qu'il
+soit, adoucira mes peines, sans pouvoir, ce me semble, compromettre, ce
+qui m'importe avant tout, le bonheur de Votre Majesté.
+
+JOSÉPHINE.
+
+
+
+
+LETTRE XCIII
+
+Réponse de l'Empereur Napoléon
+
+À l'Impératrice Joséphine, à Navarre.
+
+ Compiègne, le 21 avril 1810.
+
+
+Mon amie, je reçois ta lettre du 19 avril; elle est d'un mauvais style.
+Je suis toujours le même; mes pareils ne changent jamais. Je ne sais ce
+qu'Eugène a pu te dire. Je ne t'ai pas écrit, parce que tu ne l'as pas
+fait, et que j'ai désiré tout ce qui peut t'être agréable.
+
+Je vois avec plaisir que tu ailles à Malmaison, et que tu sois contente;
+moi, je le serai de recevoir de tes nouvelles et de te donner des
+miennes. Je n'en dis pas davantage jusqu'à ce que tu aies comparé cette
+lettre à la tienne; et, après cela, je te laisse juge qui est meilleur
+et plus ami de toi ou de moi.
+
+Adieu, mon amie; porte-toi tien et sois juste pour toi et pour moi.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XCIV
+
+Réponse de l'Impératrice Joséphine.
+
+
+Mille, mille tendres remerciements de ne m'avoir pas oubliée. Mon fils
+vient de m'apporter ta lettre. Avec quelle ardeur je l'ai lue, et
+cependant j'y ai mis bien du temps; car il n'y a pas un mot qui ne m'ait
+fait pleurer, mais ces larmes étaient bien douces! J'ai retrouvé mon
+coeur tout entier, et tel qu'il sera toujours: il y a des sentiments qui
+sont la vie même et qui ne peuvent finir qu'avec elle.
+
+Je serais au désespoir que ma lettre du 19 t'eût déplu; je ne m'en
+rappelle pas entièrement les expressions, mais je sais quel sentiment
+bien pénible l'avait dictée, c'était le chagrin de n'avoir pas de tes
+nouvelles.
+
+Je t'avais écrit à mon départ de Malmaison; et, depuis, combien de fois
+j'aurais voulu t'écrire! Mais je sentais les raisons de ton silence, et
+je craignais d'être importune par une lettre. La tienne a été un baume
+pour moi. Sois heureux, sois-le autant que tu le mérites; c'est mon
+coeur qui te parle. Tu viens aussi de me donner ma part de bonheur, et
+une part bien vivement sentie: rien ne peut valoir pour moi une marque
+de ton souvenir.
+
+Adieu, mon ami; je te remercie aussi tendrement que je t'aimerai
+toujours.
+
+JOSÉPHINE.
+
+
+
+
+LETTRE XCV
+
+À l'Impératrice Joséphine, à Navarre.
+
+ Compiègne, le 28 avril 1910.
+
+
+Mon amie, je reçois deux lettres de toi. J'écris à Eugène. J'ai ordonné
+que l'on fit le mariage de Tascher avec la princesse de la Leyen.
+
+J'irai demain à Anvers voir ma flotte et ordonner des travaux. Je serai
+de retour le 15 mai.
+
+Eugène me dit que tu veux aller aux eaux, ne te gêne en rien. N'écoute
+pas les bavardages de Paris; ils sont oisifs et bien loin de connaître
+le véritable état des choses. Mes sentiments pour toi ne changent pas et
+je désire beaucoup te savoir heureuse et contente.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XCVI
+
+À l'Impératrice Eugénie, à Malmaison.
+
+
+Mon amie, je reçois ta lettre. Eugène te donnera des nouvelles de mon
+voyage et de l'Impératrice. J'approuve fort que tu ailles aux eaux.
+J'espère qu'elles te feront du bien.
+
+Je désire bien te voir. Si tu es à Malmaison à la fin du mois, je
+viendrai te voir.
+
+Ma santé est fort bonne; il me manque de te savoir contente et bien
+portante. Fais-moi connaître le nom que tu voudrais porter en route.
+
+Ne doute jamais de toute la vérité de mes sentiments pour toi; ils
+dureront autant que moi; tu serais fort injuste si tu en doutais.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XCVII
+
+À l'Impératrice Joséphine, aux eaux d'Aix, en Savoie.
+
+ Rambouillet, le 8 juillet 1810.
+
+
+Mon amie, j'ai reçu ta lettre du 3 juillet. Tu auras vu Eugène, et sa
+présence t'aura fait du bien. J'ai appris avec plaisir que les eaux te
+sont bonnes. Le roi de Hollande vient d'abdiquer la couronne, en
+laissant la régence, selon la Constitution, à la reine. Il a quitté
+Amsterdam et laissé le grand-duc de Berg.
+
+J'ai réuni la Hollande à la France; mais cet acte a cela d'heureux qu'il
+émancipe la reine, et cette infortunée fille va venir à Paris avec son
+fils, le grand-duc de Berg; cela la rendra parfaitement heureuse.
+
+Ma santé est bonne. Je suis venu ici pour chasser quelques jours. Je te
+verrai avec plaisir cet automne. Ne doute jamais de mon amitié. Je ne
+change jamais. Porte-toi bien, sois gaie et crois à la vérité de mes
+sentiments.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XCVIII
+
+À l'Impératrice Joséphine, à Navarre.
+
+ Fontainebleau, le 14 novembre 1810.
+
+
+Mon amie, j'ai reçu ta lettre. Hortense m'a parlé de toi. Je vois avec
+plaisir que tu es contente. J'espère que tu ne t'ennuies pas trop à
+Navarre.
+
+Ma santé est fort bonne. L'Impératrice avance heureusement dans sa
+grossesse. Je ferai les différentes choses que tu me demandes pour ta
+maison. Soigne bien ta santé, sois contente et ne doute jamais de mes
+sentiments pour toi.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE XCIX
+
+À l'Impératrice Joséphine, à Navarre.
+
+
+Je reçois ta lettre. Je ne vois pas d'inconvénient au mariage de Mme
+de Mackau avec Wattier, si cela lui convient; ce général est un fort
+brave homme. Je me porte bien. J'espère avoir un garçon; je te le ferai
+savoir aussitôt.
+
+Adieu, mon amie. Je suis bien aise que Mme d'Arberg t'ait dit des
+choses qui te fassent plaisir. Quand tu me verras, tu me trouveras avec
+les mêmes sentiments pour toi.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE C
+
+À l'Impératrice Joséphine, à Malmaison.
+
+ Trianon, 25 août 1813.
+
+
+J'ai reçu ta lettre. Je vois avec plaisir que tu es en bonne santé. Je
+suis pour quelques jours à Trianon. Je compte aller à Compiègne. Ma
+santé est fort bonne.
+
+Mets de l'ordre dans tes affaires; ne dépense que un million cinq cent
+mille francs et mets de côté tous les ans autant; cela fera une réserve
+de quinze millions en dix ans pour tes petits-enfants: il est doux de
+pouvoir leur donner quelque chose et de leur être utile. Au lieu de
+cela, l'on me dit que tu as des dettes, cela serait bien vilain.
+Occupe-toi de tes affaires et ne donne pas à qui en veut prendre. Si tu
+me veux plaire, fais que je sache que tu as un gros trésor. Juge combien
+j'aurais mauvaise opinion de toi si je te savais endettée avec trois
+millions de revenu.
+
+Adieu, mon amie, porte-toi bien.
+
+NAPOLÉON.
+
+
+
+
+LETTRE CI
+
+À l'Impératrice Joséphine, à Malmaison
+
+ Vendredi, 8 heures du matin, 1813.
+
+
+J'envoie savoir comment tu te portes, car Hortense m'a dit que tu étais
+au lit hier. J'ai été fâché contre toi pour tes dettes; je ne veux pas
+que tu en aies; au contraire, j'espère que tu mettras un million de côté
+tous les ans, pour donner à tes petites-filles lorsqu'elles se
+marieront.
+
+Toutefois, ne doute jamais de mon amitié pour toi et ne te fais aucun
+chagrin là-dessus.
+
+Adieu, mon amie; annonce-moi que tu es bien portante. On dit que tu
+engraisses comme une bonne fermière de Normandie.
+
+NAPOLÉON.
+
+ * * * * *
+
+
+
+
+APPENDICES
+
+DIALOGUE SUR L'AMOUR
+
+
+_Ce texte, rédigé par Bonaparte, en 1791, lors de son séjour à Valence,
+à l'âge de vingt-deux ans, demeura inconnu pendant cent et trois ans._
+
+_Cet écrit d'un style sec et sans unité trace vigoureusement la
+conception que Napoléon devait avoir toute sa vie de la femme._
+
+_Le sort de ce manuscrit fut mouvementé._
+
+_À sa chute, Napoléon l'envoya à Fesch_[5] _enfermé parmi d'autres dans
+un des cartons de son cabinet. Fesch n'en prit jamais connaissance. À la
+mort de celui-ci, en 1839, son grand vicaire, l'abbé Lyonnet, à qui le
+carton revint, en vendit le contenu à Libri_[6], _qui le revendit à des
+amateurs, entre autres à lord Ashburnham, dont le fils, en 1884, le
+céda, pour une somme de 675,000 francs, à la bibliothèque
+Médico-Laurentienne de Florence, où il fut copié par MM. Frédéric Masson
+et Guido Biagi qui, en 1895, le publièrent sous le titre de «Napoléon
+inconnu»._
+
+[Note 5: Oncle de Napoléon Ier, né à Ajaccio, archevêque de Lyon
+et grand aumonier de l'Empire.]
+
+[Note 6: Collectionneur équivoque qui volait ce qu'il ne pouvait
+acquérir.]
+
+ * * * * *
+
+
+
+
+DIALOGUE SUR L'AMOUR
+
+
+DES MAZIS[7].--Comment, monsieur, qu'est-ce que l'amour? Eh quoi!
+n'êtes-vous donc pas composé comme les autres hommes?
+
+[Note 7: Alexandre Des Mazis avait été à l'École militaire de Paris,
+l'instructeur d'infanterie de Bonaparte. Tous deux s'étalent liés d'une
+étroite amitié qui se resserra au cours de communes garnisons. Émigré
+sous la Terreur, Des Mazis ne rentra en France que sous le consulat.
+Napoléon le nomma administrateur mobilier de la couronne, officier civil
+de sa maison et chambellan. À la chute de l'empereur, Des Mazis servit
+les Bourbons.]
+
+_Bonaparte_.--Je ne vous demande pas la définition de l'amour. Je fus
+jadis amoureux et il m'en est resté assez de souvenir pour que je n'aie
+pas besoin de ces définitions métaphysiques qui ne font jamais
+qu'embrouiller les choses; je vous dis plus que de nier son existence.
+Je le crois nuisible à la société, au bonheur individuel des hommes,
+enfin je crois que l'amour fait plus de mal... et que ce serait un
+bienfait d'une divinité protectrice que de nous en défaire et d'en
+délivrer le monde.
+
+DES MAZIS.--Quoi! l'amour nuisible à la société, lui qui vivifie la
+nature entière, source de toute production, de tout bonheur. Point
+d'amour, monsieur, autant vaudrait-il anéantir notre existence.
+
+_Bonaparte_.--Vous vous échauffez. La passion vous transporte.
+Reconnaissez, je vous en prie, votre ami. Ne me regardez pas avec
+indignation et répondez pourquoi, depuis que cette passion vous domine,
+ne vous vois-je plus dans vos sociétés ordinaires? Que sont devenues vos
+occupations? Pourquoi négligez-vous vos parents, vos amis? Vos journées
+entières sont sacrifiées à une promenade monotone et solitaire jusqu'à
+ce que l'heure vous permette de voir votre Adélaïde.
+
+DES MAZIS.--Eh! que m'importe à moi, monsieur, vos occupations, vos
+sociétés? À quoi aboutit une science indigeste? Qu'ai-je à faire de ce
+qui s'est passé il y a mille ans? Quelle influence puis-je avoir sur le
+cours des astres? Que m'importe le minutieux détail des discussions
+puériles des hommes?... Je me suis occupé de cela sans doute.
+Qu'avais-je de mieux à faire? Il fallait bien par quelque moyen me
+soustraire à l'ennui qui me menaçait; mais croyez-moi, je sentais au
+milieu de mon cabinet le vide de mon coeur. Parfois mon esprit était
+satisfait, mais mes sentiments! Ô Dieu! je n'ai fait que végéter tant
+que je n'eus pas aimé. Actuellement, au contraire, quand l'amour
+m'arrache au sommeil, je ne dis plus: «Pourquoi le soleil luit-il
+aujourd'hui pour moi?» Non! le premier rayon de lumière me présente ma
+chère Adélaïde en habit du matin. Je la vois penser à moi, me sourire.
+Hier au soir elle me serrait la main, elle soupirait, nos regards se
+rencontraient. Comme ils exprimaient nos sentiments! Je contemple un
+portrait qui me ravit l'âme. Cent fois je le remets pour le reprendre
+aussitôt. Cette promenade, monsieur, que vous appelez monotone, eh! non,
+la vaste étendue du globe ne contient pas plus de variété. D'abord, mon
+esprit repasse les choses qu'elle m'a dites; je relis le billet qu'elle
+m'a écrit; je pense à celui qui doit peindre toute l'étendue de mon
+amour. Je le refais cent fois. Mon imagination s'élève; je vois bientôt
+mes feux couronnés; je regrette tantôt de ne pas avoir une fortune
+immense à lui sacrifier. Ici même, je voudrais avoir une couronne.
+Concevez le charme de la proposer à ses parents, la joie que cela lui
+causerait. Tout ce qui approche d'elle est sacré à mes yeux. Une autre
+fois je penserai aux préparatifs des noces qui doivent bientôt nous
+unir, jusqu'aux présents que je dois lui faire. Mon coeur se dilate à
+imaginer quelque chose qui puisse l'obliger, lui prouver mon amour.
+Voyez-vous le château où nous devons passer nos jours, les sombres
+bosquets, les riantes prairies, les délicieux parterres? Rien ne
+m'affecte que le plaisir d'être tous les jours à côté d'elle. Mais
+bientôt elle doit me donner des gages de notre amour... Mais vous riez!
+En vérité, je vous déteste.
+
+BONAPARTE.--Je ris des grandes occupations qui captivent votre âme et
+plus encore du feu avec lequel vous me les communiquez. Quelle maladie
+étrange s'est emparée de vous? Je sens que la raison que vous appelez à
+votre secours ne fera aucun effet et, dans le délire où vous êtes, vous
+ferez plus que de fermer l'oreille à sa voix, vous la mépriserez.
+Souvenez-vous que vous n'êtes pas de sang-froid et que mon amitié fut
+toujours le juge qui vous rappela à vos désirs. Souvenez-vous que je
+m'en suis toujours rendu digne. J'aurais besoin de répéter ici les
+obligations que vous me devez et les marques qui vous sont connues de
+mes sentiments, car, moi-même je ne serais pas à l'abri de vos
+invectives dans les accès de votre délire. Car votre état est pareil à
+celui d'un malade qui ne voit que la chimère qu'il poursuit et sans
+connaître la maladie qui la produit, ni la santé qu'il a perdue. Je
+n'agiterai donc pas si vos plaisirs sont dignes de l'homme ou même si
+c'en sont. Je veux croire que ce sexe, roi du monde par sa force, son
+industrie, son esprit et toutes ses autres facultés naturelles, trouve
+sa suprême félicité à languir dans les chaînes d'une molle passion et
+sous les lois d'un être plus faible d'entendement comme de corps. Je
+veux croire, comme vous le dites, que le souvenir de votre Adélaïde, son
+image, sa conversation puissent vous dédommager des agréments de vos
+occupations, de vos sociétés; mais n'est-il pas vrai que vous désirez
+toujours la fin de cet état et que votre insatiable imagination voudrait
+obtenir ce que la vertu d'Adélaïde ne peut vous accorder. Ma froide
+tranquillité, je le vois, n'est pas propre à peindre le pesant fardeau
+qui tourmente l'existence d'un amant dans le moindre échec qui lui
+survient. Qu'Adélaïde s'absente pour quinze jours seulement, que
+devenez-vous? Si un autre s'efforce à cet objet, que vous croyez vous
+appartenir, que d'inquiétude! Si une mère alarmée trouve mauvaises de
+trop fréquentes visites qui font parler un public méchant, enfin,
+monsieur, que sais-je, cent petites autres choses qui frappent fortement
+un amant vous agitent. Souvent, les nuits se passent sans sommeil, les
+repas sans manger. La terre n'a point d'endroit pour contenir votre
+inquiétude extrême. Votre sang bouillonne, vous marchez à grands pas, le
+regard égaré. Pauvre chevalier, est-ce là le bonheur? Je ne doute pas
+que si, aujourd'hui, dans l'extase que vous a occasionnée un serrement
+de main, vous ne trouviez cet état la suprême félicité, je ne doute pas,
+dis-je, que, demain, dans une humeur contraire, vous ne trouviez votre
+faiblesse insupportable. Mais, chevalier, voilà votre position. S'il
+fallait défendre la patrie attaquée, que feriez-vous? S'il fallait!...
+Mais à quoi êtes-vous bon? Confiera-t-on le bonheur de vos semblables à
+un enfant qui pleure sans cesse, qui s'alarme ou se réjouit au seul
+mouvement d'une autre personne? Confiera-t-on le secret de l'État à
+celui qui n'a point de volonté?
+
+DES MAZIS.--Toujours des grands mots vides de sens! Que fait à moi votre
+État, ses secrets? En vérité, vous êtes inconcevable aujourd'hui. Vous
+n'avez jamais raisonné si pitoyablement.
+
+BONAPARTE.--Ah! chevalier, que vous importent l'État, vos concitoyens,
+la société? Voilà les suites d'un coeur relâché, abandonné à la volupté.
+Point de force, point de vertu dans votre sentier. Vous n'ambitionniez
+que de faire le bien et aujourd'hui ce bien même vous est indifférent.
+Quel est donc ce sentiment dépravé qui a pris la place de votre amour
+pour la vertu? Vous ne désirez que de vivre ignoré à l'ombre de vos
+peupliers. Profonde philosophie! Ah! chevalier, que je déteste cette
+passion qui a produit une si grande métamorphose. Vous ne songez pas que
+vous tirez vers l'égoïsme et tout vous est indifférent: opinion des
+hommes, estime de vos amis, amour de vos parents. Tout est captivé au
+tyran fort de votre faiblesse. Un coup d'oeil, un serrement de main, un
+baiser, chevalier et que vous importent alors la peine de la patrie, la
+mauvaise opinion de vos amis; un attouchement corporel... mais je ne
+veux pas vous irriter. Je le veux croire: l'amour a des plaisirs
+incomparables, des peines encore plus grandes peut-être, mais n'importe,
+considérons seulement l'influence qu'il a dans l'état de société. Il est
+vrai, chevalier, que, dans l'état des choses, notre âme, née
+indépendante, a besoin d'être formée, dégradée. Si vous voulez, par les
+institutions, que dès la naissance l'attention que tous les législateurs
+ont donnée à l'éducation... que nous sommes nés pour être heureux, que
+c'est la loi suprême que la nature a gravée au fond de nous mêmes. Il
+est vrai que c'est la base qui nous a été donnée pour servir de règle à
+notre conduite. Chacun, né juge de ce qui peut lui convenir, a donc le
+droit de disposer de son corps comme de ses affections, mais cet état
+d'indépendance est vraiment opposé à l'état de servitude où la société
+nous a mis.
+
+En changeant d'état il a donc fallu changer d'humeur. Il a donc fallu
+substituer au cri de notre sentiment celui des préjugés. Voilà la base
+de toutes les institutions sociales. Il a fallu prendre l'homme dès son
+origine pour en faire, s'il se peut, une autre créature. Croyez-vous,
+sans ce changement, que tant d'hommes souffriraient d'être avilis par un
+petit nombre de grands seigneurs et que des palais somptueux seraient
+respectés par des hommes qui manquent de pain? La force est la loi des
+animaux; la conviction est celle des hommes. On convint, soit pour
+repousser les attaques des bêtes plus fortes, soit pour ne pas être
+exposé à se battre à chaque instant, l'on convint, dis-je, de lois des
+propriétés et chacun fut assuré au nom de tous de la propriété de son
+champ.
+
+Cette convention n'existait qu'entre un petit nombre d'hommes. Il fallut
+donc des magistrats, soit pour repousser les attaques des peuplades
+voisines, soit pour faire exécuter la convention reçue.
+
+Ces magistrats sentirent le charme du commandement, mais les plus
+alertes du peuple s'y opposèrent. Ils furent gagnés et ainsi associés
+aux projets des ambitieux. Le peuple fut subjugué. Vous voyez
+l'inégalité s'introduire à grands pas; vous voyez se former la classe
+régnante et la classe gouvernée. La religion vint consoler les
+malheureux qui se trouvaient dépouillés de toute propriété. Elle vint
+les enchaîner pour toujours. Ce ne fut plus par les cris de la
+conscience que l'homme devait se conduire. Non! L'on craignit qu'un
+sentiment que l'on faisait tout au monde pour étouffer ne reprît le
+dessus.
+
+Il y eut donc un Dieu. Ce Dieu conduisait le monde. Tout se faisait par
+acte de sa volonté. Il avait donné des lois écrites... et l'empire des
+prêtres commença, empire qui probablement ne finira jamais.
+
+Que l'homme donc soit dégradé, triste vérité! Mais que l'état de société
+ne soit légitime, c'est ce dont l'on ne peut disconvenir. Le silence des
+hommes là-dessus est une approbation tacite que rien ne peut démentir.
+Vous avez vingt ans, monsieur, choisissez: ou renoncez à votre rang, à
+votre fortune, et quittez un monde que vous détestez, ou, vous
+inscrivant dans le nombre des citoyens, soumettez-vous à ses lois. Vous
+jouissez des avantages du contrat, serez-vous infidèle aux autres
+clauses? Ce ne serait pas vous croire honnête homme que d'en douter.
+Vous devez donc être attaché à un État qui vous procure tant de
+bien-être et procurant à la fois de faire un digne usage des avantages
+qu'il vous a accordés, vous devez rendre heureux le peuple au-dessus
+duquel vous êtes et faire prospérer la société qui vous a distingué.
+Pour cela faire, il faut que, guidé toujours par le flambeau de la
+raison, vous puissiez balancer avec équité les droits des hommes à qui
+vous vous devez. Pour cela faire, il faut que, prêt à tout entreprendre
+pour le service de l'État, vous soyez soldat, homme d'affaires,
+courtisan même si l'intérêt du peuple et de votre nation le demande. Ah!
+que votre récompense sera douce! Défiez alors les malignes vapeurs de la
+calomnie, de la jalousie! Défiez hardiment le temps même! Vos membres
+décrépits ne seront plus qu'une image imparfaite de ce qu'ils furent
+jadis et ils attireront cependant le respect de tous ceux qui vous
+approcheront. L'un racontera dans sa cabane le soulagement que vous lui
+avez accordé. L'autre, en faisant le récit des complots des méchants,
+dira: «S'il ne fût venu à mon secours, j'eusse péri du supplice des
+criminels.» Chevalier, cesse de restreindre cette âme altière et ce
+coeur jadis si fier à une sphère aussi étroite. Toi, aux genoux d'une
+femme! Fais plutôt tomber aux tiens les méchants confondus! Toi,
+mépriser les peines des hommes! Sentiment d'honneur, subjugue-le plutôt!
+Estimé par tes semblables, respecté, aimé par tes vassaux, la mort
+viendra t'enlever au milieu des pleura de ceux qui t'entoureront, après
+avoir coulé une vie douce, oracle de tes proches et père de tes vassaux.
+
+DES MAZIS.--Je ne vous entends pas. Comment, monsieur, mon amour
+pourrait-il m'empêcher de suivre le plan que vous venez de tracer?
+Quelle idée vous êtes-vous donc faite d'Adélaïde?
+
+Adélaïde, s'il faut pour remplir ces devoirs soulager les malheureux;
+s'il faut pour être vertueux aimer sa patrie, les hommes, la société,
+qui plus qu'elle est vertueuse? Croyez-vous que je faisais le bien avec
+la froideur de la philosophie? Quand la volonté d'Adélaïde sera le
+mobile qui me conduira, lui faire plaisir la récompense... Non,
+monsieur, vous n'avez jamais été amoureux.
+
+BONAPARTE.--Je plains votre erreur. Quoi, chevalier, vous croyez que
+l'amour est le chemin de la vertu? Il vous immétrigue (_emplâtrer,
+retenir avec du mastic_) à chaque pas. Soyez sincère, depuis que cette
+passion fatale a troublé votre repos, avez-vous envisagé d'autre
+jouissance que celle de l'amour? Vous ferez donc le bien ou le mal selon
+les symptômes de votre passion. Mais que dis-je? Vous et la passion ne
+font qu'un même être. Tant qu'elle durera vous n'agirez que pour elle
+et, puisque vous êtes convenu que les devoirs d'un homme riche
+consistaient à faire du bien, à arracher de l'indigence les malheureux
+qui y gémissent, que les devoirs d'un homme de naissance l'obligeaient à
+se servir du crédit de son nom pour détruire les brigues des méchants,
+que les devoirs du citoyen consistaient à défendre la patrie et à
+concourir à sa prospérité, n'avouerez-vous pas que les devoirs d'un bon
+fils consistent à reconnaître en son père les obligations d'une
+éducation soignée, à sa mère... Non! chevalier, je me tairais si j'étais
+obligé de vous prouver de pareilles évidences.
+
+ * * * * *
+
+
+
+
+LA FEMME ET LE CODE NAPOLÉON
+
+
+_Nous avons recherché dans le Code civil et le Code pénal ceux des
+articles qui se rapportent à la femme._
+
+_Par l'examen de ces articles, on pourra se rendre compte combien
+Napoléon souhaitait marquer la dépendance de l'épouse à l'époux.
+Convaincu qu'elle était faible, il la voulait protégée par le mari. Mais
+en lui accordant cette protection, il exigeait d'elle une absolue
+soumission à une discipline familiale, que d'ailleurs il souhaitait
+douce. Enfin, ennemi des désordres conjugaux, il frappa inégalement
+l'épouse et l'époux, sachant la différence de résultat d'une même faute
+et pour marquer, semble-t-il, le caractère grave et élevé de l'épouse,
+qui, à ses yeux, est surtout la Mère._
+
+ * * * * *
+
+
+
+
+CODE CIVIL
+
+LIVRE PREMIER.--TITRE PREMIER
+
+=Jouissance des droits civils.=
+
+
+Tout Français a la jouissance ou propriété des droits civils; mais
+quelques Français, comme les mineurs, les interdits et les _femmes
+mariées_ n'ont pas l'exercice de leurs droits.
+
+
+TITRE III
+
+=Du domicile.=
+
+Celui qui est _soumis_ à une personne est domicilié chez elle: ainsi la
+_femme_ est domiciliée chez son mari.
+
+
+TITRE V
+
+=Des droits et des devoirs respectifs des époux.=
+
+ART. 213.--Le mari doit _protection_ à sa femme, la femme _obéissance_ à
+son mari.
+
+ART. 214.--La femme est obligée d'habiter avec le mari et de le suivre
+partout où il juge à propos de résider; le mari est obligé de la
+recevoir et de lui fournir tout ce qui est nécessaire pour les besoins
+de la vie, selon ses facultés et son état.
+
+
+TITRE VI
+
+=Du divorce.=
+
+ART. 229.--Le mari pourra demander le divorce pour cause d'adultère de
+sa femme.
+
+ART. 230.--La femme pourra demander le divorce pour cause d'adultère de
+son mari lorsqu'_il aura tenu sa concubine dans la maison commune_.
+
+
+TITRE VI
+
+=De la séparation de corps.=
+
+ART. 308.--La femme contre laquelle la séparation de corps sera
+prononcée pour cause d'adultère sera condamnée, par le même jugement et
+sur la réquisition du ministère public, à la réclusion dans une maison
+de correction pendant un temps déterminé, qui ne pourra être moindre de
+trois mois, ni excéder deux années.
+
+ART. 309.--_Le mari restera le maître d'arrêter l'effet de cette
+condamnation en consentant à reprendre sa femme_.
+
+
+TITRE VII
+
+=De la paternité et de la filiation.=
+
+ART. 340.--La recherche de la paternité est interdite.
+
+ART. 341.--La recherche de la maternité est admise.
+
+
+TITRE IX
+
+=De la puissance paternelle.=
+
+ART. 373.--Le père seul exerce cette autorité durant le mariage.
+
+ART. 374.--L'enfant ne peut quitter la maison paternelle sans la
+permission de son père, si ce n'est pour _enrôlement volontaire_[8],
+après l'âge de dix-huit ans révolus.
+
+[Note 8: Il faut observer cette restriction. Elle exprime la pensée
+de Napoléon, mettant la Patrie (les armées, par conséquent) au-dessus de
+la famille.]
+
+
+TITRE X
+
+=De la tutelle des père et mère.=
+
+ART. 389.--Le _père_ est, durant le mariage, administrateur des biens
+personnels de ses enfants mineurs.
+
+
+LIVRE III.--TITRE PREMIER
+
+=Des successions.=
+
+ART. 776.--Les femmes mariées ne peuvent pas valablement accepter une
+succession sans l'autorisation de leur mari.
+
+
+TITRE II
+
+=Des donations entre vifs et des testaments.=
+
+ART. 905.--La femme mariée ne pourra donner entre vifs sans l'assistance
+ou le consentement spécial de son mari.
+
+ART. 934.--La femme mariée ne pourra accepter une donation sans le
+consentement de son mari.
+
+ART. 1029.--La femme mariée ne pourra accepter l'exécution testamentaire
+qu'avec le consentement de son mari.
+
+ * * * * *
+
+
+
+
+
+CODE PÉNAL
+
+
+LIVRE III
+
+=Crimes et délits.=
+
+ART. 324.--Dans le cas d'adultère prévu par l'article 336, le meurtre
+commis par l'époux sur son épouse ainsi que sur le complice à l'instant
+où il les surprend en flagrant délit dans la maison conjugale est
+excusable.
+
+ART. 336.--L'adultère de la femme ne pourra être dénoncé que par le
+mari.
+
+ART. 337.--La femme convaincue d'adultère subira la peine de
+l'emprisonnement pendant trois mois au moins et deux ans au plus. Le
+mari restera le maître d'arrêter cette condamnation en consentant à
+reprendre sa femme.
+
+ART. 339.--Le mari qui aura entretenu une concubine dans la maison
+conjugale et qui aura été convaincu sur la plainte de la femme sera puni
+d'une amende de cent francs à deux mille francs.
+
+ * * * * *
+
+
+
+
+LETTRES À Mme WALEWSKA
+
+
+_Après la victoire d'Iéna, Napoléon occupa la Pologne et fit dans
+Varsovie, sa capitale, une entrée glorieuse. Les Polonais, qui avaient
+vu dans son triomphe l'espoir de leur affranchissement, lui firent un
+accueil enthousiaste. Les fêtes succédèrent aux fêtes. Au cours de l'une
+d'elles, dans un bal, Napoléon remarqua Marie Walewska. Pour la première
+fois peut-être depuis qu'il est empereur, il laissa voir son trouble et
+l'écrivit, bien que dans un billet bref, où le chef paraît plus que
+l'amoureux. Ce billet, que Duroc[9] porta, était ainsi conçu:_
+
+ «Je n'ai vu que vous, je n'ai admiré que vous, je ne désire que
+ vous. Une réponse bien prompte pour calmer l'impatiente ardeur de
+
+ «N.»
+
+[Note 9: Duroc, aide de camp de l'Empereur et un de ses familiers.]
+
+_La signature, qui n'est qu'un paraphe, le style, qui n'est qu'une suite
+d'exclamations que termine un ordre, tout cela parut une impertinence
+aux yeux de la jeune Polonaise. Elle refusa l'invitation._
+
+_L'Empereur ne se tint pas pour battu. Il a conscience de sa valeur, et
+si d'autres, plus modestes et surtout moins actifs que lui,
+répugneraient à l'affirmer, il ne craint pas de l'écrire à celle qu'il
+veut conquérir_:
+
+ «Vous ai-je déplu, madame? J'avais cependant le droit d'espérer le
+ contraire. Me suis-je trompé! Votre empressement s'est ralenti,
+ tandis que le mien augmente. Vous m'ôtez le repos! Oh! donnez un
+ peu de joie, de bonheur à un pauvre coeur tout prêt à vous adorer.
+ Une réponse est-elle si difficile à obtenir? Vous m'en devez deux.
+
+ «N.»
+
+_À ce billet, où paraissait l'ennui de n'avoir pas été accueilli, la
+crainte d'avoir été trop brusque et la douleur réelle qu'éprouvait le
+Maître à se sentir isolé dans sa gloire, Marie Walewska, plus par
+respect de ses devoirs d'épouse, croyons-nous, que par fierté, ne voulut
+pas répondre._
+
+_Son entourage a beau lui représenter qu'être la maîtresse de l'Empereur,
+ce n'est pas manquer à l'honneur, et que ce serait peut-être préparer le
+salut et la grandeur de la Pologne, Marie Walewska se refuse à ce
+compromis._
+
+_Napoléon insiste une troisième fois. Son billet est plus tendre encore,
+plus long aussi. Enfin il promet ce que tous les Polonais désirent:_
+
+ «Il y a des moments où trop d'élévation pèse, et c'est ce que
+ j'éprouve. Comment satisfaire le besoin d'un coeur épris qui
+ voudrait s'élancer à vos pieds et qui se trouve arrêté par le poids
+ de hautes considérations paralysant les plus vifs désirs? Oh! si
+ vous vouliez!... Il n'y a que vous seule qui puissiez lever les
+ obstacles qui nous séparent. Mon ami Duroc vous en facilitera les
+ moyens.
+
+ Oh! venez! venez! Tous vos désirs seront remplis. Votre patrie me
+ sera plus chère quand vous aurez pitié de mon pauvre coeur.
+
+ «N.»
+
+_Le lendemain de la réception de ce billet, lasse des assauts de
+Napoléon et surtout d'entendre les prières de son entourage, qui
+persistait à voir dans son consentement l'avènement de la Pologne, Marie
+Walewska se rendit au château impérial. Ce fut la nuit, entourée de
+mystère, voilée et en voiture fermée, qu'elle y arriva en compagnie d'un
+gardien discret._
+
+_Napoléon l'attendait. Il était là, debout, dans la salle ou on
+l'introduisit. Empressé, comme il savait l'être avec les femmes qu'il
+aimait, l'Empereur se montra galant. Mais Marie Walewska, toute surprise
+encore, ne put que pleurer, se montrer nerveuse et d'une timidité qui
+pouvait surprendre. Quand, à deux heures du matin, on vint la prendre
+pour la reconduire chez elle, comme il avait été convenu, Napoléon
+n'avait obtenu qu'un droit de consolation et sa promesse de revenir le
+lendemain._
+
+_Aussi, dès son réveil, sa femme de chambre lui remit-elle ce mot, qui
+accompagnait un bouquet et une guirlande de diamants:_
+
+ «Marie, ma douce Marie, ma première pensée est pour toi, mon
+ premier désir est de te revoir. Tu reviendras, n'est-ce pas? Tu me
+ l'as promis. Sinon l'aigle volerait vers toi. Je te verrai à dîner,
+ l'ami[10] le dit. Daigne donc accepter ce bouquet: qu'il devienne
+ un lien mystérieux qui établisse entre nous un rapport secret au
+ milieu de la foule qui nous environne. Exposés aux regards de la
+ multitude, nous pourrons nous entendre. Quand ma main pressera mon
+ coeur, tu sauras qu'il est tout occupé de toi et, pour répondre, tu
+ presseras le bouquet! Aime-moi, ma gentille Marie, et que ta main
+ ne quitte jamais ton bouquet.
+
+ N.»
+
+[Note 10: Duroc.]
+
+_Le soir, elle était au dîner. La conversation s'engagea entre elle et
+l'Empereur à l'aide de ce bouquet. Puis elle vint au palais. L'habitude
+prise, elle y revint chaque soir._
+
+_Quand Napoléon quitta Varsovie pour Finckenstein, elle le suivit. Dans
+cette nouvelle résidence, elle mène une vie cloîtrée, enfermée dans un
+château morne, où elle ne voit personne. L'Empereur paraît aux heures
+des repas, pris en tête à tête. Le reste du temps, elle l'use à lire, à
+broder, à voir la parade à travers les persiennes._
+
+_De Finckenstein, elle va à Vienne, et de Vienne à Paris, où l'Empereur
+lui achète un hôtel particulier au 48 de la rue de la Victoire._
+
+_De là, elle gagne Schoenbrunn, en 1809, et le château de Walewice, en
+1810, où elle accouche d'un fils (le 4 mai): le comte Walewski._
+
+_Puis elle revint à Paris. Mais l'époque des revers commençait.
+Napoléon, attristé, ne pense plus avec la même gaieté à sa maîtresse.
+Des soucis l'absorbent. Il songe à mourir. C'est quelques jours avant
+l'Île d'Elbe. Ce soir où, vaincu, il a voulu se suicider sans y
+parvenir, Marie Walewska attendra toute une nuit l'amant soucieux que,
+bien qu'attristée, elle n'ose déranger. Lui ne se souviendra plus qu'au
+matin qu'elle a passé la nuit à l'attendre dans une pièce proche. Et
+malgré tant de douleur qui l'accable, il trouve pour elle, à défaut
+d'amour, des mots d'amitié profonde:_
+
+ «Marie, j'ai reçu votre lettre du 15. Les sentiments qui vous
+ animent me touchent vivement. Ils sont dignes de votre belle âme et
+ de la bonté de votre coeur. Lorsque vous aurez arrangé vos
+ affaires, si vous voulez aller aux eaux de Lucques ou de Sise, je
+ vous verrai avec un grand et vif intérêt, ainsi que votre fils,
+ pour qui mes sentiments sont toujours invariables. Portez-vous
+ bien, pensez à moi avec plaisir et ne doutez jamais de moi.
+
+ Le 16 avril.
+
+ N.»
+
+_Napoléon partit pour l'Île d'Elbe. C'est là qu'elle le vint visiter le
+1er septembre 1814. Elle sera près de lui encore en 1815, pendant les
+Cent Jours._
+
+_Enfin, quand ce fut l'exil définitif, l'abdication pour Sainte-Hélène,
+Marie se crut dégagée de tout serment. Elle épousa Philippe-Antoine,
+général comte d'Ornano, ancien colonel des dragons de la Garde, cousin
+de l'Empereur._
+
+_De ce mariage elle eut un fils[11], le 9 juin 1817. Quelques mois
+après, vers la mi-décembre, elle mourait dans son hôtel de la rue de la
+Victoire, qu'elle avait quitté lors de son mariage._
+
+[Note 11: Rodolphe-Auguste d'Ornano, député au Corps législatif sous
+le Second Empire. Mort le 14 octobre 1866.]
+
+
+
+
+
+
+End of Project Gutenberg's Tendresses impériales, by Napoléon Bonaparte
+
+*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK TENDRESSES IMPÉRIALES ***
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+such as creation of derivative works, reports, performances and
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+and help preserve free future access to Project Gutenberg-tm electronic
+works. See paragraph 1.E below.
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+Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
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+including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists
+because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from
+people in all walks of life.
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+Volunteers and financial support to provide volunteers with the
+assistance they need, is critical to reaching Project Gutenberg-tm's
+goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
+remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
+Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
+and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations.
+To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
+and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4
+and the Foundation web page at http://www.pglaf.org.
+
+
+Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive
+Foundation
+
+The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
+501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
+state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
+Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
+number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at
+http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent
+permitted by U.S. federal laws and your state's laws.
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+Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered
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+business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact
+information can be found at the Foundation's web site and official
+page at http://pglaf.org
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+ Dr. Gregory B. Newby
+ Chief Executive and Director
+ gbnewby@pglaf.org
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+Literary Archive Foundation
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+Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
+spread public support and donations to carry out its mission of
+increasing the number of public domain and licensed works that can be
+freely distributed in machine readable form accessible by the widest
+array of equipment including outdated equipment. Many small donations
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+status with the IRS.
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+The Foundation is committed to complying with the laws regulating
+charities and charitable donations in all 50 states of the United
+States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
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+have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
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+any statements concerning tax treatment of donations received from
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+methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
+ways including checks, online payments and credit card
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+Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic
+works.
+
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+concept of a library of electronic works that could be freely shared
+with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project
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+
+Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
+editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S.
+unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
+keep eBooks in compliance with any particular paper edition.
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+This Web site includes information about Project Gutenberg-tm,
+including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
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+ The Project Gutenberg eBook of Tendresses Impériales, by Napoléon Bonaparte
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+The Project Gutenberg EBook of Tendresses impériales, by Napoléon Bonaparte
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+This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
+almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
+re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
+with this eBook or online at www.gutenberg.org
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+Title: Tendresses impériales
+
+Author: Napoléon Bonaparte
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+Release Date: November 2, 2006 [EBook #19700]
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+Language: French
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+*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK TENDRESSES IMPÉRIALES ***
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+Produced by Chuck Greif, Mireille Harmelin and the Online
+Distributed Proofreading Team at http://dp.rastko.net
+(Produced from images of the Bibliothèque nationale de
+France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr)
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+
+<table summary="note" border="0" cellpadding="10" style="background-color: #ccccff;">
+ <tr>
+ <td valign="top">
+
+<p>Note du transcripteur:<br /><br />Ce livre pr&eacute;sente des lettres de Napol&eacute;on Bonaparte &agrave; sa premi&egrave;re femme,
+Jos&eacute;phine de Beauharnais, et &agrave; la Comtesse Marie de Walewska.</p>
+
+<p>Rappelons que Napol&eacute;on Bonaparte eut deux &eacute;pouses:</p>
+
+<p>&mdash;Jos&eacute;phine Tascher de la Pagerie, veuve du g&eacute;n&eacute;ral Beauharnais, qu'il
+&eacute;pousa en 1796 et dont il divor&ccedil;a en 1809 car Jos&eacute;phine ne lui avait pas
+donn&eacute; l'h&eacute;ritier &agrave; la dynastie qu'il souhaitait;&mdash;Marie-Louise, fille
+de l'empereur d'Autriche, qu'il &eacute;pousa en 1810 et dont il eut un fils,
+le roi de Rome (1811-1832), surnomm&eacute; l'Aiglon.</p>
+
+<p>C'est pendant les pourparlers qui conduisirent au Trait&eacute; de Tilsitt
+sign&eacute; en 1807 entre Napol&eacute;on 1er et le tsar Alexandre 1er de Russie,
+trait&eacute; qui eut pour cons&eacute;quences le d&eacute;membrement de la Prusse et la
+reconstitution d'un &Eacute;tat polonais (le Grand Duch&eacute; de Varsovie), que
+Napol&eacute;on fit la connaissance de la Comtesse Marie de Walewska, &agrave;
+laquelle furent adress&eacute;es quelques unes des lettres pr&eacute;sent&eacute;es dans ce
+livre.</p>
+
+<p>Rappelons bri&egrave;vement les &eacute;pisodes successifs de la vie politique et
+militaire de Napol&eacute;on Bonaparte:</p>
+
+<p>&mdash;en mars 1796, Bonaparte venait d'&ecirc;tre nomm&eacute; g&eacute;n&eacute;ral en chef de
+l'arm&eacute;e d'Italie pour combattre les Autrichiens. Il y remporta des
+victoires rest&eacute;es fameuses: Castiglione, Arcole, Rivoli. Le Trait&eacute; de
+Campoformio (octobre 1797) mit fin &agrave; la guerre avec les Autrichiens.</p>
+
+<p>&mdash;en 1798-1799, ce fut la Campagne d'&Eacute;gypte o&ugrave; Bonaparte fut vainqueur
+aux Pyramides; mais la flotte fran&ccedil;aise fut d&eacute;truite par Nelson, &agrave;
+Aboukir.</p>
+
+<p>&mdash;en 1800, ce fut la 2&egrave;me campagne d'Italie avec la victoire de
+Marengo sur les Autrichiens.</p>
+
+<p>&mdash;Bonaparte devint premier Consul &agrave; la suite du coup d'&Eacute;tat du 18
+brumaire an VIII (9 novembre 1799) puis fut sacr&eacute; Napol&eacute;on 1er, Empereur
+des Fran&ccedil;ais, le 2 d&eacute;cembre 1804.</p>
+
+<p>&mdash;Ce fut ensuite une succession de batailles victorieuses, Austerlitz
+(1805), I&eacute;na (1806), Eylau et Friedland (1807), Wagram (1809). Mais il y
+eut la d&eacute;faite de Trafalgar (1805) o&ugrave; la flotte fran&ccedil;aise fut d&eacute;truite
+par les Anglais. La Paix de Vienne fut sign&eacute;e le 14 octobre 1809. Puis
+vinrent les d&eacute;sastres avec la Campagne de Russie (1812), la Campagne
+d'Allemagne et la D&eacute;faite de Leipzig (octobre 1813), la Prise de Paris
+par les Alli&eacute;s (mars 1814), le Trait&eacute; d'abdication de Fontainebleau
+(avril 1814), l'exil &agrave; l'&icirc;le d'Elbe, le Congr&egrave;s de Vienne qui op&eacute;ra la
+liquidation du r&eacute;gime napol&eacute;onien en Europe, les Cent Jours (mars &agrave;
+juillet 1815) apr&egrave;s le retour de Napol&eacute;on de l'Ile d'Elbe, la D&eacute;faite de
+Waterloo (juin 1815), la 2&egrave;me abdication, le 22 juin 1815 et le d&eacute;part
+pour son exil &agrave; Sainte-H&eacute;l&egrave;ne o&ugrave; il mourra en 1821.</p>
+</td>
+ </tr>
+</table>
+
+<hr style="width: 95%;" />
+
+<h3>NAPOL&Eacute;ON BONAPARTE</h3>
+
+<h1>TENDRESSES IMP&Eacute;RIALES</h1>
+
+<h3>AVEC UNE LETTRE-PR&Eacute;FACE PAR<br /><br />
+ABEL GRI<br /><br /></h3>
+
+<div class="poem1"><div class="stanza">
+<span class="i0">&nbsp;&nbsp;L'Amour est l'occupation de l'homme<br /></span>
+<span class="i0">oisif, la distraction du guerrier, l'&eacute;cueil<br /></span>
+<span class="i0">du souverain.<br /></span>
+<span class="i0">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;(Napol&eacute;on Bonaparte)<br /></span>
+</div></div>
+<p>&nbsp;</p>
+<p>&nbsp;<br /></p>
+<hr style="width: 5%;" />
+
+<h3>PARIS</h3>
+
+<h3>BIBLIOTH&Egrave;QUE INTERNATIONALE D'&Eacute;DITION</h3>
+
+<h3>E. SANSOT &amp; C<sup>ie</sup></h3>
+
+<h3>9, rue de l'&Eacute;peron, 9</h3>
+
+<h3>MCMXIII</h3>
+
+<p class="center">
+IL A &Eacute;T&Eacute; TIR&Eacute; DE CET OUVRAGE<br />
+25 EXEMPLAIRES NUM&Eacute;ROT&Eacute;S SUR HOLLANDE<br />
+VAN GELDER ZONEN<br />
+</p>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+
+<p><strong><i>Que diriez-vous d'une s&eacute;rie qui grouperait les r&eacute;cits envoy&eacute;s du
+th&eacute;&acirc;tre de leurs exploits &agrave; leurs ma&icirc;tresses par nos h&eacute;ros et qui nous
+les ferait voir dans l'instant o&ugrave; l'amour agit sur eux comme un ferment
+d'h&eacute;ro&iuml;sme? Les lettres du jeune g&eacute;n&eacute;ral en chef de l'arm&eacute;e d'Italie
+ouvriraient cette collection.</i></strong></p>
+
+<p class="sign">(<span class="smcap">Maurice Barr&egrave;s</span>)</p>
+
+<p class="center">(Pr&eacute;face des &laquo;<i>Lettres du lieutenant-colonel Moll</i>&raquo;.)</p>
+<p>&nbsp;<br /></p>
+<p>&nbsp;<br /></p>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+
+<h2><a name="TABLE_DES_MATIERES" id="TABLE_DES_MATIERES"></a>TABLE DES MATI&Egrave;RES</h2>
+<hr style="width: 65%;" />
+<table summary="table" cellspacing="2" cellpadding="2">
+<tr><td>&nbsp;</td></tr>
+<tr><td style="font-size: 125%;" align="left"><a href="#LETTRE-PREFACE"><b>Lettre-pr&eacute;face &agrave; M. Maurice Barr&egrave;s</b></a></td></tr>
+<tr><td>&nbsp;</td></tr>
+<tr><td style="font-size: 125%;" align="left"><a href="#LETTRES_DE_BONAPARTE_1"><b>Lettres du G&eacute;n&eacute;ral en chef de l'arm&eacute;e d'Italie</b></a></td></tr>
+<tr><td style="font-size: 50%;"><a href="#LETTRE_I"><b>Lettre I,</b></a>
+<a href="#LETTRE_II"><b>II,</b></a>
+<a href="#LETTRE_III"><b>III,</b></a>
+<a href="#LETTRE_IV"><b>IV,</b></a>
+<a href="#LETTRE_V"><b>V,</b></a>
+<a href="#LETTRE_VI"><b>VI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_VII"><b>VII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_VIII"><b>VIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_IX"><b>IX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_X"><b>X,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XI"><b>XI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XII"><b>XII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XIII"><b>XIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XIV"><b>XIV,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XV"><b>XV,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XVI"><b>XVI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XVII"><b>XVII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XVIII"><b>XVIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XIX"><b>XIX</b></a></td></tr>
+<tr><td>&nbsp;</td></tr>
+<tr><td style="font-size: 125%;" align="left"><a href="#LETTRES_DE_BONAPARTE_2"><b>Lettres de Bonaparte, Premier Consul</b></a></td></tr>
+<tr><td style="font-size: 50%;"><a href="#LETTRE_XX"><b>Lettre XX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXI"><b>XXI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXII"><b>XXII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXIII"><b>XXIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXIV"><b>XXIV,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXV"><b>XXV</b></a></td></tr>
+<tr><td>&nbsp;</td></tr>
+<tr><td style="font-size: 125%;" align="left"><a href="#LETTRES_DE_NAPOLEON"><b>Lettres de Napol&eacute;on, Empereur</b></a></td></tr>
+<tr><td style="font-size: 50%;"><a href="#LETTRE_XXVI"><b>Lettre XXVI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXVII"><b>XXVII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXVIII"><b>XXVIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXIX"><b>XXIX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXX"><b>XXX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXXI"><b>XXXI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXXII"><b>XXXII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXXIII"><b>XXXIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXXIV"><b>XXXIV,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXXV"><b>XXXV,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXXVI"><b>XXXVI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXXVII"><b>XXXVII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXXVIII"><b>XXXVIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XXXIX"><b>XXXIX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XL"><b>XL,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XLI"><b>XLI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XLII"><b>XLII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XLIII"><b>XLIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XLIV"><b>XLIV,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XLV"><b>XLV,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XLVI"><b>XLVI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XLVII"><b>XLVII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XLVIII"><b>XLVIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XLIX"><b>XLIX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_L"><b>L,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LI"><b>LI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LII"><b>LII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LIII"><b>LIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LIV"><b>LIV,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LV"><b>LV,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LVI"><b>LVI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LVII"><b>LVII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LVIII"><b>LVIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LIX"><b>LIX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LX"><b>LX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LXI"><b>LXI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LXII"><b>LXII,</b></a>
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+<a href="#LETTRE_LXX"><b>LXX,</b></a>
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+<a href="#LETTRE_LXXIV"><b>LXXIV,</b></a>
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+<a href="#LETTRE_LXXVI"><b>LXXVI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LXXVII"><b>LXXVII</b></a></td></tr>
+<tr><td>&nbsp;</td></tr>
+<tr><td style="font-size: 125%;" align="left"><a href="#LETTRES_DE_NAPOLEON_A_JOSEPHINE"><b>Lettres de Napol&eacute;on &agrave; Jos&eacute;phine apr&egrave;s le divorce</b></a></td></tr>
+<tr><td style="font-size: 50%;"><a href="#LETTRE_LXXVIII"><b>Lettre LXXVIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LXXIX"><b>LXXIX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LXXX"><b>LXXX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LXXXI"><b>LXXXI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LXXXII"><b>LXXXII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_LXXXIII"><b>LXXXIII,</b></a>
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+<a href="#LETTRE_LXXXVIII"><b>LXXXVIII,</b></a>
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+<a href="#LETTRE_XC"><b>XC,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XCI"><b>XCI,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XCII"><b>XCII,</b></a>
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+<a href="#LETTRE_XCVIII"><b>XCVIII,</b></a>
+<a href="#LETTRE_XCIX"><b>XCIX,</b></a>
+<a href="#LETTRE_C"><b>C,</b></a>
+<a href="#LETTRE_CI"><b>CI</b></a></td></tr>
+<tr><td>&nbsp;</td></tr>
+<tr><td style="font-size: 110%;" align="left"><a href="#APPENDICES"><b>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;APPENDICES:</b></a></td></tr>
+<tr><td align="left"><a href="#DIALOGUE_SUR_LAMOUR"><b>Dialogue sur l'amour</b></a></td></tr>
+<tr><td align="left"><a href="#CODE_CIVIL"><b>La femme et le Code Napol&eacute;on: Code civil</b></a></td></tr>
+<tr><td align="left"><a href="#CODE_PENAL"><b>Code p&eacute;nal</b></a></td></tr>
+<tr><td align="left"><a href="#LETTRES_A_M_WALEWSKA"><b>Lettres &agrave; M<sup>me</sup> Walewska</b></a></td></tr>
+</table>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE-PREFACE" id="LETTRE-PREFACE"></a>LETTRE-PR&Eacute;FACE</h2>
+
+<p class="center">&Agrave;</p>
+
+<h3>MAURICE BARR&Egrave;S</h3>
+
+
+<p><strong><i>Voir r&eacute;unies, en une page d'h&eacute;ro&iuml;sme et de passion, les lettres d'amour
+du jeune g&eacute;n&eacute;ral en chef de l'arm&eacute;e d'Italie, c'est une id&eacute;e qui vous
+fut ch&egrave;re et que voici r&eacute;alis&eacute;e.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>En y joignant le &laquo;Dialogue sur l'Amour&raquo; qu'&eacute;crivit le jeune lieutenant
+d'artillerie et les billets fi&eacute;vreux que l'Empereur fit parvenir &agrave; Marie
+Walewska, nous ajoutons les clart&eacute;s et les ombres qui feront mieux
+valoir la figure du h&eacute;ros.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Il n'est pas jusqu'&agrave; cet &acirc;pre &eacute;nonc&eacute; des articles du Code qui, comme la
+gravure s&eacute;v&egrave;re de quelque eau-forte, ne puisse fixer dans notre cerveau
+la pens&eacute;e aust&egrave;re du Ma&icirc;tre.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Nous ne dirons pas l'histoire de ses amours. Si nous les savons
+multiples, nous avons retenu qu'elles ne l'obs&eacute;d&egrave;rent pas. Sans les
+consid&eacute;rer comme une tare, il pensait justement qu'elles &eacute;taient un mal
+in&eacute;vitable &agrave; l'homme sans foyer, et que, pour cette raison, mieux valait
+les taire et les cacher.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>C'est encore l'aimer que de ne pas attacher d'importance aux actes de
+sa vie qu'il estimait n&eacute;gligeables.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Aussi, sa tendresse pour Marie Walewska n'aura-t-elle que l'agr&eacute;ment
+d'une faiblesse s'entourant de romantisme.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Elle aura le charme troublant d'une page de litt&eacute;rature o&ugrave; l'amour
+discute l'&ecirc;tre aim&eacute; &agrave; la curiosit&eacute; des foules et &agrave; la raillerie des
+pamphl&eacute;taires. Malgr&eacute; ses moments de v&eacute;ritable grandeur et malgr&eacute;
+l'inalt&eacute;rable souvenir qu'il lui garda, l'aventure polonaise ne restera
+qu'une aventure, sans doute plus longue, plus relev&eacute;e parmi les autres,
+mais dont on n'a pas &agrave; chercher les cons&eacute;quences, parce qu'elle ne
+pouvait pas en avoir dans la pens&eacute;e et par la volont&eacute; du h&eacute;ros.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>L'id&eacute;e du r&eacute;tablissement d'un royaume par l'intervention de l'amour ne
+sera qu'une chim&egrave;re con&ccedil;ue par l'h&eacute;ro&iuml;ne et narr&eacute;e avec volupt&eacute; par les
+&eacute;crivains &eacute;pris de son histoire.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>L'ascension au tr&ocirc;ne d'une concubine n'est qu'une autre folie de ceux
+qui s'ing&eacute;ni&egrave;rent &agrave; voir un passionn&eacute; chez Napol&eacute;on.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Il e&ucirc;t &eacute;t&eacute; plus vrai de dire que par Napol&eacute;on l'amour n'est ni
+recherch&eacute;, ni surtout glorifi&eacute;. Il est combattu. L'Empereur ne l'accepte
+que dans le mariage, sans l'y croire n&eacute;cessaire. Pour lui, le mariage
+est un devoir social. C'est un acte l&eacute;gitime que nous devons accomplir,
+que le souverain doit imposer &agrave; ses sujets et &agrave; l'accomplissement duquel
+il pr&ecirc;tera son encouragement. C'est un moyen de fonder une famille, une
+nation, une dynastie. Si fragiles que soient des unions que, seule, la
+volont&eacute; explique, il les veut d&eacute;finitives. Si le divorce est inscrit
+dans ses lois, ce n'est qu'entour&eacute; de mille entraves qui le rendent
+difficile &agrave; appliquer et d'aspect si redoutable que la plupart des
+solliciteurs s'en d&eacute;tournent. Il croit qu'il n'est rien de durable que
+ce qu'a b&acirc;ti la volont&eacute; tenace. Il sait que les &eacute;nergies sont rares et
+que la foule, quoique mobile, est soumise, parce que craintive. La
+rigueur de ses lois forcera son peuple &agrave; la vertu.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Aussi l'amour n'appara&icirc;t &agrave; ses yeux que comme un libertinage. Il le
+voit sous son aspect physique, et de suite il entrevoit les d&eacute;ch&eacute;ances
+o&ugrave; conduisent les passions. &Eacute;conome de l'&eacute;nergie de son peuple comme de
+la sienne, il utilise m&ecirc;me les circonstances quotidiennes pour bannir de
+son entourage l'id&eacute;e de l'amour et l'habituer &agrave; des pens&eacute;es plus
+aust&egrave;res. La perte d'une amante provoque-t-elle un suicide parmi ses
+troupes, de suite il fait lire une proclamation dans laquelle il est dit
+qu'&laquo;un soldat doit vaincre la douleur et la m&eacute;lancolie de ses passions&raquo;.
+L'histoire ne dit pas quelle femme fut cause de ce drame. Ma&icirc;tresse ou
+&eacute;pouse, la proclamation e&ucirc;t &eacute;t&eacute; la m&ecirc;me. Dans sa pens&eacute;e, l'homme se doit
+&agrave; une t&acirc;che plus s&eacute;v&egrave;re que celle d'aimer. L'amour est l'affaire des
+femmes, dont il exige la fid&eacute;lit&eacute;. Non pas qu'en soi il donne une grande
+importance &agrave; l'adult&egrave;re. Il le dit &laquo;commun&raquo; et c'est une &laquo;affaire de
+canap&eacute;&raquo;. Mais s'il le comprend, il ne l'excuse pas et les m&oelig;urs
+qu'imposera son exemple contribueront &agrave; en diminuer les causes. Il veut
+les &eacute;pouses respect&eacute;es. Il &eacute;carte d'elles les galants, supprimant ainsi
+toutes excuses &agrave; leur faute. Si malgr&eacute; tant de soins la trahison n'a pu
+&ecirc;tre &eacute;vit&eacute;e, il se gardera bien de l'&eacute;bruiter, d'user m&ecirc;me de l'autorit&eacute;
+de ses lois. Il sait qu'un malheur conjugal ne doit pas s'avouer.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Ceci explique le ton enjou&eacute; de ses lettres &agrave; Jos&eacute;phine, o&ugrave; les rares
+menaces sont plut&ocirc;t des avis de discr&eacute;tion. Alors il &eacute;crit: &laquo;Ne te fie
+pas, et je te conseille de te bien garder la nuit, car une de ces
+prochaines tu entendras grand bruit.&raquo;</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Aussi sa correspondance est-elle d'une lecture passionnante et
+triste.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Bonaparte, &agrave; vingt-six ans</i><a name="FNanchor_1_1" id="FNanchor_1_1"></a><a href="#Footnote_1_1" class="fnanchor">[1]</a>, <i>se marie avec Jos&eacute;phine, &acirc;g&eacute;e de
+quelques ann&eacute;es de plus que lui</i><a name="FNanchor_2_2" id="FNanchor_2_2"></a><a href="#Footnote_2_2" class="fnanchor">[2]</a>. <i>Elle est veuve. Elle est cr&eacute;ole.
+Elle a pass&eacute; sa vie dans l'oisivet&eacute;. Celle du jeune Bonaparte s'est
+pass&eacute;e dans l'&eacute;tude et dans les combats. Il ne sait des femmes et de
+l'amour que ce qu'il en a observ&eacute; avec une am&egrave;re justesse. Mais que peut
+l'observation d'un jeune homme quand, pour la combattre, on a le visage,
+la gr&acirc;ce de s&eacute;duction et l'exp&eacute;rience de Jos&eacute;phine.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Pour conqu&eacute;rir une place, une fortune, un droit aux honneurs, elle usa
+de la seule arme qui &eacute;tait en son pouvoir. Une prescience lui disait que
+tout cela, ce jeune homme timide avec elle, mais &eacute;nergique avec les
+&eacute;v&eacute;nements, saurait le lui offrir.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Et il en fut ainsi.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>D&egrave;s le soir du mariage, c'est, de la rue Chante-reine, le h&acirc;tif d&eacute;part
+vers la gloire. Et bient&ocirc;t les nouvelles parviennent, apportant chacune
+l'annonce d'un triomphe, d'un pas vers l'empire dont elle r&ecirc;ve peut-&ecirc;tre
+dans son imagination orientale, mais certainement l'assurance d'un peu
+plus de cet argent dont elle se montrera si prodigue.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Pendant qu'il &eacute;crit ces fi&eacute;vreux billets le soir, sous la tente, parmi
+l'&eacute;parpillement des cartes et des rapports, lorsque dorment ses soldats
+harass&eacute;s, Jos&eacute;phine, oublieuse des promesses r&eacute;centes, se laisse aller &agrave;
+l'ardeur de son temp&eacute;rament. Bonaparte en re&ccedil;oit la nouvelle en &Eacute;gypte.
+De suite il songe au divorce. Ce qu'il y a de brutal et d'orgueilleux
+dans son caract&egrave;re lui pr&eacute;sente ce moyen prompt de sauver son honneur.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Mais bient&ocirc;t il fait un lent et puissant effort sur lui-m&ecirc;me,
+s'appliquant &agrave; discuter, &agrave; peser la gravit&eacute; et les cons&eacute;quences de la
+rupture.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Il commande un corps d'exp&eacute;dition. Il a d&eacute;cid&eacute; d'atteindre le pouvoir &agrave;
+son retour en France. Des ennemis l'entourent. Ira-t-il pr&ecirc;ter le flanc
+aux railleries en faisant conna&icirc;tre &agrave; tous ce qui n'est su que de
+quelques-uns? Ainsi les ann&eacute;es passent. Il grandit dans sa puissance. En
+Italie, il est trop tard d&eacute;j&agrave; pour exiger cette r&eacute;paration. La blessure
+est plus ancienne aussi. Il la pourra supporter. Les efforts faits pour
+reconqu&eacute;rir Jos&eacute;phine sont rest&eacute;s vains. Il e&ucirc;t fallu qu'il demeur&acirc;t
+pr&egrave;s d'elle &agrave; la distraire, &agrave; la choyer. Mais son destin l'appelait aux
+arm&eacute;es.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>La certitude de toute maternit&eacute; impossible chez l'Imp&eacute;ratrice, seule,
+le d&eacute;termina &agrave; la rupture. Encore ne put-il l'accepter d&eacute;finitive. Il
+sentit le besoin de la savoir proche de lui et heureuse par ses soins.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Perp&eacute;tuel combat entre l'amour et la destin&eacute;e, voil&agrave; toute la vie de
+Napol&eacute;on avec Jos&eacute;phine.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Maintenant que nous connaissons les id&eacute;es de l'Empereur sur l'amour et
+le mariage, on peut demeurer surpris de voir sa conduite.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Quand on songe qu'il avoua ses ma&icirc;tresses &agrave; Jos&eacute;phine, lui pr&eacute;senta
+M<sup>me</sup> Walewska, et que l'ayant r&eacute;pudi&eacute;e il ne voulut cesser de la voir,
+quelle extraordinaire complexit&eacute; de caract&egrave;re ne d&eacute;couvre-t-on pas en
+lui!</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Deux causes expliquent cette conduite; l'&eacute;ducation litt&eacute;raire de
+Bonaparte et le r&ocirc;le d'initiatrice de Jos&eacute;phine.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Napol&eacute;on dans sa rudesse garde un fond de r&ecirc;verie qui combat sans cesse
+son positivisme natif. Cela il le doit &agrave; sa jeunesse isol&eacute;e, malheureuse
+m&ecirc;me, d&eacute;pourvue de caresses et de cet argent avec lequel s'ach&egrave;tent les
+illusions de celles-ci. Il a vu des femmes, sans doute, mais leurs rangs
+si sup&eacute;rieurs au sien l'ont forc&eacute; &agrave; n'&ecirc;tre que tendre et &laquo;troubadour&raquo;
+aupr&egrave;s d'elles. Ce furent les idylles de Valence. De celles qui se
+donnent, il conna&icirc;t seulement les filles v&eacute;nales comme celle interrog&eacute;e
+un soir de fi&egrave;vre sous les galeries du Palais-Royal.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>La lecture de Rousseau l'exalta. Il a r&ecirc;v&eacute; une M<sup>me</sup> de Warens. Il
+croit la d&eacute;couvrir dans cette cr&eacute;ole s'offrant &agrave; lui, prestigieuse,
+entour&eacute;e du souvenirs de son Orient natal. Il l'aime d'autant plus qu'il
+n'osait esp&eacute;rer lui plaire.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>De son c&ocirc;t&eacute;, Jos&eacute;phine trouva de l'agr&eacute;ment &agrave; s&eacute;duire ce jeune homme
+qu'elle savait chaste. Pour cette voluptueuse c'&eacute;tait une conqu&ecirc;te bien
+tentante. Ce que furent leur fi&egrave;vre, nous le devinons. Dans leur h&acirc;te de
+possession, ils ne surent attendre leur mariage.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Tout ce qu'une femme dont l'amour est la seule pens&eacute;e peut mettre de
+science, de raffinement, de recherche dans l'&eacute;treinte, il est certain
+que Jos&eacute;phine le r&eacute;v&eacute;la &agrave; Bonaparte &eacute;tonn&eacute; et ravi. Pour elle il fut un
+jouet. Elle le trouva m&ecirc;me &laquo;dr&ocirc;le&raquo; et par ce plaisir qu'elle donnait
+contre toute attente elle le poss&eacute;da. De lui avoir fait conna&icirc;tre un
+amour qu'il imaginait seulement dans les romans, Bonaparte lui en fut
+toute sa vie reconnaissant. Ce conqu&eacute;rant l'aime parce qu'elle l'a
+vaincu, qu'elle l'a su tenir, lass&eacute;, pr&egrave;s d'elle et cependant heureux.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Aussi il aura pour elle des empressements de petit-ma&icirc;tre, de d&eacute;licates
+attentions, des pardons m&ecirc;me. Elle peut tout faire: le tromper, se
+vendre et s'endetter. Qu'importe! Il sait qu'il trouvera en elle un
+superbe instrument de plaisir plus vibrant et plus riche que tous les
+autres.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Aux heures de r&eacute;flexion, dans les nuits aux camps, sa pens&eacute;e s'applique
+&agrave; comprendre Jos&eacute;phine. Il &eacute;voque les amants &agrave; qui elle se donne avec la
+m&ecirc;me fougue qu'&agrave; lui-m&ecirc;me. Si, dans son instinct de m&acirc;le, il est jaloux,
+sa fiert&eacute; d'homme ne se r&eacute;volte pas. Il sait qu'il n'a qu'&agrave; repara&icirc;tre
+pour les lui faire oublier tous. Sa gloire, sa richesse lui ajoutent un
+prestige dont il conna&icirc;t la force. &laquo;Ce qu'on aime en nous c'est notre
+bonheur&raquo;, pense-t-il. Il se dit aussi qu'une femme dont les sens sont si
+prompts ne pourra jamais commander &agrave; l'esprit d'un homme. Pas plus
+qu'elle ne se souvient de lui absent, il ne redoute de subir son action
+quand il l'a quitt&eacute;e. Cela le s&eacute;duit d'avoir une femme ne songeant qu'&agrave;
+le distraire sans penser &agrave; le commander. Enfin c'est surtout parce
+qu'elle fut l'initiatrice qu'il ne l'oublie jamais. Elle peut vieillir
+et avec l'&acirc;ge voir s'&eacute;teindre la possibilit&eacute; des &eacute;treintes. Qu'importe!
+Elle l'a fait vibrer avant toutes les autres. S'il n'h&eacute;site pas m&ecirc;me &agrave;
+lui avouer ses infortunes galantes, c'est qu'il est certain de trouver
+sur son sein un mol oreiller pour sa peine et dans ses mains, qui eurent
+tant de luxurieuses caresses, une derni&egrave;re &eacute;treinte pour apaiser son
+c&oelig;ur. Il sait qu'elle l'aidera &agrave; d&eacute;nouer d'aventureuses liaisons,
+trouvant dans cette compromission l'agr&eacute;ment de se voir rechercher
+encore.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Vu de la sorte, le caract&egrave;re de Napol&eacute;on appara&icirc;t sans &eacute;tranget&eacute;. Il
+s'est impos&eacute;, o&ugrave; son esprit le conduisait de n'avoir d'autre ma&icirc;tre que
+lui et &agrave; laisser la femme en marge de sa pens&eacute;e.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Une conception de la vie enti&egrave;rement consacr&eacute;e &agrave; la r&eacute;alisation ferme
+d'un grand projet oblige &agrave; ne consid&eacute;rer les autres sentiments que comme
+des plaisirs et &agrave; faire que ceux qui les &eacute;veillent en nous ne puissent
+devenir rien autre que des amuseurs.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>L'esprit pourra s'ing&eacute;nier &agrave; concevoir une vie calme o&ugrave; les droits de
+la famille et ceux du devoir seront Justement &eacute;quilibr&eacute;s, il semble
+qu'une loi conduise les &ecirc;tres sup&eacute;rieurs &agrave; ne pas s'y arr&ecirc;ter. Ce calme,
+ce repos familial, dans les minutes de d&eacute;couragement ils regretteront
+parfois de ne l'avoir pas, mais ne s'attarderont pas &agrave; cette m&eacute;lancolie.
+Immenses dans leurs besoins, ceux dont Napol&eacute;on a dit qu'ils &laquo;&eacute;taient
+des m&eacute;t&eacute;ores, destin&eacute;s &agrave; br&ucirc;ler pour &eacute;clairer la terre&raquo; seront toujours
+conduits &agrave; s'&eacute;prendre de et qui sera &eacute;nervant comme le sont la lutte et
+les courtisanes, si l'on veut entendre par courtisanes non les filles
+simplement v&eacute;nales, mais celles qui trouvent &agrave; se donner une
+satisfaction aussi vive que le guerrier &agrave; vaincre. Pour les courtisanes
+et pour le conqu&eacute;rant, l'or et le butin de l'amant et du vaincu sont les
+cons&eacute;quences naturelles, mais n&eacute;gligeables d'une action puissante.
+Offrandes et ran&ccedil;ons seront vite dissip&eacute;es, et de tant de fortunes et de
+conqu&ecirc;tes il ne ratera pour l'&eacute;ternit&eacute; que l'immense souvenir de leur
+agitation.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Napol&eacute;on cherchant la femme qui l'aimera pour lui-m&ecirc;me et n'aimera que
+lui, l'artiste demandant celle qui le comprendra et lui construira un
+foyer, ob&eacute;issent &agrave; une loi de contraste de notre esprit. En donnant
+Jos&eacute;phine &agrave; Napol&eacute;on et d'ardentes ma&icirc;tresses aux chastes artistes, les
+lois surnaturelles semblent avoir voulu surchauffer les sens de ces
+h&eacute;ros pour mieux lib&eacute;rer leurs esprits en leur pr&eacute;sentant de la femme
+une id&eacute;e physique et irrespectueuse &agrave; laquelle ils ne sauraient
+s'attacher sans d&eacute;choir.</i></strong></p>
+
+<p class="sign">Abel GRI.</p>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<p>&nbsp;</p>
+<p>&nbsp;</p>
+<h2><a name="TENDRESSES_IMPERIALES" id="TENDRESSES_IMPERIALES"></a>TENDRESSES IMP&Eacute;RIALES</h2>
+<p>&nbsp;</p>
+<p>&nbsp;</p>
+<hr style="width: 65%;" />
+
+<h3><a name="LETTRES_DE_BONAPARTE_1" id="LETTRES_DE_BONAPARTE_1"></a>LETTRES DU G&Eacute;N&Eacute;RAL EN CHEF</h3>
+
+<p class="center">DE L'ARM&Eacute;E D'ITALIE</p>
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_I" id="LETTRE_I"></a>LETTRE I</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Marmirolo, le 29 messidor, 6 heures du soir
+(17 Juillet 1796).</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre, mon adorable amie; elle a rempli mon c&oelig;ur de joie.
+Je te suis oblig&eacute; de la peine que tu as prise de me donner de tes
+nouvelles; ta sant&eacute; doit &ecirc;tre meilleure aujourd'hui; je suis s&ucirc;r que tu
+es gu&eacute;rie. Je t'engage fort &agrave; monter &agrave; cheval, cela ne peut pas manquer
+de te faire du bien.</p>
+
+<p>Depuis que je t'ai quitt&eacute;e, j'ai toujours &eacute;t&eacute; triste. Mon bonheur est
+d'&ecirc;tre pr&egrave;s de toi. Sans cesse je repasse dans ma m&eacute;moire tes baisers,
+tes larmes, ton aimable jalousie, et les charmes de l'incomparable
+Jos&eacute;phine allument sans cesse une flamme vive et br&ucirc;lante dans mon c&oelig;ur
+et dans mes sens. Quand, libre de toute inqui&eacute;tude, de toute affaire,
+pourrai-je passer tous mes instants pr&egrave;s de toi, n'avoir qu'&agrave; t'aimer,
+et ne penser qu'au bonheur de te le dire et de te le prouver? Je
+t'enverrai ton cheval; mais j'esp&egrave;re que tu pourras me rejoindre. Je
+croyais t'aimer il y a quelques jours; mais, depuis que je t'ai vue, je
+sens que je t'aime mille fois plus encore. Depuis que je te connais, je
+t'adore tous les jours davantage: cela prouve combien la maxime de La
+Bruy&egrave;re, que <i>l'amour vient tout d'un coup</i>, est fausse. Tout, dans la
+nature, a un cours et diff&eacute;rents degr&eacute;s d'accroissement. Ah! je t'en
+prie, laisse-moi voir quelques-uns de tes d&eacute;fauts; sois moins belle,
+moins gracieuse, moins tendre, moins bonne surtout; surtout ne sois
+jamais jalouse, ne pleure jamais; tes larmes m'&ocirc;tent la raison, br&ucirc;lent
+mon sang. Crois bien qu'il n'est plus en mon pouvoir d'avoir une pens&eacute;e
+qui ne soit pas a toi, et une id&eacute;e qui ne te soit pas soumise.</p>
+
+<p>Repose-toi bien. R&eacute;tablis vite ta sant&eacute;. Viens me rejoindre; et, au
+moins, qu'avant de mourir, nous puissions dire: &laquo;Nous f&ucirc;mes tant de
+jours heureux!!&raquo;</p>
+
+<p>Millions de baisers et m&ecirc;me &agrave; Fortun&eacute;<a name="FNanchor_3_3" id="FNanchor_3_3"></a><a href="#Footnote_3_3" class="fnanchor">[3]</a>, en d&eacute;pit de sa m&eacute;chancet&eacute;.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_II" id="LETTRE_II"></a>LETTRE II</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Marmirolo, le 19 messidor, 9 heures apr&egrave;s-midi
+(18 juillet 1796).</p>
+
+
+<p>J'ai pass&eacute; toute la nuit sous les armes. J'aurais eu Mantoue par un coup
+hardi et heureux; mais les eaux du lac ont promptement baiss&eacute;, de sorte
+que ma colonne qui &eacute;tait embarqu&eacute;e n'a pu arriver. Ce soir, je
+recommence d'une autre mani&egrave;re, mais cela ne donnera pas des r&eacute;sultats
+aussi satisfaisants.</p>
+
+<p>Je re&ccedil;ois une lettre d'Eug&egrave;ne, que je t'envoie. Je te prie d'&eacute;crire de
+ma part &agrave; ces aimables enfants et de leur envoyer quelques bijoux.
+Assure-les bien que je les aime comme mes enfants. Ce qui est &agrave; toi ou &agrave;
+moi se confond tellement dans mon c&oelig;ur, qu'il n'y a aucune diff&eacute;rence.</p>
+
+<p>Je suis fort inquiet de savoir comment tu te portes, ce que tu fais.
+J'ai &eacute;t&eacute; dans le village de Virgile, sur les bords du lac, au clair
+argentin de la lune, et pas un instant sans songer &agrave; Jos&eacute;phine!</p>
+
+<p>L'ennemi a fait le 28 une sortie g&eacute;n&eacute;rale; il nous a tu&eacute; ou bless&eacute; deux
+cents hommes, il en a perdu cinq cents en rentrant avec pr&eacute;cipitation.</p>
+
+<p>Je me porte bien. Je suis tout &agrave; Jos&eacute;phine, et je n'ai de plaisir ni de
+bonheur que dans sa soci&eacute;t&eacute;.</p>
+
+<p>Trois r&eacute;giments napolitains sont arriv&eacute;s &agrave; Brescia; ils se sont s&eacute;par&eacute;s
+de l'arm&eacute;e autrichienne, en cons&eacute;quence de la convention que j'ai
+conclue avec M. Pignatelli.</p>
+
+<p>J'ai perdu ma tabati&egrave;re; je te prie de m'en choisir une un peu plate, et
+d'y faire &eacute;crire quelque chose dessus, avec tes cheveux.</p>
+
+<p>Mille baisers aussi br&ucirc;lants que tu es froide. Amour sans bornes et
+fid&eacute;lit&eacute; &agrave; toute &eacute;preuve. Avant que Joseph<a name="FNanchor_4_4" id="FNanchor_4_4"></a><a href="#Footnote_4_4" class="fnanchor">[4]</a> parte, je d&eacute;sire lui
+parler.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_III" id="LETTRE_III"></a>LETTRE III</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Marmirolo, 1<sup>er</sup> thermidor an <span class="smcap">iv</span> (19 juillet 1790).</p>
+
+
+<p>Il y a deux jours que je suis sans lettres de toi. Voil&agrave; trente fois
+aujourd'hui que je me suis fait cette observation, tu sens que cela est
+bien triste; tu ne peux pas douter cependant de la tendre et unique
+sollicitude que tu m'inspires.</p>
+
+<p>Nous avons attaqu&eacute; hier Mantoue. Nous l'avons chauff&eacute;e avec deux
+batteries &agrave; boulets rouges et des mortiers. Toute la nuit cette
+mis&eacute;rable ville a br&ucirc;l&eacute;. Ce spectacle &eacute;tait horrible et imposant. Nous
+nous sommes empar&eacute;s de plusieurs ouvrages ext&eacute;rieurs, nous ouvrons la
+tranch&eacute;e cette nuit. Je vais partir pour Castiglione demain avec le
+quartier g&eacute;n&eacute;ral, et je compte y coucher.</p>
+
+<p>J'ai re&ccedil;u un courrier de Paris. Il y avait deux lettres pour toi; je les
+ai lues. Cependant, bien que cette action me paraisse toute simple et
+que tu m'en aies donn&eacute; la permission l'autre jour, je crains que cela ne
+te f&acirc;che, et cela m'afflige bien. J'aurais voulu les recacheter: fi! ce
+serait une horreur. Si je suis coupable, je te demande gr&acirc;ce; je te jure
+que ce n'est pas par jalousie; non, certes, j'ai de mon adorable amie
+une trop grande opinion pour cela. Je voudrais que tu me donnasses
+permission enti&egrave;re de lire tes lettres; avec cela il n'y aurait plus de
+remords ni de crainte.</p>
+
+<p>Achille arrive en courrier de Milan; pas de lettres de mon adorable
+amie! Adieu, mon unique bien. Quand pourras-tu venir me rejoindre? Je
+viendrai te prendre moi-m&ecirc;me &agrave; Milan.</p>
+
+<p>Mille baisers aussi br&ucirc;lants que mon c&oelig;ur, aussi purs que toi.</p>
+
+<p>Je fais appeler le courrier; il me dit qu'il est pass&eacute; chez toi, et que
+tu lui as dit que tu n'avais rien &agrave; lui ordonner. Fi! m&eacute;chante, laide,
+cruelle, tyranne, petit joli monstre! Tu te ris de mes menaces, de mes
+sottises; ah! si je pouvais, tu sais bien, t'enfermer dans mon c&oelig;ur, je
+t'y mettrais en prison.</p>
+
+<p>Apprends-moi que tu es gaie, bien portante et bien tendre.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_IV" id="LETTRE_IV"></a>LETTRE IV</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Castiglione, le 9 thermidor an <span class="smcap">iv</span>, 8 heures du matin
+(21 juillet 1796).</p>
+
+
+<p>J'esp&egrave;re qu'en arrivant ce soir je recevrai une de tes lettres. Tu sais,
+ma ch&egrave;re Jos&eacute;phine, le plaisir qu'elles me font, et je suis s&ucirc;r que tu
+te plais &agrave; les &eacute;crire. Je partirai cette nuit pour Peschiera, pour les
+montagnes de..., pour V&eacute;rone et de l&agrave; j'irai &agrave; Mantoue et peut-&ecirc;tre &agrave;
+Milan, recevoir un baiser, puisque tu m'assures qu'ils ne sont pas
+glac&eacute;s; j'esp&egrave;re que tu seras parfaitement r&eacute;tablie alors, et que tu
+pourras m'accompagner &agrave; mon quartier g&eacute;n&eacute;ral pour ne plus me quitter.
+N'es-tu pas l'&acirc;me de ma vie et le sentiment de mon c&oelig;ur?</p>
+
+<p>Tes prot&eacute;g&eacute;s sont un peu vifs, ils sentent l'ardent. Combien je leur
+suis oblig&eacute; de faire en eux quelque chose qui te soit agr&eacute;able. Ils se
+rendront &agrave; Milan. Il faut en tout un peu de patience.</p>
+
+<p>Adieu, belle et bonne, toute non pareille, toute divine; mille baisers
+amoureux.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_V" id="LETTRE_V"></a>LETTRE V</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Castiglione, 4 thermidor an <span class="smcap">iv</span> (22 juillet 1796).</p>
+
+
+<p>Les besoins de l'arm&eacute;e exigent ma pr&eacute;sence dans ces environs; il est
+impossible que je puisse m'&eacute;loigner jusqu'&agrave; venir &agrave; Milan; il me
+faudrait cinq &agrave; six jours et il peut arriver pendant ce temps-l&agrave; des
+mouvements o&ugrave; ma pr&eacute;sence pourrait &ecirc;tre urgente ici.</p>
+
+<p>Tu m'assures que ta sant&eacute; est bonne; je te prie en cons&eacute;quence de venir
+&agrave; Brescia. J'envoie &agrave; l'heure m&ecirc;me Murat pour t'y pr&eacute;parer un logement
+dans la ville, comme tu le d&eacute;sires.</p>
+
+<p>Je crois que tu feras bien d'aller coucher le 6 &agrave; Cassano, en partant
+fort tard de Milan, et de venir le 7 &agrave; Brescia, o&ugrave; le plus tendre des
+amants t'attend. Je suis d&eacute;sesp&eacute;r&eacute; que tu puisses croire, ma bonne amie,
+que mon c&oelig;ur puisse s'ouvrir &agrave; d'autres qu'&agrave; toi; il t'appartient par
+droit de conqu&ecirc;te et cette conqu&ecirc;te sera solide, et &eacute;ternelle. Je ne
+sais pourquoi tu me parles de M<sup>me</sup> Te..., dont je me soucie fort peu,
+ainsi que des femmes de Brescia. Quant &agrave; tes lettres qu'il te f&acirc;che que
+j'ouvre, celle-ci sera la derni&egrave;re; ta lettre n'&eacute;tait pas arriv&eacute;e.</p>
+
+<p>Adieu, ma tendre amie, donne-moi souvent de tes nouvelles. Viens
+promptement me joindre et sois heureuse et sans inqui&eacute;tude; tout va
+bien, et mon c&oelig;ur est &agrave; toi pour la vie.</p>
+
+<p>Aie soin de rendre &agrave; l'adjudant g&eacute;n&eacute;ral Miollis la bo&icirc;te de m&eacute;dailles
+qu'il m'&eacute;crit t'avoir remise. Les hommes sont si mauvaise langue et si
+m&eacute;chants qu'il faut se mettre en r&egrave;gle sur tout.</p>
+
+<p>Sant&eacute;, amour et prompte arriv&eacute;e &agrave; Brescia.</p>
+
+<p>J'ai &agrave; Milan une voiture &agrave; la fois de ville et de campagne; tu te
+serviras de celle-l&agrave; pour venir. Porte avec toi ton argenterie et une
+partie des objets qui te sont n&eacute;cessaires. Voyage &agrave; petites journ&eacute;es et
+pendant le frais, afin de ne pas te fatiguer. La troupe ne met que trois
+jours pour se rendre &agrave; Brescia. Il y a, en poste, pour quatorze heures
+de chemin. Je t'invite &agrave; coucher le 6 &agrave; Cassano; je viendrai &agrave; ta
+rencontre le 7, le plus loin possible.</p>
+
+<p>Adieu, ma Jos&eacute;phine. Mille tendres baisers.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_VI" id="LETTRE_VI"></a>LETTRE VI</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Brescia, le 13 fructidor an <span class="smcap">iv</span> (10 ao&ucirc;t 1796).</p>
+
+
+<p>J'arrive, mon ador&eacute;e amie, ma premi&egrave;re pens&eacute;e est de t'&eacute;crire. Ta sant&eacute;
+et ton image ne sont pas sorties un instant de ma m&eacute;moire pendant toute
+la route. Je ne serai tranquille que lorsque j'aurai re&ccedil;u des lettres de
+toi. J'en attends avec impatience. Il n'est pas possible que tu te
+peignes mon inqui&eacute;tude. Je t'ai laiss&eacute;e triste, chagrine et demi-malade.
+Si l'amour le plus profond et le plus tendre pouvait te rendre heureuse,
+tu devrais l'&ecirc;tre.... Je suis accabl&eacute; d'affaires.</p>
+
+<p>Adieu, ma douce Jos&eacute;phine; aime-moi, porte-toi bien et pense souvent,
+souvent &agrave; moi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_VII" id="LETTRE_VII"></a>LETTRE VII</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Brescia, le 14 fructidor an <span class="smcap">iv</span> (31 ao&ucirc;t).</p>
+
+
+<p>Je pars &agrave; l'instant pour V&eacute;rone. J'avais esp&eacute;r&eacute; recevoir une lettre de
+toi; cela me met dans une inqui&eacute;tude affreuse. Tu &eacute;tais un peu malade
+lors de mon d&eacute;part; je t'en prie, ne me laisse pas dans une pareille
+inqui&eacute;tude. Tu m'avais promis plus d'exactitude; ta langue &eacute;tait
+cependant bien d'accord alors avec ton c&oelig;ur... Toi, &agrave; qui la nature a
+donn&eacute; douceur, am&eacute;nit&eacute; et tout ce qui pla&icirc;t, comment peux-tu oublier
+celui qui t'aime avec tant de chaleur? Trois jours sans lettres de toi;
+je t'ai cependant &eacute;crit plusieurs fois. L'absence est horrible, les
+nuits sont longues, ennuyeuses et fades; la journ&eacute;e est monotone.</p>
+
+<p>Aujourd'hui, seul avec les pens&eacute;es, les travaux, les &eacute;critures, les
+hommes et leurs fastueux projets, je n'ai pas m&ecirc;me un billet de toi que
+je puisse presser contre mon c&oelig;ur.</p>
+
+<p>Le quartier g&eacute;n&eacute;ral est parti; je pars dans une heure. J'ai re&ccedil;u cette
+nuit un expr&egrave;s de Paris; il n'y avait pour toi que la lettre ci-jointe
+qui te fera plaisir.</p>
+
+<p>Pense &agrave; moi, vis pour moi, sois souvent avec ton bien-aim&eacute; et crois
+qu'il n'est pour lui qu'un seul malheur qui l'effraie, ce serait de
+n'&ecirc;tre plus aim&eacute; de sa Jos&eacute;phine. Mille baisers bien doux, bien tendres,
+bien exclusifs.</p>
+
+<p>Fais partir de suite M. Monclas pour V&eacute;rone; je le placerai. Il faut
+qu'il soit arriv&eacute; avant le 18.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_VIII" id="LETTRE_VIII"></a>LETTRE VIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Ala, le 17 fructidor an <span class="smcap">iv</span> (3 septembre 1796).</p>
+
+
+<p>Nous sommes en pleine campagne, mon adorable amie; nous avons culbut&eacute;
+les postes ennemis; nous leur avons pris huit ou dix chevaux avec un
+pareil nombre de cavaliers. La troupe est tr&egrave;s gaie et bien dispos&eacute;e.
+J'esp&egrave;re que nous ferons de bonnes affaires et que nous entrerons dans
+Trente le 10.</p>
+
+<p>Point de lettres de toi; cela m'inqui&egrave;te vraiment; l'on m'assure
+cependant que tu te portes bien et que m&ecirc;me tu as &eacute;t&eacute; te promener au lac
+de C&ocirc;me. J'attends tous les jours et avec impatience le courrier o&ugrave; tu
+m'apprendras de tes nouvelles; tu sais combien elles me sont ch&egrave;res. Je
+ne vis pas loin de toi; le bonheur de la vie est pr&egrave;s de ma douce
+Jos&eacute;phine. Pense &agrave; moi! &Eacute;cris-moi souvent, bien souvent; c'est le seul
+rem&egrave;de &agrave; l'absence; elle est cruelle, mais sera, j'esp&egrave;re, momentan&eacute;e.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_IX" id="LETTRE_IX"></a>LETTRE IX</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Montebello, le 24 fructidor an <span class="smcap">iv</span>, &agrave; midi
+(10 septembre 1796).</p>
+
+
+<p>L'ennemi a perdu, ma ch&egrave;re amie, dix-huit mille hommes prisonniers; le
+reste est tu&eacute; ou bless&eacute;. Wurmser, avec une colonne de quinze cents
+chevaux et cinq mille hommes d'infanterie, n'a plus d'autre ressource
+que de se jeter dans Mantoue.</p>
+
+<p>Jamais nous n'avons eu de succ&egrave;s aussi constants et aussi grands.
+L'Italie, le Frioul, le Tyrol sont assur&eacute;s &agrave; la R&eacute;publique. Il faut que
+l'empereur cr&eacute;e une seconde arm&eacute;e; artillerie, &eacute;quipages de pont,
+bagages, tout est pris.</p>
+
+<p>Sous peu de jours nous nous verrons; c'est la plus douce r&eacute;compense de
+mes fatigues et de mes peines.</p>
+
+<p>Mille baisers ardents et bien amoureux.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_X" id="LETTRE_X"></a>LETTRE X</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Ronco, le 26 fructidor an <span class="smcap">iv</span>, &agrave; 10 heures du matin
+(12 septembre 1706).</p>
+
+
+<p>Je suis ici, ma ch&egrave;re Jos&eacute;phine, depuis deux jours, mal couch&eacute;, mal
+nourri et bien contrari&eacute; d'&ecirc;tre loin de toi.</p>
+
+<p>Wurmser est cern&eacute;; il a avec lui trois mille hommes de cavalerie et cinq
+mille hommes d'infanterie. Il est &agrave; Porto-Legagno; il cherche &agrave; se
+retirer &agrave; Mantoue; mais cela lui devient d&eacute;sormais impossible. D&egrave;s
+l'instant que cette affaire sera termin&eacute;e, je serai dans tes bras.</p>
+
+<p>Je t'embrasse un million de fois.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XI" id="LETTRE_XI"></a>LETTRE XI</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">V&eacute;rone, premier Jour compl&eacute;mentaire an <span class="smcap">iv</span>
+(le 17 septembre 1796).</p>
+
+
+<p>Je t'&eacute;cris, ma bonne amie, bien souvent, et toi peu. Tu es une m&eacute;chante
+et une laide, bien laide, autant que tu es l&eacute;g&egrave;re. Cela est perfide,
+tromper un pauvre mari, un tendre amant! Doit-il perdre ses droits parce
+qu'il est loin, charg&eacute; de besogne, de fatigue et de peine? Sans sa
+Jos&eacute;phine, sans l'assurance de son amour, que lui reste-t-il sur la
+terre? Qu'y ferait-il?</p>
+
+<p>Nous avons eu hier une affaire tr&egrave;s sanglante; l'ennemi a perdu beaucoup
+de monde et a &eacute;t&eacute; compl&egrave;tement battu. Nous lui avons pris le faubourg de
+Mantoue.</p>
+
+<p>Adieu, adorable Jos&eacute;phine; une de ces nuits, les portes s'ouvriront avec
+fracas: comme un jaloux, et me voil&agrave; dans tes bras.</p>
+
+<p>Mille baisers amoureux.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XII" id="LETTRE_XII"></a>LETTRE XII</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">Mod&egrave;ne, le 23 vend&eacute;miaire an <span class="smcap">v</span>, &agrave; 9 heures du soir.
+(17 octobre 1796).</p>
+
+
+<p>J'ai &eacute;t&eacute; avant-hier toute la journ&eacute;e en campagne. J'ai gard&eacute; hier le
+lit. La fi&egrave;vre et un violent mal de t&ecirc;te, tout cela m'a emp&ecirc;ch&eacute; d'&eacute;crire
+&agrave; mon adorable amie; mais j'ai re&ccedil;u ses lettres; je les ai press&eacute;es
+contre mon c&oelig;ur et mes l&egrave;vres, et la douleur de l'absence, cent milles
+d'&eacute;loignement, ont disparu. Dans ce moment je t'ai vue pr&egrave;s de moi, non
+capricieuse et f&acirc;ch&eacute;e, mais douce, tendre, avec cette onction de bont&eacute;
+qui est exclusivement le partage de ma Jos&eacute;phine. C'&eacute;tait un r&ecirc;ve; juge
+si cela m'a gu&eacute;ri de la fi&egrave;vre. Tes lettres sont froides comme cinquante
+ans, elles ressemblent &agrave; quinze ans de mariage. On y voit l'amiti&eacute; et
+les sentiments de cet hiver de la vie. Fi! Jos&eacute;phine!... C'est bien
+m&eacute;chant, bien mauvais, bien tra&icirc;tre &agrave; vous. Que vous reste-t-il pour me
+rendre bien &agrave; plaindre? Ne plus m'aimer? Eh! c'est d&eacute;j&agrave; fait. Me ha&iuml;r?
+Eh bien! je le souhaite, tout avilit hors la haine; mais l'indiff&eacute;rence
+au pouls de marbre, &agrave; l'&oelig;il fixe, &agrave; la d&eacute;marche monotone!...</p>
+
+<p>Mille, mille baisers bien tendres, comme mon c&oelig;ur.</p>
+
+<p>Je me porte un peu mieux, je pars demain. Les Anglais &eacute;vacuent la
+M&eacute;diterran&eacute;e. La Corse est &agrave; nous. Bonne nouvelle pour la France et pour
+l'arm&eacute;e.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XIII" id="LETTRE_XIII"></a>LETTRE XIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">V&eacute;rone, le 10 brumaire an <span class="smcap">v</span> (9 novembre 1790).</p>
+
+
+<p>Je suis arriv&eacute; depuis avant-hier &agrave; V&eacute;rone, ma bonne amie. Quoique
+fatigu&eacute;, je suis bien portant, bien affair&eacute; et je t'aime toujours &agrave; la
+passion. Je monte &agrave; cheval.</p>
+
+<p>Je t'embrasse mille fois.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte.</span></p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XIV" id="LETTRE_XIV"></a>LETTRE XIV</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">V&eacute;rone, le 3 frimaire an <span class="smcap">v</span> (13 novembre 1796).</p>
+
+
+<p>Je ne t'aime plus du tout; au contraire, je te d&eacute;teste. Tu es une
+vilaine, bien gauche, bien b&ecirc;te, bien cendrillon. Tu ne m'&eacute;cris pas du
+tout, tu n'aimes pas ton mari; tu sais le plaisir que tes lettres lui
+font, et tu ne lui &eacute;cris pas six lignes jet&eacute;es au hasard.</p>
+
+<p>Que faites-vous donc toute la journ&eacute;e, madame? Quelle affaire si
+importante vous &ocirc;te le temps d'&eacute;crire &agrave; votre bien bon amant? Quelle
+affection &eacute;touffe et met de c&ocirc;t&eacute; l'amour, le tendre et constant amour
+que vous lui avez promis? Quel peut &ecirc;tre ce merveilleux, ce nouvel amant
+qui absorbe tous vos instants, tyrannise vos journ&eacute;es et vous emp&ecirc;che de
+vous occuper de votre mari? Jos&eacute;phine, prenez-y garde, une belle nuit
+les portes enfonc&eacute;es et me voil&agrave;.</p>
+
+<p>En v&eacute;rit&eacute;, je suis inquiet, ma bonne amie, de ne pas recevoir de tes
+nouvelles; &eacute;cris-moi vite quatre pages et de ces aimables choses qui
+remplissent mon c&oelig;ur de sentiment et de plaisir.</p>
+
+<p>J'esp&egrave;re qu'avant peu je te serrerai dans mes bras, et je te couvrirai
+d'un million de baisers br&ucirc;lants comme sous l'&eacute;quateur.</p>
+
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XV" id="LETTRE_XV"></a>LETTRE XV</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Milan.</h4>
+
+<p class="right">V&eacute;rone, le 4 frimaire an <span class="smcap">v</span> (24 novembre 1796).</p>
+
+
+<p>J'esp&egrave;re bient&ocirc;t, ma douce amie, &ecirc;tre dans tes bras. Je t'aime &agrave; la
+fureur. J'&eacute;cris &agrave; Paris par ce courrier. Tout va bien. Wurmser a &eacute;t&eacute;
+battu hier sous Mantoue. Il ne manque &agrave; ton mari que l'amour de
+Jos&eacute;phine pour &ecirc;tre heureux.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XVI" id="LETTRE_XVI"></a>LETTRE XVI</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; G&ecirc;nes.</h4>
+
+<p class="right">Milan, le 7 frimaire an <span class="smcap">v</span>, &agrave; trois heures
+apr&egrave;s-midi (27 novembre 1796).</p>
+
+
+<p>J'arrive &agrave; Milan, je me pr&eacute;cipite dans ton appartement, j'ai tout quitt&eacute;
+pour te voir, te presser dans mes bras;... tu n'y &eacute;tais pas: tu cours
+les villes avec des f&ecirc;tes; tu t'&eacute;loignes de moi lorsque j'arrive, tu ne
+te soucies plus de ton cher Napol&eacute;on. Un caprice te l'a fait aimer,
+l'inconstance te le rend indiff&eacute;rent.</p>
+
+<p>Accoutum&eacute; aux dangers, je sais le rem&egrave;de aux ennuis et aux maux de la
+vie. Le malheur que j'&eacute;prouve est incalculable; j'avais droit de n'y pas
+compter.</p>
+
+<p>Je serai ici jusqu'au 9 dans la journ&eacute;e. Ne te d&eacute;range pas; cours les
+plaisirs; le bonheur est fait pour toi. Le monde entier est trop heureux
+s'il peut te plaire, et ton mari seul est bien, bien malheureux.</p>
+
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XVII" id="LETTRE_XVII"></a>LETTRE XVII</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; G&ecirc;nes.</h4>
+
+<p class="right">Milan, le 8 frimaire an <span class="smcap">v</span>, 8 heures du soir
+(28 novembre 1796).</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois le courrier que Berthier avait exp&eacute;di&eacute; &agrave; G&ecirc;nes. Tu n'as pas eu
+le temps de m'&eacute;crire, je le sens facilement. Environn&eacute;e de plaisirs et
+de jeux, tu aurais tort de me faire le moindre sacrifice.</p>
+
+<p>Berthier a bien voulu me montrer la lettre que tu lui as &eacute;crite. Mon
+intention n'est pas que tu d&eacute;ranges rien &agrave; tes calculs, ni aux parties
+de plaisir qui te sont offertes; je n'en vaux pas la peine et le bonheur
+ou le malheur d'un homme que tu n'aimes pas n'a pas le droit
+d'int&eacute;resser.</p>
+
+<p>Pour moi, t'aimer seule, te rendre heureuse, ne rien faire qui puisse te
+contrarier, voil&agrave; le destin et le but de ma vie.</p>
+
+<p>Sois heureuse, ne me reproche rien, ne t'int&eacute;resse pas &agrave; la f&eacute;licit&eacute;
+d'un homme qui ne vit que de ta vie, ne jouit que de tes plaisirs et de
+ton bonheur. Quand j'exige de toi un bonheur pareil au mien, j'ai tort:
+pourquoi vouloir que la dentelle p&egrave;se autant que l'or? Quand je te
+sacrifie tous mes d&eacute;sirs, toutes mes pens&eacute;es, tous les instants de ma
+vie, j'ob&eacute;is &agrave; l'ascendant que tes charmes, ton caract&egrave;re et toute ta
+personne ont su prendre sur mon malheureux c&oelig;ur. J'ai tort, si la
+nature ne m'a pas donn&eacute; les attraits pour te captiver; mais ce que je
+m&eacute;rite de la part de Jos&eacute;phine ce sont des &eacute;gards, de l'estime, car je
+l'aime &agrave; la fureur et uniquement.</p>
+
+<p>Adieu, femme adorable; adieu, ma Jos&eacute;phine. Puisse le sort concentrer
+dans mon c&oelig;ur tous les chagrins et toutes les peines, mais qu'il donne
+&agrave; ma Jos&eacute;phine des jours prosp&egrave;res et heureux. Qui le m&eacute;rita plus
+qu'elle? Quand il sera constat&eacute; qu'elle ne peut plus aimer, je
+renfermerai ma douleur profonde, et je me contenterai de pouvoir lui
+&ecirc;tre utile et bon &agrave; quelque chose.</p>
+
+<p>Je rouvre ma lettre pour te donner un baiser... Ah! Jos&eacute;phine!...
+Jos&eacute;phine!...</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XVIII" id="LETTRE_XVIII"></a>LETTRE XVIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Bologne.</h4>
+
+<p class="right">Le 28 pluvi&ocirc;se an <span class="smcap">v</span> (16 f&eacute;vrier 1797).</p>
+
+
+<p>Tu es triste, tu es malade, tu ne m'&eacute;cris plus, tu veux t'en aller &agrave;
+Paris. N'aimerais-tu plus ton ami? Cette id&eacute;e me rend malheureux. Ma
+douce amie, la vie est pour moi insupportable depuis que je suis
+instruit de ta tristesse.</p>
+
+<p>Je m'empresse de t'envoyer Moscati, afin qu'il puisse te soigner. Ma
+sant&eacute; est un peu faible; mon rhume dure toujours. Je te prie de te
+m&eacute;nager, de m'aimer autant que je t'aime, et de m'&eacute;crire tous les jours.
+Mon inqui&eacute;tude est sans &eacute;gale.</p>
+
+<p>J'ai dit &agrave; Moscati de t'accompagner &agrave; Anc&ocirc;ne, si tu veux y venir. Je
+t'&eacute;crirai l&agrave; pour te faire savoir o&ugrave; je suis.</p>
+
+<p>Peut-&ecirc;tre ferai-je la paix avec le Pape et serai-je bient&ocirc;t pr&egrave;s de toi;
+c'est le v&oelig;u le plus ardent de mon &acirc;me.</p>
+
+<p>Je te donne cent baisers. Crois que rien n'&eacute;gale mon amour, si ce n'est
+mon inqui&eacute;tude. &Eacute;cris-moi tous les jours toi-m&ecirc;me. Adieu, tr&egrave;s ch&egrave;re
+amie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XIX" id="LETTRE_XIX"></a>LETTRE XIX</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Bologne.</h4>
+
+<p class="right">Tolentino, 1<sup>er</sup> vent&ocirc;se an <span class="smcap">v</span> (19 f&eacute;vrier 1797).</p>
+
+
+<p>La paix avec Rome vient d'&ecirc;tre sign&eacute;e. Bologne, Ferrare, la Romagne sont
+c&eacute;d&eacute;es &agrave; la R&eacute;publique. Le Pape nous donne 30 millions dans peu de temps
+et des objets d'art.</p>
+
+<p>Je pars demain matin pour Anc&ocirc;ne, et, de l&agrave;, pour Rimini, Ravenne et
+Bologne. Si ta sant&eacute; ta le permet, viens &agrave; Rimini ou Ravenne; mais
+m&eacute;nage-toi, je t'en conjure.</p>
+
+<p>Pas un mot de ta main, bon Dieu! qu'ai-je donc fait? Ne penser qu'&agrave; toi,
+n'aimer que Jos&eacute;phine, ne vivre que pour ma femme, ne jouir que du
+bonheur de mon amie, cela doit-il me m&eacute;riter de sa part un traitement si
+rigoureux? Mon amie, je t'en conjure, pense souvent &agrave; moi et &eacute;cris-moi
+tous les jours. Tu es malade ou tu ne m'aimes pas! Crois-tu donc que mon
+c&oelig;ur soit de marbre? Et mes peines t'int&eacute;ressent-elles si peu? Tu me
+conna&icirc;trais bien mal! Je ne le puis croire. Toi, &agrave; qui la nature a donn&eacute;
+l'esprit, la douceur et la beaut&eacute;, toi qui seule pouvais r&eacute;gner dans mon
+c&oelig;ur, toi qui sais trop, sans doute, l'empire absolu que tu as sur moi!</p>
+
+<p>&Eacute;cris-moi, pense &agrave; moi et aime-moi.</p>
+
+<p>Pour la vie tout &agrave; toi,</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRES_DE_BONAPARTE_2" id="LETTRES_DE_BONAPARTE_2"></a>LETTRES DE BONAPARTE</h2>
+
+<h3>PREMIER CONSUL</h3>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XX" id="LETTRE_XX"></a>LETTRE XX</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Le 26 florial an <span class="smcap">viii</span> (10 mai 1800)</p>
+
+
+<p>Je pars dans l'instant pour aller coucher &agrave; Saint-Maurice. Je n'ai point
+re&ccedil;u de lettres de toi, cela n'est pas bien; je t'ai &eacute;crit tous les
+courriers.</p>
+
+<p>Eug&egrave;ne doit arriver apr&egrave;s-demain. Je suis un peu enrhum&eacute;, mais cela ne
+sera rien.</p>
+
+<p>Mille choses tendres &agrave; toi, ma bonne petite Jos&eacute;phine, et &agrave; tout ce qui
+t'appartient.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXI" id="LETTRE_XXI"></a>LETTRE XXI</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Plombi&egrave;res.</h4>
+
+<p class="right">Paris, le 27.....an <span class="smcap">x</span> (1801).</p>
+
+
+<p>Il fait si mauvais temps ici que je suis rest&eacute; &agrave; Paris. Malmaison, sans
+toi, est trop triste. La f&ecirc;te a &eacute;t&eacute; belle, elle m'a un peu fatigu&eacute;. Le
+v&eacute;sicatoire que l'on m'a mis au bras me fait toujours souffrir beaucoup.</p>
+
+<p>J'ai re&ccedil;u pour toi, de Londres, des plantes que j'ai envoy&eacute;es &agrave; ton
+jardinier. S'il fait aussi mauvais &agrave; Plombi&egrave;res qu'ici, tu souffriras
+beaucoup des eaux.</p>
+
+<p>Mille choses aimables &agrave; maman et &agrave; Hortense.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXII" id="LETTRE_XXII"></a>LETTRE XXII</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Plombi&egrave;res.</h4>
+
+<p class="right">Malmaison, 30 prairial an <span class="smcap">xi</span> (10 juin 1803).</p>
+
+
+<p>Je n'ai pas encore re&ccedil;u de tes nouvelles; je pense cependant que tu as
+d&eacute;j&agrave; d&ucirc; commencer &agrave; prendre les eaux. Nous sommes ici un peu tristes,
+quoique l'aimable fille fasse les honneurs de la maison &agrave; merveille. Je
+me sens depuis deux jours l&eacute;g&egrave;rement tourment&eacute; de ma douleur. Le gros
+Eug&egrave;ne est arriv&eacute; hier au soir, il se porte &agrave; merveille.</p>
+
+<p>Je t'aime comme le premier jour, parce que tu es bonne et aimable
+par-dessus tout.</p>
+
+<p>Hortense m'a dit qu'elle t'&eacute;crivait souvent.</p>
+
+<p>Mille choses aimables, et un baiser d'amour. Tout &agrave; toi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXIII" id="LETTRE_XXIII"></a>LETTRE XXIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Plombi&egrave;res.</h4>
+
+<p class="right">Malmaison, 4 messidor an <span class="smcap">xi</span> (23 juin 1803).</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u ta lettre, ma bonne petite Jos&eacute;phine. Je vois avec peine que
+tu as souffert de la route; mais quelques jours de repos te feront du
+bien. Je suis assez bien portant. J'ai &eacute;t&eacute; hier &agrave; la chasse &agrave; Marly et
+je m'y suis bless&eacute; tr&egrave;s l&eacute;g&egrave;rement &agrave; un doigt en tirant un sanglier.</p>
+
+<p>Hortense se porte assez bien. Ton gros fils a &eacute;t&eacute; un peu malade, mais il
+va mieux. Je crois que ce soir ces dames jouent le <i>Barbier de S&eacute;ville</i>.
+Le temps est tr&egrave;s beau. Je te prie de croire que rien n'est plus vrai
+que les sentiments que j'ai pour ma petite Jos&eacute;phine.</p>
+
+<p>Tout &agrave; toi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXIV" id="LETTRE_XXIV"></a>LETTRE XXIV</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Plombi&egrave;res.</h4>
+
+<p class="right">Malmaison, le 3 messidor an <span class="smcap">xi</span> (27 juin 1803).</p>
+
+
+<p>Ta lettre, bonne petite femme, m'a appris que tu &eacute;tais incommod&eacute;e.
+Corvisart m'a dit que c'&eacute;tait un bon signe, que les bains te feraient
+l'effet d&eacute;sir&eacute; et qu'ils te mettraient dans un bon &eacute;tat. Cependant,
+savoir que tu es souffrante est une peine sensible pour mon c&oelig;ur.</p>
+
+<p>J'ai &eacute;t&eacute; voir hier la manufacture de S&egrave;vres et Saint-Cloud.</p>
+
+<p>Mille choses aimables pour tous.</p>
+
+<p>Pour la vie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXV" id="LETTRE_XXV"></a>LETTRE XXV</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Plombi&egrave;res.</h4>
+
+<p class="right">Malmaison, 12 messidor an <span class="smcap">xi</span> (1<sup>er</sup> juillet 1803).</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u ta lettre du 10 messidor. Tu ne me parles pas de ta sant&eacute; ni
+de l'effet des bains. Je vois que tu comptes &ecirc;tre de retour dans huit
+jours; cela fait grand plaisir &agrave; ton ami qui s'ennuie d'&ecirc;tre seul!...</p>
+
+<p>Tu dois avoir vu le g&eacute;n&eacute;ral Ney qui part pour Plombi&egrave;res: il se mariera
+&agrave; son retour.</p>
+
+<p>Hortense a jou&eacute; hier Rosine dans le <i>Barbier de S&eacute;ville</i> avec son
+intelligence ordinaire.</p>
+
+<p>Je te prie de croire que je t'aime et suis fort impatient de te revoir.
+Tout est triste ici sans toi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Bonaparte</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRES_DE_NAPOLEON" id="LETTRES_DE_NAPOLEON"></a>LETTRES DE NAPOL&Eacute;ON</h2>
+
+<h3>EMPEREUR</h3>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXVI" id="LETTRE_XXVI"></a>LETTRE XXVI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Aix-la-Chapelle.</h4>
+
+<p class="right">Boulogne, le 15 thermidor an <span class="smcap">xii</span>
+(3 ao&ucirc;t 1804).</p>
+
+
+<p>Mon amie, j'esp&egrave;re apprendre bient&ocirc;t que les eaux t'ont fait beaucoup de
+bien. Je suis pein&eacute; de toutes les contrari&eacute;t&eacute;s que tu as &eacute;prouv&eacute;es. Je
+d&eacute;sire que tu m'&eacute;crives souvent. Ma sant&eacute; est tr&egrave;s bonne, quoique un peu
+fatigu&eacute;e. Je serai sous peu de jours &agrave; Dunkerque, d'o&ugrave; je t'&eacute;crirai.</p>
+
+<p>Eug&egrave;ne est parti pour Blois.</p>
+
+<p>Je te couvre de baisers.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXVII" id="LETTRE_XXVII"></a>LETTRE XXVII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Aix-la-Chapelle.</h4>
+
+<p class="right">Calais, 18 thermidor an <span class="smcap">xii</span> (6 ao&ucirc;t 1804).</p>
+
+
+<p>Mon amie, je suis &agrave; Calais depuis minuit; je pense en partir ce soir
+pour Dunkerque. Je suis content de ce que je vois et assez bien de
+sant&eacute;. Je d&eacute;sire que les eaux te fassent autant de bien que m'en font le
+mouvement, la vue des camps et la mer.</p>
+
+<p>Eug&egrave;ne est parti pour Blois. Hortense se porte bien. Louis est &agrave;
+Plombi&egrave;res.</p>
+
+<p>Je d&eacute;sire beaucoup te voir. Tu es toujours n&eacute;cessaire &agrave; mon bonheur.
+Mille choses aimables chez toi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXVIII" id="LETTRE_XXVIII"></a>LETTRE XXVIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; Jos&eacute;phine, &agrave; Strasbourg.</h4>
+
+<p class="right">Louisbourg, 13 vend&eacute;miaire an <span class="smcap">xiv</span> (5 octobre 1805).</p>
+
+
+<p>Je pars &agrave; l'instant pour continuer ma marche. Tu seras, mon amie, cinq
+ou six jours sans avoir de mes nouvelles; ne t'en inqui&egrave;te pas, cela
+tient aux op&eacute;rations qui vont avoir lieu. Tout va bien, et comme je le
+pouvais esp&eacute;rer.</p>
+
+<p>J'ai assist&eacute; ici &agrave; une noce du fils de l'&eacute;lecteur avec une ni&egrave;ce du roi
+de Prusse. Je d&eacute;sire donner une corbeille de trente-six mille &agrave; quarante
+mille francs &agrave; la jeune princesse. Fais-la faire et envoie-la par un de
+mes chambellans &agrave; la nouvelle mari&eacute;e, lorsque ces chambellans viendront
+me rejoindre. Il faut que ce soit fait sur-le-champ.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie, je t'aime et t'embrasse.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXIX" id="LETTRE_XXIX"></a>LETTRE XXIX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Strasbourg.</h4>
+
+<p class="right">Augsbourg, le 1<sup>er</sup> brumaire an <span class="smcap">xiv</span> (23 octobre 1805).</p>
+
+
+<p>Les deux derni&egrave;res nuits m'ont bien repos&eacute;, et je vais partir demain
+pour Munich. Je mande M. Talleyrand et M. Maret pr&egrave;s de moi; je les
+verrai peu et je vais me rendre sur l'Inn pour attaquer l'Autriche au
+sein de ses &Eacute;tats h&eacute;r&eacute;ditaires. J'aurais bien d&eacute;sir&eacute; te voir, mais ne
+compte pas que je t'appelle, &agrave; moins qu'il n'y ait un armistice ou des
+quartiers d'hiver.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie, mille baisers. Mes compliments &agrave; ces dames.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXX" id="LETTRE_XXX"></a>LETTRE XXX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Strasbourg.</h4>
+
+<p class="right">Munich, le dimanche 5 brumaire an <span class="smcap">xiv</span> (27 octobre 1805).</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u par Lemarois ta lettre. J'ai vu avec peine que tu t'&eacute;tais trop
+inqui&eacute;t&eacute;e. L'on m'a donn&eacute; des d&eacute;tails qui m'ont prouv&eacute; toute la
+tendresse que tu me portes; mais il faut plus de force et de confiance.
+J'avais d'ailleurs pr&eacute;venu que je serais six jours sans l'&eacute;crire.</p>
+
+<p>J'attends demain l'&eacute;lecteur. &Agrave; midi je pars pour confirmer mon mouvement
+sur l'Inn. Ma sant&eacute; est assez bonne. Il ne faut pas penser &agrave; passer le
+Rhin avant quinze ou vingt jours. Il faut &ecirc;tre gaie, t'amuser, et
+esp&eacute;rer qu'avant la fin du mois nous nous verrons.</p>
+
+<p>Je m'avance contre l'arm&eacute;e russe. Dans quelques jours j'aurai pass&eacute;
+l'Inn.</p>
+
+<p>Adieu, ma bonne amie, mille choses aimables &agrave; Hortense, &agrave; Eug&egrave;ne et aux
+deux Napol&eacute;on.</p>
+
+<p>Garde la corbeille quelque temps encore.</p>
+
+<p>J'ai donn&eacute; hier aux dames de cette cour un concert. Le ma&icirc;tre de
+chapelle est un homme de m&eacute;rite.</p>
+
+<p>J'ai chass&eacute; &agrave; une faisanderie de l'&eacute;lecteur: tu vois que je ne suis pas
+si fatigu&eacute;.</p>
+
+<p>M. de Talleyrand est arriv&eacute;.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXXI" id="LETTRE_XXXI"></a>LETTRE XXXI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Strasbourg.</h4>
+
+<p class="right">Haag, le 11, &agrave; 10 heures du soir, brumaire an <span class="smcap">xiv</span>
+(3 novembre 1805).</p>
+
+
+<p>Je suis en grande marche; le temps est tr&egrave;s froid, la terre couverte
+d'un pied de neige. Cela est un peu rude. Il ne manque heureusement pas
+de bois; nous sommes ici toujours dans les for&ecirc;ts. Je me porte assez
+bien. Mes affaires vont d'une mani&egrave;re satisfaisante; mes ennemis doivent
+avoir plus de soucis que moi.</p>
+
+<p>Je d&eacute;sire avoir de tes nouvelles et apprendre que tu es sans inqui&eacute;tude.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie, je vais me coucher.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXXII" id="LETTRE_XXXII"></a>LETTRE XXXII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Strasbourg.</h4>
+
+<p class="right">Mardi, 14 brumaire an <span class="smcap">xiv</span> (5 novembre 1805).</p>
+
+
+<p>Je suis &agrave; Lintz. Le temps est beau. Nous sommes &agrave; vingt-huit lieues de
+Vienne. Les Russes ne tiennent pas; ils sont en grande retraite. La
+maison d'Autriche est fort embarrass&eacute;e; &agrave; Vienne, on &eacute;vacue tous les
+bagages de la cour. Il est probable que d'ici &agrave; cinq ou six jours il y
+aura du nouveau, je d&eacute;sire bien te revoir. Ma sant&eacute; est bonne.</p>
+
+<p>Je t'embrasse.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXXIII" id="LETTRE_XXXIII"></a>LETTRE XXXIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'imp&eacute;ratrice, &agrave; Strasbourg.</h4>
+
+<p class="right">Le 24 brumaire, &agrave; 9 heures du soir, an <span class="smcap">xiv</span>
+(15 novembre 1805).</p>
+
+
+<p>Je suis &agrave; Vienne depuis deux jours, ma bonne amie, un peu fatigu&eacute;. Je
+n'ai pas encore vu la ville de jour; je l'ai parcourue la nuit. Demain
+je re&ccedil;ois les notables et les corps. Presque toutes mes troupes sont au
+del&agrave; du Danube, &agrave; la poursuite des Russes.</p>
+
+<p>Adieu, ma Jos&eacute;phine; du moment que cela sera possible, je te ferai
+venir. Mille choses aimables pour toi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXXIV" id="LETTRE_XXXIV"></a>LETTRE XXXIV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Strasbourg.</h4>
+
+<p class="right">Vienne, 25 brumaire an <span class="smcap">xiv</span> (18 novembre 1805).</p>
+
+
+<p>J'&eacute;cris &agrave; M. d'Harville pour que tu partes et que tu te rendes &agrave; Bade,
+de l&agrave; &agrave; Stuttgard et de l&agrave; &agrave; Munich. Tu donneras, &agrave; Stuttgard, la
+corbeille &agrave; la princesse Paul. Il suffit qu'il y ait pour quinze mille &agrave;
+vingt mille francs; le restant sera pour faire des pr&eacute;sents, &agrave; Munich,
+aux filles de l'&eacute;lectrice de Bavi&egrave;re. Tout ce que tu as su pour M<sup>me</sup>
+de Serrent est d&eacute;finitivement arrang&eacute;. Porte de quoi faire des pr&eacute;sents
+aux dames et aux officiers qui seront de service pr&egrave;s de toi. Sois
+honn&ecirc;te, mais re&ccedil;ois tous les hommages: l'on te doit tout et tu ne dois
+rien que par honn&ecirc;tet&eacute;. L'&eacute;lectrice de Wurtemberg est fille du roi
+d'Angleterre, c'est une bonne femme, tu dois bien la traiter, mais
+cependant sans affectation.</p>
+
+<p>Je serai bien aise de te voir du moment que mes affaires me le
+permettront. Je pars pour mon avant-garde. Il fait un temps affreux, il
+neige beaucoup; du reste, toutes mes affaires vont bien.</p>
+
+<p>Adieu, ma bonne amie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXXV" id="LETTRE_XXXV"></a>LETTRE XXXV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Munich.</h4>
+
+<p class="right">Austerlitz, 14 frimaire an <span class="smcap">xiv</span>
+(4 d&eacute;cembre 1805).</p>
+
+
+<p>J'ai conclu une tr&ecirc;ve. Les Russes s'en vont. La bataille d'Austerlitz
+est la plus belle de toutes celles que j'ai donn&eacute;es: quarante-cinq
+drapeaux, plus de cent cinquante pi&egrave;ces de canon, les &eacute;tendards de la
+garde de Russie, vingt g&eacute;n&eacute;raux, trente mille prisonniers, plus de vingt
+mille tu&eacute;s; spectacle horrible!</p>
+
+<p>L'empereur Alexandre est au d&eacute;sespoir et s'en va en Russie. J'ai vu hier
+&agrave; mon bivouac l'empereur d'Allemagne; nous caus&acirc;mes deux heures; nous
+sommes convenus de faire vite la paix.</p>
+
+<p>Le temps n'est pas encore tr&egrave;s mauvais. Voil&agrave; enfin le repos rendu au
+continent, il faut esp&eacute;rer qu'il va l'&ecirc;tre au monde: les Anglais ne
+sauraient nous faire front.</p>
+
+<p>Je verrai avec bien du plaisir le moment qui me rapprochera de toi.</p>
+
+<p>Il court un petit mal d'yeux qui dure deux jours, je n'en ai pas encore
+&eacute;t&eacute; atteint.</p>
+
+<p>Adieu, ma bonne amie, je me porte assez bien et suis fort d&eacute;sireux de
+t'embrasser.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXXVI" id="LETTRE_XXXVI"></a>LETTRE XXXVI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'imp&eacute;ratrice, &agrave; Munich.</h4>
+
+<p class="right">Schoenbrunn, 29 frimaire an <span class="smcap">xiv</span> (20 d&eacute;cembre 1803).</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre du 25. J'apprends avec peine que tu es souffrante;
+ce n'est pas l&agrave; une bonne disposition pour faire cent lieues dans cette
+saison. Je ne sais ce que je ferai: je d&eacute;pends des &eacute;v&eacute;nements; je n'ai
+pas de volont&eacute;; j'attends tout de leur issue. Reste &agrave; Munich, amuse-toi;
+ce n'est pas difficile, lorsqu'on a tant de personnes aimables et dans
+un si beau pays. Je suis, moi, assez occup&eacute;. Dans quelques jours je
+serai d&eacute;cid&eacute;.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; mille choses aimantes et tendres.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXXVII" id="LETTRE_XXXVII"></a>LETTRE XXXVII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">G&eacute;ra, le 13, &agrave; 2 heures du matin, 1806.</p>
+
+
+<p>Je suis aujourd'hui &agrave; G&eacute;ra, ma bonne amie; mes affaires vont fort bien
+et tout comme je pouvais l'esp&eacute;rer. Avec l'aide de Dieu, en peu de jours
+cela aura pris un caract&egrave;re bien terrible, je crois, pour le pauvre roi
+de Prusse, que je plains personnellement, parce qu'il est bon. La reine
+est &agrave; Erfurt avec le roi. Si elle veut voir une bataille, elle aura ce
+cruel plaisir. Je me porte &agrave; merveille; j'ai d&eacute;j&agrave; engraiss&eacute; depuis mon
+d&eacute;part; cependant je fais, de ma personne, vingt et vingt-cinq lieues
+par jour, &agrave; cheval, en voiture, de toutes les mani&egrave;res. Je me couche &agrave;
+huit heures et suis lev&eacute; &agrave; minuit; je songe quelquefois que tu n'es pas
+encore couch&eacute;e.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXXVIII" id="LETTRE_XXXVIII"></a>LETTRE XXXVIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">1<sup>er</sup> novembre, 2 heures du matin, 1806.</p>
+
+
+<p>Talleyrand arrive et me dit, mon amie, que tu ne fais que pleurer. Que
+veux-tu donc? Tu as ta fille, tes petits-enfants, et de bonnes
+nouvelles; voil&agrave; bien des moyens d'&ecirc;tre contente et heureuse.</p>
+
+<p>Le temps est ici superbe; il n'a pas encore tomb&eacute; de toute la campagne
+une seule goutte d'eau. Je me porte fort bien, et tout va au mieux.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; j'ai re&ccedil;u une lettre de M. Napol&eacute;on; je ne crois pas
+qu'elle soit de lui, mais d'Hortense.</p>
+
+<p>Mille choses &agrave; tout le monde.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XXXIX" id="LETTRE_XXXIX"></a>LETTRE XXXIX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Le 6 novembre, &agrave; 9 heures du soir, 1806.</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u ta lettre o&ugrave; tu me parais f&acirc;ch&eacute;e du mal que je dis des femmes;
+il est vrai que je hais les femmes intrigantes au del&agrave; de tout. Je suis
+accoutum&eacute; &agrave; des femmes bonnes, douces et conciliantes; ce sont celles
+que j'aime. Si elles m'ont g&acirc;t&eacute;, ce n'est pas ma faute, mais la tienne.
+Au reste, tu verras que j'ai &eacute;t&eacute; fort bon pour une qui s'est montr&eacute;e
+sensible et bonne, M<sup>me</sup> d'Hatzfeld. Lorsque je lui montrai la lettre
+de son mari, elle me dit en sanglotant, avec une profonde sensibilit&eacute;,
+et na&iuml;vement: <i>Ah! c'est bien l&agrave; son &eacute;criture!</i> Lorsqu'elle lisait, son
+accent allait &agrave; l'&acirc;me; elle me fit peine. Je lui dis: <i>Eh bien! madame,
+jetez cette lettre au feu, je ne serai plus assez puissant pour faire
+punir votre mari.</i> Elle br&ucirc;la la lettre et me parut bien heureuse. Son
+mari est depuis fort tranquille: deux heures plus tard, il &eacute;tait perdu.
+Tu vois donc que j'aime les femmes bonnes, na&iuml;ves et douces; mais c'est
+que celles-l&agrave; seules te ressemblent.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie, je me porte bien.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XL" id="LETTRE_XL"></a>LETTRE XL</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Le 18 novembre 1806.</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre du 11 novembre. Je vois avec satisfaction que mes
+sentiments te font plaisir. Tu as tort de penser qu'ils puissent &ecirc;tre
+flatt&eacute;s; je t'ai parl&eacute; de toi comme je te vois. Je suis afflig&eacute; de
+penser que tu t'ennuies &agrave; Mayence. Si le voyage n'&eacute;tait pas si long, tu
+pourrais venir jusqu'ici, car il n'y a plus d'ennemis, ou il est au del&agrave;
+de la Vistule, c'est-&agrave;-dire &agrave; plus de cent vingt lieues d'ici.
+J'attendrai ce que tu en penses. Je serai bien aise aussi de voir M.
+Napol&eacute;on.</p>
+
+<p>Adieu, ma bonne amie.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+<p>J'ai ici encore trop d'affaires pour que je puisse retourner &agrave; Paris.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XLI" id="LETTRE_XLI"></a>LETTRE XLI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Le 22 novembre, &agrave; 10 heures du soir, 1806.</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre. Je suis f&acirc;ch&eacute; de te voir triste; tu n'as cependant
+que des raisons d'&ecirc;tre gaie. Tu as tort de montrer tant de bont&eacute; &agrave; des
+gens qui s'en montrent indignes. M<sup>me</sup> L... est une sotte, si b&ecirc;te que
+tu devrais la conna&icirc;tre et ne lui pr&ecirc;ter aucune attention. Sois
+contente, heureuse de mon amiti&eacute;, de tout ce que tu m'inspires. Je me
+d&eacute;ciderai dans quelques jours &agrave; t'appeler ici ou &agrave; t'envoyer &agrave; Paris.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; tu peux actuellement aller, si tu veux, &agrave; Darmstadt, &agrave;
+Francfort; cela te dissipera.</p>
+
+<p>Mille choses &agrave; Hortense.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XLII" id="LETTRE_XLII"></a>LETTRE XLII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Posen, le 2 d&eacute;cembre 1806.</p>
+
+
+<p>C'est aujourd'hui l'anniversaire d'Austerlitz. J'ai &eacute;t&eacute; &agrave; un bal de la
+ville. Il pleut. Je me porte bien. Je t'aime et te d&eacute;sire. Mes troupes
+sont &agrave; Varsovie. Il n'a pas encore fait froid. Toutes ces Polonaises
+sont Fran&ccedil;aises; mais il n'y a qu'une femme pour moi. La conna&icirc;trais-tu?
+Je te ferais bien son portrait, mais il faudrait trop le flatter pour
+que tu te reconnusses; cependant, &agrave; dire vrai, mon c&oelig;ur n'aurait que de
+bonnes choses &agrave; en dire. Ces nuits-ci sont longues, tout seul.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XLIII" id="LETTRE_XLIII"></a>LETTRE XLIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, 4 Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Le 3 d&eacute;cembre, &agrave; midi, 1806.</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre du 26 novembre, j'y vois deux choses: tu me dis que
+je ne lis pas tes lettres; cela est mal pens&eacute;. Je te sais mauvais gr&eacute;
+d'une si mauvaise opinion. Tu me dis que ce pourrait &ecirc;tre par quelque
+r&ecirc;ve de la nuit et tu ajoutes que tu n'es pas jalouse. Je me suis aper&ccedil;u
+depuis longtemps que les gens col&egrave;res soutiennent toujours qu'ils ne
+sont pas col&egrave;res, que ceux qui ont peur disent souvent qu'ils n'ont pas
+peur; tu es donc convaincue de jalousie: j'en suis enchant&eacute;! Du reste,
+tu as tort; je ne pense &agrave; rien moins et dans les d&eacute;serts de la Pologne
+l'on songe peu aux belles... J'ai eu hier un bal de la noblesse de la
+province d'assez belles femmes, assez riches, assez mal mises, quoique &agrave;
+la mode de Paris.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je me porte bien.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XLIV" id="LETTRE_XLIV"></a>LETTRE XLIV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Posen, le 3 d&eacute;cembre, &agrave; 6 heures du soir.</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre du 27 novembre, o&ugrave; je vois que ta petite t&ecirc;te s'est
+mont&eacute;e. Je me suis souvenu de ce vers:</p>
+
+<p class="center">D&eacute;sir de femme est un feu qui d&eacute;vore.</p>
+
+<p>Il faut cependant te calmer. Je t'ai &eacute;crit que j'&eacute;tais en Pologne, que
+lorsque les quartiers d'hiver seraient assis, tu pourrais venir; il faut
+donc attendre quelques jours. Plus on est grand et moins on doit avoir
+de volont&eacute;; l'on d&eacute;pend des &eacute;v&eacute;nements et des circonstances. Tu peux
+aller &agrave; Francfort et &agrave; Darmstadt. J'esp&egrave;re sous peu de temps t'appeler;
+mais il faut que les &eacute;v&eacute;nements le veuillent. La chaleur de ta lettre me
+fait voir que vous autres jolies femmes vous ne connaissez pas de
+barri&egrave;res; ce que vous voulez doit &ecirc;tre; mais moi, je me d&eacute;clare le plus
+esclave des hommes: mon ma&icirc;tre n'a pas d'entrailles, et ce ma&icirc;tre c'est
+la nature des choses.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; porte-toi bien. La personne dont j'ai voulu te parler
+est M<sup>me</sup> L... dont tout le monde dit bien du mal: l'on m'assure
+qu'elle &eacute;tait plus Prussienne que Fran&ccedil;aise. Je ne le crois pas; mais je
+la crois une sotte qui ne dit que des b&ecirc;tises.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XLV" id="LETTRE_XLV"></a>LETTRE XLV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Le 10 d&eacute;cembre, 5 heures du soir, 1806.</p>
+
+
+<p>Un officier m'apporte un tapis de ta part; il est un peu court et
+&eacute;troit; je ne t'en remercie pas moins. Je me porte assez bien. Le temps
+est fort variable. Mes affaires vont assez bien. Je t'aime et te d&eacute;sire
+beaucoup.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je t'&eacute;crirai de venir avec au moins autant de plaisir
+que tu voudras.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+<p>Un baiser &agrave; Hortense, &agrave; St&eacute;phanie et &agrave; Napol&eacute;on.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XLVI" id="LETTRE_XLVI"></a>LETTRE XLVI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Pultusk, le 31 d&eacute;cembre 1806.</p>
+
+
+<p>J'ai bien ri en recevant tes derni&egrave;res lettres. Tu te fais des belles de
+la Pologne une id&eacute;e qu'elles ne m&eacute;ritent pas. J'ai eu deux ou trois
+jours de plaisir d'entendre Pa&euml;r et deux chanteuses qui m'ont fait de
+tr&egrave;s bonne musique. J'ai re&ccedil;u ta lettre dans une mauvaise grange, ayant
+de la boue, du vent et de la paille pour tout lit. Je serai demain &agrave;
+Varsovie. Je crois que tout est fini pour cette ann&eacute;e. L'arm&eacute;e va entrer
+en quartiers d'hiver. Je hausse les &eacute;paules de la b&ecirc;tise de M<sup>me</sup> de
+L...; tu devrais cependant te f&acirc;cher et lui conseiller de n'&ecirc;tre pas si
+sotte. Cela perce dans le public et indigne bien des gens.</p>
+
+<p>Quant &agrave; moi, je m&eacute;prise l'ingratitude comme le plus vilain d&eacute;faut du
+c&oelig;ur. Je sais qu'au lieu de te consoler ils t'ont fait de la peine.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je me porte bien. Je ne pense pas que tu doives aller &agrave;
+Cassel; cela n'est pas convenable. Tu peux aller &agrave; Darmstadt.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XLVII" id="LETTRE_XLVII"></a>LETTRE XLVII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Varsovie, le 3 janvier 1807.</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u ta lettre, mon amie. Ta douleur me touche; mais il faut bien
+se soumettre aux &eacute;v&eacute;nements. Il y a trop de pays &agrave; traverser depuis
+Mayence jusqu'&agrave; Varsovie; il faut donc que les &eacute;v&eacute;nements me permettent
+de me rendre &agrave; Berlin pour que je t'&eacute;crive d'y venir. Cependant l'ennemi
+battu s'&eacute;loigne, mais j'ai bien des choses &agrave; r&eacute;gler ici. Je serais assez
+d'opinion que tu retournasses &agrave; Paris, o&ugrave; tu es n&eacute;cessaire. Renvoie ces
+dames qui ont leurs affaires; tu gagneras d'&ecirc;tre d&eacute;barrass&eacute;e de gens qui
+ont d&ucirc; bien te fatiguer.</p>
+
+<p>Je me porte bien; il fait mauvais. Je t'aime de c&oelig;ur.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XLVIII" id="LETTRE_XLVIII"></a>LETTRE XLVIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Varsovie, 7 Janvier 1807.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je suis touch&eacute; de tout ce que tu me dis; mais la saison
+froide, les chemins tr&egrave;s mauvais, peu s&ucirc;rs, je ne puis donc consentir &agrave;
+t'exposer &agrave; tant de fatigues et de dangers. Rentre &agrave; Paris pour y passer
+l'hiver. Va aux Tuileries, re&ccedil;ois et fais la m&ecirc;me vie que tu as
+l'habitude de mener quand j'y suis; c'est l&agrave; ma volont&eacute;. Peut-&ecirc;tre ne
+tarderai-je pas &agrave; t'y rejoindre, mais il est indispensable que tu
+renonces &agrave; faire trois cents lieues dans cette saison, &agrave; travers des
+pays ennemis, et sur les derri&egrave;res de l'arm&eacute;e. Crois qu'il m'en co&ucirc;te
+plus qu'&agrave; toi de retarder de quelques semaines le bonheur de te voir,
+mais ainsi l'ordonnent les &eacute;v&eacute;nements et le bien des affaires.</p>
+
+<p>Adieu, ma bonne amie; sois gaie et montre du caract&egrave;re.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XLIX" id="LETTRE_XLIX"></a>LETTRE XLIX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Varsovie, le 8 janvier 1807.</p>
+
+
+<p>Ma bonne amie, je re&ccedil;ois ta lettre du 27 avec celles de M. Napol&eacute;on et
+d'Hortense qui y &eacute;taient jointes. Je t'avais pri&eacute;e de rentrer &agrave; Paris.
+La saison trop mauvaise, les chemins peu s&ucirc;rs et d&eacute;testables, les
+espaces trop consid&eacute;rables pour que je permette que tu viennes jusqu'ici
+o&ugrave; mes affaires me retiennent. Il te faudrait au moins un mois pour
+arriver. Tu y arriveras malade; il faudrait peut-&ecirc;tre repartir alors; ce
+serait donc folie. Ton s&eacute;jour &agrave; Mayence est trop triste; Paris te
+r&eacute;clame; vas-y, c'est mon d&eacute;sir. Je suis plus contrari&eacute; que toi; j'eusse
+aim&eacute; &agrave; partager les longues nuits de cette saison avec toi, mais il faut
+ob&eacute;ir aux circonstances.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_L" id="LETTRE_L"></a>LETTRE L</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Varsovie, le 11 Janvier 1807.</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u ta lettre du 27, o&ugrave; je vois que tu &eacute;tais un peu inqui&egrave;te sur
+les &eacute;v&eacute;nements militaires. Tout est fini, comme je te l'ai mand&eacute; &agrave; ma
+satisfaction, mes affaires vont bien. L'&eacute;loignement est trop
+consid&eacute;rable pour que je permette que, dans cette saison, tu viennes si
+loin. Je me porte fort bien, un peu ennuy&eacute; quelquefois de la longueur
+des nuits.</p>
+
+<p>Je vois ici, jusqu'&agrave; cette heure, assez peu de monde.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je d&eacute;sire que tu sois gaie et que tu donnes un peu de
+vie &agrave; la capitale. Je voudrais fort y &ecirc;tre.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+<p>J'esp&egrave;re que la reine est all&eacute;e &agrave; La Haye avec M. Napol&eacute;on.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LI" id="LETTRE_LI"></a>LETTRE LI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Le 16 Janvier 1807.</p>
+
+
+<p>Ma bonne amie, j'ai re&ccedil;u ta lettre du 5 janvier; tout ce que tu me dis
+de ta douleur me peine. Pourquoi des larmes, du chagrin? N'as-tu donc
+plus de courage? Je te verrai bient&ocirc;t; ne doute jamais de mes sentiments
+et, si tu veux m'&ecirc;tre plus ch&egrave;re encore, montre du caract&egrave;re et de la
+force d'&acirc;me. Je suis humili&eacute; de penser que ma femme puisse se m&eacute;fier de
+mes destin&eacute;es.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je t'aime, je d&eacute;sire te voir et veux te savoir contente
+et heureuse.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LII" id="LETTRE_LII"></a>LETTRE LII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Varsovie, le 18 janvier 1807.</p>
+
+
+<p>Je crains que tu n'aies bien du chagrin de notre s&eacute;paration qui doit
+encore se prolonger de quelques semaines et de ton retour &agrave; Paris.
+J'exige que tu aies plus de force. L'on me dit que tu pleures toujours:
+fi! que cela est laid! Ta lettre du 7 janvier me fait de la peine. Sois
+digne de moi et prends plus de caract&egrave;re. Fais &agrave; Paris la repr&eacute;sentation
+convenable et surtout sois contente.</p>
+
+<p>Je me porte tr&egrave;s bien et je t'aime beaucoup; mais, si tu pleures
+toujours, je te croirai sans courage et sans caract&egrave;re; je n'aime pas
+les l&acirc;ches, une imp&eacute;ratrice doit avoir du c&oelig;ur.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LIII" id="LETTRE_LIII"></a>LETTRE LIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Varsovie, le 19 janvier 1807.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je re&ccedil;ois ta lettre; j'ai ri de ta peur du feu. Je suis
+d&eacute;sesp&eacute;r&eacute; du ton de tes lettres et de ce qui me revient. Je te d&eacute;fends
+de pleurer, d'&ecirc;tre chagrine et inqui&egrave;te; je veux que tu sois gaie,
+aimable et heureuse.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LIV" id="LETTRE_LIV"></a>LETTRE LIV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Mayence.</h4>
+
+<p class="right">Le 23 janvier 1807.</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre du 15 janvier. Il est impossible que je permette &agrave;
+des femmes un voyage comme celui-ci: mauvais chemins, chemins peu s&ucirc;rs
+et fangeux. Retourne &agrave; Paris, sois-y gaie, contente; peut-&ecirc;tre y
+serai-je aussi bient&ocirc;t. J'ai ri de ce que tu me dis que tu as pris un
+mari pour &ecirc;tre avec lui; je pensais, dans mon ignorance, que la femme
+&eacute;tait faite pour le mari, le mari pour la patrie, la famille et la
+gloire; pardon de mon ignorance, l'on apprend toujours avec nos belles
+dames.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; crois qu'il m'en co&ucirc;te de ne pas te faire venir;
+dis-toi: c'est une preuve combien je lui suis pr&eacute;cieuse.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LV" id="LETTRE_LV"></a>LETTRE LV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Le 26, &agrave; midi, 1807.</p>
+
+
+<p>Ma bonne amie, j'ai re&ccedil;u ta lettre; je vois avec peine comme tu
+t'affliges. Le pont de Mayence ne rapproche ni n'&eacute;loigne les distances
+qui nous s&eacute;parent. Rentre donc &agrave; Paris. Je serais f&acirc;ch&eacute; et inquiet de te
+savoir si malheureuse et si isol&eacute;e &agrave; Mayence. Tu comprends que je ne
+dois, que je ne puis consulter que mon c&oelig;ur, je serais avec toi ou toi
+avec moi; car tu serais bien injuste si tu doutais de mon amour et de
+tous mes sentiments.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LVI" id="LETTRE_LVI"></a>LETTRE LVI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Wittemberg, le 1<sup>er</sup> f&eacute;vrier, &agrave; midi, 1807.</p>
+
+
+<p>Ta lettre du 11, de Mayence, m'a fait rire. Je suis aujourd'hui &agrave;
+quarante lieues de Varsovie; le temps est froid mais beau.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; sois heureuse, aie du caract&egrave;re.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LVII" id="LETTRE_LVII"></a>LETTRE LVII</h2>
+
+<p class="right">&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</p>
+
+
+<p>Mon amie, ta lettre du 20 janvier m'a fait de la peine; elle est trop
+triste. Voil&agrave; le mal de ne pas &ecirc;tre un peu d&eacute;vote! Tu me dis que ton
+bonheur fait ta gloire, cela n'est pas g&eacute;n&eacute;reux; il faut dire: le
+bonheur des autres fait ma gloire, cela n'est pas conjugal; il faut
+dire: le bonheur de mon mari fait ma gloire, cela n'est pas maternel; il
+faudrait dire: le bonheur de mes enfants fait ma gloire; or, comme les
+peuples, ton mari, tes enfants ne peuvent &ecirc;tre heureux qu'avec un peu de
+gloire, il ne faut pas tant en faire fi! Jos&eacute;phine, votre c&oelig;ur est
+excellent et votre raison faible; vous sentez &agrave; merveille, mais vous
+raisonnez moins bien.</p>
+
+<p>Voil&agrave; assez de querelle; je veux que tu sois gaie, contente de ton sort,
+et que tu ob&eacute;isses, non en grondant et en pleurant, mais de gait&eacute; de
+c&oelig;ur et avec un peu de bonheur.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je pars cette nuit pour parcourir mes avant-postes.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LVIII" id="LETTRE_LVIII"></a>LETTRE LVIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Eylau, 3 heures du matin, 9 f&eacute;vrier 1807.</p>
+
+
+<p>Mon amie, il y a eu hier une grande bataille; la victoire m'est rest&eacute;e,
+mais j'ai perdu bien du monde; la perte de l'ennemi, qui est plus
+consid&eacute;rable encore, ne me console pas. Enfin, je t'&eacute;cris ces deux
+lignes moi-m&ecirc;me, quoique je sois bien fatigu&eacute;, pour te dire que je suis
+bien portant et que je t'aime.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LIX" id="LETTRE_LIX"></a>LETTRE LIX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Eylau, le 9 f&eacute;vrier, &agrave; 6 heures du soir, 1807.</p>
+
+
+<p>Je t'&eacute;cris un mot, mon amie, afin que tu ne sois pas inqui&egrave;te. L'ennemi
+a perdu la bataille, quarante pi&egrave;ces de canon, dix drapeaux, douze mille
+prisonniers; il a horriblement souffert. J'ai perdu du monde: seize
+mille tu&eacute;s, trois mille ou quatre mille bless&eacute;s.</p>
+
+<p>Ton cousin Tascher se porte bien; je l'ai appel&eacute; pr&egrave;s de moi avec le
+titre d'officier d'ordonnance.</p>
+
+<p>Corbineau a &eacute;t&eacute; tu&eacute; d'un obus; je m'&eacute;tais singuli&egrave;rement attach&eacute; &agrave; cet
+officier qui avait beaucoup de m&eacute;rite; cela me fait de la peine. Ma
+garde &agrave; cheval s'est couverte de gloire. D'Allemagne est bless&eacute;
+dangereusement.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LX" id="LETTRE_LX"></a>LETTRE LX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Eylau, le 11 f&eacute;vrier, &agrave; 8 heures du matin, 1807.</p>
+
+
+<p>Je t'&eacute;cris un mot, mon amie; tu dois avoir &eacute;t&eacute; bien inqui&egrave;te. J'ai battu
+l'ennemi dans une m&eacute;morable journ&eacute;e, mais qui m'a co&ucirc;t&eacute; bien des braves.
+Le mauvais temps qu'il fait me force &agrave; prendre mes cantonnements.</p>
+
+<p>Ne te d&eacute;sole pas, je te prie; tout cela finira bient&ocirc;t et le bonheur de
+te voir me fera promptement oublier mes fatigues. Au reste, je n'ai
+jamais &eacute;t&eacute; si bien portant.</p>
+
+<p>Le petit Tascher, du 4<sup>e</sup> de ligne, s'est bien comport&eacute;; il a eu une
+rude &eacute;preuve. Je l'ai appel&eacute; pr&egrave;s de moi, je l'ai fait officier
+d'ordonnance; ainsi, voil&agrave; ses peines finies. Ce jeune homme
+m'int&eacute;resse.</p>
+
+<p>Adieu, ma bonne amie; mille baisers.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXI" id="LETTRE_LXI"></a>LETTRE LXI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Eylau, le 14 f&eacute;vrier 1807.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je suis toujours &agrave; Eylau. Ce pays est couvert de morts et de
+bless&eacute;s. Ce n'est pas la belle partie de la guerre; l'on souffre et
+l'&acirc;me est oppress&eacute;e de voir tant de victimes. Je me porte bien. J'ai
+fait ce que je voulais et j'ai repouss&eacute; l'ennemi en faisant &eacute;chouer ses
+projets.</p>
+
+<p>Tu dois &ecirc;tre inqui&egrave;te, et cette pens&eacute;e m'afflige. Toutefois,
+tranquillise-toi, mon amie, et sois gaie.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+<p>Dis &agrave; Caroline et &agrave; Pauline que le grand-duc et le prince se portent
+tr&egrave;s bien.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXII" id="LETTRE_LXII"></a>LETTRE LXII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Liebstadt, le 21, &agrave; 2 heures du matin, 1807.</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre du 4 f&eacute;vrier; j'y vois avec plaisir que ta sant&eacute; est
+bonne. Paris ach&egrave;vera de te rendre la gaiet&eacute; et le repos, le retour &agrave;
+tes habitudes, la sant&eacute;.</p>
+
+<p>Je me porte &agrave; merveille. Ce temps et le pays sont mauvais. Mes affaires
+vont assez bien; il d&eacute;g&egrave;le et g&egrave;le dans vingt-quatre heures: l'on ne
+peut voir un hiver aussi bizarre.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je t'aime, je pense &agrave; toi et d&eacute;sire te savoir contente,
+gaie et heureuse.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXIII" id="LETTRE_LXIII"></a>LETTRE LXIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Osterode, le 2 mars 1807.</p>
+
+
+<p>Mon amie, il y a deux ou trois jours que je ne t'ai &eacute;crit; je me le
+reproche; je connais tes inqui&eacute;tudes. Je me porte fort bien; mes
+affaires sont bonnes. Je suis dans un mauvais village, o&ugrave; je passerai
+encore bien du temps: cela ne vaut pas la grande ville. Je te le r&eacute;p&egrave;te,
+je ne me suis jamais si bien port&eacute;; tu me trouveras fort engraiss&eacute;.</p>
+
+<p>Il fait ici un temps de printemps; la neige fond, les rivi&egrave;res d&eacute;g&egrave;lent,
+cela me fait plaisir.</p>
+
+<p>J'ai ordonn&eacute; ce que tu d&eacute;sires pour Malmaison; sois gaie et heureuse,
+c'est ma volont&eacute;.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je t'embrasse de c&oelig;ur.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXIV" id="LETTRE_LXIV"></a>LETTRE LXIV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Le 27, &agrave; 7 heures du soir, 1807.</p>
+
+
+<p>Mon amie, ta lettre me fait de la peine. Tu ne dois pas mourir; tu te
+portes bien, et tu ne peux avoir aucun sujet raisonnable de chagrin.</p>
+
+<p>Je pense que tu dois aller au mois de mai &agrave; Saint-Cloud; mais il faut
+rester tout le mois d'avril &agrave; Paris.</p>
+
+<p>Ma sant&eacute; est bonne. Mes affaires vont bien.</p>
+
+<p>Tu ne dois pas penser &agrave; voyager cet &eacute;t&eacute;; tout cela n'est pas possible;
+tu ne dois pas courir les auberges et les camps. Je d&eacute;sire, autant que
+toi, te voir, et m&ecirc;me vivre tranquille.</p>
+
+<p>Je sais faire autre chose que la guerre, mais le devoir passe avant
+tout. Toute ma vie, j'ai tout sacrifi&eacute;, tranquillit&eacute;, int&eacute;r&ecirc;t, bonheur,
+&agrave; ma destin&eacute;e.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie. Vois peu cette M<sup>me</sup> de P..., c'est une femme de
+mauvaise soci&eacute;t&eacute;; cela est trop commun et trop vil.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+<p>J'ai eu lieu de me plaindre de M. T..., je l'ai envoy&eacute; dans sa terre, en
+Bourgogne; je ne veux plus en entendre parler.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXV" id="LETTRE_LXV"></a>LETTRE LXV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Le 10 mai 1807.</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre. Je ne sais ce que tu me dis des dames en
+correspondance avec moi. Je n'aime que ma petite Jos&eacute;phine, bonne,
+boudeuse et capricieuse, qui sait faire une querelle avec gr&acirc;ce, comme
+tout ce qu'elle fait; car elle est toujours aimable, hors cependant
+quand elle est jalouse: alors elle devient toute diablesse. Mais
+revenons &agrave; ces dames. Si je devais m'occuper de quelqu'une d'entre
+elles, je t'assure que je voudrais qu'elles fussent de jolis boutons de
+rose. Celles dont tu parles sont-elles dans ce cas?</p>
+
+<p>Je d&eacute;sire que tu ne d&icirc;nes jamais qu'avec des personnes qui ont d&icirc;n&eacute; avec
+moi; que ta liste soit la m&ecirc;me pour tes cercles, que tu n'admettes
+jamais &agrave; Malmaison, dans ton intimit&eacute;, des ambassadeurs et des
+&eacute;trangers. Si tu faisais diff&eacute;remment, tu me d&eacute;plairais; enfin ne te
+laisse pas circonvenir par des personnes que je ne connais pas et qui ne
+viendraient pas chez toi si j'y &eacute;tais.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXVI" id="LETTRE_LXVI"></a>LETTRE LXVI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Saint-Cloud.</h4>
+
+<p class="right">Friedland, le 15 juin 1807.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je ne t'&eacute;cris qu'un mot, car je suis bien fatigu&eacute;; voil&agrave; bien
+des jours que je bivouaque. Mes enfants ont dignement c&eacute;l&eacute;br&eacute;
+l'anniversaire de la bataille de Marengo.</p>
+
+<p>La bataille de Friedland sera aussi c&eacute;l&egrave;bre et est aussi glorieuse pour
+mon peuple. Toute l'arm&eacute;e russe est en d&eacute;route, quatre-vingts pi&egrave;ces de
+canon, trente mille hommes pris ou tu&eacute;s; vingt-cinq g&eacute;n&eacute;raux russes
+tu&eacute;s, bless&eacute;s ou pris; la garde russe &eacute;cras&eacute;e: c'est une digne s&oelig;ur de
+Marengo, Austerlitz, I&eacute;na. Le bulletin te dira le reste. Ma perte n'est
+pas consid&eacute;rable; j'ai man&oelig;uvr&eacute; l'ennemi avec succ&egrave;s.</p>
+
+<p>Sois sans inqui&eacute;tude et contente.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je monte &agrave; cheval.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+<p>L'on peut donner cette nouvelle comme une notice, si elle est arriv&eacute;e
+avant le bulletin. On peut aussi tirer le canon, Cambac&eacute;r&egrave;s fera la
+notice.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXVII" id="LETTRE_LXVII"></a>LETTRE LXVII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Saint-Cloud.</h4>
+
+<p class="right">Le 6 juillet 1807.</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u ta lettre du 25 juin. J'ai vu avec peine que tu &eacute;tais &eacute;go&iuml;ste
+et que les succ&egrave;s de mes armes seraient pour toi sans attraits.</p>
+
+<p>La belle reine de Prusse doit venir d&icirc;ner avec moi aujourd'hui.</p>
+
+<p>Je me porte bien et d&eacute;sire beaucoup te revoir, quand le destin l'aura
+marqu&eacute;. Cependant, il est possible que cela ne tarde pas.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; mille choses aimables.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXVIII" id="LETTRE_LXVIII"></a>LETTRE LXVIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Saint-Cloud.</h4>
+
+<p class="right">Le 7 juillet 1807.</p>
+
+
+<p>Mon amie, la reine de Prusse a d&icirc;n&eacute; hier avec moi. J'ai eu &agrave; me d&eacute;fendre
+de ce qu'elle voulait m'obliger &agrave; faire encore quelques concessions &agrave;
+son mari; mais j'ai &eacute;t&eacute; galant, et me suis tenu &agrave; ma politique. Elle est
+fort aimable. J'irai te donner des d&eacute;tails qu'il me serait impossible de
+te donner sans &ecirc;tre bien long. Quand tu liras cette lettre, la paix avec
+la Prusse et la Russie sera conclue et J&eacute;r&ocirc;me reconnu roi de Westphalie,
+avec trois millions de population. Ces nouvelles pour toi seule.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je t'aime et veux te savoir contente et gaie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXIX" id="LETTRE_LXIX"></a>LETTRE LXIX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Saint-Cloud.</h4>
+
+<p class="right">Le 18, &agrave; midi, 1807.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je suis arriv&eacute; hier &agrave; cinq heures du soir &agrave; Dresde, fort bien
+portant, quoique je sois rest&eacute; cent heures en voiture, sans sortir. Je
+suis ici chez le roi de Saxe, dont je suis fort content. Je suis donc
+rapproch&eacute; de toi de plus de moiti&eacute; du chemin.</p>
+
+<p>Il se peut qu'une de ces belles nuits je tombe &agrave; Saint-Cloud comme un
+jaloux; je t'en pr&eacute;viens.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; j'aurai grand plaisir &agrave; te voir.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXX" id="LETTRE_LXX"></a>LETTRE LXX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Le 9 janvier 1809.</p>
+
+
+<p>Moustache m'apporte une lettre de toi du 31 d&eacute;cembre. Je vois, mon amie,
+que tu es triste et que tu as l'inqui&eacute;tude tr&egrave;s noire. L'Autriche ne me
+fera pas la guerre. Si elle me la fait, j'ai cent cinquante mille hommes
+en Allemagne, et autant sur le Rhin, et quatre cent mille Allemands pour
+lui r&eacute;pondre. La Russie ne se s&eacute;parera pas de moi. On est fou &agrave; Paris;
+tout marche bien.</p>
+
+<p>Je serai &agrave; Paris aussit&ocirc;t que je le croirai utile. Je te conseille de
+prendre garde aux revenants; un beau jour, &agrave; deux heures du matin...</p>
+
+<p>Mais adieu, mon amie; je me porte bien, et suis tout &agrave; toi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXI" id="LETTRE_LXXI"></a>LETTRE LXXI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Plombi&egrave;res.</h4>
+
+<p class="right">Le 19 juin, &agrave; midi, 1809.</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre, o&ugrave; tu m'annonces ton d&eacute;part pour Plombi&egrave;res. Je
+vois ce voyage avec plaisir, parce que j'esp&egrave;re qu'il te fera du bien.</p>
+
+<p>Eug&egrave;ne est en Hongrie, et se porte bien. Ma sant&eacute; est fort bonne, et
+l'arm&eacute;e en bon &eacute;tat.</p>
+
+<p>Je suis bien aise de savoir le grand-duc de Berg avec toi.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; tu connais mes sentiments pour Jos&eacute;phine; ils sont
+invariables.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXII" id="LETTRE_LXXII"></a>LETTRE LXXII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Paris.</h4>
+
+<p class="right">Schoenbrunn, le 21 ao&ucirc;t 1809.</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u ta lettre du 14 ao&ucirc;t, de Plombi&egrave;res; j'y vois que tu seras
+arriv&eacute;e le 18 &agrave; Paris ou &agrave; Malmaison. Tu auras &eacute;t&eacute; malade de la chaleur,
+qui est bien grande ici. Malmaison doit &ecirc;tre bien sec et br&ucirc;l&eacute; par ce
+temps-l&agrave;.</p>
+
+<p>Ma sant&eacute; est bonne. Je suis cependant un peu enrhum&eacute; de la chaleur.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXIII" id="LETTRE_LXXIII"></a>LETTRE LXXIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Le 31 ao&ucirc;t 1809.</p>
+
+
+<p>Je n'ai pas re&ccedil;u de lettres de toi depuis plusieurs jours; les plaisirs
+de Malmaison, les belles serres, les beaux jardins, font oublier les
+absents; c'est la r&egrave;gle, dit-on, chez vous autres. Tout le monde ne
+parle que de ta bonne sant&eacute;; tout cela m'est fort sujet &agrave; caution.</p>
+
+<p>Je vais demain faire une absence de deux jours en Hongrie avec Eug&egrave;ne.
+Ma sant&eacute; est bonne.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXIV" id="LETTRE_LXXIV"></a>LETTRE LXXIV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Kems, le 9 septembre 1809.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je suis ici depuis hier &agrave; deux heures du matin; j'y suis pour
+voir mes troupes. Ma sant&eacute; n'a jamais &eacute;t&eacute; meilleure. Je sais que tu es
+bien portante.</p>
+
+<p>Je serai &agrave; Paris au moment o&ugrave; personne ne m'attendra plus.</p>
+
+<p>Tout va ici fort bien, et &agrave; ma satisfaction.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXV" id="LETTRE_LXXV"></a>LETTRE LXXV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Le 23 septembre 1809.</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u ta lettre du 16, je vois que tu te portes bien. La maison de
+la vieille fille ne vaut que cent vingt mille francs; ils n'en
+trouveront jamais plus. Cependant, je te laisse ma&icirc;tresse de faire ce
+que tu voudras, puisque cela t'amuse, mais, une fois achet&eacute;e, ne fais
+pas d&eacute;molir pour y faire quelques rochers.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXVI" id="LETTRE_LXXVI"></a>LETTRE LXXVI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Le 25 septembre 1809.</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u ta lettre. Ne te fie pas, et je te conseille de te bien garder
+la nuit; car une des prochaines, tu entendras grand bruit.</p>
+
+<p>Ma sant&eacute; est bonne; je ne sais ce que l'on d&eacute;bite; je ne me suis jamais
+mieux port&eacute; depuis bien des ann&eacute;es: Corvisart ne m'&eacute;tait point utile.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; tout va ici fort bien.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXVII" id="LETTRE_LXXVII"></a>LETTRE LXXVII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Nymphenbourg, pr&egrave;s Munich, le 21 octobre 1809.</p>
+
+
+<p>Je suis ici depuis hier bien portant; je ne partirai pas encore demain.
+Je m'arr&ecirc;terai un jour &agrave; Stuttgard. Tu seras pr&eacute;venue vingt-quatre
+heures d'avance de mon arriv&eacute;e &agrave; Fontainebleau. Je me fais une f&ecirc;te de
+te revoir, et j'attends ce moment avec impatience.</p>
+
+<p>Je t'embrasse.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Tout &agrave; toi,</span></p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRES_DE_NAPOLEON_A_JOSEPHINE" id="LETTRES_DE_NAPOLEON_A_JOSEPHINE"></a>LETTRES DE NAPOL&Eacute;ON &Agrave; JOS&Eacute;PHINE</h2>
+
+<h3>APR&Egrave;S LE DIVORCE</h3>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXVIII" id="LETTRE_LXXVIII"></a>LETTRE LXXVIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">8 heures du soir, d&eacute;cembre 1809.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je t'ai trouv&eacute;s aujourd'hui plus faible que tu ne devais &ecirc;tre.
+Tu as montr&eacute; du courage, il faut que tu en trouves pour te soutenir; il
+faut ne pas te laisser aller &agrave; une funeste m&eacute;lancolie, il faut te
+trouver contente, et surtout soigner ta sant&eacute;, qui m'est si pr&eacute;cieuse.
+Si tu m'es attach&eacute;e et si tu m'aimes, tu dois te comporter avec force et
+te juger heureuse. Tu ne peux pas mettre en doute ma constante et tendre
+amiti&eacute;, et tu conna&icirc;trais bien mal tous les sentiments que je te porte
+si tu supposais que je puis &ecirc;tre heureux si tu n'es pas heureuse, et
+content, si tu ne te tranquillises.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie, dors bien; songe que je le veux.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXIX" id="LETTRE_LXXIX"></a>LETTRE LXXIX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">7 heures du soir.</p>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre, mon amie. Savary me dit que tu pleures toujours;
+cela n'est pas bien. J'esp&egrave;re que tu auras pu te promener aujourd'hui.
+Je t'ai envoy&eacute; de ma chasse. Je viendrai te voir lorsque tu me diras que
+tu es raisonnable et que ton courage prend le dessus.</p>
+
+<p>Demain, toute la journ&eacute;e, j'ai les ministres.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; je suis triste aussi aujourd'hui; j'ai besoin de te
+savoir satisfaite et d'apprendre que tu prends de l'aplomb.</p>
+
+<p>Dors bien.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXX" id="LETTRE_LXXX"></a>LETTRE LXXX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Jeudi, &agrave; midi, 1809.</p>
+
+
+<p>Je voulais venir te voir aujourd'hui, mon amie; mais je suis tr&egrave;s occup&eacute;
+et un peu indispos&eacute;. Je vais cependant aller au conseil. Je te prie de
+me dire comment tu te portes.</p>
+
+<p>Ce temps est bien humide et pas du tout sain.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXXI" id="LETTRE_LXXXI"></a>LETTRE LXXXI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Vendredi, &agrave; 8 heures, 1810.</p>
+
+
+<p>Je voulais venir te voir aujourd'hui, mais je ne le puis; ce sera,
+j'esp&egrave;re, pour demain. Il y a bien longtemps que tu m'as donn&eacute; de tes
+nouvelles.</p>
+
+<p>J'ai appris avec plaisir que tu t'&eacute;tais promen&eacute;e dans ton jardin pendant
+ces froids.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; porte-toi bien, et ne doute jamais de mes sentiments.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXXII" id="LETTRE_LXXXII"></a>LETTRE LXXXII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Dimanche, &agrave; 8 heures du soir, 1810.</p>
+
+
+<p>J'ai &eacute;t&eacute; bien content de t'avoir vue hier; je sens combien ta soci&eacute;t&eacute; a
+de charmes pour moi. J'ai travaill&eacute; aujourd'hui avec Est&egrave;ve. J'ai
+accord&eacute; cent mille francs pour 1810, pour l'extraordinaire de Malmaison.
+Tu peux donc faire planter tant que tu voudras; tu distribueras cette
+somme comme tu l'entendras. J'ai charg&eacute; Est&egrave;ve de te remettre deux cent
+mille francs aussit&ocirc;t que le contrat de la maison Julien sera fait. J'ai
+ordonn&eacute; que l'on paierait ta parure de rubis, laquelle sera &eacute;valu&eacute;e par
+l'intendance, car je ne veux pas de voleries de bijoutiers. Ainsi, voil&agrave;
+quatre cent mille francs que cela me co&ucirc;te.</p>
+
+<p>J'ai ordonn&eacute; que l'on t&icirc;nt le million que la liste civile te doit, pour
+1810, &agrave; la disposition de ton homme d'affaires, pour payer tes dettes.</p>
+
+<p>Tu dois trouver dans l'armoire de Malmaison cinq cent mille &agrave; six cent
+mille francs; tu peux les prendre pour faire ton argenterie et ton
+linge.</p>
+
+<p>J'ai ordonn&eacute; qu'on te fit un tr&egrave;s beau service de porcelaine; l'on
+prendra tes ordres pour qu'il soit tr&egrave;s beau.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXXIII" id="LETTRE_LXXXIII"></a>LETTRE LXXXIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Mercredi, 6 heures du soir, 1810.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je ne vois pas d'inconv&eacute;nient que tu re&ccedil;oives le roi de
+Wurtemberg quand tu voudras. Le roi et la reine de Bavi&egrave;re doivent aller
+te voir apr&egrave;s-demain.</p>
+
+<p>Je d&eacute;sire fort aller &agrave; Malmaison: mais il faut que tu sois forte et
+tranquille: le page de ce matin dit qu'il t'a vue pleurer.</p>
+
+<p>Je vais d&icirc;ner tout seul.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; ne doute jamais de mes sentiments pour toi; tu serais
+injuste et mauvaise.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXXIV" id="LETTRE_LXXXIV"></a>LETTRE LXXXIV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Samedi, &agrave; 1 heure apr&egrave;s-midi, 1810.</p>
+
+
+<p>Mon amie, j'ai vu hier Eug&egrave;ne qui m'a dit que tu recevrais les rois.
+J'ai &eacute;t&eacute; au concert jusqu'&agrave; huit heures; je n'ai d&icirc;n&eacute;, tout seul, qu'&agrave;
+cette heure-l&agrave;.</p>
+
+<p>Je d&eacute;sire bien te voir. Si je ne viens pas aujourd'hui, je viendrai
+apr&egrave;s la messe.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; j'esp&egrave;re te trouver sage et bien portante. Ce temps-l&agrave;
+doit bien te peser.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXXV" id="LETTRE_LXXXV"></a>LETTRE LXXXV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Trianon, le 17 janvier 1810.</p>
+
+
+<p>Mon amie, d'Audenarde, que je t'ai envoy&eacute; ce matin, me dit que tu n'as
+plus de courage depuis que tu es &agrave; Malmaison. Ce lieu est cependant tout
+plein de nos sentiments, qui ne peuvent et ne doivent jamais changer, du
+moins de mon c&ocirc;te.</p>
+
+<p>J'ai bien envie de te voir, mais il faut que je sois s&ucirc;r que tu es
+forte, et non faible; je le suis aussi un peu, et cela me fait un mal
+affreux.</p>
+
+<p>Adieu, Jos&eacute;phine; bonne nuit. Si tu doutais de moi, tu serais bien
+ingrate.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXXVI" id="LETTRE_LXXXVI"></a>LETTRE LXXXVI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">30 Janvier 1810.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je re&ccedil;ois ta lettre. J'esp&egrave;re que la promenade que tu as faite
+aujourd'hui, pour montrer ta serre, t'aura fait du bien.</p>
+
+<p>Je te saurai avec plaisir &agrave; l'&Eacute;lys&eacute;e, et fort heureux de te voir plus
+souvent; car tu sais combien je t'aime.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXXVII" id="LETTRE_LXXXVII"></a>LETTRE LXXXVII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Mardi, &agrave; midi, 1810.</p>
+
+
+<p>J'apprends que tu t'affliges, cela n'est pas bien. Tu es sans confiance
+en moi, et tous les bruits que l'on r&eacute;pand te frappent; ce n'est pas me
+conna&icirc;tre, Jos&eacute;phine. Je t'en veux, et si je n'apprends que tu es gaie
+et contente, j'irai te gronder bien fort.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXXVIII" id="LETTRE_LXXXVIII"></a>LETTRE LXXXVIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Samedi, &agrave; 6 heures du soir, 1810.</p>
+
+
+<p>J'ai dit &agrave; Eug&egrave;ne que tu aimais plut&ocirc;t &agrave; &eacute;couter les bavards d'une
+grande ville que ce que je te disais; qu'il ne faut pas permettre que
+l'on te fasse des contes en l'air pour t'affliger.</p>
+
+<p>J'ai fait transporter tes effets &agrave; l'&Eacute;lys&eacute;e. Tu viendras incessamment &agrave;
+Paris; mais sois tranquille et contente, et aie confiance enti&egrave;re en
+moi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_LXXXIX" id="LETTRE_LXXXIX"></a>LETTRE LXXXIX</h2>
+
+<p>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; l'&Eacute;lys&eacute;e-Napol&eacute;on.</p>
+
+<p class="right">Vendredi, 6 heures du soir, 1810.</p>
+
+
+<p>Savary me remet, en arrivant, ta lettre; je vois avec peine que tu es
+triste; je suis bien aise que tu ne te sois pas aper&ccedil;ue du feu.</p>
+
+<p>J'ai eu beau temps &agrave; Rambouillet.</p>
+
+<p>Hortense m'a dit que tu avais eu le projet de venir d&icirc;ner chez Bessi&egrave;res
+et de retourner coucher &agrave; Paris. Je suis f&acirc;ch&eacute; que tu n'aies pas pu
+ex&eacute;cuter ton projet.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; sois gaie, songe que c'est le moyen de me plaire.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XC" id="LETTRE_XC"></a>LETTRE XC</h2>
+
+<p>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; l'&Eacute;lys&eacute;e-Napol&eacute;on.</p>
+
+<p class="right">19 f&eacute;vrier 1810.</p>
+
+
+<p>Mon amie, j'ai re&ccedil;u ta lettre. Je d&eacute;sire te voir; mais les r&eacute;flexions
+que tu me fais peuvent &ecirc;tre vraies. Il y a peut-&ecirc;tre quelque
+inconv&eacute;nient &agrave; nous trouver sous le m&ecirc;me toit pendant la premi&egrave;re ann&eacute;e.
+Cependant la campagne de Bessi&egrave;res est trop loin pour pouvoir revenir;
+d'un autre c&ocirc;t&eacute;, je suis un peu enrhum&eacute; et je ne suis pas s&ucirc;r d'y aller.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XCI" id="LETTRE_XCI"></a>LETTRE XCI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Le 12 mars 1810.</p>
+
+
+<p>Mon amie, j'esp&egrave;re que tu auras &eacute;t&eacute; contente de ce que j'ai fait pour
+Navarre. Tu y auras vu un nouveau t&eacute;moignage du d&eacute;sir que j'ai de t'&ecirc;tre
+agr&eacute;able.</p>
+
+<p>Fais prendre possession de Navarre; tu pourras y aller le 25 mars passer
+le mois d'avril.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XCII" id="LETTRE_XCII"></a>LETTRE XCII</h2>
+
+<p>De l'Imp&eacute;ratrice Jos&eacute;phine &agrave; l'Empereur Napol&eacute;on.</p>
+
+<p class="right">Navarre, le 19 avril 1810.</p>
+
+
+<p>Sire,</p>
+
+<p>Je re&ccedil;ois, par mon fils, l'assurance que Votre Majest&eacute; consent &agrave; mon
+retour &agrave; Malmaison, et qu'elle veut bien m'accorder les avances que je
+lui ai demand&eacute;es pour rendre habitable le ch&acirc;teau de Navarre.</p>
+
+<p>Cette double faveur, Sire, dissipe en grande partie les inqui&eacute;tudes et
+m&ecirc;me les craintes que le long silence de Votre Majest&eacute; m'avait
+inspir&eacute;es. J'avais peur d'&ecirc;tre enti&egrave;rement bannie de son souvenir: je
+vois que je ne le suis pas. Je suis donc aujourd'hui moins malheureuse,
+et m&ecirc;me aussi heureuse qu'il m'est d&eacute;sormais possible de l'&ecirc;tre.</p>
+
+<p>J'irai &agrave; la fin du mois &agrave; Malmaison, puisque Votre Majest&eacute; n'y voit
+aucun obstacle. Mais, je dois vous le dire, Sire, je n'aurais pas si t&ocirc;t
+profit&eacute; de la libert&eacute; que Votre Majest&eacute; me laisse &agrave; cet &eacute;gard, si la
+maison de Navarre n'exigeait pas, pour ma sant&eacute;, et pour celle des
+personnes de ma maison, des r&eacute;parations qui sont urgentes. Mon projet
+est de demeurer &agrave; Malmaison fort peu de temps; je m'en &eacute;loignerai
+bient&ocirc;t pour aller aux eaux. Mais, pendant que je serai &agrave; Malmaison,
+Votre Majest&eacute; peut &ecirc;tre s&ucirc;re que j'y vivrai comme si j'&eacute;tais &agrave; mille
+lieues de Paris. J'ai fait un grand sacrifice, Sire, et chaque jour je
+sens davantage toute son &eacute;tendue. Cependant, ce sacrifice sera ce qu'il
+doit &ecirc;tre, il sera entier de ma part. Votre Majest&eacute; ne sera troubl&eacute;e,
+dans son bonheur, par aucune expression de mes regrets.</p>
+
+<p>Je ferai sans cesse des v&oelig;ux pour que Votre Majest&eacute; soit heureuse,
+peut-&ecirc;tre m&ecirc;me en ferai-je pour la revoir; que Votre Majest&eacute; en soit
+convaincue, je respecterai toujours sa nouvelle situation, je la
+respecterai en silence; confiante dans les sentiments qu'elle me portait
+autrefois, je n'en provoquerai aucune preuve nouvelle; j'attendrai tout
+de sa justice et de son c&oelig;ur.</p>
+
+<p>Je me borne &agrave; lui demander une gr&acirc;ce, c'est qu'elle daigne chercher
+elle-m&ecirc;me un moyen de convaincre quelquefois, et moi-m&ecirc;me et ceux qui
+m'entourent, que j'ai toujours une petite place dans son souvenir et une
+grande place dans son estime et dans son amiti&eacute;. Ce moyen, quel qu'il
+soit, adoucira mes peines, sans pouvoir, ce me semble, compromettre, ce
+qui m'importe avant tout, le bonheur de Votre Majest&eacute;.</p>
+
+<p><span class="smcap">Jos&eacute;phine</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XCIII" id="LETTRE_XCIII"></a>LETTRE XCIII</h2>
+
+<h4>R&eacute;ponse de l'Empereur Napol&eacute;on<br /><br />
+
+&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice Jos&eacute;phine, &agrave; Navarre.</h4>
+
+<p class="right">Compi&egrave;gne, le 21 avril 1810.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je re&ccedil;ois ta lettre du 19 avril; elle est d'un mauvais style.
+Je suis toujours le m&ecirc;me; mes pareils ne changent jamais. Je ne sais ce
+qu'Eug&egrave;ne a pu te dire. Je ne t'ai pas &eacute;crit, parce que tu ne l'as pas
+fait, et que j'ai d&eacute;sir&eacute; tout ce qui peut t'&ecirc;tre agr&eacute;able.</p>
+
+<p>Je vois avec plaisir que tu ailles &agrave; Malmaison, et que tu sois contente;
+moi, je le serai de recevoir de tes nouvelles et de te donner des
+miennes. Je n'en dis pas davantage jusqu'&agrave; ce que tu aies compar&eacute; cette
+lettre &agrave; la tienne; et, apr&egrave;s cela, je te laisse juge qui est meilleur
+et plus ami de toi ou de moi.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; porte-toi tien et sois juste pour toi et pour moi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XCIV" id="LETTRE_XCIV"></a>LETTRE XCIV</h2>
+
+<h4>R&eacute;ponse de l'Imp&eacute;ratrice Jos&eacute;phine.</h4>
+
+
+<p>Mille, mille tendres remerciements de ne m'avoir pas oubli&eacute;e. Mon fils
+vient de m'apporter ta lettre. Avec quelle ardeur je l'ai lue, et
+cependant j'y ai mis bien du temps; car il n'y a pas un mot qui ne m'ait
+fait pleurer, mais ces larmes &eacute;taient bien douces! J'ai retrouv&eacute; mon
+c&oelig;ur tout entier, et tel qu'il sera toujours: il y a des sentiments qui
+sont la vie m&ecirc;me et qui ne peuvent finir qu'avec elle.</p>
+
+<p>Je serais au d&eacute;sespoir que ma lettre du 19 t'e&ucirc;t d&eacute;plu; je ne m'en
+rappelle pas enti&egrave;rement les expressions, mais je sais quel sentiment
+bien p&eacute;nible l'avait dict&eacute;e, c'&eacute;tait le chagrin de n'avoir pas de tes
+nouvelles.</p>
+
+<p>Je t'avais &eacute;crit &agrave; mon d&eacute;part de Malmaison; et, depuis, combien de fois
+j'aurais voulu t'&eacute;crire! Mais je sentais les raisons de ton silence, et
+je craignais d'&ecirc;tre importune par une lettre. La tienne a &eacute;t&eacute; un baume
+pour moi. Sois heureux, sois-le autant que tu le m&eacute;rites; c'est mon
+c&oelig;ur qui te parle. Tu viens aussi de me donner ma part de bonheur, et
+une part bien vivement sentie: rien ne peut valoir pour moi une marque
+de ton souvenir.</p>
+
+<p>Adieu, mon ami; je te remercie aussi tendrement que je t'aimerai
+toujours.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Jos&eacute;phine</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XCV" id="LETTRE_XCV"></a>LETTRE XCV</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice Jos&eacute;phine, &agrave; Navarre.</h4>
+
+<p class="right">Compi&egrave;gne, le 28 avril 1910.</p>
+
+
+<p>Mon amie, je re&ccedil;ois deux lettres de toi. J'&eacute;cris &agrave; Eug&egrave;ne. J'ai ordonn&eacute;
+que l'on fit le mariage de Tascher avec la princesse de la Leyen.</p>
+
+<p>J'irai demain &agrave; Anvers voir ma flotte et ordonner des travaux. Je serai
+de retour le 15 mai.</p>
+
+<p>Eug&egrave;ne me dit que tu veux aller aux eaux, ne te g&ecirc;ne en rien. N'&eacute;coute
+pas les bavardages de Paris; ils sont oisifs et bien loin de conna&icirc;tre
+le v&eacute;ritable &eacute;tat des choses. Mes sentiments pour toi ne changent pas et
+je d&eacute;sire beaucoup te savoir heureuse et contente.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XCVI" id="LETTRE_XCVI"></a>LETTRE XCVI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice Eug&eacute;nie, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+
+<p>Mon amie, je re&ccedil;ois ta lettre. Eug&egrave;ne te donnera des nouvelles de mon
+voyage et de l'Imp&eacute;ratrice. J'approuve fort que tu ailles aux eaux.
+J'esp&egrave;re qu'elles te feront du bien.</p>
+
+<p>Je d&eacute;sire bien te voir. Si tu es &agrave; Malmaison &agrave; la fin du mois, je
+viendrai te voir.</p>
+
+<p>Ma sant&eacute; est fort bonne; il me manque de te savoir contente et bien
+portante. Fais-moi conna&icirc;tre le nom que tu voudrais porter en route.</p>
+
+<p>Ne doute jamais de toute la v&eacute;rit&eacute; de mes sentiments pour toi; ils
+dureront autant que moi; tu serais fort injuste si tu en doutais.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XCVII" id="LETTRE_XCVII"></a>LETTRE XCVII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice Jos&eacute;phine, aux eaux d'Aix, en Savoie.</h4>
+
+<p class="right">Rambouillet, le 8 juillet 1810.</p>
+
+
+<p>Mon amie, j'ai re&ccedil;u ta lettre du 3 juillet. Tu auras vu Eug&egrave;ne, et sa
+pr&eacute;sence t'aura fait du bien. J'ai appris avec plaisir que les eaux te
+sont bonnes. Le roi de Hollande vient d'abdiquer la couronne, en
+laissant la r&eacute;gence, selon la Constitution, &agrave; la reine. Il a quitt&eacute;
+Amsterdam et laiss&eacute; le grand-duc de Berg.</p>
+
+<p>J'ai r&eacute;uni la Hollande &agrave; la France; mais cet acte a cela d'heureux qu'il
+&eacute;mancipe la reine, et cette infortun&eacute;e fille va venir &agrave; Paris avec son
+fils, le grand-duc de Berg; cela la rendra parfaitement heureuse.</p>
+
+<p>Ma sant&eacute; est bonne. Je suis venu ici pour chasser quelques jours. Je te
+verrai avec plaisir cet automne. Ne doute jamais de mon amiti&eacute;. Je ne
+change jamais. Porte-toi bien, sois gaie et crois &agrave; la v&eacute;rit&eacute; de mes
+sentiments.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XCVIII" id="LETTRE_XCVIII"></a>LETTRE XCVIII</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice Jos&eacute;phine, &agrave; Navarre.</h4>
+
+<p class="right">Fontainebleau, le 14 novembre 1810.</p>
+
+
+<p>Mon amie, j'ai re&ccedil;u ta lettre. Hortense m'a parl&eacute; de toi. Je vois avec
+plaisir que tu es contente. J'esp&egrave;re que tu ne t'ennuies pas trop &agrave;
+Navarre.</p>
+
+<p>Ma sant&eacute; est fort bonne. L'Imp&eacute;ratrice avance heureusement dans sa
+grossesse. Je ferai les diff&eacute;rentes choses que tu me demandes pour ta
+maison. Soigne bien ta sant&eacute;, sois contente et ne doute jamais de mes
+sentiments pour toi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_XCIX" id="LETTRE_XCIX"></a>LETTRE XCIX</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice Jos&eacute;phine, &agrave; Navarre.</h4>
+
+
+<p>Je re&ccedil;ois ta lettre. Je ne vois pas d'inconv&eacute;nient au mariage de M<sup>me</sup>
+de Mackau avec Wattier, si cela lui convient; ce g&eacute;n&eacute;ral est un fort
+brave homme. Je me porte bien. J'esp&egrave;re avoir un gar&ccedil;on; je te le ferai
+savoir aussit&ocirc;t.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie. Je suis bien aise que M<sup>me</sup> d'Arberg t'ait dit des
+choses qui te fassent plaisir. Quand tu me verras, tu me trouveras avec
+les m&ecirc;mes sentiments pour toi.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_C" id="LETTRE_C"></a>LETTRE C</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice Jos&eacute;phine, &agrave; Malmaison.</h4>
+
+<p class="right">Trianon, 25 ao&ucirc;t 1813.</p>
+
+
+<p>J'ai re&ccedil;u ta lettre. Je vois avec plaisir que tu es en bonne sant&eacute;. Je
+suis pour quelques jours &agrave; Trianon. Je compte aller &agrave; Compi&egrave;gne. Ma
+sant&eacute; est fort bonne.</p>
+
+<p>Mets de l'ordre dans tes affaires; ne d&eacute;pense que un million cinq cent
+mille francs et mets de c&ocirc;t&eacute; tous les ans autant; cela fera une r&eacute;serve
+de quinze millions en dix ans pour tes petits-enfants: il est doux de
+pouvoir leur donner quelque chose et de leur &ecirc;tre utile. Au lieu de
+cela, l'on me dit que tu as des dettes, cela serait bien vilain.
+Occupe-toi de tes affaires et ne donne pas &agrave; qui en veut prendre. Si tu
+me veux plaire, fais que je sache que tu as un gros tr&eacute;sor. Juge combien
+j'aurais mauvaise opinion de toi si je te savais endett&eacute;e avec trois
+millions de revenu.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie, porte-toi bien.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRE_CI" id="LETTRE_CI"></a>LETTRE CI</h2>
+
+<h4>&Agrave; l'Imp&eacute;ratrice Jos&eacute;phine, &agrave; Malmaison</h4>
+
+<p class="right">Vendredi, 8 heures du matin, 1813.</p>
+
+
+<p>J'envoie savoir comment tu te portes, car Hortense m'a dit que tu &eacute;tais
+au lit hier. J'ai &eacute;t&eacute; f&acirc;ch&eacute; contre toi pour tes dettes; je ne veux pas
+que tu en aies; au contraire, j'esp&egrave;re que tu mettras un million de c&ocirc;t&eacute;
+tous les ans, pour donner &agrave; tes petites-filles lorsqu'elles se
+marieront.</p>
+
+<p>Toutefois, ne doute jamais de mon amiti&eacute; pour toi et ne te fais aucun
+chagrin l&agrave;-dessus.</p>
+
+<p>Adieu, mon amie; annonce-moi que tu es bien portante. On dit que tu
+engraisses comme une bonne fermi&egrave;re de Normandie.</p>
+
+<p class="sign"><span class="smcap">Napol&eacute;on</span>.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<p>&nbsp;</p>
+<h2><a name="APPENDICES" id="APPENDICES"></a>APPENDICES</h2>
+<p>&nbsp;</p>
+<p>&nbsp;</p>
+<h3>DIALOGUE SUR L'AMOUR</h3>
+
+
+<p><strong><i>Ce texte, r&eacute;dig&eacute; par Bonaparte, en 1791, lors de son s&eacute;jour &agrave; Valence,
+&agrave; l'&acirc;ge de vingt-deux ans, demeura inconnu pendant cent et trois ans.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Cet &eacute;crit d'un style sec et sans unit&eacute; trace vigoureusement la
+conception que Napol&eacute;on devait avoir toute sa vie de la femme.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Le sort de ce manuscrit fut mouvement&eacute;.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>&Agrave; sa chute, Napol&eacute;on l'envoya &agrave; Fesch</i><a name="FNanchor_5_5" id="FNanchor_5_5"></a><a href="#Footnote_5_5" class="fnanchor">[5]</a> <i>enferm&eacute; parmi d'autres dans
+un des cartons de son cabinet. Fesch n'en prit jamais connaissance. &Agrave; la
+mort de celui-ci, en 1839, son grand vicaire, l'abb&eacute; Lyonnet, &agrave; qui le
+carton revint, en vendit le contenu &agrave; Libri</i><a name="FNanchor_6_6" id="FNanchor_6_6"></a><a href="#Footnote_6_6" class="fnanchor">[6]</a>, <i>qui le revendit &agrave; des
+amateurs, entre autres &agrave; lord Ashburnham, dont le fils, en 1884, le
+c&eacute;da, pour une somme de 675,000 francs, &agrave; la biblioth&egrave;que
+M&eacute;dico-Laurentienne de Florence, o&ugrave; il fut copi&eacute; par MM. Fr&eacute;d&eacute;ric Masson
+et Guido Biagi qui, en 1895, le publi&egrave;rent sous le titre de &laquo;Napol&eacute;on
+inconnu&raquo;.</i></strong></p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="DIALOGUE_SUR_LAMOUR" id="DIALOGUE_SUR_LAMOUR"></a>DIALOGUE SUR L'AMOUR</h2>
+
+
+<p><span class="smcap">Des Mazis</span><a name="FNanchor_7_7" id="FNanchor_7_7"></a><a href="#Footnote_7_7" class="fnanchor">[7]</a>.&mdash;Comment, monsieur, qu'est-ce que l'amour? Eh quoi!
+n'&ecirc;tes-vous donc pas compos&eacute; comme les autres hommes?</p>
+
+<p><i>Bonaparte</i>.&mdash;Je ne vous demande pas la d&eacute;finition de l'amour. Je fus
+jadis amoureux et il m'en est rest&eacute; assez de souvenir pour que je n'aie
+pas besoin de ces d&eacute;finitions m&eacute;taphysiques qui ne font jamais
+qu'embrouiller les choses; je vous dis plus que de nier son existence.
+Je le crois nuisible &agrave; la soci&eacute;t&eacute;, au bonheur individuel des hommes,
+enfin je crois que l'amour fait plus de mal... et que ce serait un
+bienfait d'une divinit&eacute; protectrice que de nous en d&eacute;faire et d'en
+d&eacute;livrer le monde.</p>
+
+<p><span class="smcap">Des Mazis</span>.&mdash;Quoi! l'amour nuisible &agrave; la soci&eacute;t&eacute;, lui qui vivifie la
+nature enti&egrave;re, source de toute production, de tout bonheur. Point
+d'amour, monsieur, autant vaudrait-il an&eacute;antir notre existence.</p>
+
+<p><i>Bonaparte</i>.&mdash;Vous vous &eacute;chauffez. La passion vous transporte.
+Reconnaissez, je vous en prie, votre ami. Ne me regardez pas avec
+indignation et r&eacute;pondez pourquoi, depuis que cette passion vous domine,
+ne vous vois-je plus dans vos soci&eacute;t&eacute;s ordinaires? Que sont devenues vos
+occupations? Pourquoi n&eacute;gligez-vous vos parents, vos amis? Vos journ&eacute;es
+enti&egrave;res sont sacrifi&eacute;es &agrave; une promenade monotone et solitaire jusqu'&agrave;
+ce que l'heure vous permette de voir votre Ad&eacute;la&iuml;de.</p>
+
+<p><span class="smcap">Des Mazis</span>.&mdash;Eh! que m'importe &agrave; moi, monsieur, vos occupations, vos
+soci&eacute;t&eacute;s? &Agrave; quoi aboutit une science indigeste? Qu'ai-je &agrave; faire de ce
+qui s'est pass&eacute; il y a mille ans? Quelle influence puis-je avoir sur le
+cours des astres? Que m'importe le minutieux d&eacute;tail des discussions
+pu&eacute;riles des hommes?... Je me suis occup&eacute; de cela sans doute.
+Qu'avais-je de mieux &agrave; faire? Il fallait bien par quelque moyen me
+soustraire &agrave; l'ennui qui me mena&ccedil;ait; mais croyez-moi, je sentais au
+milieu de mon cabinet le vide de mon c&oelig;ur. Parfois mon esprit &eacute;tait
+satisfait, mais mes sentiments! &Ocirc; Dieu! je n'ai fait que v&eacute;g&eacute;ter tant
+que je n'eus pas aim&eacute;. Actuellement, au contraire, quand l'amour
+m'arrache au sommeil, je ne dis plus: &laquo;Pourquoi le soleil luit-il
+aujourd'hui pour moi?&raquo; Non! le premier rayon de lumi&egrave;re me pr&eacute;sente ma
+ch&egrave;re Ad&eacute;la&iuml;de en habit du matin. Je la vois penser &agrave; moi, me sourire.
+Hier au soir elle me serrait la main, elle soupirait, nos regards se
+rencontraient. Comme ils exprimaient nos sentiments! Je contemple un
+portrait qui me ravit l'&acirc;me. Cent fois je le remets pour le reprendre
+aussit&ocirc;t. Cette promenade, monsieur, que vous appelez monotone, eh! non,
+la vaste &eacute;tendue du globe ne contient pas plus de vari&eacute;t&eacute;. D'abord, mon
+esprit repasse les choses qu'elle m'a dites; je relis le billet qu'elle
+m'a &eacute;crit; je pense &agrave; celui qui doit peindre toute l'&eacute;tendue de mon
+amour. Je le refais cent fois. Mon imagination s'&eacute;l&egrave;ve; je vois bient&ocirc;t
+mes feux couronn&eacute;s; je regrette tant&ocirc;t de ne pas avoir une fortune
+immense &agrave; lui sacrifier. Ici m&ecirc;me, je voudrais avoir une couronne.
+Concevez le charme de la proposer &agrave; ses parents, la joie que cela lui
+causerait. Tout ce qui approche d'elle est sacr&eacute; &agrave; mes yeux. Une autre
+fois je penserai aux pr&eacute;paratifs des noces qui doivent bient&ocirc;t nous
+unir, jusqu'aux pr&eacute;sents que je dois lui faire. Mon c&oelig;ur se dilate &agrave;
+imaginer quelque chose qui puisse l'obliger, lui prouver mon amour.
+Voyez-vous le ch&acirc;teau o&ugrave; nous devons passer nos jours, les sombres
+bosquets, les riantes prairies, les d&eacute;licieux parterres? Rien ne
+m'affecte que le plaisir d'&ecirc;tre tous les jours &agrave; c&ocirc;t&eacute; d'elle. Mais
+bient&ocirc;t elle doit me donner des gages de notre amour... Mais vous riez!
+En v&eacute;rit&eacute;, je vous d&eacute;teste.</p>
+
+<p><span class="smcap">Bonaparte</span>.&mdash;Je ris des grandes occupations qui captivent votre &acirc;me et
+plus encore du feu avec lequel vous me les communiquez. Quelle maladie
+&eacute;trange s'est empar&eacute;e de vous? Je sens que la raison que vous appelez &agrave;
+votre secours ne fera aucun effet et, dans le d&eacute;lire o&ugrave; vous &ecirc;tes, vous
+ferez plus que de fermer l'oreille &agrave; sa voix, vous la m&eacute;priserez.
+Souvenez-vous que vous n'&ecirc;tes pas de sang-froid et que mon amiti&eacute; fut
+toujours le juge qui vous rappela &agrave; vos d&eacute;sirs. Souvenez-vous que je
+m'en suis toujours rendu digne. J'aurais besoin de r&eacute;p&eacute;ter ici les
+obligations que vous me devez et les marques qui vous sont connues de
+mes sentiments, car, moi-m&ecirc;me je ne serais pas &agrave; l'abri de vos
+invectives dans les acc&egrave;s de votre d&eacute;lire. Car votre &eacute;tat est pareil &agrave;
+celui d'un malade qui ne voit que la chim&egrave;re qu'il poursuit et sans
+conna&icirc;tre la maladie qui la produit, ni la sant&eacute; qu'il a perdue. Je
+n'agiterai donc pas si vos plaisirs sont dignes de l'homme ou m&ecirc;me si
+c'en sont. Je veux croire que ce sexe, roi du monde par sa force, son
+industrie, son esprit et toutes ses autres facult&eacute;s naturelles, trouve
+sa supr&ecirc;me f&eacute;licit&eacute; &agrave; languir dans les cha&icirc;nes d'une molle passion et
+sous les lois d'un &ecirc;tre plus faible d'entendement comme de corps. Je
+veux croire, comme vous le dites, que le souvenir de votre Ad&eacute;la&iuml;de, son
+image, sa conversation puissent vous d&eacute;dommager des agr&eacute;ments de vos
+occupations, de vos soci&eacute;t&eacute;s; mais n'est-il pas vrai que vous d&eacute;sirez
+toujours la fin de cet &eacute;tat et que votre insatiable imagination voudrait
+obtenir ce que la vertu d'Ad&eacute;la&iuml;de ne peut vous accorder. Ma froide
+tranquillit&eacute;, je le vois, n'est pas propre &agrave; peindre le pesant fardeau
+qui tourmente l'existence d'un amant dans le moindre &eacute;chec qui lui
+survient. Qu'Ad&eacute;la&iuml;de s'absente pour quinze jours seulement, que
+devenez-vous? Si un autre s'efforce &agrave; cet objet, que vous croyez vous
+appartenir, que d'inqui&eacute;tude! Si une m&egrave;re alarm&eacute;e trouve mauvaises de
+trop fr&eacute;quentes visites qui font parler un public m&eacute;chant, enfin,
+monsieur, que sais-je, cent petites autres choses qui frappent fortement
+un amant vous agitent. Souvent, les nuits se passent sans sommeil, les
+repas sans manger. La terre n'a point d'endroit pour contenir votre
+inqui&eacute;tude extr&ecirc;me. Votre sang bouillonne, vous marchez &agrave; grands pas, le
+regard &eacute;gar&eacute;. Pauvre chevalier, est-ce l&agrave; le bonheur? Je ne doute pas
+que si, aujourd'hui, dans l'extase que vous a occasionn&eacute;e un serrement
+de main, vous ne trouviez cet &eacute;tat la supr&ecirc;me f&eacute;licit&eacute;, je ne doute pas,
+dis-je, que, demain, dans une humeur contraire, vous ne trouviez votre
+faiblesse insupportable. Mais, chevalier, voil&agrave; votre position. S'il
+fallait d&eacute;fendre la patrie attaqu&eacute;e, que feriez-vous? S'il fallait!...
+Mais &agrave; quoi &ecirc;tes-vous bon? Confiera-t-on le bonheur de vos semblables &agrave;
+un enfant qui pleure sans cesse, qui s'alarme ou se r&eacute;jouit au seul
+mouvement d'une autre personne? Confiera-t-on le secret de l'&Eacute;tat &agrave;
+celui qui n'a point de volont&eacute;?</p>
+
+<p><span class="smcap">Des Mazis</span>.&mdash;Toujours des grands mots vides de sens! Que fait &agrave; moi votre
+&Eacute;tat, ses secrets? En v&eacute;rit&eacute;, vous &ecirc;tes inconcevable aujourd'hui. Vous
+n'avez jamais raisonn&eacute; si pitoyablement.</p>
+
+<p><span class="smcap">Bonaparte</span>.&mdash;Ah! chevalier, que vous importent l'&Eacute;tat, vos concitoyens,
+la soci&eacute;t&eacute;? Voil&agrave; les suites d'un c&oelig;ur rel&acirc;ch&eacute;, abandonn&eacute; &agrave; la volupt&eacute;.
+Point de force, point de vertu dans votre sentier. Vous n'ambitionniez
+que de faire le bien et aujourd'hui ce bien m&ecirc;me vous est indiff&eacute;rent.
+Quel est donc ce sentiment d&eacute;prav&eacute; qui a pris la place de votre amour
+pour la vertu? Vous ne d&eacute;sirez que de vivre ignor&eacute; &agrave; l'ombre de vos
+peupliers. Profonde philosophie! Ah! chevalier, que je d&eacute;teste cette
+passion qui a produit une si grande m&eacute;tamorphose. Vous ne songez pas que
+vous tirez vers l'&eacute;go&iuml;sme et tout vous est indiff&eacute;rent: opinion des
+hommes, estime de vos amis, amour de vos parents. Tout est captiv&eacute; au
+tyran fort de votre faiblesse. Un coup d'&oelig;il, un serrement de main, un
+baiser, chevalier et que vous importent alors la peine de la patrie, la
+mauvaise opinion de vos amis; un attouchement corporel... mais je ne
+veux pas vous irriter. Je le veux croire: l'amour a des plaisirs
+incomparables, des peines encore plus grandes peut-&ecirc;tre, mais n'importe,
+consid&eacute;rons seulement l'influence qu'il a dans l'&eacute;tat de soci&eacute;t&eacute;. Il est
+vrai, chevalier, que, dans l'&eacute;tat des choses, notre &acirc;me, n&eacute;e
+ind&eacute;pendante, a besoin d'&ecirc;tre form&eacute;e, d&eacute;grad&eacute;e. Si vous voulez, par les
+institutions, que d&egrave;s la naissance l'attention que tous les l&eacute;gislateurs
+ont donn&eacute;e &agrave; l'&eacute;ducation... que nous sommes n&eacute;s pour &ecirc;tre heureux, que
+c'est la loi supr&ecirc;me que la nature a grav&eacute;e au fond de nous m&ecirc;mes. Il
+est vrai que c'est la base qui nous a &eacute;t&eacute; donn&eacute;e pour servir de r&egrave;gle &agrave;
+notre conduite. Chacun, n&eacute; juge de ce qui peut lui convenir, a donc le
+droit de disposer de son corps comme de ses affections, mais cet &eacute;tat
+d'ind&eacute;pendance est vraiment oppos&eacute; &agrave; l'&eacute;tat de servitude o&ugrave; la soci&eacute;t&eacute;
+nous a mis.</p>
+
+<p>En changeant d'&eacute;tat il a donc fallu changer d'humeur. Il a donc fallu
+substituer au cri de notre sentiment celui des pr&eacute;jug&eacute;s. Voil&agrave; la base
+de toutes les institutions sociales. Il a fallu prendre l'homme d&egrave;s son
+origine pour en faire, s'il se peut, une autre cr&eacute;ature. Croyez-vous,
+sans ce changement, que tant d'hommes souffriraient d'&ecirc;tre avilis par un
+petit nombre de grands seigneurs et que des palais somptueux seraient
+respect&eacute;s par des hommes qui manquent de pain? La force est la loi des
+animaux; la conviction est celle des hommes. On convint, soit pour
+repousser les attaques des b&ecirc;tes plus fortes, soit pour ne pas &ecirc;tre
+expos&eacute; &agrave; se battre &agrave; chaque instant, l'on convint, dis-je, de lois des
+propri&eacute;t&eacute;s et chacun fut assur&eacute; au nom de tous de la propri&eacute;t&eacute; de son
+champ.</p>
+
+<p>Cette convention n'existait qu'entre un petit nombre d'hommes. Il fallut
+donc des magistrats, soit pour repousser les attaques des peuplades
+voisines, soit pour faire ex&eacute;cuter la convention re&ccedil;ue.</p>
+
+<p>Ces magistrats sentirent le charme du commandement, mais les plus
+alertes du peuple s'y oppos&egrave;rent. Ils furent gagn&eacute;s et ainsi associ&eacute;s
+aux projets des ambitieux. Le peuple fut subjugu&eacute;. Vous voyez
+l'in&eacute;galit&eacute; s'introduire &agrave; grands pas; vous voyez se former la classe
+r&eacute;gnante et la classe gouvern&eacute;e. La religion vint consoler les
+malheureux qui se trouvaient d&eacute;pouill&eacute;s de toute propri&eacute;t&eacute;. Elle vint
+les encha&icirc;ner pour toujours. Ce ne fut plus par les cris de la
+conscience que l'homme devait se conduire. Non! L'on craignit qu'un
+sentiment que l'on faisait tout au monde pour &eacute;touffer ne repr&icirc;t le
+dessus.</p>
+
+<p>Il y eut donc un Dieu. Ce Dieu conduisait le monde. Tout se faisait par
+acte de sa volont&eacute;. Il avait donn&eacute; des lois &eacute;crites... et l'empire des
+pr&ecirc;tres commen&ccedil;a, empire qui probablement ne finira jamais.</p>
+
+<p>Que l'homme donc soit d&eacute;grad&eacute;, triste v&eacute;rit&eacute;! Mais que l'&eacute;tat de soci&eacute;t&eacute;
+ne soit l&eacute;gitime, c'est ce dont l'on ne peut disconvenir. Le silence des
+hommes l&agrave;-dessus est une approbation tacite que rien ne peut d&eacute;mentir.
+Vous avez vingt ans, monsieur, choisissez: ou renoncez &agrave; votre rang, &agrave;
+votre fortune, et quittez un monde que vous d&eacute;testez, ou, vous
+inscrivant dans le nombre des citoyens, soumettez-vous &agrave; ses lois. Vous
+jouissez des avantages du contrat, serez-vous infid&egrave;le aux autres
+clauses? Ce ne serait pas vous croire honn&ecirc;te homme que d'en douter.
+Vous devez donc &ecirc;tre attach&eacute; &agrave; un &Eacute;tat qui vous procure tant de
+bien-&ecirc;tre et procurant &agrave; la fois de faire un digne usage des avantages
+qu'il vous a accord&eacute;s, vous devez rendre heureux le peuple au-dessus
+duquel vous &ecirc;tes et faire prosp&eacute;rer la soci&eacute;t&eacute; qui vous a distingu&eacute;.
+Pour cela faire, il faut que, guid&eacute; toujours par le flambeau de la
+raison, vous puissiez balancer avec &eacute;quit&eacute; les droits des hommes &agrave; qui
+vous vous devez. Pour cela faire, il faut que, pr&ecirc;t &agrave; tout entreprendre
+pour le service de l'&Eacute;tat, vous soyez soldat, homme d'affaires,
+courtisan m&ecirc;me si l'int&eacute;r&ecirc;t du peuple et de votre nation le demande. Ah!
+que votre r&eacute;compense sera douce! D&eacute;fiez alors les malignes vapeurs de la
+calomnie, de la jalousie! D&eacute;fiez hardiment le temps m&ecirc;me! Vos membres
+d&eacute;cr&eacute;pits ne seront plus qu'une image imparfaite de ce qu'ils furent
+jadis et ils attireront cependant le respect de tous ceux qui vous
+approcheront. L'un racontera dans sa cabane le soulagement que vous lui
+avez accord&eacute;. L'autre, en faisant le r&eacute;cit des complots des m&eacute;chants,
+dira: &laquo;S'il ne f&ucirc;t venu &agrave; mon secours, j'eusse p&eacute;ri du supplice des
+criminels.&raquo; Chevalier, cesse de restreindre cette &acirc;me alti&egrave;re et ce
+c&oelig;ur jadis si fier &agrave; une sph&egrave;re aussi &eacute;troite. Toi, aux genoux d'une
+femme! Fais plut&ocirc;t tomber aux tiens les m&eacute;chants confondus! Toi,
+m&eacute;priser les peines des hommes! Sentiment d'honneur, subjugue-le plut&ocirc;t!
+Estim&eacute; par tes semblables, respect&eacute;, aim&eacute; par tes vassaux, la mort
+viendra t'enlever au milieu des pleura de ceux qui t'entoureront, apr&egrave;s
+avoir coul&eacute; une vie douce, oracle de tes proches et p&egrave;re de tes vassaux.</p>
+
+<p><span class="smcap">Des Mazis</span>.&mdash;Je ne vous entends pas. Comment, monsieur, mon amour
+pourrait-il m'emp&ecirc;cher de suivre le plan que vous venez de tracer?
+Quelle id&eacute;e vous &ecirc;tes-vous donc faite d'Ad&eacute;la&iuml;de?</p>
+
+<p>Ad&eacute;la&iuml;de, s'il faut pour remplir ces devoirs soulager les malheureux;
+s'il faut pour &ecirc;tre vertueux aimer sa patrie, les hommes, la soci&eacute;t&eacute;,
+qui plus qu'elle est vertueuse? Croyez-vous que je faisais le bien avec
+la froideur de la philosophie? Quand la volont&eacute; d'Ad&eacute;la&iuml;de sera le
+mobile qui me conduira, lui faire plaisir la r&eacute;compense... Non,
+monsieur, vous n'avez jamais &eacute;t&eacute; amoureux.</p>
+
+<p><span class="smcap">Bonaparte</span>.&mdash;Je plains votre erreur. Quoi, chevalier, vous croyez que
+l'amour est le chemin de la vertu? Il vous imm&eacute;trigue (<i>empl&acirc;trer,
+retenir avec du mastic</i>) &agrave; chaque pas. Soyez sinc&egrave;re, depuis que cette
+passion fatale a troubl&eacute; votre repos, avez-vous envisag&eacute; d'autre
+jouissance que celle de l'amour? Vous ferez donc le bien ou le mal selon
+les sympt&ocirc;mes de votre passion. Mais que dis-je? Vous et la passion ne
+font qu'un m&ecirc;me &ecirc;tre. Tant qu'elle durera vous n'agirez que pour elle
+et, puisque vous &ecirc;tes convenu que les devoirs d'un homme riche
+consistaient &agrave; faire du bien, &agrave; arracher de l'indigence les malheureux
+qui y g&eacute;missent, que les devoirs d'un homme de naissance l'obligeaient &agrave;
+se servir du cr&eacute;dit de son nom pour d&eacute;truire les brigues des m&eacute;chants,
+que les devoirs du citoyen consistaient &agrave; d&eacute;fendre la patrie et &agrave;
+concourir &agrave; sa prosp&eacute;rit&eacute;, n'avouerez-vous pas que les devoirs d'un bon
+fils consistent &agrave; reconna&icirc;tre en son p&egrave;re les obligations d'une
+&eacute;ducation soign&eacute;e, &agrave; sa m&egrave;re... Non! chevalier, je me tairais si j'&eacute;tais
+oblig&eacute; de vous prouver de pareilles &eacute;vidences.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LA_FEMME_ET_LE_CODE_NAPOLEON" id="LA_FEMME_ET_LE_CODE_NAPOLEON"></a>LA FEMME ET LE CODE NAPOL&Eacute;ON</h2>
+
+
+<p><strong><i>Nous avons recherch&eacute; dans le Code civil et le Code p&eacute;nal ceux des
+articles qui se rapportent &agrave; la femme.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Par l'examen de ces articles, on pourra se rendre compte combien
+Napol&eacute;on souhaitait marquer la d&eacute;pendance de l'&eacute;pouse &agrave; l'&eacute;poux.
+Convaincu qu'elle &eacute;tait faible, il la voulait prot&eacute;g&eacute;e par le mari. Mais
+en lui accordant cette protection, il exigeait d'elle une absolue
+soumission &agrave; une discipline familiale, que d'ailleurs il souhaitait
+douce. Enfin, ennemi des d&eacute;sordres conjugaux, il frappa in&eacute;galement
+l'&eacute;pouse et l'&eacute;poux, sachant la diff&eacute;rence de r&eacute;sultat d'une m&ecirc;me faute
+et pour marquer, semble-t-il, le caract&egrave;re grave et &eacute;lev&eacute; de l'&eacute;pouse,
+qui, &agrave; ses yeux, est surtout la M&egrave;re.</i></strong></p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="CODE_CIVIL" id="CODE_CIVIL"></a>CODE CIVIL</h2>
+
+<h3>LIVRE PREMIER.&mdash;TITRE PREMIER</h3>
+
+<p class="center"><b>Jouissance des droits civils.</b></p>
+
+
+<p>Tout Fran&ccedil;ais a la jouissance ou propri&eacute;t&eacute; des droits civils; mais
+quelques Fran&ccedil;ais, comme les mineurs, les interdits et les <i>femmes
+mari&eacute;es</i> n'ont pas l'exercice de leurs droits.</p>
+
+
+<h3>TITRE III</h3>
+
+<p class="center"><b>Du domicile.</b></p>
+
+<p>Celui qui est <i>soumis</i> &agrave; une personne est domicili&eacute; chez elle: ainsi la
+<i>femme</i> est domicili&eacute;e chez son mari.</p>
+
+
+<h3>TITRE V</h3>
+
+<p class="center"><b>Des droits et des devoirs respectifs des &eacute;poux.</b></p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 213.&mdash;Le mari doit <i>protection</i> &agrave; sa femme, la femme <i>ob&eacute;issance</i> &agrave;
+son mari.</p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 214.&mdash;La femme est oblig&eacute;e d'habiter avec le mari et de le suivre
+partout o&ugrave; il juge &agrave; propos de r&eacute;sider; le mari est oblig&eacute; de la
+recevoir et de lui fournir tout ce qui est n&eacute;cessaire pour les besoins
+de la vie, selon ses facult&eacute;s et son &eacute;tat.</p>
+
+
+<h3>TITRE VI</h3>
+
+<p class="center"><b>Du divorce.</b></p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 229.&mdash;Le mari pourra demander le divorce pour cause d'adult&egrave;re de
+sa femme.</p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 230.&mdash;La femme pourra demander le divorce pour cause d'adult&egrave;re de
+son mari lorsqu'<i>il aura tenu sa concubine dans la maison commune</i>.</p>
+
+
+<h3>TITRE VI</h3>
+
+<p class="center"><b>De la s&eacute;paration de corps.</b></p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 308.&mdash;La femme contre laquelle la s&eacute;paration de corps sera
+prononc&eacute;e pour cause d'adult&egrave;re sera condamn&eacute;e, par le m&ecirc;me jugement et
+sur la r&eacute;quisition du minist&egrave;re public, &agrave; la r&eacute;clusion dans une maison
+de correction pendant un temps d&eacute;termin&eacute;, qui ne pourra &ecirc;tre moindre de
+trois mois, ni exc&eacute;der deux ann&eacute;es.</p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 309.&mdash;<i>Le mari restera le ma&icirc;tre d'arr&ecirc;ter l'effet de cette
+condamnation en consentant &agrave; reprendre sa femme</i>.</p>
+
+
+<h3>TITRE VII</h3>
+
+<p class="center"><b>De la paternit&eacute; et de la filiation.</b></p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 340.&mdash;La recherche de la paternit&eacute; est interdite.</p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 341.&mdash;La recherche de la maternit&eacute; est admise.</p>
+
+
+<h3>TITRE IX</h3>
+
+<p class="center"><b>De la puissance paternelle.</b></p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 373.&mdash;Le p&egrave;re seul exerce cette autorit&eacute; durant le mariage.</p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 374.&mdash;L'enfant ne peut quitter la maison paternelle sans la
+permission de son p&egrave;re, si ce n'est pour <i>enr&ocirc;lement volontaire</i><a name="FNanchor_8_8" id="FNanchor_8_8"></a><a href="#Footnote_8_8" class="fnanchor">[8]</a>,
+apr&egrave;s l'&acirc;ge de dix-huit ans r&eacute;volus.</p>
+
+
+<h3>TITRE X</h3>
+
+<p class="center"><b>De la tutelle des p&egrave;re et m&egrave;re.</b></p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 389.&mdash;Le <i>p&egrave;re</i> est, durant le mariage, administrateur des biens
+personnels de ses enfants mineurs.</p>
+
+
+<h3>LIVRE III.&mdash;TITRE PREMIER</h3>
+
+<p class="center"><b>Des successions.</b></p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 776.&mdash;Les femmes mari&eacute;es ne peuvent pas valablement accepter une
+succession sans l'autorisation de leur mari.</p>
+
+
+<h3>TITRE II</h3>
+
+<p class="center"><b>Des donations entre vifs et des testaments.</b></p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 905.&mdash;La femme mari&eacute;e ne pourra donner entre vifs sans l'assistance
+ou le consentement sp&eacute;cial de son mari.</p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 934.&mdash;La femme mari&eacute;e ne pourra accepter une donation sans le
+consentement de son mari.</p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 1029.&mdash;La femme mari&eacute;e ne pourra accepter l'ex&eacute;cution testamentaire
+qu'avec le consentement de son mari.</p>
+
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="CODE_PENAL" id="CODE_PENAL"></a>CODE P&Eacute;NAL</h2>
+
+
+<h3>LIVRE III</h3>
+
+<p class="center"><b>Crimes et d&eacute;lits.</b></p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 324.&mdash;Dans le cas d'adult&egrave;re pr&eacute;vu par l'article 336, le meurtre
+commis par l'&eacute;poux sur son &eacute;pouse ainsi que sur le complice &agrave; l'instant
+o&ugrave; il les surprend en flagrant d&eacute;lit dans la maison conjugale est
+excusable.</p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 336.&mdash;L'adult&egrave;re de la femme ne pourra &ecirc;tre d&eacute;nonc&eacute; que par le
+mari.</p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 337.&mdash;La femme convaincue d'adult&egrave;re subira la peine de
+l'emprisonnement pendant trois mois au moins et deux ans au plus. Le
+mari restera le ma&icirc;tre d'arr&ecirc;ter cette condamnation en consentant &agrave;
+reprendre sa femme.</p>
+
+<p><span class="smcap">Art</span>. 339.&mdash;Le mari qui aura entretenu une concubine dans la maison
+conjugale et qui aura &eacute;t&eacute; convaincu sur la plainte de la femme sera puni
+d'une amende de cent francs &agrave; deux mille francs.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="LETTRES_A_M_WALEWSKA" id="LETTRES_A_M_WALEWSKA"></a>LETTRES &Agrave; M<sup>me</sup> WALEWSKA</h2>
+
+
+<p><strong><i>Apr&egrave;s la victoire d'I&eacute;na, Napol&eacute;on occupa la Pologne et fit dans
+Varsovie, sa capitale, une entr&eacute;e glorieuse. Les Polonais, qui avaient
+vu dans son triomphe l'espoir de leur affranchissement, lui firent un
+accueil enthousiaste. Les f&ecirc;tes succ&eacute;d&egrave;rent aux f&ecirc;tes. Au cours de l'une
+d'elles, dans un bal, Napol&eacute;on remarqua Marie Walewska. Pour la premi&egrave;re
+fois peut-&ecirc;tre depuis qu'il est empereur, il laissa voir son trouble et
+l'&eacute;crivit, bien que dans un billet bref, o&ugrave; le chef para&icirc;t plus que
+l'amoureux. Ce billet, que Duroc<a name="FNanchor_9_9" id="FNanchor_9_9"></a><a href="#Footnote_9_9" class="fnanchor">[9]</a> porta, &eacute;tait ainsi con&ccedil;u:</i></strong></p>
+
+<div class="blockquot"><p>&laquo;Je n'ai vu que vous, je n'ai admir&eacute; que vous, je ne d&eacute;sire que
+vous. Une r&eacute;ponse bien prompte pour calmer l'impatiente ardeur de</p>
+
+<p class="sign">&laquo;N.&raquo;</p></div>
+
+<p><strong><i>La signature, qui n'est qu'un paraphe, le style, qui n'est qu'une suite
+d'exclamations que termine un ordre, tout cela parut une impertinence
+aux yeux de la jeune Polonaise. Elle refusa l'invitation.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>L'Empereur ne se tint pas pour battu. Il a conscience de sa valeur, et
+si d'autres, plus modestes et surtout moins actifs que lui,
+r&eacute;pugneraient &agrave; l'affirmer, il ne craint pas de l'&eacute;crire &agrave; celle qu'il
+veut conqu&eacute;rir:</i></strong></p>
+
+<div class="blockquot"><p>&laquo;Vous ai-je d&eacute;plu, madame? J'avais cependant le droit d'esp&eacute;rer le
+contraire. Me suis-je tromp&eacute;! Votre empressement s'est ralenti,
+tandis que le mien augmente. Vous m'&ocirc;tez le repos! Oh! donnez un
+peu de joie, de bonheur &agrave; un pauvre c&oelig;ur tout pr&ecirc;t &agrave; vous adorer.
+Une r&eacute;ponse est-elle si difficile &agrave; obtenir? Vous m'en devez deux.</p>
+
+<p class="sign">&laquo;N.&raquo;</p></div>
+
+<p><strong><i>&Agrave; ce billet, o&ugrave; paraissait l'ennui de n'avoir pas &eacute;t&eacute; accueilli, la
+crainte d'avoir &eacute;t&eacute; trop brusque et la douleur r&eacute;elle qu'&eacute;prouvait le
+Ma&icirc;tre &agrave; se sentir isol&eacute; dans sa gloire, Marie Walewska, plus par
+respect de ses devoirs d'&eacute;pouse, croyons-nous, que par fiert&eacute;, ne voulut
+pas r&eacute;pondre.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Son entourage a beau lui repr&eacute;senter qu'&ecirc;tre la ma&icirc;tresse de l'Empereur,
+ce n'est pas manquer &agrave; l'honneur, et que ce serait peut-&ecirc;tre pr&eacute;parer le
+salut et la grandeur de la Pologne, Marie Walewska se refuse &agrave; ce
+compromis.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Napol&eacute;on insiste une troisi&egrave;me fois. Son billet est plus tendre encore,
+plus long aussi. Enfin il promet ce que tous les Polonais d&eacute;sirent:</i></strong></p>
+
+<div class="blockquot"><p>&laquo;Il y a des moments o&ugrave; trop d'&eacute;l&eacute;vation p&egrave;se, et c'est ce que
+j'&eacute;prouve. Comment satisfaire le besoin d'un c&oelig;ur &eacute;pris qui
+voudrait s'&eacute;lancer &agrave; vos pieds et qui se trouve arr&ecirc;t&eacute; par le poids
+de hautes consid&eacute;rations paralysant les plus vifs d&eacute;sirs? Oh! si
+vous vouliez!... Il n'y a que vous seule qui puissiez lever les
+obstacles qui nous s&eacute;parent. Mon ami Duroc vous en facilitera les
+moyens.</p>
+
+<p>Oh! venez! venez! Tous vos d&eacute;sirs seront remplis. Votre patrie me
+sera plus ch&egrave;re quand vous aurez piti&eacute; de mon pauvre c&oelig;ur.</p>
+
+<p class="sign">&laquo;N.&raquo;</p></div>
+
+<p><strong><i>Le lendemain de la r&eacute;ception de ce billet, lasse des assauts de
+Napol&eacute;on et surtout d'entendre les pri&egrave;res de son entourage, qui
+persistait &agrave; voir dans son consentement l'av&egrave;nement de la Pologne, Marie
+Walewska se rendit au ch&acirc;teau imp&eacute;rial. Ce fut la nuit, entour&eacute;e de
+myst&egrave;re, voil&eacute;e et en voiture ferm&eacute;e, qu'elle y arriva en compagnie d'un
+gardien discret.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Napol&eacute;on l'attendait. Il &eacute;tait l&agrave;, debout, dans la salle ou on
+l'introduisit. Empress&eacute;, comme il savait l'&ecirc;tre avec les femmes qu'il
+aimait, l'Empereur se montra galant. Mais Marie Walewska, toute surprise
+encore, ne put que pleurer, se montrer nerveuse et d'une timidit&eacute; qui
+pouvait surprendre. Quand, &agrave; deux heures du matin, on vint la prendre
+pour la reconduire chez elle, comme il avait &eacute;t&eacute; convenu, Napol&eacute;on
+n'avait obtenu qu'un droit de consolation et sa promesse de revenir le
+lendemain.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Aussi, d&egrave;s son r&eacute;veil, sa femme de chambre lui remit-elle ce mot, qui
+accompagnait un bouquet et une guirlande de diamants:</i></strong></p>
+
+<div class="blockquot"><p>&laquo;Marie, ma douce Marie, ma premi&egrave;re pens&eacute;e est pour toi, mon
+premier d&eacute;sir est de te revoir. Tu reviendras, n'est-ce pas? Tu me
+l'as promis. Sinon l'aigle volerait vers toi. Je te verrai &agrave; d&icirc;ner,
+l'ami<a name="FNanchor_10_10" id="FNanchor_10_10"></a><a href="#Footnote_10_10" class="fnanchor">[10]</a> le dit. Daigne donc accepter ce bouquet: qu'il devienne
+un lien myst&eacute;rieux qui &eacute;tablisse entre nous un rapport secret au
+milieu de la foule qui nous environne. Expos&eacute;s aux regards de la
+multitude, nous pourrons nous entendre. Quand ma main pressera mon
+c&oelig;ur, tu sauras qu'il est tout occup&eacute; de toi et, pour r&eacute;pondre, tu
+presseras le bouquet! Aime-moi, ma gentille Marie, et que ta main
+ne quitte jamais ton bouquet.</p>
+
+<p class="sign">&laquo;N.&raquo;</p></div>
+
+<p><strong><i>Le soir, elle &eacute;tait au d&icirc;ner. La conversation s'engagea entre elle et
+l'Empereur &agrave; l'aide de ce bouquet. Puis elle vint au palais. L'habitude
+prise, elle y revint chaque soir.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Quand Napol&eacute;on quitta Varsovie pour Finckenstein, elle le suivit. Dans
+cette nouvelle r&eacute;sidence, elle m&egrave;ne une vie clo&icirc;tr&eacute;e, enferm&eacute;e dans un
+ch&acirc;teau morne, o&ugrave; elle ne voit personne. L'Empereur para&icirc;t aux heures
+des repas, pris en t&ecirc;te &agrave; t&ecirc;te. Le reste du temps, elle l'use &agrave; lire, &agrave;
+broder, &agrave; voir la parade &agrave; travers les persiennes.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>De Finckenstein, elle va &agrave; Vienne, et de Vienne &agrave; Paris, o&ugrave; l'Empereur
+lui ach&egrave;te un h&ocirc;tel particulier au 48 de la rue de la Victoire.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>De l&agrave;, elle gagne Schoenbrunn, en 1809, et le ch&acirc;teau de Walewice, en
+1810, o&ugrave; elle accouche d'un fils (le 4 mai): le comte Walewski.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Puis elle revint &agrave; Paris. Mais l'&eacute;poque des revers commen&ccedil;ait.
+Napol&eacute;on, attrist&eacute;, ne pense plus avec la m&ecirc;me gaiet&eacute; &agrave; sa ma&icirc;tresse.
+Des soucis l'absorbent. Il songe &agrave; mourir. C'est quelques jours avant
+l'&Icirc;le d'Elbe. Ce soir o&ugrave;, vaincu, il a voulu se suicider sans y
+parvenir, Marie Walewska attendra toute une nuit l'amant soucieux que,
+bien qu'attrist&eacute;e, elle n'ose d&eacute;ranger. Lui ne se souviendra plus qu'au
+matin qu'elle a pass&eacute; la nuit &agrave; l'attendre dans une pi&egrave;ce proche. Et
+malgr&eacute; tant de douleur qui l'accable, il trouve pour elle, &agrave; d&eacute;faut
+d'amour, des mots d'amiti&eacute; profonde:</i></strong></p>
+
+<div class="blockquot"><p>&laquo;Marie, j'ai re&ccedil;u votre lettre du 15. Les sentiments qui vous
+animent me touchent vivement. Ils sont dignes de votre belle &acirc;me et
+de la bont&eacute; de votre c&oelig;ur. Lorsque vous aurez arrang&eacute; vos
+affaires, si vous voulez aller aux eaux de Lucques ou de Sise, je
+vous verrai avec un grand et vif int&eacute;r&ecirc;t, ainsi que votre fils,
+pour qui mes sentiments sont toujours invariables. Portez-vous
+bien, pensez &agrave; moi avec plaisir et ne doutez jamais de moi.</p>
+
+<p><span style="margin-left: 5em;">Le 16 avril.</span></p>
+
+<p class="sign">&laquo;N.&raquo;</p></div>
+
+<p><strong><i>Napol&eacute;on partit pour l'&Icirc;le d'Elbe. C'est l&agrave; qu'elle le vint visiter le
+1<sup>er</sup> septembre 1814. Elle sera pr&egrave;s de lui encore en 1815, pendant les
+Cent Jours.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>Enfin, quand ce fut l'exil d&eacute;finitif, l'abdication pour Sainte-H&eacute;l&egrave;ne,
+Marie se crut d&eacute;gag&eacute;e de tout serment. Elle &eacute;pousa Philippe-Antoine,
+g&eacute;n&eacute;ral comte d'Ornano, ancien colonel des dragons de la Garde, cousin
+de l'Empereur.</i></strong></p>
+
+<p><strong><i>De ce mariage elle eut un fils<a name="FNanchor_11_11" id="FNanchor_11_11"></a><a href="#Footnote_11_11" class="fnanchor">[11]</a>, le 9 juin 1817. Quelques mois
+apr&egrave;s, vers la mi-d&eacute;cembre, elle mourait dans son h&ocirc;tel de la rue de la
+Victoire, qu'elle avait quitt&eacute; lors de son mariage.</i></strong></p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+
+<div class="footnotes"><h3>FOOTNOTES:</h3>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_1_1" id="Footnote_1_1"></a><a href="#FNanchor_1_1"><span class="label">[1]</span></a> N&eacute; en 1769.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_2_2" id="Footnote_2_2"></a><a href="#FNanchor_2_2"><span class="label">[2]</span></a> N&eacute;e &agrave; la Martinique en 1763. Elle avait 32 ans.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_3_3" id="Footnote_3_3"></a><a href="#FNanchor_3_3"><span class="label">[3]</span></a> Petit chien de Jos&eacute;phine.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_4_4" id="Footnote_4_4"></a><a href="#FNanchor_4_4"><span class="label">[4]</span></a> Fr&egrave;re a&icirc;n&eacute; de Napol&eacute;on, devenu roi d'Espagne.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_5_5" id="Footnote_5_5"></a><a href="#FNanchor_5_5"><span class="label">[5]</span></a> Oncle de Napol&eacute;on I<sup>er</sup>, n&eacute; &agrave; Ajaccio, archev&ecirc;que de Lyon
+et grand aumonier de l'Empire.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_6_6" id="Footnote_6_6"></a><a href="#FNanchor_6_6"><span class="label">[6]</span></a> Collectionneur &eacute;quivoque qui volait ce qu'il ne pouvait
+acqu&eacute;rir.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_7_7" id="Footnote_7_7"></a><a href="#FNanchor_7_7"><span class="label">[7]</span></a> Alexandre Des Mazis avait &eacute;t&eacute; &agrave; l'&Eacute;cole militaire de Paris,
+l'instructeur d'infanterie de Bonaparte. Tous deux s'&eacute;talent li&eacute;s d'une
+&eacute;troite amiti&eacute; qui se resserra au cours de communes garnisons. &Eacute;migr&eacute;
+sous la Terreur, Des Mazis ne rentra en France que sous le consulat.
+Napol&eacute;on le nomma administrateur mobilier de la couronne, officier civil
+de sa maison et chambellan. &Agrave; la chute de l'empereur, Des Mazis servit
+les Bourbons.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_8_8" id="Footnote_8_8"></a><a href="#FNanchor_8_8"><span class="label">[8]</span></a> Il faut observer cette restriction. Elle exprime la pens&eacute;e
+de Napol&eacute;on, mettant la Patrie (les arm&eacute;es, par cons&eacute;quent) au-dessus de
+la famille.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_9_9" id="Footnote_9_9"></a><a href="#FNanchor_9_9"><span class="label">[9]</span></a> Duroc, aide de camp de l'Empereur et un de ses familiers.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_10_10" id="Footnote_10_10"></a><a href="#FNanchor_10_10"><span class="label">[10]</span></a> Duroc.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_11_11" id="Footnote_11_11"></a><a href="#FNanchor_11_11"><span class="label">[11]</span></a> Rodolphe-Auguste d'Ornano, d&eacute;put&eacute; au Corps l&eacute;gislatif sous
+le Second Empire. Mort le 14 octobre 1866.</p></div>
+
+</div>
+
+
+
+
+
+
+
+<pre>
+
+
+
+
+
+End of Project Gutenberg's Tendresses impériales, by Napoléon Bonaparte
+
+*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK TENDRESSES IMPÉRIALES ***
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+Foundation
+
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+Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm
+concept of a library of electronic works that could be freely shared
+with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project
+Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support.
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+Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
+editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S.
+unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
+keep eBooks in compliance with any particular paper edition.
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+Most people start at our Web site which has the main PG search facility:
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+This Web site includes information about Project Gutenberg-tm,
+including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
+Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to
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+This eBook, including all associated images, markup, improvements,
+metadata, and any other content or labor, has been confirmed to be
+in the PUBLIC DOMAIN IN THE UNITED STATES.
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+Procedures for determining public domain status are described in
+the "Copyright How-To" at https://www.gutenberg.org.
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+No investigation has been made concerning possible copyrights in
+jurisdictions other than the United States. Anyone seeking to utilize
+this eBook outside of the United States should confirm copyright
+status under the laws that apply to them.
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