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authorRoger Frank <rfrank@pglaf.org>2025-10-14 20:09:01 -0700
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+Project Gutenberg's L'Illustration, No. 3658, 5 Avril 1913, by Various
+
+This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
+almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
+re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
+with this eBook or online at www.gutenberg.org
+
+
+Title: L'Illustration, No. 3658, 5 Avril 1913
+
+Author: Various
+
+Release Date: October 30, 2011 [EBook #37886]
+
+Language: French
+
+Character set encoding: ISO-8859-1
+
+*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK L'ILLUSTRATION, NO. 3658, 5 ***
+
+
+
+
+Produced by Jeroen Hellingman et Rénald Lévesque
+
+
+
+
+
+
+L'Illustration, No. 3658, 5 Avril 1913
+
+AVEC CE NUMÉRO
+La Petite Illustration
+CONTENANT
+LES FLAMBEAUX
+PIÈCE EN 3 ACTES
+par M. Henry BATAILLE.
+
+
+
+[Illustration: LA REVUE COMIQUE, par Henriot.]
+
+
+
+Ce numéro contient:
+1º LA PETITE ILLUSTRATION, Série-Théâtre n° 3: LES FLAMBEAUX, de M.
+Henry Bataille;
+2º UN SUPPLÉMENT ÉCONOMIQUE ET FINANCIER de deux pages.
+
+
+
+[Illustration: L'ILLUSTRATION
+_Prix du Numéro: Un Franc._
+SAMEDI 5 AVRIL 1913
+_71e Année.--N° 3658._]
+
+
+
+[Illustration: M. HENNION. M. BARTHOU. M. POINCARÉ.
+LE PREMIER VOYAGE PRÉSIDENTIEL DE M. RAYMOND POINCARÉ
+Le président de la République, le président du Conseil, le nouveau
+préfet de police et les «pitchounettes» de Montpellier.
+_Voir l'article et les autres photographies, page 309._]
+
+
+
+NOTRE NOUVEAU SUPPLÉMENT ÉCONOMIQUE ET FINANCIER
+
+Un nouveau supplément s'ajoute encore, à partir d'aujourd'hui, à nos
+pages déjà si variées et si nombreuses.
+
+L'objet et le programme de _l'Illustration économique et financière_,
+qui sera désormais encartée dans tous nos numéros, sont définis en tête
+de la première feuille offerte sous ce titre à nos lecteurs.
+
+L'adjonction à notre journal «universel» de cette rubrique, si utile
+quand la documentation en est sûre et quand les appréciations y sont à
+la fois sincères, prudentes et judicieuses, nous avait été réclamée
+souvent. Mais nous ne voulions pas, pour lui faire une place, qui aurait
+été parfois insuffisante, restreindre, si peu que ce fût, celle de la
+documentation illustrée d'actualité ou d'art. Nous sommes heureux que le
+succès croissant de _l'Illustration_, qui vient de se manifester encore
+par une nouvelle et importante hausse de notre tirage coïncidant avec
+l'augmentation de notre prix d'abonnement, nous permette de donner deux
+pages de plus--quatre quand ce sera nécessaire--dans chacun de nos
+numéros.
+
+
+
+THÉÂTRE ET ROMAN
+
+_La Petite Illustration_ publiera, les 12 et 26 avril, les quatrième et
+cinquième parties du roman de M. MARCEL PRÉVOST: _Les Anges gardiens_.
+
+Le 19 avril paraîtra _l'Embuscade_, de M. HENRY KISTEMAECKERS,
+représentée à la Comédie-Française.
+
+Le 3 mai, _les Éclaireuses_, de M. MAURICE DONNAY (Comédie-Marigny).
+Puis, successivement: _Hélène Ardouin_, de M. ALFRED CAPUS; _l'Habit
+vert_, de MM. ROBERT DE FLERS ET G.-A. DE CAILLAVET; _Servir_ et _la
+Chienne du roi_, de M. HENRI LAVEDAN.
+
+A la fin du mois de mai, nous commencerons la publication du grand roman
+que M. PAUL BOURGET achève actuellement: _Le Démon de midi_.
+
+Enfin, parmi les autres oeuvres théâtrales que _La Petite Illustration_
+publiera avant la fin de cette saison, nous pouvons citer dès maintenant
+_Le Secret_, de M. HENRY BERNSTEIN.
+
+
+
+COURRIER DE PARIS
+
+LE PROBLÈME DU PORTRAIT
+
+Sous ce titre, M. Jacques-Emile Blanche publiait l'autre jour dans le
+_Gaulois_ un de ces articles mordants, judicieux et fins, qui n'ont
+jamais que deux défauts: d'être trop rares et trop courts. Mettant sur
+la sellette les gens du monde, il leur faisait sans barguigner le
+reproche de se lancer dans l'aventure du portrait avec une inconscience
+aussi coupable que folle, en n'ayant qu'une idée et qu'un but: _être
+beau_, laisser de soi, après soi, une image avantageuse et fascinatrice.
+A l'entendre, la plupart des femmes, et--chose inouïe--la grande
+majorité des hommes, que l'on aurait pu supposer à l'abri d'un pareil
+ridicule, ne sont travaillés, dès qu'ils songent à la reproduction de
+leur admirable image, que de cet unique souci de vanité coquette. Fermés
+à l'art, étrangers à ses exigences et aux nobles sacrifices de
+renoncement personnel qu'il impose, les personnes qui se font peindre
+«ne pensent qu'à elles» et n'y pensent qu'à cet étroit point de vue de
+tricherie en face de la vérité. Elles n'ont pas beaucoup de goût, et peu
+de jugement, ne se connaissent jamais elles-mêmes, ne soupçonnent rien,
+non seulement de leur physique et du véritable caractère qui s'en
+dégage, mais de leur nature morale qu'il s'agit bien pourtant aussi
+d'exprimer sur la toile et à propos de laquelle, plus encore que de
+leurs traits extérieurs, elles battent complètement la breloque, les
+brunes voulant être représentées blondes, les gaies cherchant du coude
+la pose triste, les pensives réclamant une attitude d'animation, et les
+tumultueuses préoccupées, dans une chute soudaine, de donner l'aspect,
+depuis longtemps convoité, de la mélancolie...
+
+Enfin M. Blanche, côté peintre, faisait passer aux modèles mondains,
+pendant deux colonnes de journal, le plus délicieux et mauvais quart
+d'heure qu'il soit possible de traverser...
+
+Tant et si bien qu'après avoir, sans restriction, partagé sa façon de
+voir et de badiner à ce sujet, il m'est venu des scrupules, tournant
+presque au remords, et, dans une lueur, je me suis avisé tout à coup que
+peut-être en se plaçant de l'autre côté, dans le camp des hommes
+insensés et des femmes frivoles, dans la foule de cette humanité
+ordinaire, bourgeoise et mondaine, qui a la faiblesse de vouloir se
+faire peindre et l'orgueil de s'adresser, dans ce but, aux maîtres
+célèbres, je me suis imaginé que l'optique en ce cas pourrait bien
+changer et qu'il y aurait aimablement beaucoup d'excellentes petites
+choses à dire dont il ne serait pas défendu à quelques princes du
+pinceau de tirer profit.
+
+Et d'abord, parlant du goût, je ne craindrai pas d'affirmer que, sauf
+exception, les gens du monde, qu'il s'agisse des nobles aussi bien que
+des bourgeois, ne sont pas moins doués de cette qualité que les
+artistes. Et ils sont tout à fait autorisés à leur fournir, sur
+l'arrangement d'un portrait, la pose à prendre, le costume à choisir et
+mille autres questions qui, sans être en dehors de la technique et de la
+facture, n'en ont pas moins une grande importance, des indications et
+des conseils très précieux. Le peintre est, le plus souvent, un
+spécialiste que l'exécution matérielle de son tableau suffit seule à
+occuper, à remplir, à absorber, un passionné de son art et de son
+métier, pour qui peindre est tout. Et certes, qu'il a raison! Cela est
+magnifique! Et on ne va pas penser que je le blâme? Je le salue et je
+l'admire. Cependant, n'est-il pas, tout de même, un peu trop enfoncé
+parfois dans son intransigeance bourrue? Voyez, comme il est quelquefois
+touchant et limité dans sa façon de concevoir et de mettre en scène le
+modèle qu'il a sous la main? Il ne pèche généralement pas par excès
+d'imagination. Il s'étonne des exigences, des entêtements du modèle qui
+prétend se connaître et ne se connaît pas... Mais que dira-t-on aussi,
+en bonne justice, de lui, du peintre et de ses idées préconçues, de son
+inconsciente tyrannie? N'a-t-il pas souvent, à côté et au-dessous de sa
+manière, sa _manie_? N'a-t-il pas sa pose préférée qu'il tient bien, et
+qu'il vous inflige? N'a-t-il pas un ton qu'il affectionne? N'a-t-il pas
+son _heure_, son éclairage, son expression, sa nuance de regard favorite
+par où il faut passer coûte que coûte? Ne voit-il pas les gens comme il
+veut les voir ou comme il en a l'habitude? N'a-t-il pas ses clichés? Ne
+lui arrive-t-il pas, même avec un superbe talent, de transformer
+complètement son modèle, de le dénaturer, de le désocialiser, d'en faire
+tout autre chose et l'opposé radical de ce qu'il est? Ne se montre-t-il
+pas alors, je vous le demande, aussi aveugle, aussi incompréhensible et
+coupable, plus même, que le brave homme qui s'illusionne sur son compte
+en demandant une attitude un peu au-dessus de son niveau, ou que la dame
+souhaitant une joue de quelques années plus fraîche et plus lisse?
+
+Combien sont-ils les peintres qui, devant le modèle, s'appliquent
+aussitôt à s'oublier, à s'humilier, pour entrer tête basse dans le
+personnage nouveau et inconnu dont ils ont assumé l'entreprise? Combien
+sont-ils cherchant à pénétrer à fond cet étranger qu'ils visitent pour
+la première fois, décidés, quoi qu'il leur en coûte, à sacrifier leurs
+préférences, à modifier leur palette selon l'homme, la femme, l'enfant,
+le vieillard dont le sort pictural est entre leurs mains? Certes, nous
+en connaissons, et beaucoup, parmi lesquels est au premier rang M.
+Blanche. Mais trop souvent encore le peintre, et j'entends le bon
+peintre, de conscience moyenne, et qui sait son affaire, ne s'embarrasse
+pas de tant d'histoires. Devant le monsieur ou la dame à _enlever_, il
+ne se ronge pas de désespoir et de curiosité. Il s'observe d'abord
+lui-même, il se demande quel est le parti le plus avantageux qu'il peut
+tirer de l'individu. «Le modèle veut à tout prix, dit-on, être beau et
+plaire.» Et le peintre? N'a-t-il pas souvent, lui aussi, pour unique
+souci d'être magnifique, de séduire et d'empaumer? de briller à
+l'occasion, et fût-ce aux dépens de celui qui n'est à ses yeux qu'un
+prétexte à prouver une fois de plus son talent, sa virtuosité, et à
+perpétuer sa gloire? Quand il fait le portrait des autres, c'est
+toujours un peu le sien que le peintre exécute en pensée, le portrait de
+sa propre personnalité. Car il sait qu'avant de dire: «Voilà M. Un
+Tel!» ou: «N'est-ce pas Mme X...?» on s'écriera à vingt mètres: «Ah!
+Voilà un Casimir! un Victor! un Philippe!» Et ce n'est qu'ensuite,
+quelques longues minutes plus tard, que l'on aura l'idée de se demander
+ce qu'il représente. Le nom du portraituré n'est qu'un sous-titre.
+
+Et la question de ressemblance, qui fait couler tant d'encre et de
+couleur! S'autorisant du peu d'envergure artistique de certains dignes
+messieurs, et de bonnes dames dont l'idée fixe «est d'être criants» sur
+la toile, au point que leur petit chien lui-même, en les regardant,
+gémisse de joie et remue la queue, voilà qu'on en arrive tout doucement
+et sans douleur à proscrire d'un portrait la ressemblance. Elle est
+l'ennemie de l'art. Espérer timidement la ressemblance, c'est avoir
+l'âme d'un photographe et témoigner d'une platitude écoeurante. On vous
+rit au nez et vous perdez toute considération. «Jamais on n'aurait cru
+cela de vous!» La phrase, qui a l'air d'un mot de comédie moliéresque:
+«Un portrait n'a pas besoin d'être ressemblant», est devenue banale et à
+présent fait loi.
+
+Il suffit, tranchent beaucoup de gens «qualifiés», que le peintre fasse
+«avec vous» un joli morceau pour que vous n'ayez rien à dire. Et si,
+près de la toile en face de laquelle vous êtes nez à nez, l'on
+s'extasie: «C'est rudement bien!» pour vous demander ensuite par acquit
+de conscience: «Qui est-ce?» parce qu'on ne vous a pas reconnu, vous
+devez vous déclarer enchanté, et c'est en vous excusant que vous
+répondrez: «C'est moi! mon Dieu, oui!» rougissant comme si, en vous
+nommant, vous faisiez honte au peintre et que vous lui en demandiez
+pardon.
+
+[Illustration: M. André de Fouquières à New-York: promenade au Central
+Park.--_Phot. Alexandre Teneau._]
+
+Non, le modèle ne veut pas être _beau_, à tout prix, et contre toute
+justice. Il se connaît plus qu'on ne le croit, et presque toujours il
+«se plaît», même avec un physique ingrat, et tel que Dieu et ses parents
+l'ont fait. Il ne serait pas embarrassé de citer maints visages
+ravissants, supérieurs au sien, mais pourtant, si vous le mettiez au
+pied du mur, il ne changerait pas, car, ne craignons pas de le répéter,
+il s'aime tel qu'il est. Et par là, entendez tel qu'il est à son maximum
+d'agrément et dans ses meilleurs jours. Il y a, en effet, nous l'avons
+tous éprouvé mille fois avec une ivresse enfantine, des circonstances,
+des heures, des minutes où nous avons le sentiment pur et certain
+d'être, par un réflexe moral, en presque parfaite beauté physique, à ce
+point relatif de réussite générale qu'il nous est permis çà et là
+d'atteindre. Quand nous nous regardons, à ces instants privilégiés, nous
+ne nous trouvons pas beaux, mais mieux. Nous nous sentons en béatitude
+vitale, en état de quasi-bonheur, de reconnaissance et de bénédiction.
+Nous aimons, nous nous croyons aimés, nous nous voyons aimables. Ne
+serait-ce pas à un de ces passages-là que le peintre inspiré devrait
+nous saisir plutôt que de s'appliquer, comme il semble en avoir si
+souvent l'obstination maladive, à nous représenter en dépression, en
+laideur, en vulgarité quotidienne...? Cette façon de comprendre ne
+l'empêcherait pas, me semble-t-il, de produire un chef-d'oeuvre, et voilà
+la vraie ressemblance, la seule qu'ait le droit et un peu aussi le
+devoir d'exiger de lui le modèle, sa ressemblance avec l'homme heureux,
+dégagé, élevé, éclairé, rayonnant, supérieur à lui-même et à son
+ordinaire qu'il a le noble désir d'être toujours et qu'il a la grâce de
+devenir quelquefois. Que l'artiste profite de ces éclaircies humaines
+d'idéal. Et même alors, s'il rate la ressemblance, il la donnera. Il
+fera un portrait de nous-mêmes qui ne sera pas uniquement celui de notre
+nez, la géologie de notre peau, de nos trois plis, la miniature de notre
+verrue et l'apothéose de nos ongles.
+
+HENRI LAVEDAN.
+
+_(Reproduction et traduction réservées.)_
+
+
+
+LA SOCIÉTÉ AMÉRICAINE D'AUJOURD'HUI ET CELLE DE DEMAIN
+
+_M. André de Fouquières, auquel sa réputation de Parisien averti a
+réservé aux États-Unis le plus flatteur, le plus chaleureux accueil,
+vient de revenir en France. Après avoir parlé aux Américains de notre
+pays, et avant de nous conter, en une série de conférences au théâtre
+Marigny, ses impressions d'outre-Atlantique, il en donne aujourd'hui la
+primeur à_ L'Illustration: _attentif à tous les spectacles de la vie
+yankee, M. André de Fouquières a vu se dessiner, pendant son séjour à
+New-York, une curieuse évolution dans les moeurs, dont il définit ici le
+caractère._
+
+A mon départ, plusieurs journaux m'ont décerné le titre d' «ambassadeur
+des Modes». Peut-être certains ne le faisaient-ils point sans quelque
+ironie, et je fus tout d'abord surpris de constater, dès mon arrivée,
+que les Américains prenaient ce titre au sérieux. Mais, depuis, j'ai
+compris qu'un tel rôle, en apparence puéril, valait d'être joué. La mode
+est la seule industrie française qui soit prépondérante aux États-Unis.
+Et quelle source de fortune ne représente-t-elle pas? Nulle part, il
+n'est possible de voir une telle folie de luxe, une telle émulation dans
+la lutte pour l'élégance, un tel _respect_ des fantaisies de la mode.
+Jamais une Américaine ne transforme au goût du jour une robe de l'autre
+saison; elle n'admet et ne porte que le _neuf_. Elle observe avec
+minutie les moindres transformations inventées par nos couturiers, et
+l'originalité les effraie si peu que c'est à New-York que les «maîtres»
+de la rue de la Paix adressent leurs plus audacieuses créations. Des
+sommes formidables sont réservées chaque année à la toilette féminine et
+nombreuses sont les maisons françaises qui doivent au faste yankee
+beaucoup de leur prospérité. Eh bien, tout cela menace de changer et
+nous avons à craindre non seulement la concurrence étrangère, mais
+encore un nouvel état d'esprit.
+
+Parlons d'abord de la concurrence: elle est acharnée et terrible. Elle
+vient surtout de l'Allemagne, qui compte aux États-Unis 400.000
+représentants pour 30.000 Français. Les Allemands étant sur place
+prennent aisément «position». À vrai dire, les modes inventées à Berlin
+ou à Munich ne sont pas acceptées par l'aristocratie new-yorkaise: les
+fameux «Quatre-Cents» dont le cercle est étroitement fermé, et les
+nouveaux millionnaires, les puissants industriels qui forment une
+société neuve à côté de cette élite, ont trop le souci d'imiter les
+arbitres du «smart set» pour s'adresser à d'autres couturiers que les
+nôtres. Mais la petite bourgeoisie commence à se laisser persuader par
+les catalogues alléchants, les journaux de mode qui annoncent les
+nouveautés parisiennes et sont édités par des maisons germaniques. La
+vente de nos soies diminue. Nos modistes ont moins de commandes.
+L'«Article de Paris» se fabrique meilleur compte à Boston ou à
+Baltimore. Et, malheureusement, les couturiers français semblent faire
+peu d'efforts pour maintenir le prestige utile de notre élégance chez un
+peuple admirateur de toutes les traditions et qui estime en nous ce
+culte du bon ton et des belles manières, symbole, à ses yeux, du plus
+glorieux passé.
+
+Je suis arrivé en Amérique au moment même où la plus curieuse évolution
+risque de se produire. Evolution n'est pas le terme exact, car c'est en
+quelque sorte un retour vers les moeurs anciennes. Deux faits d'inégale
+importance sont les prodromes de ce que je nommais le «nouvel état
+d'esprit»: la manifestation quasi officielle des suffragettes, l'arrivée
+au pouvoir du président Wilson.
+
+Les suffragettes?... Elles m'ont semblé, en vérité, bien différentes de
+celles qui font entendre à Londres leurs voix si turbulentes. Elles ont
+organisé le 3 mars 1913, à Washington, la veille de l'entrée du
+président à White-House, la plus singulière et la plus déroutante des
+processions. Un magnifique programme illustré, répandu à profusion,
+publiait, en même temps que les revendications féminines, les
+photographies des plus notoires suffragettes (et il y en a de
+charmantes!). Il annonçait aussi l'ordre dans lequel devait se dérouler
+la parade. Et tout était combiné à merveille, avec cet esprit d'ordre et
+de méthode qui caractérise la race. Venaient d'abord, à la suite de Mrs
+Richard Coke Burleson, la Grande Maréchale, les officiers de la
+«National American Woman suffrage Association» ayant à leur tête la
+présidente, la révérende Anna Howard Shaw, qui possède les plus hauts
+grades universitaires. Ensuite défilaient les nations où la femme a
+obtenu le droit de vote, celles où elles sont bien près de l'avoir et
+enfin celles où elles ne l'ont pas encore. Après quoi, c'était la grande
+cavalcade reconstituant l'historique de la cause féministe et
+représentant les diverses carrières dans lesquelles les femmes se sont
+distinguées, depuis les infirmières militaires jusqu'aux nourrices,
+depuis les doctoresses jusqu'aux avocates, depuis les écrivains et les
+professeurs jusqu'aux musiciennes et aux actrices. L'actrice se nommait
+miss Fola la Folette et possédait le plus délicieux visage.
+
+Et je vis, ce beau jour de printemps, le plus surprenant carrousel et la
+plus étrange mascarade.
+
+[Illustration: La brigade montée des suffragettes, à
+Washington.--_Copyright Underwood and Underwood._]
+
+Il y avait des chars et des automobiles, de somptueux costumes, des
+étendards multicolores. Et que dira de la «brigade montée» dirigée par
+miss Geneviève Wimsatt, un adorable cow-boy? Les femmes américaines
+montent à cheval comme les hommes et sont d'intrépides cavalières. Les
+banderoles claquaient au vent pour étaler la phrase fatidique: «Vote for
+Women». La présence de Mme Taft dans une tribune d'honneur donnait à
+cette manifestation une apparence officielle. Mais la plupart des
+spectatrices me parurent plus amusées que passionnées par l'allure
+martiale des 6.000 suffragettes. M. Wilson entendra-t-il les appels des
+acharnées lutteuses qui escomptent un changement de régime pour
+renverser «the present political organization of Society, from which
+women are excluded»?
+
+Le _New-York Times_ m'ayant demandé mes impressions, je répondis que
+nous avions en France des idées différentes sur le rôle social des
+femmes, que leur faiblesse même faisait leur charme et que les
+Françaises craindraient trop de perdre certaines prérogatives en
+obtenant des _droits_. Bref, j'accumulai les habituels raisonnements,
+non sans laisser voir que je trouvais immoral d'imaginer qu'un homme
+pouvait--par quels moyens?--supplier une femme de lui donner sa voix.
+Aussi bien, au cours de la procession, les suffragettes avaient eu
+besoin du concours des policemen, et les suffragettes ne remplaceront
+jamais les policemen. Je donnai d'autres motifs d'ordre sentimental, et
+je fus hué par quelques aimables féministes.
+
+Tout de même il y a quelque chose de très sérieux dans ce mouvement. Si
+certaines suffragettes ne voient dans les manifestations publiques qu'un
+prétexte à costumes originaux et à plaisantes cavalcades, il en est
+d'autres qui travaillent avec une âpre volonté pour le triomphe de leurs
+idées. Beaucoup, comme Mrs Belmont, la mère de la duchesse de
+Marlborough, appartiennent à l'aristocratie. Et rien n'est plus tenace
+qu'une Américaine pour qui la moindre occupation n'est qu'un moyen de
+prouver son indépendance. Enfin neuf États sur trente-neuf ont accordé
+aux femmes le droit de vote. C'est un résultat.
+
+ *
+ * *
+
+Le 4 mars, j'assistai à la parade en l'honneur de M. Wilson. La voiture
+qui contenait les deux présidents passa au milieu d'une foule énorme et
+enthousiaste. Le caractère yankee est si prompt, si peu inquiet, que
+l'assistance sembla fort peu se préoccuper de dissentiments politiques.
+Pour elle, le Président d'hier et le Président de demain--si
+différents--représentaient la nation et elle s'associa cordialement au
+geste de M. Wilson lorsqu'il salua avec noblesse le drapeau des
+États-Unis (1).
+
+[Note 1: Mais le public se contenta d'applaudir: car en Amérique on ne
+se découvre pas devant le drapeau.]
+
+Le défilé des troupes eut lieu dans un ordre parfait et j'admirai
+surtout les West Point Cadets dont l'allure est à la fois élégante et
+martiale. J'ai remarqué que les régiments des États du Sud sont d'une
+tenue supérieure à ceux du Centre. Cela, m'a-t-on dit, parce que les
+New-Yorkais sont trop préoccupés par le souci des affaires pour être
+_uniquement_ des soldats. L'explication m'a paru typique. Et j'ai goûté
+d'autant mieux les pittoresques costumes du Virginia military Institute,
+des Richmond Blues et du 5e régiment de Maryland qui rappellent les
+uniformes brodés et soutachés du premier Empire.
+
+Mais ce que je ne saurais oublier, c'est la bizarre chevauchée des
+gouverneurs des États, tous en redingotes et coiffés de chapeaux hauts
+de forme, maintenant leurs coursiers bien en ligne, observant avec une
+gravité imperturbable l'allure militaire. Derrière eux, dans le même
+ordre merveilleux, d'autres cavaliers, les dignitaires civils en
+redingotes et en chapeaux hauts de forme, imitaient la démarche sévère
+de leurs chefs de troupe.
+
+[Illustration: M. Wilson et M. Taft.]
+
+Dès que cette somptueuse parade eut pris fin, j'observai dans les
+tribunes où se trouvait réunie la belle société de Washington un
+changement subit d'attitudes. On parla politique et j'entendis les
+doléances des républicains qui venaient d'assister au triomphe des
+démocrates.
+
+C'est que l'avènement de M. Wilson a une signification particulière. Et
+cette fois la belle confiance des Américains a lieu d'être troublée.
+C'est en approchant les deux Présidents que j'ai compris la tristesse
+soudaine et l'incertitude du monde des affaires. M. Taft m'avait fait
+l'honneur, deux jours avant son départ de White-House, de m'accorder une
+audience privée. Notre ambassadeur, l'aimable M. Jusserand, qui est à
+Washington le doyen du corps diplomatique, et M. Chandler Hale,
+secrétaire, d'État, avaient été mes gracieux introducteurs. M. Taft
+m'accueillit avec une bonhomie cordiale et me parla de Paris et de la
+France. Il m'entretint avec admiration de l'oeuvre de la Croix-Bouge
+dont il avait reçu des délégués quelque temps auparavant. Il me dit
+enfin que nous devions être heureux d'avoir désormais à la tête de notre
+pays un homme aussi éminent que M. Raymond Poincaré, dont la réputation
+aux États-Unis est immense. Ce prestige de M. Poincaré, je l'avais
+constaté déjà dans la société new-yorkaise où on le qualifie de «strong
+man». Puis M. Taft me questionna sur mes impressions d'Amérique. Après
+que je lui eus affirmé mon estime pour l'énergie et la puissance d'une
+nation où tout désir ambitieux se transforme en énergie utile, j'ajoutai
+que j'avais été frappé par l'antithèse des caractères si pondérés, si
+acharnés, si précis, lorsqu'il s'agissait du labeur quotidien, du
+«business» impérieux et dominateur, et si jeunes pourtant, si gais, si
+épris du luxe et du jeu. J'avouai que je trouvai un grand charme à ce
+côté un peu français.
+
+--Ainsi, dis-je, je suis toujours surpris lorsque je vois des hommes
+graves, des magistrats, des professeurs, des industriels célèbres, se
+livrer à une danse endiablée, à ce «pas du dindon», le turkey-trot qui
+fait fureur en Amérique.
+
+Sous la présidence de M. Wilson on ne dansera pas le «pas du dindon» à
+White-House.
+
+M. Wilson parle peu. On ne sait pas ce que pense M. Wilson. Et le monde
+des affaires qui apprécie la discrétion, accueillerait fort bien M.
+Wilson, s'il n'avait par ses premiers actes ébauché tout un programme
+qui l'effraie un peu.
+
+Avec le Président de demain, le ferment puritain est revenu à la surface
+des âmes américaines. Tout un parti s'exalte à la pensée de voir les
+moeurs sévères et rigoureuses d'autrefois renverser les idées actuelles.
+Car ce puritanisme marque un retour vers l'esprit des premiers
+conquérants du Nouveau-Monde. Le peuple, surtout, est satisfait: il
+pressent sa revanche contre les brasseurs de millions. Et certains
+industriels, pour la première fois, ne quitteront pas New-York au
+printemps, tellement les décisions présidentielles sont faites pour leur
+permettre toute crainte. Songez donc! M. Wilson a refusé le bal
+traditionnel qui eut toujours lieu le soir de l'installation à
+White-House; en outre, il proscrit le vin de sa table; il déclare qu'il
+ne veut plus d'avant-scène d'honneur au théâtre et que lorsqu'il va voir
+une pièce il entend que l'on supprime les tentures qui pourraient
+distinguer sa loge des autres; il prie les orchestres de ne jamais jouer
+l'hymne américain lorsqu'il paraît; il désire n'être qu'un simple
+citoyen parmi le peuple. Et le peuple est ravi.
+
+Mais c'est au tour des élégantes américaines d'écouter Mrs Wilson avec
+stupeur. Mrs Wilson blâme les femmes qui dépensent beaucoup d'argent
+pour leur toilette. Un budget minime doit suffire. Mrs Wilson et ses
+filles se contentent de consacrer 35 francs à un corsage et 200 francs à
+une robe. Tout budget féminin qui excède 5.000 francs est exagéré. Et
+les femmes des secrétaires d'État font chorus. Le gouvernement est
+économe, austère et pratique. Tout est changé. Les ambassadeurs n'auront
+plus à envisager les difficultés d'un séjour à New-York. Le faste
+devient une manière d'inconduite. L'excentricité est bannie des moeurs.
+Nous ne verrons plus partir de Paris ces scintillantes bottines
+mordorées et les gants mauves ou roses qu'osaient, porter les jeunes
+misses émancipées. On assure que la misère sera moins grande le jour où
+les trusteurs cesseront d'être prodigues. Le monde des affaires s'en
+amuserait s'il n'était inquiet. Mais voici que M. Wilson renonce au
+yacht qui faisait la joie de ses prédécesseurs. Et l'on s'effare. Les
+honneurs que M. Wilson repousse ne s'adressaient pas à sa personne, mais
+au chef d'une nation. L'Amérique puritaine ne sera plus la patrie des
+fêtes ruineuses ni des folles élégances.
+
+ANDRÉ DE FOUQUIÈRES.
+
+
+
+LES PETITES OUAILLES BLANCHES DE L'ABBÉ POPULAIRE
+
+Midinettes sortant de l'église Saint-Roch après le sermon de midi: la
+Révoltée, la Résignée, la Bavarde, la Frivole, la Rêveuse...
+
+C'est une charmante et bienfaisante idée qu'a eue un vicaire de la
+paroisse Saint-Roch, l'abbé Populaire, de convier en son église, pour
+une «neuvaine» spéciale, employée à de courts sermons familiers, «les
+ouvrières du quartier de l'Opéra». A midi, l'atelier a entr'ouvert ses
+portes et a laissé s'échapper toutes ces petites laborieuses, qui
+emplissent la rue d'un joyeux tumulte... Mais la libre flânerie est
+parfois mauvaise conseillère, et les gens d'expérience assurent qu'elle
+ne conduit ni à la sagesse ni au bonheur. Les quelque vingt minutes
+qu'elles lui consacraient, le prédicateur de Saint-Roch les a réclamées,
+pendant neuf jours, pour ses conférences. Vingt minutes, ce n'est guère!
+Mais il n'en faut point davantage pour faire méditer ces jeunes âmes, si
+frivoles en apparence, et si accessibles pourtant à la claire raison, et
+qui retrouvent avec tant de facile simplicité la foi de l'enfance.
+
+La «neuvaine des midinettes» a commencé la semaine dernière. Dans la
+salle des catéchismes qui leur avait été réservée, elles se pressaient,
+un peu émues sans doute, offrant par avance aux admonestations leurs
+têtes brunes et blondes. Pour ses débuts, le prêtre les mit en garde
+contre les dangers de l'imagination, qui est, affirma-t-il, funeste aux
+jeunes filles. Après avoir ainsi gourmande, très paternellement, les
+Rêveuses, l'abbé Populaire parla tour à tour, dans les conférences qui
+suivirent, des Frivoles, des Bavardes, des Résignées, des Révoltées et
+des Déchues. Et chacune reçut la petite leçon qu'elle méritait.
+
+Les voici toutes, au sortir de l'église, celles à qui l'excellent
+prédicateur vient de dire leurs vérités. Elles emportent avec elles la
+bonne parole, qui sans doute les rendra meilleures. Et, quand elles
+auront regagné l'atelier, les heures de travail leur paraîtront plus
+légères.
+
+
+
+[Illustration: LA CONSÉCRATION DE LA VICTOIRE GRECQUE.--A Janina: le
+Diadoque (qui allait être, le lendemain, le nouveau roi) assiste, avec
+les princes à la «Doxologie» célébrée par les Turcs de la ville en
+l'honneur de l'armée victorieuse.--_Phot. prise par M. Jean Leune,
+pendant le discours du mufti._]
+
+[Illustration: Le général Essad pacha. _Croquis de M. Jean Leune, à bord
+au Pylaros, le 22 mars._]
+
+[Illustration: Le consul de France à Janina, M. E. Dussap, et sa femme,
+l'écrivain bien connu Guy Chantepleure.]
+
+[Illustration: Le colonel Vehib bey. _Croquis de M. Jean Leune, à bord
+du Pylaros le 22 mars._]
+
+A JANINA
+
+Pour compléter notre intéressante documentation sur la prise de Janina,
+nous ajoutons aujourd'hui aux notes et aux photographies de M. Jean
+Leune, publiées dans notre dernier numéro, cette page illustrée sur les
+lendemains de la victoire grecque. Ce sont encore, avec deux croquis
+rapides, par M. Jean Leune, des défenseurs de Janina, le général Essad
+pacha et le colonel Vehib bey, des photographies envoyées par notre
+intrépide correspondant à l'armée d'Epire. Voici le groupe sympathique
+et bien français que forment notre consul à Janina, M. Dussap et sa
+femme, connue en littérature sous le nom de Guy Chantepleure, deux
+vaillants qui, par leur attitude ferme et courageuse, ont su, à certains
+moments difficiles, imposer aux soldats turcs exaspérés le respect de la
+population grecque de la ville. Nos documents du bas de la page montrent
+des pièces de l'artillerie turque broyées sur la forte colline de
+Bizani, et constituent une sorte de bas-relief pour ce document de
+tableau d'histoire: le héros du jour, le Diadoque, assistant, sur un
+trône improvisé, à la cérémonie rituelle que les musulmans soumis
+célèbrent en l'honneur de leurs nouveaux maîtres.
+
+[Illustration: L'artillerie turque de Bizani: pièces de 85 et de 105mm
+détruites ou gravement endommagées par les obus de l'artillerie
+grecque.--_Phot. Jean Leune_.]
+
+[Illustration: Le cercueil de Georges Ier transporté sur un affût de
+canon.--._Phot. A. Adossidès._]
+
+DE SALONIQUE AU PIRÉE.
+
+A Salonique, le transfert, sur son yacht, _l'Amphitrite_, du roi
+assassiné, fut, le 25 mars dernier, une cérémonie très impressionnante.
+Parti de la résidence royale, le matin à 9 heures, le cortège funèbre,
+encadré de ces traditionnels evzones qui formaient la garde particulière
+du souverain défunt, s'achemina vers le port au milieu d'un immense
+concours de population recueillie. Toute la garnison avait pris les
+armes. Les drapeaux étaient surmontés de croix voilées de crêpe. Le
+cercueil, qui reposait sur un affût de canon, était enveloppé du drapeau
+national, sur lequel, à l'endroit de la tête, on avait placé la
+couronne, était suivi par la famille royale, et ce furent les princes et
+le nouveau roi lui-même qui, au port, transportèrent le corps à bord de
+_l'Amphitrite_. Il y eut, sur _l'Amphitrite_, un discours du métropolite
+parlant du roi «tombé au champ d'honneur». Et le bâtiment funèbre où
+s'était embarquée la reine Olga, soutenue par le roi Constantin, leva
+l'ancre et prit la direction du Pirée, où, retardé par le brouillard, il
+n'arriva que le 27 mars un peu avant midi. Il était attendu, sur le
+débarcadère, par tous les hauts dignitaires de la Cour et du royaume
+qui, dès que le bâtiment eut jeté l'ancre, montèrent à bord pour
+s'incliner, les premiers, devant la dépouille de leur souverain.
+
+[Illustration: LES FUNÉRAILLES DU ROI GEORGES A SALONIQUE. Au
+débarcadère: les princes hellènes, fils et petits-fils du roi, enlèvent
+le cercueil royal de l'affût de canon pour le transporter sur
+_l'Amphitrite._ A gauche de notre photographie et à droite du cercueil,
+les princes Christophore, Nicolas, le nouveau diadoque Georges et le roi
+Constantin; à gauche du cercueil, les princes André, Alexandre et
+Georges.]
+
+[Illustration: Arrivée au Pirée de _l'Amphitrite_ portant le corps du
+roi Georges.--_Phot. A. Gaziadès._]
+
+Pendant le débarquement du cercueil du roi Georges que continuaient de
+porter les princes de la famille royale, les batteries tirèrent des
+salves. Le corps fut, comme à Salonique, placé sur un affût de canon.
+Les deux reines et les princesses montèrent dans les voitures. Le roi
+suivit le cercueil que précédait le saint-synode et que traînaient sur
+son affût les marins hellènes. Derrière le nouveau souverain venaient
+les princes, le ministre luthérien, les ministres, les consuls
+étrangers, toutes les autorités civiles et militaires.
+
+Au débarcadère et sur tout le trajet, on avait arboré les couleurs
+funèbres, blanc et mauve. Des oriflammes flottaient au vent, portant le
+monogramme du roi en or, surmonté de la couronne.
+
+A la gare, un wagon mortuaire peint en blanc avec des bandes mauves
+latérales reçut le corps du souverain et, lorsque le train spécial
+s'ébranla pour se diriger sur la capitale, les canons des navires
+étrangers ancrés au Pirée tirèrent, en même temps que les batteries
+grecques, les salves de salut.
+
+A Athènes, le cortège se rendit, au milieu d'une affluence énorme, à la
+cathédrale tapissée de couronnes, où, après une cérémonie religieuse, le
+cercueil a été déposé dans une chapelle, en attendant le jour des
+funérailles solennelles.
+
+[Illustration: Le cercueil traîné sur un affût par les marins hellènes.
+_--Phot. Rhomaïdès-Zeitz._]
+
+[Illustration: LE RETOUR A ATHÈNES DE LA DÉPOUILLE MORTELLE DU ROI
+ASSASSINÉ.--Le cortège funèbre quittant le débarcadère du Pirée.--_Phot.
+A. Gaziadès._]
+
+[Illustration: SOFIA FÊTE LA PRISE D'ANDRINOPLE.--Manifestation devant
+la statue du tsar libérateur Alexandre II.--_Phot. Karastoïanof._]
+
+LA PRISE D'ANDRINOPLE
+
+_Les communications entre Andrinople et Sofia restent momentanément
+difficiles et d'une désespérante lenteur. Aucune des photographies ou
+des correspondances dont l'envoi nous a été annoncé par dépêche n'a donc
+pu nous parvenir encore et ne nous parviendra avant la fin de cette
+semaine._
+
+_On ignorerait tout, d'ailleurs, des conditions exactes dans lesquelles
+s'est produite la chute d'Andrinople, si deux longs et importants
+télégrammes d'un correspondant français et d'un correspondant italien
+(M. Ludovic Naudeau, du_ Journal, _et M. Luigi Barzini, du_ Corriere
+délia Sera) _n'avaient complété les brefs communiqués des états-majors
+bulgare et serbe et projeté un peu de lumière dans la chaos des
+nouvelles contradictoires et fantaisistes provenant de Sofia ou de
+Belgrade: prétendu anéantissement de la ville et de ses mosquées, mort
+supposée de Choukri pacha, etc._
+
+_Notre collaborateur M. Réginald Kann--que nous avions envoyé, nos
+lecteurs le savent, en Bulgarie, après la rupture de l'armistice et la
+reprise des hostilités--serait arrivé à Andrinople dès le 27 mars avec
+MM. Naudeau et Barzini s'il n'avait été victime, à son retour de
+Silistrie, d'un assez grave accident dont il se remet peu à peu, mais
+qui a nécessité son retour en France._
+
+_Quand M. Gustave Babin, parti à son tour pour la Bulgarie, a atteint
+Sofia, Andrinople était déjà aux mains des alliés. Il a pourtant
+continué sa route, et les impressions, les descriptions que nous
+attendons de lui auront un intérêt d'autant plus grand qu'elles seront
+illustrées d'après nature de dessins de M. Georges Scott._
+
+_A la nouvelle de la chute d'Andrinople, nous avons pensé en effet que
+le peintre des émouvantes scènes de guerre dans les Balkans, dont
+plusieurs ont été reproduites ici même il y a trois semaines, devait
+aller sur les lieux compléter son admirable collection de Kirk-Kilissé
+et de Loule-Bourgas._
+
+_M. Georges Scott a reçu aussitôt les autorisations nécessaires et, par
+l'Orient-Express jusqu'à Sofia, par les trains militaires ensuite, a
+gagné Andrinople où il a dû arriver mercredi, en compagnie de MM. les
+députés Messimy, ancien ministre de la Guerre, et Bênazet, rapporteur de
+la commission de l'armée._
+
+_En attendant ses envois et ceux de M. Gustave Babin, voici un exposé
+succinct de tout ce que l'on sait actuellement de l'événement le plus
+sensationnel de la guerre des Balkans:_
+
+La chute d'Andrinople, si longtemps, si fiévreusement attendue à Sofia,
+peut être célébrée par les Bulgares comme une belle et glorieuse
+victoire, mais elle ne met pas nécessairement fin à la guerre. Des trois
+points où les armées adverses de Thrace se trouvaient face à face,
+Boulaïr, Tchataldja, Andrinople, ce dernier est le seul dont la
+conservation ne semblait pas d'un intérêt vital pour les Ottomans. La
+perte des lignes de Tchataldja eût livré Constantinople au vainqueur;
+l'occupation de la péninsule de Gallipoli eût permis à la flotte grecque
+de pénétrer dans la Marmara et de bombarder Stamboul à revers; avec
+Andrinople, les Turcs ne voient disparaître qu'un gage précieux pour les
+négociations de paix et la capitulation de Choukri pacha, quoiqu'elle
+libère d'importants contingents alliés, modifie moins la situation
+stratégique que la situation morale au préjudice de la Turquie.
+
+Pour les Bulgares, quel soulagement! C'est l'épine qu'on s'arrache du
+pied, le cauchemar persistant qui se dissipe. De même que la résistance
+de Port-Arthur gêna, pendant toute l'année 1904, le haut commandement
+japonais sur le Chaho; de même la présence, sur sa ligne de
+communications, de la forteresse ennemie, a entravé constamment les
+opérations du général Savof.
+
+L'ATTAQUE ET LA DÉFENSE
+
+[Illustration: Après la prise d'Andrinople: la population de Sofia
+acclame le ministre de Russie, M. Meklioudof. _Phot. M. Bitschef._]
+
+Trois méthodes s'offrent à l'assiégeant pour s'emparer d'un camp
+retranché: l'attaque de vive force, le siège régulier, l'investissement.
+L'attaque de vive force consiste à concentrer sur un ou plusieurs points
+de la ligne de défense un feu intense, à la faveur duquel l'infanterie
+se lance à l'assaut des ouvrages. Le siège régulier permet de
+s'approcher de la place lentement, par une avancée constante, en
+creusant une tranchée profonde qui se dirige en zigzag vers la ligne de
+défense; les travailleurs y progressent peu à peu, à l'abri du canon de
+la place; on parvient ainsi jusqu'aux forts qu'on peut détruire par la
+mine. Par l'investissement on se contente d'entourer la ville, de
+l'isoler, et on compte sur la famine pour l'obliger à capituler; c'est
+le procédé le moins onéreux, mais aussi le moins rapide.
+
+[Illustration: LA CHUTE D'ANDRINOPLE.--Carte des opérations bulgares
+contre les forts de l'Est, dont la prise d'assaut a entraîné la
+reddition de la ville. _D'après les télégrammes de M. Ludovic Naudeau._]
+
+L'armée bulgare était assez mal outillée pour entreprendre un siège
+régulier. Ses troupes techniques--sapeurs, mineurs, artificiers--sont
+peu nombreuses et de qualité médiocre, s'il faut en croire certains
+témoins oculaires, notamment notre collaborateur A. de Penennrun.
+D'ailleurs le terrain argileux des environs d'Andrinople se prête mal
+aux terrassements; les pluies diluviennes de l'automne ne s'infiltrant
+pas dans le sol, les tranchées restent inondées; puis, lorsque les
+gelées arrivent, le travail de sape devient encore plus dur et plus
+pénible. D'autre part, l'artillerie de siège de l'armée bulgare ne
+compte que des pièces de calibre moyen, 150 et 120mm dont un grand
+nombre d'un modèle archaïque. Pas une pièce de 20cm, pas un mortier. A
+l'artillerie de campagne sont allés tous les crédits disponibles; on a
+négligé le matériel lourd. Aussi la tâche imposée au général Ivanof,
+chargé des opérations du siège avec un personnel de pionniers
+insuffisant et un matériel médiocre, paraissait fort ingrate.
+
+Il est vrai que le camp retranché d'Andrinople ne présentait pas sur
+tout son développement des défenses également redoutables. Si les forts
+du secteur nord-ouest répondent à toutes les exigences de la guerre
+moderne, en revanche ceux du secteur est sont plus anciens et ne
+contiennent pas d'abris bétonnés; enfin, dans le secteur ouest et le
+secteur sud, les positions naturelles très solides n'ont été renforcées
+que sommairement par des redoutes de terre. L'infanterie et l'artillerie
+de campagne ottomane suffisaient amplement à la défense de toute la
+ligne; quant à l'artillerie lourde de Choukri pacha, elle était très
+supérieure à celle des assiégeants.
+
+LES PHASES SUCCESSIVES DU SIÈGE
+
+Lorsque les armées bulgares envahirent la Thrace, la 8e division
+descendant la Maritza, la 3e marchant du nord au sud convergèrent sur
+Andrinople. A cette période des hostilités il s'agissait de masquer la
+forteresse avec le moins de troupes possible afin de consacrer le
+maximum des effectifs à la lutte contre l'armée de campagne ennemie.
+L'investissement ne fut d'abord confié qu'à deux divisions et à une
+brigade de cavalerie qui suffirent à refouler les reconnaissances de
+Choukri pacha sur la ligne des forts et à rejeter ensuite dans la place
+une grosse colonne qui tentait de rejoindre l'aile gauche d'Abdullah
+pacha, engagée contre la 1re armée bulgare à Séliolou. L'arrivée d'une
+division nouvellement formée, puis d'unités serbes, permit, vers le 12
+novembre, de compléter l'encerclement d'Andrinople et de la couper de
+toute communication avec l'extérieur. A ce moment deux divisions serbes,
+celles du Timok (1er ban) et du Danube (2e ban), tenaient les secteurs
+ouest et nord-ouest; les 8e et 11e divisions bulgares, plus la brigade
+de réserve de la 9e division, formaient la ligne de blocus des secteurs
+est et sud.
+
+Le général Ivanof n'avait pas attendu que l'investissement fût achevé
+pour tenter des attaques brusquées sur plusieurs ouvrages de la défense,
+ceux des secteurs ouest et sud, qui sont les plus primitifs et les moins
+bien armés. Le 7 novembre, la 8e division s'emparait, après un combat de
+quelques heures, des retranchements de Kartal-Tépé, au sud du faubourg
+de Karagatch. Du côté ouest, il semble que les alliés aient été moins
+heureux et qu'après avoir occupé la position de Papas-Tépé ils en aient
+été chassés par un retour offensif de la garnison d'Andrinople. Jusqu'à
+la conclusion de l'armistice, au commencement de décembre, tous les
+efforts tentés pour reprendre Papas-Tépé ou pour déboucher de
+Kartal-Tépé vers Karagatch échouèrent.
+
+Lorsque les hostilités reprirent, dans les premiers jours de février, les
+alliés avaient renoncé, semble-t-il, à prendre Andrinople par une attaque
+de vive force, comptant sur le blocus et le bombardement pour amener
+Choukri pacha à capituler. La ville étant largement pourvue de vivres,
+les obus n'y causant que peu de ravages, cette tactique ne pouvait
+amener la reddition de la place. Le commandement bulgare s'en rendit
+enfin compte et, reprenant son premier plan d'action, décida d'enlever
+Andrinople d'assaut.
+
+Les opérations de la première période du siège avaient montré que les
+forts du secteur nord-ouest étaient trop puissants pour être pris à la
+baïonnette, que dans les secteurs ouest et sud l'espace manquait pour
+manoeuvrer. Restait le secteur est, le plus étendu, celui où la ceinture
+des ouvrages permanents forme un angle droit, dont le saillant, le fort
+d'Aïvas-Tabia, peut être attaqué à la fois par le nord et l'est; c'est
+le point faible de la ligne. Le général Ivanof résolut de faire exécuter
+des attaques dans tous les secteurs pour y fixer l'ennemi et de
+concentrer son principal effort sur Aïvas-Tabia et les forts voisins.
+
+M. Ludovic Naudeau, envoyé spécial du _Journal_, qui put parcourir le
+terrain du combat quelques heures après l'action, nous raconte comment
+deux formidables batteries, de quarante pièces chacune, furent établies
+au nord et à l'est d'Aïvas-Tabia; 25.000 fantassins massés à proximité
+attendaient à l'abri que le canon leur eût frayé un chemin pour courir à
+la baïonnette sur le fort ennemi. Pendant la nuit du 24 au 25,
+l'infanterie, sortant de ses couverts, chassait les Turcs d'une position
+avancée, le mamelon de Maslak, situé à 2 kilomètres en avant
+d'Aïvas-Tabia. A l'aube du 26, tout était prêt pour l'attaque décisive
+contre cet ouvrage déjà fortement maltraité par les projectiles des
+grosses pièces bulgares.
+
+L'ASSAUT FINAL
+
+«Cependant, dit notre confrère, le moment suprême était arrivé. Le
+général Ivanof avait donné l'ordre au 23e, au 56e, au 53e et à un
+bataillon du 6e de s'élancer à l'assaut d'Aïvas-Tabia. Le 23e, qui
+s'avançait en tête, s'efforça de parvenir jusqu'au réseau des fils de
+fer. Il est accueilli par une grêle de balles, qui, en quelques minutes,
+lui cause des pertes terribles. Il creuse hâtivement des tranchées, il
+s'abrite, il avance par bonds, il arrive jusqu'aux fils de fer, qu'il
+commence à briser à coups de pioche, à coups de pelle, à coups de
+crosse. Mais alors la fusillade turque est si intense que ce qui reste
+du régiment a un instant d'hésitation et commence à reculer. Il a déjà
+perdu 2.000 hommes. C'est alors que le colonel s'élance en tête de ses
+soldats, portant lui-même le drapeau du régiment. En même temps, des
+batteries d'artillerie de campagne et des «howitzers» viennent, sous un
+feu terrible, se mettre en position tout près du 23e régiment, qui,
+reprenant courage, se rue de nouveau. Il est 5 heures du matin. Le 23e,
+à l'assaut, se fraie un passage à travers les fils de fer barbelés. Les
+hommes lancent leurs capotes sur les ronces d'acier, puis ils passent
+tant bien que mal, grâce à ce bizarre expédient. Les Turcs, en face de
+l'ascension obstinée de ces furieux que rien n'arrête, commencent à
+hésiter à leur tour et, tout à coup saisis d'effroi, ils abandonnent
+leur position et ils s'enfuient vers la ville.
+
+» Les survivants du 23e sautent dans la tranchée. Ils sont dans le fort,
+que ne défend aucune force, et aussitôt l'artillerie bulgare (non
+seulement l'artillerie de campagne, mais un certain nombre d'obusiers)
+arrive au galop dans Aïvas-Tabia et y prend position. Déjà, on apprend
+qu'Hadjholou a été enlevé à 3 heures, et c'est le commencement de la
+fin. Toute la ligne des autres forts de l'est, désormais tournée et
+attaquée par le flanc, cède sans résistance. Aucune contre-attaque,
+aucun essai de reconquérir les positions enlevées par les assaillants
+n'est effectuera aucun, moment. La garnison de chaque fort s'enfuit,
+frappée de panique, ou bien elle se rend sans coup férir dans les autres
+secteurs.
+
+[Illustration: Le général bulgare Ivanof, le vainqueur
+d'Andrinople._--Phot. G. Woltz._]
+
+[Illustration: La grande mosquée d'Andrinople. Cette photographie du
+célèbre monument, que l'on avait annoncé à tort avoir été détruit par
+les Turcs eux-mêmes avant l'entrée des Bulgares et qui est heureusement
+intact, a été prise cet hiver, pendant le siège.]
+
+Il en est de même partout. Les défenseurs des forts, trouvant leur
+situation intenable, abandonnent la défense et mettent bas les armes.
+Des milliers de soldats, qui ont jeté leur fusil, se précipitent,
+affolés, vers la ville. Ils s'efforcent de se cacher dans les maisons
+des habitants et de se procurer des vêtements civils. Et, pendant que se
+passent ces scènes lamentables, deux régiments bulgares entrent
+tranquillement, étendards déployés, dans la ville. A 10 heures du matin,
+Choukri pacha, qui venait de faire arborer le drapeau blanc sur la tour
+du guet et qui avait aussi, paraît-il, envoyé des parlementaires dans
+les divers secteurs pour demander des assiégeants la cessation des
+hostilités, n'a pas même le temps de voir revenir ceux-ci. Il est pris,
+purement et simplement, dans l'un des forts, l'Hadirlik, où il s'était
+réfugié.»
+
+Ainsi s'écroulait, en quelques heures, la longue résistance de la
+garnison d'Andrinople.
+
+Ce brusque anéantissement laisse une impression d'étonnement, presque de
+stupeur. On pouvait croire que la famine, les privations avaient
+affaibli le moral des défenseurs. Il n'en est rien. La ville contenait
+encore des approvisionnements en quantité. Certaines denrées, telles que
+le sel et le sucre avaient atteint cent fois leur prix ordinaire; mais
+le grain ne manquait pas; des troupeaux entiers de boeufs et de moutons
+pâturaient dans les jardins; il fallut tuer les chevaux des officiers et
+des attelages d'artillerie pour ne pas les laisser tomber vivants aux
+mains des Bulgares. La soudaineté de l'ouragan d'obus qui s'abattit sur
+eux, la fougue extraordinaire de l'attaque, paraissent avoir déconcerté
+les garnisons des forts et provoqué, chez ces soldats fatigués, une
+panique analogue à celle qui s'empara de leurs compagnons d'armes à
+Kirk-Kilissé et Loule Bourgas. C'est la lassitude, non la faim, qui a eu
+raison de l'armée de Choukri pacha.
+
+[Illustration: UN CHEF-D'OEUVRE DE L'ARCHITECTURE OTTOMANE.--La grande
+mosquée Sélimié d'Andrinople, aux 999 fenêtres.]
+
+_Quel émouvant et magnifique symbole de la conquête que cette mosquée
+d'Andrinople, dont les puissantes assises reposaient, depuis des
+siècles, en terre ottomane, et qui, aujourd'hui, est tombée aux mains
+chrétiennes! Pour ceux que la force des armes a conduits jusqu'en ce
+sanctuaire de l'Islam, on ne saurait imaginer de prise plus superbe, ni
+mieux faite pour exalter l'imagination populaire; et il n'en doit pas
+être aussi de plus douloureuse au coeur des musulmans. A considérer ces
+voûtes hardies, d'où pendent les fils innombrables des lustres, ces
+colonnes, ces portiques, tout ce grandiose lieu de prière, on comprend
+l'obstination de la résistance turque... La mosquée du sultan Sélim, la
+mosquée aux 999 fenêtres, édifiée de 1568 à 1574 par Sinan, est une
+merveille de l'architecture ottomane. Formant un immense carré, agrandi,
+sur l'un des côtés, par l'enfoncement du «mihrab», elle dresse, à une
+hauteur de 35 mètres, sa coupole, qui porte sur huit arcades aux piliers
+arrondis. «La construction intérieure est en briques, sauf les piédroits
+et les corniches qui sont en pierre dure, dit, dans son bel ouvrage sur
+les Coupoles d'Orient et d'Occident, M. Alphonse Oosset; les piliers
+sont recouverts en partie de marbre, et disposés par panneaux en
+facettes étroites; les murs sont ornés de revêtements de faïence, puis
+de peintures... Les lampes suspendues en cercle donnent l'échelle de
+proportions à cet immense ensemble, où l'on ne sait ce qui est le plus à
+admirer, de l'inspiration du génie ou de l'exécution.» Des informations,
+aujourd'hui controuvées, avaient annoncé la destruction de la mosquée
+Sélimié: ce chef-d'oeuvre n'a fort heureusement souffert aucun dommage
+pendant le bombardement et après la chute de la ville._
+
+
+
+[Illustration: L'INAUGURATION DU THÉÂTRE DES CHAMPS-ELYSÉES.--La façade
+illuminée par le projecteur de la tour Eiffel.]
+
+Cette partie de l'avenue Montaigne proche de la place de l'Aima, qui
+était jusqu'à présent peu passagère le soir, est maintenant devenue,
+entre 8 h. 1/2 et minuit, un foyer d'animation et de lumière. Le théâtre
+des Champs-Elysées, où deux salles, l'une consacrée à la musique,
+l'autre à la comédie, s'offrent simultanément au choix du public, a
+fait, cette semaine, son ouverture, et c'est, à l'arrivée et au départ
+des spectateurs, un va-et-vient d'automobiles croisant les rayons de
+leurs lanternes, tandis que la façade marmoréenne de ce nouveau palais
+resplendit, des portes jusqu'aux bas-reliefs du statuaire Bourdelle, de
+la blanche clarté frisante que lui dispense le projecteur de la tour
+Eiffel...
+
+L'inauguration du théâtre de musique, avec _Benvenuto Cellini_--que
+devait suivre, quelques jours plus tard, la première représentation de
+_l'Exilée_ sur la scène de comédie--avait attiré une foule élégante et
+choisie, curieuse de voir les nouveautés promises, depuis longtemps, aux
+Parisiens. La salle claire, aérée, ne pouvait manquer de séduire par le
+confortable de son aménagement, qui permet au spectateur des commodités
+inaccoutumées, et par l'excellence de son acoustique. Il est certain
+qu'un heureux et considérable effort a été réalisé, grâce à M. Gabriel
+Astruc et à ses collaborateurs, les architectes Perret, pour doter la
+capitale d'un nouveau théâtre où l'on puisse goûter parfaitement les
+oeuvres lyriques; aussi le plaisir d'entendre a-t-il été sans mélange.
+La salle elle-même, toute en marbre gris rehaussé par les dorures des
+colonnes, avec sa coupole ornée d'importantes compositions décoratives
+du peintre Maurice Denis, est d'aspect sévère, non exempt de froideur.
+En ce moment où l'on s'ingénie à chercher un style inédit, tout essai,
+si intéressant soit-il, surprend volontiers notre goût. Peut-être
+regrettera-t-on seulement que celui-ci se soit trop directement inspiré
+de l'art mis en honneur à Munich et à Dresde: transplanté à Paris, il
+nous apparaît d'une solennité un peu sèche, délibérément indigente, et
+par là s'écartant de toute tradition française.
+
+[Illustration: A la «Comédie des Champs-Elysées» dirigée par M. Léon
+Poirier: une scène de la pièce d'ouverture, _l'Exilée_, par M. Henry
+Kistemaeckers.]
+
+[Illustration: Angle de la salle et de la scène du Théâtre lyrique,
+dirigé par M. Gabriel Astruc.--_Photographies Gerschel._ DEUX NOUVEAUX
+THÉÂTRES DANS UN MÊME MONUMENT, AUX CHAMPS-ELYSÉES]
+
+[Illustration: Devant les tribunes: le général Lyautey s'entretient avec
+le consul d'Allemagne.--_Phot. Nadelar._]
+
+[Illustration: L'automobile des ministres chérifiens qui arrivent de
+Rabat pour assister au concours hippique.]
+
+[Illustration: Le général Lyautey félicitant un des vainqueurs du
+concours, M. de Vaugelas, dont le cheval a franchi 1 m. 70 de hauteur.
+LA PREMIÈRE RÉUNION SPORTIVE ET MONDAINE AU MAROC: LE CONCOURS HIPPIQUE
+DE CASABLANCA.--_Photographies de Mareschal._]
+
+Casablanca est en voie de devenir--en attendant le port bien outillé et
+les chemins de fer qui assureront sa prospérité--une des villes les
+mieux policées et les plus élégantes de l'Afrique du Nord. A y vivre, on
+ne se douterait point qu'il faut, presque chaque jour, continuer de se
+battre un peu plus loin en terre marocaine, pour conserver aux régions
+soumises et déjà organisées toute la sécurité qu'on leur a promise.
+
+Donc, tandis que les combats se succèdent au seuil des régions encore
+impénétrées, des réunions sportives et mondaines s'organisent à
+Casablanca en pleine prospérité économique. Un officier de chasseurs
+d'Afrique soutenu par le club élégant de la ville «l'Ampha Club», qui
+réunit les personnalités les plus distinguées des colonies française et
+anglaise, a pris l'initiative de ces réunions. Et voici comment fut
+organisé le premier concours hippique du Maroc, qui eut lieu le 23, le
+24 et le 25 mars, et dont le succès ne saurait étonner en ce pays où
+tout le monde monte à cheval et où une belle monture est le premier luxe
+des indigènes. Le résident général, qui fut un très brillant officier de
+cavalerie, et Mme Lyautey assistaient à cette réunion où toutes les
+notabilités étrangères étaient présentes ainsi que le pacha de
+Casablanca, Sr Guebbas, et les ministres chérifiens venus exprès, en
+automobile, de Rabat, pour suivre les épreuves que clôturèrent de
+splendides fantasias.
+
+
+
+[Illustration: UN JOUR DE TEMPÊTE A CASABLANCA.--La jetée assaillie par
+un raz de marée.--_Phot. A. Fouet._]
+
+La mauvaise saison s'est fait rudement sentir, cette année, sur les
+côtes du Maroc, si peu propices aux navigateurs. Il ne s'est presque
+point passé de semaine où l'on n'ait eu à signaler quelque accident
+maritime, dû à la tempête, si souvent déchaînée en ces parages, et à
+l'insuffisance des abris. Les ports mêmes n'y offrent point aux bateaux
+de sûrs asiles: celui de Casablanca, que sa «barre» rend impraticable
+par les gros temps, ne leur a donné, tout cet hiver, qu'une hospitalité
+précaire. Tout récemment encore, le 23 mars, un raz de marée d'une
+extrême violence s'est abattu sur ses quais, les envahissant de ses eaux
+furieuses; mal contenues par les jetées trop basses, elles vinrent
+inonder les bâtiments de la douane, non sans grand dommage pour les
+marchandises qui y étaient déposées. Le même jour, deux voiliers
+étrangers se perdaient corps et biens dans 'la rade de Rabat, tandis
+qu'un troisième, la _Marguerite_, battant pavillon français, allait
+s'échouer, près de la ville, devant la caserne du tabor de police.
+
+Quelle fut l'impétuosité du raz de marée, à Casablanca, notre
+photographie le montre de saisissante manière: le petit port assailli
+par les vagues, sur lequel se dressent, abandonnées, les grues
+inactives, la barre qui roule, toute proche, ses flots menaçants, les
+navires mouillés au large, composent une sinistre image... Mieux que
+tout commentaire, elle fait comprendre l'urgente nécessité des travaux
+d'aménagement reconnus indispensables, et dont l'adjudication, conclue
+la semaine passée, permet d'espérer la réalisation prochaine.
+
+
+
+[Illustration: DES AILES!--Une colonie d'hirondelles de mer dans un îlot
+de l'archipel des Philippines. _Phot. Chartes Martin._]
+
+Cette gravure qui semble un fragment de «poncif» pour frise décorative
+est la reproduction sans retouche d'un instantané pris par un voyageur,
+M. Charles Martin, dans un îlot de l'archipel des Philippines. Elle
+représente une envolée de sternes, les unes tachetées de gris, les
+autres recouvertes d'une livrée noire, toutes également blanches sous
+les ailes et sous le ventre.
+
+La forme élancée de la sterne lui a valu le nom populaire d'hirondelle
+de mer. Pourtant ce gracieux palmipède a des moeurs bien différentes de
+celles du passereau qui vient nous annoncer chaque année le retour du
+printemps.
+
+La sterne est essentiellement un oiseau de mer. Elle vit par bandes qui
+creusent leurs nids sur quelque plage déserte, en plein Océan, ou aussi
+loin que possible d'une région habitée. Dès que les petits sont en âge
+de voler, elles émigrent en masse vers quelque terre lointaine, et,
+intrépides voyageuses, parcourent ainsi des distances inimaginables.
+Nous citerons le cas d'une des trente-huit espèces du genre: la sterne
+arctique. Cet oiseau pond ses oeufs et élève sa petite famille dans les
+parages du Pôle Nord, et s'en retourne hiverner sur les rivages du
+continent antarctique! Sauf le temps de la nidaison, sa vie se passe à
+faire la navette entre les deux extrémités de l'axe de la terre.
+
+
+
+[Illustration: M. Maurice Bertrand. M. Edwards. M. A. Hébrard. Dr. A. de
+Rothschild. M. H. Bernstein.]
+
+[Illustration: Cte Hallez Claparède. Cte Boni de Castellane. M.
+Messager. M. Astruc. H. Sem dessinant M. Paul Robert.]
+
+UNE FANTAISIE DÉCORATIVE AU THÉÂTRE DES CHAMPS-ELYSÉES.--Des croquis
+grandeur nature crayonnés par Sem sur les murs du bar.
+
+Tandis que, dans ce théâtre des Champs-Elysées dont l'inauguration a été
+l'événement parisien de la semaine, la façade s'orne d'une noble frise
+due au statuaire Bourdelle, qui a également composé. pour l'atrium
+d'entrée et les couloirs des loges, une suite de bas-reliefs
+mythologiques, d'autres parties de ce palais où tout concourt au plaisir
+des yeux ont reçu une décoration moins sévère. Un élégant bar-fumoir y
+accueille, pendant l'entr'acte, les spectateurs désireux d'échanger
+quelques propos parmi les nuées légères des cigarettes: pour égayer ce
+lieu aimable, où, les soirs de «générale» passeront tant de
+contemporains notoires, quel artiste était plus désigné que Sem, leur
+dessinateur attitré? Il a croqué, avec sa verve coutumière, sur deux
+panneaux appliqués aux murs, et qui ne paraissent point s'en distinguer,
+quelques-unes des silhouettes sans lesquelles on n'imagine pas le
+Tout-Paris de 1913. Exécutées à la grandeur naturelle, elles donnent
+l'impression d'avoir été jetées, d'un crayon preste, sur la pierre même.
+Ainsi vivantes et toutes proches, elles serviront de fond, si l'on peut
+dire, aux causeries qui s'échangeront là, entre deux actes...
+
+
+
+[Illustration: L'Institut et le Collège français de Madrid.]
+
+LA FRANCE ET SES SOEURS LATINES
+
+_A Madrid, l'inauguration de l'Institut français, à Rome, la
+constitution du comité Italia-Francia ont été, à peu de jours de
+distance, deux intéressantes et caractéristiques manifestations en
+faveur de l'amitié latine. Aussi réunissons-nous sous un même titre
+d'actualité les correspondances que nous avons reçues de Madrid et de
+Borné et qu'il comment de rapprocher._
+
+L'INAUGURATION DE L'INSTITUT FRANÇAIS DE MADRID
+
+Le 27 mars a eu lieu l'inauguration solennelle de l'Institut français de
+Madrid, sous la présidence de M. Steeg, ancien ministre de l'Instruction
+publique, délégué spécial du gouvernement français, et en présence du
+comte de Romanonès, président du Conseil espagnol, des ministres d'État,
+M. Navarro Reverter, et de l'Instruction publique, M. Lopez Muñoz, de
+l'ambassadeur de France M. Geoffray, de MM. Collignon, membre de
+l'Institut; Bayet, directeur de l'enseignement supérieur; Coullet,
+directeur au ministère de l'Instruction publique; des recteurs des
+Universités de Madrid, Bordeaux, Toulouse et Poitiers, de plus de
+cinquante universitaires français et autres notabilités des deux pays.
+L'Institut français de Madrid, analogue aux Écoles de Rome, d'Athènes,
+de Florence et de Saint-Pétersbourg, réunit désormais deux oeuvres
+naguère distinctes et d'ailleurs également méritoires. C'est, d'une
+part, l'École des hautes études hispaniques, fondée, sur l'initiative et
+sous la direction du savant archéologue M. Pierre Paris, par
+l'Université de Bordeaux pour permettre à de jeunes agrégés de
+poursuivre en Espagne leurs travaux, qui ont abouti déjà à des thèses
+fort remarquables. Et c'est, d'autre part, l'Union des Etudiants
+français et espagnols créée en 1908 par le doyen de la Faculté des
+lettres de Toulouse, M. É. Mérimée, pour organiser, à Madrid au
+printemps, à Burgos en été, deux séries de cours: espagnols à
+l'intention des maîtres ou élèves français se préparant à l'enseignement
+de cette langue; français pour les auditeurs espagnols, qui, l'an
+dernier, dépassaient, à Madrid, le chiffre de 150, tandis qu'à Burgos se
+formait une colonie scolaire de 125 Français. De ce double courant
+parallèle d' «échanges universitaires» franco-espagnols était née entre
+les Universités de Toulouse et Bordeaux, leurs promotrices, une «ardente
+et cordiale émulation», selon le mot de M. Steeg.
+
+[Illustration: Le discours de M. Steeg, représentant du gouvernement
+français, à l'inauguration de l'institut français de Madrid.]
+
+Mais toutes deux sentaient également, en raison même du succès de leur
+entreprise, l'urgente nécessité de substituer une installation
+définitive et personnelle à l'installation provisoire de l'École des
+études hispaniques en garni et de l'Union des étudiants à l'Université
+de Madrid, où le recteur, M. Condey Luque, leur offrait une affable
+hospitalité. L'heureuse coïncidence du transfert, dans un vaste terrain
+et un nouvel édifice, du Collège primaire et secondaire entretenu par la
+Société française d'enseignement de Madrid, le dévouement du président
+de cette Société, M. Delvaille, le zèle de nos ambassadeurs, MM. Revoil
+et Geoffray, les libéralités publiques et privées, ont permis d'édifier
+en moins d'un an auprès du Collège, dans un des meilleurs quartiers de
+Madrid, bel et sobre bâtiment, dû aux architectes MM. Galeron et Zabala,
+et qui offre un asile indépendant et confortable à la fois aux boursiers
+en mission d'études hispaniques et aux chargés de cours français à
+l'usage du public espagnol. C'est dans la grande salle de conférences
+qu'a eu lieu la cérémonie de l'inauguration de l'Institut, avec les
+discours de MM. Lapie, recteur de l'Université de Toulouse, Collignon,
+Delvaille, du ministre de l'Instruction publique espagnol, M. Lopez
+Muñoz, qui eut la délicate attention d'en prononcer une partie dans un
+français aussi correct que vibrant, et enfin de M. Steeg. Tous, après
+avoir retracé la genèse et défini le caractère de cette institution, ont
+célébré la reprise, consacrée par la ratification de l'accord marocain,
+des bons rapports franco-espagnols, dont l'interruption momentanée
+n'avait d'ailleurs point fait obstacle au succès de notre oeuvre
+universitaire. Mais encore fallait-il dissiper les préventions dont
+celle-ci pouvait être l'objet de la part de certains esprits
+susceptibles et enclins à regarder la création de cette sorte de Faculté
+française à Madrid comme une mainmise intellectuelle, si l'on peut dire,
+de la France sur l'Espagne. C'est à quoi s'est très opportunément
+appliqué M. Steeg en spécifiant que ce centre pédagogique et
+scientifique à la fois se conformerait au principe de la mutualité. Et
+l'annonce que, à la demande des universités françaises des notabilités
+espagnoles comme le docteur Ramon y Cajal, titulaire du prix Nobel, et
+l'éminent philologue Ménendez Pidal, iraient à leur tour donner des
+conférences en France, suivant l'exemple récent de M. Altamira,
+directeur de l'enseignement primaire, à la Sorbonne, en fut un gage
+suffisant.
+
+La cordialité qui n'a cessé de régner durant ces fêtes, à la séance
+d'inauguration comme au déjeuner offert par le comte de Romanonès à M.
+Steeg, au dîner, et à la brillante soirée de l'ambassade de France,
+s'est peut-être manifestée d'une façon plus expressive encore pendant
+l'excursion des délégués français à Tolède, où les exercices exécutes
+devant eux par l'École d'infanterie et les hymnes des deux pays joués
+par sa musique ont fourni l'occasion de toasts chaleureux en l'honneur
+de chaque armée. Quant au roi Alphonse XIII, partisan convaincu de
+l'entente franco-espagnole, si son accident de cheval a obligé de
+supprimer le déjeuner auquel il avait invité M. Steeg et la, réception
+des universitaires français au palais, l'audience précédemment accordée
+par lui à notre envoyé officiel avait témoigné de l'intérêt et de la
+sympathie qu'il porte à cette belle oeuvre.
+
+J. CAUSSE.
+
+
+
+«FRANCE-ITALIE» ET «ITALIA-FRANCIA»
+
+Dans la jolie villa Cavalieri s'est constitué à Rome, récemment, le
+comité Italia-Francia qui, sous la présidence honoraire du marquis
+Visconti-Venosta, travaillera de concert avec le comité France-Italie
+présidé par M. Pichon, à resserrer les liens qui unissent les deux pays.
+
+On remarquait parmi les assistants à la réunion: M. Luigi Luzzatti,
+ancien président du Conseil; le chef socialiste réformiste, le député
+Bissolati; M. Salvatore Barzilai, l'un des meilleurs orateurs du
+Parlement; le leader républicain Eugenio Chiesa; le sénateur Martini,
+ancien gouverneur de l'Érythrée; M. Carcano, conservateur,
+vice-président de la Chambre; le sénateur Pompéo Molmenti, bien connu;
+le sculpteur Léonardo Bistolfi; M. Guglielmo Ferrero, l'historien si
+apprécié en France.
+
+Le comité qui s'est formé a désigné comme secrétaire général le
+commandeur Enea Cavalieri.
+
+Celui-ci, avec beaucoup d'amabilité, a bien voulu, en quelques mots, me
+dire, pour _l'Illustration_, quelles étaient les intentions du nouveau
+comité:
+
+«En nommant comme président d'honneur un diplomate tel que le marquis
+Visconti-Venosta, dont personne en France n'a oublié le rôle à la
+conférence d'Algésiras, nous avons voulu, me dit-il, montrer la
+tradition de la politique italienne qui a été toujours la plus cordiale
+vis-à-vis de la France.
+
+» Notre comité n'a pas, nominalement, de président effectif, mais, comme
+M. Luzzatti se trouve en tête des fondateurs du comité Italia-Francia,
+c'est lui qui remplit effectivement cette charge.
+
+» Nos statuts visent à la constitution de deux bureaux: l'un qui aura
+pour objet les études littéraires ou artistiques intéressant les deux
+pays, l'autre qui s'occupera des questions politiques et économiques.
+
+» Remarquez bien que nous ne voulons pas que notre activité économique
+devienne purement commerciale; certes, si de grandes questions touchant
+nos deux pays sont en jeu, nous y donnerons toute notre attention, mais
+nous ne voulons pas chercher à conclure des affaires.
+
+» Ce que nous désirons, c'est encourager tout ce qui se fait en Italie,
+pour mieux faire connaître et apprécier la France.
+
+» Nous organiserons des conférences, nous soutiendrons les institutions
+qui s'occupent de propager en Italie la langue et la culture françaises.
+
+» Nous espérons pouvoir bientôt envoyer une forte délégation porter au
+comité France-Italie à Paris les salutations de notre comité italien.»
+
+La presse a salué avec sympathie la formation du nouveau comité et les
+grands journaux romains y ont consacré leur éditorial.
+
+A peine constitué, le comité Italia-Francia a reçu de nombreuses
+adhésions de toutes les parties de l'Italie et il compte actuellement
+parmi ses membres la plupart des noms qui, à l'étranger, personnifient
+l'Italie intellectuelle.
+
+Il a devant lui un bel avenir pour le plus grand bien des deux nations
+latines.
+
+ROBERT VAUCHER.
+
+[Illustration: M. Luigi Luzzatti, qui préside le comité Italia-Francia.]
+
+[Illustration: Le commandeur Enea Cavalieri, secrétaire du comité
+Italia-Francia.]
+
+[Illustration: La voiture présidentielle à la sortie du congrès
+mutualiste.]
+
+
+
+[Illustration: Le cortège officiel au château d'eau du Peyrou.]
+
+LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE A MONTPELLIER
+
+M. POINCARÉ A MONTPELLIER
+
+Pour sa première visite officielle aux provinces françaises, M. Raymond
+Poincaré a reçu, dimanche dernier, à Montpellier, un accueil
+inoubliable. On ne vit jamais, de mémoire de Méridional, et sous la
+pluie, un pareil enthousiasme, de plus chaleureuses ni de plus unanimes
+acclamations. Ajoutons aussi que rarement, un chef de l'État eut des
+gestes et des mots plus opportuns, plus heureux, et ne sut s'adresser
+avec plus de tact au coeur de la foule.
+
+M. Poincaré s'était rendu à Montpellier pour clôturer le congrès
+national de la mutualité française. Son voyage, au programme très
+chargé, fut cependant très court et l'on peut dire qu'il battit le
+record de la célérité. Alors, en effet, que les rapides ordinaires
+mettent une quinzaine d'heures pour couvrir les 850 kilomètres qui
+séparent Paris de l'Hérault, en moins de trente-quatre heures, M.
+Poincaré, accompagné de M. Louis Barthou, président du Conseil, et de M.
+Chéron, ministre du Travail, a effectué le trajet d'aller et retour,
+entendu vingt harangues, répondu autant de fois, prononcé deux beaux
+discours, présidé une séance solennelle et un banquet, assisté à une
+fête champêtre et visité une clinique et un hôpital.
+
+Les journaux quotidiens ont donné un compte rendu détaillé de ces fêtes
+et cérémonies auxquelles avait voulu assister un éminent ami de la
+mutualité et de tout ce qui est français, le prince de Monaco. L'une de
+nos photographies donne une vision de la foule massée devant le théâtre
+à l'instant où le président de la République, qui venait de clôturer le
+congrès mutualiste, sortait pour se rendre au manège d'artillerie où
+avait lieu le banquet de 2.500 couverts. La fête champêtre eut pour
+cadre la fameuse promenade du Peyrou, dominée par le château d'eau,
+d'où, lorsque le temps est clair, on aperçoit la mer. Des grisettes
+montpelliéraines, soeurs des midinettes de Paris, récitèrent un
+compliment en languedocien, et, sous des arceaux de verdure et de fleurs
+entrelacés, des groupes de jeunes garçons et de fillettes, de jolies
+_pitchounettes_ en costume traditionnel, exécutèrent les danses locales
+de la Treille. M. Raymond Poincaré complimenta avec esprit, serra des
+mains, embrassa des enfants, entendit quarante fois _la Marseillaise_
+et, au bout de sa journée, salué par une dernière formidable
+acclamation, reprit, à 7 heures, le train de la capitale.
+
+
+
+LA SUCCESSION DE M. LÉPINE
+
+En revenant du voyage présidentiel où il remplissait pour la dernière
+fois les fonctions de directeur de la Sûreté générale, M. Hennion est
+allé recevoir des mains de M. Lépine le sceptre, ou, pour mieux dire, le
+bâton blanc de la préfecture de police.
+
+Le successeur de M. Lépine est né dans un bourg du département du Nord,
+à Gommegnies, près d'Avesnes. Il a même aujourd'hui la satisfaction
+d'être le maire de sa commune natale.
+
+Engagé dans l'infanterie pour cinq ans, M. Hennion quitta son régiment
+en 1885, avec les galons de sergent-major, et, dès l'année suivante, il
+entrait à la Sûreté générale. Nommé, un peu plus tard, commissaire
+spécial à Paris; puis envoyé, sur sa demande, à Verdun, comme
+commissaire de police (il y resta près de trois ans pour étudier le
+fonctionnement de la police en province), il était rappelé en 1893 à la
+Sûreté générale, et, depuis vingt ans, il n'a plus quitté ce service
+qu'il dirigeait depuis six ans.
+
+[Illustration: M. Hennion.--_Phot. Gerschel._]
+
+Sa figure n'est pas encore aussi connue des Parisiens que celle de M.
+Lépine. Elle l'est, en tous cas, des habitués des champs de courses, où,
+pendant douze ans, M. Hennion pourchassa les parieurs _au livre_ au
+grand profit du Trésor, qui du pari mutuel allait tirer les admirables
+ressources que l'on sait... On a vu aussi M. Hennion en province,
+puisqu'il y fut, à l'occasion de plus de cent voyages de chefs d'État,
+l'organisateur des services d'ordre.
+
+Mais, surtout, M. Hennion est le créateur de ces _brigades mobiles_ qui
+ont transformé les conditions de travail du service des recherches.
+Grâce à lui encore, ce service se trouve aujourd'hui pourvu de tout
+l'outillage moderne qui ne lui a manqué que trop longtemps: archives
+criminelles centralisées à Paris, ateliers de photographie constitués
+dans les commissariats et aux sièges des brigades mobiles, application
+de plus en plus étendue de la téléphonie et de l'automobilisme aux
+opérations de Sûreté générale...
+
+Grand, robuste, la moustache courte et jeune, la démarche aisée, le
+geste prompt, le nouveau préfet de police est un quinquagénaire favorisé
+par la nature: il a le visage d'un homme de quarante ans à peine.
+
+M. Eugène Pujalet qui succède à M. Hennion comme directeur de la Sûreté
+générale n'est âgé que d'une quarantaine d'années. Il a débuté dans
+l'administration, il y a dix-neuf ans, comme chef de cabinet du préfet
+du Tarn. A vingt-trois ans, il était appelé à Paris connue secrétaire du
+directeur de la Sûreté générale, passait de ce service à la direction du
+cabinet de M. Blanc, préfet de police, et, en 1899, revenait à la Sûreté
+générale avec les fonctions d'inspecteur des commissariats spéciaux.
+Après le vol de la _Joconde_, on confia à M. Pujalet, jeune, énergique,
+plein d'initiative, la direction provisoire des musées nationaux où il
+réorganisa si bien la surveillance et la discipline du personnel que ses
+fonctions venaient, il y a quelques mois, de lui être confirmées à titre
+définitif... Définitif, on le croyait du moins, puisque voici le
+directeur des musées d'hier devenu le directeur de la Sûreté
+d'aujourd'hui.
+
+[Illustration: M. Pujalet dans son ancien cabinet du Louvre--_Phot.
+Vizsavona._]
+
+
+
+DEUX PHOTOGRAPHIES
+
+DU DÉFUNT ROI GEORGES DE GRÈCE
+
+Un de nos excellents correspondants, M. Franz de Jessen, nous envoie de
+Copenhague, avec ces quelques lignes de commentaire, deux documents
+curieux et rares sur la jeunesse du roi Georges de Grèce qui vient
+d'être si lâchement assassiné après un règne prospère de cinquante ans:
+
+La première de ces photographies représente le roi, alors prince
+Guillaume de Danemark, en uniforme des cadets de la marine danoise. Elle
+date du mois de décembre 1862, c'est-à-dire quelques mois avant
+l'élection du prince au trône des Hellènes (30 mars 1863). Le prince
+fut, en effet, à l'époque de son élection, cadet de la marine
+danoise,--ni plus ni moins. Il est à faire remarquer qu'à ce moment son
+père (feu le roi Christian IX), n'avait pas encore pris possession de la
+couronne danoise, portée alors par le roi Frédéric VII (mort en novembre
+1863), tandis que le prince Christian n'était qu'héritier présomptif. La
+nomination du prince Guillaume au grade d'officier de marine n'eut lieu
+que le jour même où le roi Frédéric VII acceptait au nom du jeune prince
+l'offre apportée par la députation hellène, présidée par le vieux et
+fameux amiral Kanaris (audience solennelle au château de Krigtiansbors à
+Copenhague, 6 juin 1863).
+
+[Illustration: Le prince Guillaume de Danemark en 1862, à la veille
+d'être appelé à gouverner le royaume de Grèce, sous le nom de Georges
+Ier.]
+
+L'autre photographie est prise à Athènes après l'avènement du roi
+Georges, en été 1864.
+
+Le nouveau roi avait alors dix-huit ans. Il est entouré par sa suite
+_danoise_, c'est-à-dire les officiers danois qui l'ont accompagné en
+Grèce. Le roi est le jeune homme coiffé d'un chapeau melon, assis au
+milieu. Il a à ses côtés (également assis) le baron de Gyldenèvone. A
+gauche du roi (debout) le capitaine Funch, derrière le roi (debout) le
+lieutenant des dragons Hannibal Leth.
+
+[Illustration: Le roi Georges de Grèce après son avènement, en 1864,
+entouré de sa suite danoise.]
+
+
+
+LENDEMAIN DE RÉVOLUTION
+
+AU MEXIQUE
+
+Si l'ordre règne maintenant à Mexico, après la violente tragédie, la
+sauvage guerre de rues, qui ensanglanta la ville et qui se termina par
+le meurtre du président Madero et du vice-président Suarez, des ruines
+demeurent que l'on mettra peut-être longtemps à relever.
+
+Les obus, qui, pendant trois jours, se croisèrent entre le palais où
+s'était retranché le gouvernement et l'arsenal où s'étaient fortifiés
+les révolutionnaires, portèrent un peu partout leur oeuvre de destruction
+et de mort, parmi les paisibles demeures et les monuments publics, dans
+les rues et sur les places qui, en certains endroits, furent jonchées de
+cadavres que l'on brûla sur place.
+
+Nous publions ici deux des nombreuses photographies qui nous ont été
+communiquées sur les lendemains de cette convulsion politique et qui
+témoignent de la violence aveugle de ce bombardement à l'intérieur d'une
+capitale.
+
+
+
+DOCUMENTS & INFORMATIONS
+
+LA PRODUCTION TOTALE DU DIAMANT.
+
+Dans son _Traité de métallogénie_, M. de Launay cherche à évaluer la
+quantité totale de diamant extraite du sol depuis que l'on commença à
+apprécier ces brillants cailloux.
+
+Tous les anciens diamants venaient de l'Inde. Les mines de ce pays,
+aujourd'hui complètement épuisées, auraient fourni environ 2.000 kilos.
+
+En 1723 on découvrit les gisements du Brésil, qui ont donné 2.500 kilos
+de diamants représentant une valeur brute de 500 millions, soit 40
+francs le carat (1 carat = 20 centigrammes). Mais, depuis quelques
+années, la production annuelle est réduite à 350 carats ou 70 grammes.
+
+Aujourd'hui le monde entier est alimenté par les mines du Cap, trouvées
+en 1870. La production a atteint 3.600 carats en 1887 et en 1898; depuis
+lors, le syndicat des mines a limité l'extraction afin d'éviter la
+formation d'un stock trop considérable.
+
+Voici la production mondiale de 1909:
+
+Cap (Cie de Beers).. 1.860.000 carats.
+Transvaal.......... 1.929.492
+Orange............. 656.319
+Afrique allemande.. 400.000
+Guyane anglaise..... 5.646
+Nouvelle-Galles du S. 2.205
+
+La valeur des pierres diffère beaucoup selon la provenance; le diamant
+brut du Cap vaut en moyenne 40 francs le carat, celui du Transvaal, 16
+francs.
+
+M. de Launay est amené à évaluer ainsi la production totale du diamant
+depuis l'origine:
+
+ Millions Valeurs en millions
+ de carats. de francs.
+
+Inde. 10 426
+Brésil (1723-1910). 12 500
+Afrique du Sud (1867-1910). 120 3.900
+
+Total. 142 4.826
+
+Ces 142 millions de carats de diamant brut représentent 28,4 tonnes et 8
+mètres cubes, avec une valeur brute de près de 5 milliards.
+
+En tenant compte de la taille, le volume peut être diminué de moitié;
+mais la valeur marchande, aux cours actuels, peut être quintuplée. Nous
+arrivons donc à un total de 4 mètres cubes de diamants taillés, valant
+24 milliards et pouvant tenir dans une caisse mesurant 2 mètres de
+longueur et 2 mètres de largeur sur 1 mètre de hauteur.
+
+Devant de tels chiffres, qui font sourire les femmes et rougir le
+philosophe, on se demande comment le monde peut encore absorber chaque
+année pour 140 millions de diamants bruts qui, taillés, représentent un
+achat d'environ 600 millions.
+
+
+
+L'AMÉNAGEMENT DES MONTAGNES DAUPHINOISES.
+
+L'_Association dauphinoise pour l'aménagement des montagnes_ a pour but
+l'amélioration du domaine forestier et du régime pastoral dans les
+régions montagneuses du Dauphiné. Fondée à Grenoble, il y a quelques
+années, elle a déjà obtenu des résultats sérieux, malgré la faiblesse
+des ressources dont elle dispose.
+
+Grâce à une active propagande, plusieurs communes ont cessé d'accueillir
+les moutons de Provence qui venaient, chaque été, achever la dévastation
+de leurs pâturages, en même temps qu'ils rendaient impossible toute
+tentative de reboisement. Dans ces conditions, on a constaté, au bout de
+trois ou quatre ans, une véritable renaissance de la végétation
+forestière et pastorale; dans l'Oisans, notamment, des coteaux abrupts,
+rongés par le ruissellement et les avalanches, se couvrent peu à peu
+d'un manteau forestier protecteur. Les plantations réussissent dans la
+proportion d'environ 70%.
+
+Mais cela coûte cher. Beaucoup de communes ne comprennent pas encore
+leur véritable intérêt; d'autres ont des ressources si modiques que
+l'association doit prendre à sa charge le déficit causé dans la caisse
+municipale par la non-location. A ces frais et à ceux de propagande
+viennent s'ajouter les dépenses pour la création de pépinières et pour
+les plantations, et encore les subventions à diverses initiatives
+particulières, telles que les reboisements d'un caractère esthétique
+entrepris par le Syndicat d'initiative du Monestier-de-Clermont.
+
+L'association demande à ses adhérents une cotisation minime: 2 à 10
+francs, au gré de chacun. Il semble donc permis d'espérer que le nombre
+de ces adhérents augmentera rapidement, surtout dans les régions
+intéressées à une oeuvre dont personne ne saurait discuter l'utilité.
+
+[Illustration: Pylône d'une horloge publique éventré par les obus.]
+
+[Illustration: Maison criblée par la mitraille.--_Photographies de M.
+J.-B. Moreau._]
+
+LES RUINES DE LA GUERRE CIVILE A MEXICO
+
+
+
+[Illustration: Vue panoramique de Vendôme, montrant comment la ville est
+dominée par la tour de Saint-Martin.--_Phot. H. Chartier._]
+
+LA FIN D'UN SCANDALE.
+
+L'administration des Beaux-Arts a prononcé, la semaine dernière, le
+classement du clocher de Saint-Martin, à Vendôme: ainsi va prendre fin,
+à la satisfaction de tous les défenseurs de nos richesses monumentales
+menacées, et des Vendômois tout des premiers, le scandale qu'avait
+publiquement révélé, à la tribune de la Chambre, M. Maurice Barrés.
+
+Nous avons, dans notre numéro du 22 mars, publié les deux photographies
+qu'avait montrées à ses collègues le député de Paris, comme preuve des
+fâcheux travaux exécutés dans la tour. Pour répondre au désir qu'on nous
+a exprimé de divers côtés, nous reproduisons aujourd'hui une vue
+d'ensemble du clocher de Saint-Martin. Son seul aspect justifie
+l'émotion unanimement provoquée par l'acte de vandalisme dont il a été
+l'objet: c'est bien l'une des parures de Vendôme que l'on avait tenté de
+déshonorer, et que l'arrêté de classement vient de sauver fort à propos.
+
+
+
+LA DISPARITION DU CAFÉ ANGLAIS.
+
+Après Tortoni, la Maison Borée, le café du Helder, voici que disparaît
+le Café anglais. Un immeuble de rapport va remplacer la maison vieux
+jeu, aux fenêtres étroites et basses, qui, depuis longtemps, paraissait
+sommeiller au coin du boulevard et de la rue de Marivaux, dédaignant
+toute modernisation susceptible d'éblouir les passants qu'étonnait un
+pareil anachronisme à deux pas de l'Opéra et de l'Opéra-Comique.
+
+Fondé dans les dernières années du dix-huitième siècle, ce restaurant
+célèbre connut sa plus grande prospérité sous le second Empire. Gros
+financiers, artistes enrichis, littérateurs en vogue, princes de tous
+pays, s'y rencontraient avec l'aristocratique «jeunesse dorée» qui
+continuait avec autant de brio que ses aînés, mais peut-être moins de
+désinvolture, la tradition des soupers de la Régence. La finesse de la
+cuisine, la supériorité de la cave étaient aussi justement renommées que
+la discrétion du lieu et le ton imposé par une clientèle ultra-select.
+
+Après la guerre, les soupeurs d'antan se reposèrent; ceux de la nouvelle
+génération adoptèrent la brasserie, recherchant le coude à coude, la
+gaieté bruyante et l'addition discrète. Un instant, le Café anglais,
+acheté par une société, connut des jours moins heureux. En 1876, il fut
+acquis par le propriétaire actuel, M. Burdel, qui sut ramener chez lui
+une clientèle hésitante et s'en faire une nouvelle. On ne soupait plus
+guère au Café anglais; mais on y déjeunait et l'on y dînait. Les
+boursiers, quelques hommes de lettres parmi lesquels Sardou fut le
+client le plus fidèle, les riches étrangers, tous les gens fortunés
+sachant vraiment manger, fréquentaient assidûment cette maison hors rang
+dont la table continuait à lutter victorieusement avec celle des plus
+somptueux palaces. Au passant rapide, le Café anglais semblait vide et
+abandonné; en réalité, il faisait de brillantes affaires.
+
+Sa disparition est la conséquence de la plus-value formidable dont
+profitent depuis quelque temps les terrains du quartier de l'Opéra.
+L'immeuble, voué à la démolition immédiate, occupe une surface de 198
+mètres. Il a été vendu 1.500.000 francs, ce qui fait ressortir le prix
+du terrain à 7.000 francs le mètre.
+
+
+
+LE PRIX D'UN CUIRASSÉ EN ANGLETERRE ET EN ALLEMAGNE.
+
+_L'Engineering_ vient de publier des renseignements intéressants sur le
+prix actuel des navires de guerre construits en Angleterre et en
+Allemagne.
+
+Les cuirassés allemands du type _Kaiser_, construits par les chantiers
+impériaux, et ceux du type _Kaiserin_, construits par des chantiers
+privés, ont les mêmes caractéristiques générales: 170 mètres de
+longueur, 24.000 tonnes de déplacement, turbines de 28.000 chevaux ayant
+donné aux essais une vitesse de 21 noeuds. Les premiers ont coûté 59
+millions et demi; les autres, 60 millions.
+
+Les bâtiments anglais du type _King George V_, un peu moins gros que les
+unités allemandes (166 mètres de longueur et 23.000 tonnes de
+déplacement), ont la même puissance et la même vitesse; ils ne coûtent
+que 50.400.000 francs. En outre, l'armement, quoique très supérieur à
+celui des cuirassés allemands correspondants, a coûté environ 6.500.000
+francs de moins par navire.
+
+Le _Goeben_, croiseur de la marine germanique, mesure 184 mètres de
+longueur, déplace 22.600 tonnes avec une force de 52.000 chevaux; il a
+coûté 55 millions. Le _Lion_, de la marine britannique, mesure 198
+mètres, déplace 26.300 tonnes et utilise une puissance de 70.000
+chevaux; il a coûté 51.700.000 francs.
+
+De façon générale, l'écart des prix de construction entre les divers
+chantiers de l'Angleterre ne dépasse pas 2 %; et ces prix représentent
+une économie de 8 à 15 % sur ceux des chantiers allemands.
+
+
+
+LA MAISON DE BALZAC.
+
+Le ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts a tenu à classer
+parmi les monuments historiques le petit pavillon avec jardin que Balzac
+vint habiter à Paris, au numéro 24 actuel de la rue Pierre-Berton,
+lorsqu'il fut obligé de vendre, pour cause de dettes, son chalet des
+Jardies, à Sèvres.
+
+C'était, transformée au goût moderne, une aimable résidence du
+dix-huitième siècle appelée la Folie-Bertin, où Bertin de Blagny,
+financier artiste, avait donné plus d'une fête en l'honneur de Mlle Hus,
+pensionnaire du Théâtre-Français.
+
+Peut-être sa situation tenta-t-elle le grand écrivain du dix-neuvième
+siècle, plus encore que ses souvenirs. Car elle avait deux issues:
+ressource précieuse pour fuir les créanciers importuns. Là, l'auteur de
+la Comédie Humaine acheva, au cours de veilles laborieuses, sa grande
+histoire de la société moderne, avec Ursule Mirouet, la cousine Bette,
+Modeste Mignon, le Cousin Pons, et ce Mercadet qui fut comme un reflet
+de ses luttes avec ses créanciers.
+
+Le pavillon de la rue Berton est aujourd'hui le musée que la Société des
+Amis de Balzac a meublé de pieux souvenirs. Par la porte-fenêtre de la
+pièce, qui fut le cabinet de travail de l'écrivain, on accède au jardin
+où il aimait à se promener, vêtu d'un froc blanc de dominicain dont il
+avait fait son costume d'intérieur. Parfois même il y faisait porter sa
+baignoire, pour se reposer en plein air et dans l'eau.
+
+
+
+NIDIFICATIONS PRÉCOCES.
+
+Avec les hivers particulièrement doux qui sont la règle depuis quelques
+années, les oiseaux commencent à se sentir désorientés, et on les voit
+faire leur nid et pondre en des saisons tout autres que la normale. Les
+faits qui suivent et qu'a recueillis un observateur anglais, dans le
+Cheshire, donnent l'impression que normalement il y a chez les oiseaux
+une tendance à une seconde saison reproductrice en automne, tendance qui
+se réalise quand le temps est favorable.
+
+En 1911, l'observateur en question a trouvé des oeufs de ramier le 25
+octobre; des oeufs de roitelet en décembre; de jeunes étourneaux aussi
+en décembre. En 1912, il a trouvé des oeufs de linotte (janvier), de
+roitelet (janvier), des jeunes d'étourneau (janvier), des oeufs de
+merle, de moineau, etc., en novembre et décembre. En 1913, il a vu des
+oeufs de merle en janvier; de jeunes étourneaux aussi en janvier, et de
+diverses autres espèces aussi des oeufs et des jeunes, toujours en
+janvier.
+
+
+
+LE JAPON ET LA CHINE VUS PAR UN ARTISTE.
+
+D'un récent voyage au Japon et en Chine, où il était allé chercher des
+sujets nouveaux d'inspiration, M. H. Le Riche, le peintre et dessinateur
+bien connu, a rapporté une ample moisson de croquis et d'études plus
+poussées, à l'huile et à l'aquarelle, dont, à plusieurs reprises,
+_L'Illustration_ a eu la primeur. Ces études, M. Le Riche les réunit
+aujourd'hui en une exposition qui vient de s'ouvrir à la Galerie Georges
+Petit: elles constituent un ensemble d'un rare attrait, par lequel
+s'affirme le charme varié de ces impressions d'Extrême-Orient, dont nos
+lecteurs auront eu un délicat avant-goût.
+
+
+
+UNE GRANDE LORRAINE
+
+Une Lorraine de grand coeur, qui fut l'une des premières à honorer la
+mémoire de nos soldats tués sur les champs de bataille de 1870, Mme
+veuve Adolphe Bezanson, née de Viville, belle-soeur de Paul Bezanson qui
+fut maire de Metz en des temps difficiles, de 1871 à 1877, vient de
+disparaître, à un âge très avancé. Sa mort a été vivement ressentie dans
+tout le pays annexé, où elle était entourée d'une touchante vénération.
+
+[Illustration: Mme Adolphe Bezanson.--_Phot. Prillot._]
+
+Bien avant que fût fondée l'Association des Dames de Metz, Mme Bezanson
+s'était donné la noble tâche d'entretenir et de parer les tombes des
+Français tombés, pendant la guerre, autour de la grande ville lorraine.
+Chaque année, à la Toussaint, et quand revenaient les douloureux
+anniversaires, elle se rendait secrètement au cimetière Chambière,
+dissimulant sous ses vêtements des fleurs et de petits outils de
+jardinage, avec lesquels elle nettoyait pieusement les tertres. Plus
+tard, on osa rendre ostensiblement hommage à nos morts. L'honneur lui
+reste d'avoir commencé cette oeuvre du Souvenir, à laquelle les
+Alsaciens-Lorrains sont restés, malgré les obstacles, si fidèles.
+
+Mme Bezanson était titulaire de la médaille des anciens combattants de
+Gravelotte et de la médaille en or de la Société pour l'encouragement au
+bien. Cette distinction, qui ne se décerne qu'une fois par an, lui avait
+été remise solennellement par le président de la République en 1908.
+
+Metz a fait à cette grande Lorraine des obsèques émouvantes.
+
+
+
+[Illustration: Le célèbre banquier américain, John Pierpont. Morgan.]
+
+PIERPONT MORGAN
+
+M. Pierpont Morgan est mort à Rome, dimanche dernier. Il est mort après
+quelques jours de maladie, tout comme le plus modeste des rentiers...
+«Gastrite aiguë, compliquée de prostration nerveuse», disent les
+dépêches.
+
+Il avait soixante-seize ans, étant né le 17 avril 1837, à Hartford, dans
+le Connecticut. Et la première originalité de ce milliardaire fut de
+n'être pas «parti de rien». Il faut que les biographes en prennent leur
+parti; ils n'auront pas, cette fois, la ressource d'exciter
+l'imagination populaire, au récit d'aventures d'enfance pathétiques, de
+débuts misérables et attendrissants. Le jeune Pierpont Morgan, avant de
+devenir le roi de la finance, ne fut point le gamin qui apprend à lire
+tout seul, cire les bottes et vend des journaux dans les trains.
+Pierpont Morgan avait des papiers de famille et une généalogie. Ses
+aïeux, émigrés d'Angleterre aux États-Unis, s'étaient établis au
+Massachusetts en 1636; et voilà donc plus de deux siècles et demi qu'il
+existe en Amérique des parents de ce génial manieur d'affaires. Il avait
+fait, à Hartford, de bonnes études. Il avait été étudiant à Boston;
+puis, après un séjour en Suisse, il avait fait un stage en Allemagne, à
+l'Université de Gottingen. En 1857, à vingt ans, il entrait dans la
+maison de son père, qui était alors banquier à Londres.
+
+L'apprentissage ne fut pas long. Le propre du génie n'est pas seulement
+d'apprendre vite, mais de deviner ce qu'il ignore. Il se sépare, au bout
+de peu de temps, de son père, pour devenir à New-York son correspondant,
+en même temps que le directeur d'une banque qu'il y fonde,--la banque
+_Dabney Morgan and Co._ Le novice est désormais lancé. En moins de dix
+ans, il est l'un des rois des chemins de fer aux États-Unis.
+
+On a dit de Pierpont Morgan qu'il était un grand ami de notre pays.
+C'est vrai.
+
+On sait qu'au lendemain de la défaite de Sedan, une maison de banque
+vint la première, sans hésiter, au secours des vaincus: celle de Julius
+Spencer Morgan, qui prêta 250 millions au gouvernement de la Défense
+nationale; 250 millions grâce auxquels put être continuée la lutte, et
+sauvé l'honneur des vaincus. Nous ne devons pas oublier que, comme
+«correspondant» de son père aux États-Unis, Pierpont Morgan se trouvait
+naturellement associé à une opération où s'affirmait, en même temps que
+la vitalité du crédit français, la persistance d'amitiés puissantes et
+qui nous sont restées fidèles.
+
+Pierpont Morgan avait alors trente-quatre ans. Il allait entrer dans la
+plénitude de son influence et de son action. Action souveraine;
+influence telle qu'aucun industriel, aucun financier, n'en ont jamais
+connu de comparable à celle-là!
+
+Témoin des embarras et des catastrophes continuellement engendrés, aux
+États-Unis, par la lutte véritablement sauvage et meurtrière des
+concurrences, Pierpont Morgan avait pensé: «Il faut substituer à cette
+anarchie de l'ordre. _Il faut supprimer les concurrences_.»
+
+Il fallait donc pour cela transformer les concurrents en associés...
+C'était l'idée des trusts, dont la réalisation pouvait sembler une
+chimère monstrueuse et folle, et que pourtant le génie de Morgan
+réalisa. _Trust_ des chemins de fer, _trusts_ de l'acier, de la viande,
+de l'or, de la houille, des banques, de la navigation, cet homme
+prodigieux les _osa_ tous! Qu'une telle audace ait eu parfois des effets
+très salutaires, et qu'on ait pu considérer, à de certaines heures,
+Pierpont Morgan comme le sauveur du crédit américain, cela ne semble
+point niable à quelques-uns... mais ce n'est pas non plus l'avis de
+tous, et ce sera le rôle des économistes de déterminer dans quelle
+mesure fut bienfaisante et dans quelle mesure put être préjudiciable à
+la condition économique des États-Unis l'oeuvre de _conquête_, absolument
+fantastique, poursuivie durant plus de trente années, par cet homme
+surprenant.
+
+Elle lui avait rapporté, à lui personnellement, une fortune de cinq ou
+six milliards, disent les uns,--de moins d'un milliard, affirment les
+autres. Il supportait avec flegme et simplicité le poids de cette
+richesse.
+
+C'était un homme de haute taille, corpulent (105 kilos!), avec une
+encolure de taureau, des mains puissantes, un nez énorme sous lequel
+grisonnait une moustache serrée autour des lèvres minces; et le plus
+impressionnant regard qu'on pût imaginer: un regard gris, pénétrant,
+dont des sourcils épais semblaient retenir la lumière...
+
+Il parlait peu. Il allait dans le monde le moins possible. Il était un
+homme de foyer, et un homme de travail. Jules Huret a ainsi décrit la
+maison où Pierpont; Morgan travaillait:
+
+«...La banque se trouve au coin de Wall Street. nº 23, et de Brad
+Street, n° 3.
+
+» Elle n'a que cinq étages uniformes. La façade est en pierre de taille.
+Au-dessus de l'entrée des bureaux où se dressent deux colonnes de marbre
+rougeâtre soutenant un petit portique triangulaire, je lis: «J. P.
+Morgan & Co» découpé en relief dans la pierre du triangle. Sur toutes
+les fenêtres des étages supérieurs, loués à des bureaux privés, on voit,
+en lettres dorées, des noms de courtiers, de sociétés financières, etc.
+Rien d'imposant en vérité, n'était l'idée de la puissance qu'on se fait
+de l'homme qui monte tous les jours les six degrés de pierre du perron
+d'où il peut voir la statue de Washington.»
+
+Le bureau du «patron» fait suite à ceux des employés et des «grands
+chefs» qui ne sont séparés les uns des autres que par des cloisons
+basses. Le bureau de Morgan est au fond. Il n'y a même pas d'antichambre
+qui le sépare des autres. Des cloisons de verre l'entourent. Quiconque
+avait à parler à Morgan y pouvait entrer librement...
+
+Ce grand travailleur aura été un grand philanthrope. Il entretenait 300
+asiles de pauvres! Il fut aussi un grand amateur d'art, et sa collection
+particulière est une des plus merveilleuses qui soient au monde. La
+France enfin lui doit deux très beaux dons: le don d'une splendide
+collection de pierres précieuses qui est au Muséum; et celui du fameux
+«chef de Saint-Martin» qu'il restitua simplement à l'État français, le
+jour où, ayant payé fort cher cette relique, il apprit qu'elle était une
+propriété d'État... qui n'était: point à vendre.
+
+Pierpont Morgan laisse une veuve, trois filles et un fils qui lui
+succède. C'est, dans le monde, une grande figure de moins; et, pour
+l'Amérique, une véritable force qui disparaît.
+
+
+
+LES THÉÂTRES
+
+L'Athénée représente en ce moment avec succès uns comédie qui semble
+devoir passer à juste titre pour la plus originale, la plus subtile et
+la plus raffinée de cet écrivain original, subtil et raffiné qu'est M.
+Abel Hermant. C'est _la Semaine folle_. La semaine folle est, à Venise,
+la semaine de carnaval; c'est pendant une semaine de carnaval à Venise
+que se déroule l'action que M. Abel Hermant a choisie comme prétexte à
+sa nouvelle étude de moeurs cosmopolites, un drame d'amour, qui ne se
+termine d'ailleurs pas tragiquement. L'héroïne de l'aventure a meublé à
+la russe son palais du Grand Canal et il se trouve que ces deux
+byzantinismes harmonisent à merveille leurs lignes hardies et leurs
+colorations violentes; or ce détail a quelque chose de naturellement
+symbolique, toute la pièce ayant ce caractère d'étrangeté forte et
+séduisante. Elle est jouée, tout à fait dans le ton qui convient, par
+Mlle Ventura, une Slave ardente, inquiétante et captivante, par M. André
+Brûlé, à qui on peut supérieurement accorder, au masculin, les mêmes
+qualificatifs, par M. Jacques de Péraudy et par MM. Guyon fils, Gallet,
+Guilhène.
+
+Le théâtre lyrique des Champs-Elysées, fondé et dirigé par M. Gabriel
+Astruc et dont nous avons montré plus haut l'effet extérieur et la
+disposition intérieure, a ouvert la série de ses spectacles par les
+représentations d'oeuvres de choix: d'abord _Benvenuto Cellini_ de
+Berlioz, créé en 1838 et dont pourtant c'était seulement la 8e
+représentation! Ensuite--pour succéder à cet opéra si romantique quant à
+ses détails extérieurs, si humain quant à son expression--une pastorale:
+_le Freisehütz_, de Weber. joué, pour la première fois peut-être en
+France depuis un demi-siècle, sous sa forme originale. La troisième
+soirée a été exclusivement consacrée à un concert de musique français où
+voisinaient les noms de Chabrier, Lalo, Saint-Saens, Gabriel Fauré,
+Vincent d'Indy, Debussy, Paul Dukas, Inghelbrecht. On a vivement
+apprécié le soin attentif et délicat, le goût éclairé, intelligent et
+l'art, pour tout dire, avec lequel, dans une salle appropriée à cet
+effet, cette nouvelle direction théâtrale prépare et réalise ses
+spectacles musicaux.
+
+_La Chaste Suzanne_ est, à l'Apollo, la réapparition sous forme
+d'opérette d'un vaudeville, _le Fils à papa_, de MM. Mars et
+Desvallières, qui fut applaudi il y a quelques années au Palais-Royal.
+La pièce qui vient, ainsi transformée, de faire son tour du monde, n'a
+rien perdu de sa gaieté un peu libertine mais franche, que décuple
+l'entrain de la musique fraîche et mélodieuse de M. Jean Gilbert.
+
+A la Comédie-Royale, revue de M. Robert Dieudonné, _C'est fou!_ qui
+s'applique à justifier assez plaisamment son titre et qui y réussit
+souvent.
+
+
+
+[Illustration: EXERCICES PHYSIQUES, par Henriot.]
+
+
+
+
+
+
+
+
+End of Project Gutenberg's L'Illustration, No. 3658, 5 Avril 1913, by Various
+
+*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK L'ILLUSTRATION, NO. 3658, 5 ***
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+Gutenberg is a registered trademark, and may not be used if you
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+such as creation of derivative works, reports, performances and
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+works. See paragraph 1.E below.
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+or PGLAF), owns a compilation copyright in the collection of Project
+Gutenberg-tm electronic works. Nearly all the individual works in the
+collection are in the public domain in the United States. If an
+individual work is in the public domain in the United States and you are
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+in paragraph 1.F.3, this work is provided to you 'AS-IS' WITH NO OTHER
+WARRANTIES OF ANY KIND, EXPRESS OR IMPLIED, INCLUDING BUT NOT LIMITED TO
+WARRANTIES OF MERCHANTIBILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE.
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+interpreted to make the maximum disclaimer or limitation permitted by
+the applicable state law. The invalidity or unenforceability of any
+provision of this agreement shall not void the remaining provisions.
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+trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone
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+with this agreement, and any volunteers associated with the production,
+promotion and distribution of Project Gutenberg-tm electronic works,
+harmless from all liability, costs and expenses, including legal fees,
+that arise directly or indirectly from any of the following which you do
+or cause to occur: (a) distribution of this or any Project Gutenberg-tm
+work, (b) alteration, modification, or additions or deletions to any
+Project Gutenberg-tm work, and (c) any Defect you cause.
+
+
+Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm
+
+Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
+electronic works in formats readable by the widest variety of computers
+including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists
+because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from
+people in all walks of life.
+
+Volunteers and financial support to provide volunteers with the
+assistance they need, are critical to reaching Project Gutenberg-tm's
+goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
+remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
+Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
+and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations.
+To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
+and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4
+and the Foundation web page at http://www.pglaf.org.
+
+
+Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive
+Foundation
+
+The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
+501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
+state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
+Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
+number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at
+http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent
+permitted by U.S. federal laws and your state's laws.
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+The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S.
+Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered
+throughout numerous locations. Its business office is located at
+809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email
+business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact
+information can be found at the Foundation's web site and official
+page at http://pglaf.org
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+For additional contact information:
+ Dr. Gregory B. Newby
+ Chief Executive and Director
+ gbnewby@pglaf.org
+
+
+Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation
+
+Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
+spread public support and donations to carry out its mission of
+increasing the number of public domain and licensed works that can be
+freely distributed in machine readable form accessible by the widest
+array of equipment including outdated equipment. Many small donations
+($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
+status with the IRS.
+
+The Foundation is committed to complying with the laws regulating
+charities and charitable donations in all 50 states of the United
+States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
+considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
+with these requirements. We do not solicit donations in locations
+where we have not received written confirmation of compliance. To
+SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any
+particular state visit http://pglaf.org
+
+While we cannot and do not solicit contributions from states where we
+have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
+against accepting unsolicited donations from donors in such states who
+approach us with offers to donate.
+
+International donations are gratefully accepted, but we cannot make
+any statements concerning tax treatment of donations received from
+outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.
+
+Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation
+methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
+ways including checks, online payments and credit card donations.
+To donate, please visit: http://pglaf.org/donate
+
+
+Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic
+works.
+
+Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm
+concept of a library of electronic works that could be freely shared
+with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project
+Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support.
+
+
+Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
+editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S.
+unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
+keep eBooks in compliance with any particular paper edition.
+
+
+Most people start at our Web site which has the main PG search facility:
+
+ http://www.gutenberg.org
+
+This Web site includes information about Project Gutenberg-tm,
+including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
+Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to
+subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.
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+Project Gutenberg's L'Illustration, No. 3658, 5 Avril 1913, by Various
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+Title: L'Illustration, No. 3658, 5 Avril 1913
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+Author: Various
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+Release Date: October 30, 2011 [EBook #37886]
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+*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK L'ILLUSTRATION, NO. 3658, 5 ***
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+Produced by Jeroen Hellingman et Rénald Lévesque
+
+
+
+
+
+</pre>
+
+
+
+
+<br><br>
+
+<div class="cont">
+
+
+
+
+
+<p>L'Illustration, No. 3658, 5 Avril 1913</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/000small.png"><br><a href="images/000large.png">(Agrandissement)</a></p>
+
+<div class="sml">
+<p>Ce numéro contient:
+1º LA PETITE ILLUSTRATION, Série-Théâtre n° 3: <span class="sc">Les Flambeaux</span>, de M.
+Henry Bataille;<br>
+2º <span class="sc">Un Supplément économique et financier</span> de deux pages.</p>
+</div>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/001.png"></p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/001a.png"><br> <span class="sml"><span class="rig">M. Hennion. M. Barthou. M. Poincaré.</span></span><br>
+<b>LE PREMIER VOYAGE PRÉSIDENTIEL DE M. RAYMOND POINCARÉ<br>
+Le président de la République, le président du Conseil, le nouveau
+préfet de police et les «pitchounettes» de Montpellier.</b><br>
+<i>Voir l'article et les autres photographies, page 309.</i></p>
+
+<br><br>
+
+<h3>NOTRE NOUVEAU SUPPLÉMENT ÉCONOMIQUE ET FINANCIER</h3>
+
+<p>Un nouveau supplément s'ajoute encore, à partir d'aujourd'hui, à nos
+pages déjà si variées et si nombreuses.</p>
+
+<p>L'objet et le programme de <i>l'Illustration économique et financière</i>,
+qui sera désormais encartée dans tous nos numéros, sont définis en tête
+de la première feuille offerte sous ce titre à nos lecteurs.</p>
+
+<p>L'adjonction à notre journal «universel» de cette rubrique, si utile
+quand la documentation en est sûre et quand les appréciations y sont à
+la fois sincères, prudentes et judicieuses, nous avait été réclamée
+souvent. Mais nous ne voulions pas, pour lui faire une place, qui aurait
+été parfois insuffisante, restreindre, si peu que ce fût, celle de la
+documentation illustrée d'actualité ou d'art. Nous sommes heureux que le
+succès croissant de <i>l'Illustration</i>, qui vient de se manifester encore
+par une nouvelle et importante hausse de notre tirage coïncidant avec
+l'augmentation de notre prix d'abonnement, nous permette de donner deux
+pages de plus--quatre quand ce sera nécessaire--dans chacun de nos
+numéros.</p>
+
+<h3>THÉÂTRE ET ROMAN</h3>
+
+<p><i>La Petite Illustration</i> publiera, les 12 et 26 avril, les quatrième et
+cinquième parties du roman de <span class="sc">M. Marcel Prévost</span>: <i><b>Les Anges gardiens</b></i>.</p>
+
+<p>Le 19 avril paraîtra <i><b>l'Embuscade</b></i>, de <span class="sc">M. Henry Kistemaeckers</span>,
+représentée à la Comédie-Française.</p>
+
+<p>Le 3 mai, <i><b>les Éclaireuses</b></i>, de <span class="sc">M. Maurice Donnay</span> (Comédie-Marigny).
+Puis, successivement: <i><b>Hélène Ardouin</b></i>, de <span class="sc">M. Alfred Capus</span>; <i><b>l'Habit
+vert</b></i>, <span class="sc">de MM. Robert de Flers et G.-A. de Caillavet</span>; <i><b>Servir</b></i> et <i><b>la
+Chienne du roi</b></i>, de <span class="sc">M. Henri Lavedan.</span></p>
+
+<p>A la fin du mois de mai, nous commencerons la publication du grand roman
+que <span class="sc">M. Paul Bourget</span> achève actuellement: <i><b>Le Démon de midi</b></i>.</p>
+
+<p>Enfin, parmi les autres oeuvres théâtrales que <i>La Petite Illustration</i>
+publiera avant la fin de cette saison, nous pouvons citer dès maintenant
+<i><b>Le Secret</b></i>, de <span class="sc">M. Henry Bernstein</span>.</p>
+<br><br>
+
+<h3>COURRIER DE PARIS</h3>
+
+<h4>LE PROBLÈME DU PORTRAIT</h4>
+
+<p>Sous ce titre, M. Jacques-Emile Blanche publiait l'autre jour dans le
+<i>Gaulois</i> un de ces articles mordants, judicieux et fins, qui n'ont
+jamais que deux défauts: d'être trop rares et trop courts. Mettant sur
+la sellette les gens du monde, il leur faisait sans barguigner le
+reproche de se lancer dans l'aventure du portrait avec une inconscience
+aussi coupable que folle, en n'ayant qu'une idée et qu'un but: <i>être
+beau</i>, laisser de soi, après soi, une image avantageuse et fascinatrice.
+A l'entendre, la plupart des femmes, et--chose inouïe--la grande
+majorité des hommes, que l'on aurait pu supposer à l'abri d'un pareil
+ridicule, ne sont travaillés, dès qu'ils songent à la reproduction de
+leur admirable image, que de cet unique souci de vanité coquette. Fermés
+à l'art, étrangers à ses exigences et aux nobles sacrifices de
+renoncement personnel qu'il impose, les personnes qui se font peindre
+«ne pensent qu'à elles» et n'y pensent qu'à cet étroit point de vue de
+tricherie en face de la vérité. Elles n'ont pas beaucoup de goût, et peu
+de jugement, ne se connaissent jamais elles-mêmes, ne soupçonnent rien,
+non seulement de leur physique et du véritable caractère qui s'en
+dégage, mais de leur nature morale qu'il s'agit bien pourtant aussi
+d'exprimer sur la toile et à propos de laquelle, plus encore que de
+leurs traits extérieurs, elles battent complètement la breloque, les
+brunes voulant être représentées blondes, les gaies cherchant du coude
+la pose triste, les pensives réclamant une attitude d'animation, et les
+tumultueuses préoccupées, dans une chute soudaine, de donner l'aspect,
+depuis longtemps convoité, de la mélancolie...</p>
+
+<p>Enfin M. Blanche, côté peintre, faisait passer aux modèles mondains,
+pendant deux colonnes de journal, le plus délicieux et mauvais quart
+d'heure qu'il soit possible de traverser...</p>
+
+<p>Tant et si bien qu'après avoir, sans restriction, partagé sa façon de
+voir et de badiner à ce sujet, il m'est venu des scrupules, tournant
+presque au remords, et, dans une lueur, je me suis avisé tout à coup que
+peut-être en se plaçant de l'autre côté, dans le camp des hommes
+insensés et des femmes frivoles, dans la foule de cette humanité
+ordinaire, bourgeoise et mondaine, qui a la faiblesse de vouloir se
+faire peindre et l'orgueil de s'adresser, dans ce but, aux maîtres
+célèbres, je me suis imaginé que l'optique en ce cas pourrait bien
+changer et qu'il y aurait aimablement beaucoup d'excellentes petites
+choses à dire dont il ne serait pas défendu à quelques princes du
+pinceau de tirer profit.</p>
+
+<p>Et d'abord, parlant du goût, je ne craindrai pas d'affirmer que, sauf
+exception, les gens du monde, qu'il s'agisse des nobles aussi bien que
+des bourgeois, ne sont pas moins doués de cette qualité que les
+artistes. Et ils sont tout à fait autorisés à leur fournir, sur
+l'arrangement d'un portrait, la pose à prendre, le costume à choisir et
+mille autres questions qui, sans être en dehors de la technique et de la
+facture, n'en ont pas moins une grande importance, des indications et
+des conseils très précieux. Le peintre est, le plus souvent, un
+spécialiste que l'exécution matérielle de son tableau suffit seule à
+occuper, à remplir, à absorber, un passionné de son art et de son
+métier, pour qui peindre est tout. Et certes, qu'il a raison! Cela est
+magnifique! Et on ne va pas penser que je le blâme? Je le salue et je
+l'admire. Cependant, n'est-il pas, tout de même, un peu trop enfoncé
+parfois dans son intransigeance bourrue? Voyez, comme il est quelquefois
+touchant et limité dans sa façon de concevoir et de mettre en scène le
+modèle qu'il a sous la main? Il ne pèche généralement pas par excès
+d'imagination. Il s'étonne des exigences, des entêtements du modèle qui
+prétend se connaître et ne se connaît pas... Mais que dira-t-on aussi,
+en bonne justice, de lui, du peintre et de ses idées préconçues, de son
+inconsciente tyrannie? N'a-t-il pas souvent, à côté et au-dessous de sa
+manière, sa <i>manie</i>? N'a-t-il pas sa pose préférée qu'il tient bien, et
+qu'il vous inflige? N'a-t-il pas un ton qu'il affectionne? N'a-t-il pas
+son <i>heure</i>, son éclairage, son expression, sa nuance de regard favorite
+par où il faut passer coûte que coûte? Ne voit-il pas les gens comme il
+veut les voir ou comme il en a l'habitude? N'a-t-il pas ses clichés? Ne
+lui arrive-t-il pas, même avec un superbe talent, de transformer
+complètement son modèle, de le dénaturer, de le désocialiser, d'en faire
+tout autre chose et l'opposé radical de ce qu'il est? Ne se montre-t-il
+pas alors, je vous le demande, aussi aveugle, aussi incompréhensible et
+coupable, plus même, que le brave homme qui s'illusionne sur son compte
+en demandant une attitude un peu au-dessus de son niveau, ou que la dame
+souhaitant une joue de quelques années plus fraîche et plus lisse?</p>
+
+<p>Combien sont-ils les peintres qui, devant le modèle, s'appliquent
+aussitôt à s'oublier, à s'humilier, pour entrer tête basse dans le
+personnage nouveau et inconnu dont ils ont assumé l'entreprise? Combien
+sont-ils cherchant à pénétrer à fond cet étranger qu'ils visitent pour
+la première fois, décidés, quoi qu'il leur en coûte, à sacrifier leurs
+préférences, à modifier leur palette selon l'homme, la femme, l'enfant,
+le vieillard dont le sort pictural est entre leurs mains? Certes, nous
+en connaissons, et beaucoup, parmi lesquels est au premier rang M.
+Blanche. Mais trop souvent encore le peintre, et j'entends le bon
+peintre, de conscience moyenne, et qui sait son affaire, ne s'embarrasse
+pas de tant d'histoires. Devant le monsieur ou la dame à <i>enlever</i>, il
+ne se ronge pas de désespoir et de curiosité. Il s'observe d'abord
+lui-même, il se demande quel est le parti le plus avantageux qu'il peut
+tirer de l'individu. «Le modèle veut à tout prix, dit-on, être beau et
+plaire.» Et le peintre? N'a-t-il pas souvent, lui aussi, pour unique
+souci d'être magnifique, de séduire et d'empaumer? de briller à
+l'occasion, et fût-ce aux dépens de celui qui n'est à ses yeux qu'un
+prétexte à prouver une fois de plus son talent, sa virtuosité, et à
+perpétuer sa gloire? Quand il fait le portrait des autres, c'est
+toujours un peu le sien que le peintre exécute en pensée, le portrait de
+sa propre personnalité. Car il sait qu'avant de dire: «Voilà M. Un
+Tel!» ou: «N'est-ce pas Mme X...?» on s'écriera à vingt mètres: «Ah!
+Voilà un Casimir! un Victor! un Philippe!» Et ce n'est qu'ensuite,
+quelques longues minutes plus tard, que l'on aura l'idée de se demander
+ce qu'il représente. Le nom du portraituré n'est qu'un sous-titre.</p>
+
+<p>Et la question de ressemblance, qui fait couler tant d'encre et de
+couleur! S'autorisant du peu d'envergure artistique de certains dignes
+messieurs, et de bonnes dames dont l'idée fixe «est d'être criants» sur
+la toile, au point que leur petit chien lui-même, en les regardant,
+gémisse de joie et remue la queue, voilà qu'on en arrive tout doucement
+et sans douleur à proscrire d'un portrait la ressemblance. Elle est
+l'ennemie de l'art. Espérer timidement la ressemblance, c'est avoir
+l'âme d'un photographe et témoigner d'une platitude écoeurante. On vous
+rit au nez et vous perdez toute considération. «Jamais on n'aurait cru
+cela de vous!» La phrase, qui a l'air d'un mot de comédie moliéresque:
+«Un portrait n'a pas besoin d'être ressemblant», est devenue banale et à
+présent fait loi.</p>
+
+<p>Il suffit, tranchent beaucoup de gens «qualifiés», que le peintre fasse
+«avec vous» un joli morceau pour que vous n'ayez rien à dire. Et si,
+près de la toile en face de laquelle vous êtes nez à nez, l'on
+s'extasie: «C'est rudement bien!» pour vous demander ensuite par acquit
+de conscience: «Qui est-ce?» parce qu'on ne vous a pas reconnu, vous
+devez vous déclarer enchanté, et c'est en vous excusant que vous
+répondrez: «C'est moi! mon Dieu, oui!» rougissant comme si, en vous
+nommant, vous faisiez honte au peintre et que vous lui en demandiez
+pardon.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/002.png"><br><b>M. André de Fouquières à New-York: promenade au Central
+Park.</b><br>--<i>Phot. Alexandre Teneau.</i></p>
+
+<p>Non, le modèle ne veut pas être <i>beau</i>, à tout prix, et contre toute
+justice. Il se connaît plus qu'on ne le croit, et presque toujours il
+«se plaît», même avec un physique ingrat, et tel que Dieu et ses parents
+l'ont fait. Il ne serait pas embarrassé de citer maints visages
+ravissants, supérieurs au sien, mais pourtant, si vous le mettiez au
+pied du mur, il ne changerait pas, car, ne craignons pas de le répéter,
+il s'aime tel qu'il est. Et par là, entendez tel qu'il est à son maximum
+d'agrément et dans ses meilleurs jours. Il y a, en effet, nous l'avons
+tous éprouvé mille fois avec une ivresse enfantine, des circonstances,
+des heures, des minutes où nous avons le sentiment pur et certain
+d'être, par un réflexe moral, en presque parfaite beauté physique, à ce
+point relatif de réussite générale qu'il nous est permis çà et là
+d'atteindre. Quand nous nous regardons, à ces instants privilégiés, nous
+ne nous trouvons pas beaux, mais mieux. Nous nous sentons en béatitude
+vitale, en état de quasi-bonheur, de reconnaissance et de bénédiction.
+Nous aimons, nous nous croyons aimés, nous nous voyons aimables. Ne
+serait-ce pas à un de ces passages-là que le peintre inspiré devrait
+nous saisir plutôt que de s'appliquer, comme il semble en avoir si
+souvent l'obstination maladive, à nous représenter en dépression, en
+laideur, en vulgarité quotidienne...? Cette façon de comprendre ne
+l'empêcherait pas, me semble-t-il, de produire un chef-d'oeuvre, et voilà
+la vraie ressemblance, la seule qu'ait le droit et un peu aussi le
+devoir d'exiger de lui le modèle, sa ressemblance avec l'homme heureux,
+dégagé, élevé, éclairé, rayonnant, supérieur à lui-même et à son
+ordinaire qu'il a le noble désir d'être toujours et qu'il a la grâce de
+devenir quelquefois. Que l'artiste profite de ces éclaircies humaines
+d'idéal. Et même alors, s'il rate la ressemblance, il la donnera. Il
+fera un portrait de nous-mêmes qui ne sera pas uniquement celui de notre
+nez, la géologie de notre peau, de nos trois plis, la miniature de notre
+verrue et l'apothéose de nos ongles.<br>
+
+<span class="rig"><span class="sc">Henri Lavedan.</span></span></p>
+
+<p><i>(Reproduction et traduction réservées.)</i></p><br><br>
+
+<h3>LA SOCIÉTÉ AMÉRICAINE D'AUJOURD'HUI ET CELLE DE DEMAIN</h3>
+
+<p><i>M. André de Fouquières, auquel sa réputation de Parisien averti a
+réservé aux États-Unis le plus flatteur, le plus chaleureux accueil,
+vient de revenir en France. Après avoir parlé aux Américains de notre
+pays, et avant de nous conter, en une série de conférences au théâtre
+Marigny, ses impressions d'outre-Atlantique, il en donne aujourd'hui la
+primeur à</i> L'Illustration: <i>attentif à tous les spectacles de la vie
+yankee, M. André de Fouquières a vu se dessiner, pendant son séjour à
+New-York, une curieuse évolution dans les moeurs, dont il définit ici le
+caractère.</i></p>
+
+<p>A mon départ, plusieurs journaux m'ont décerné le titre d' «ambassadeur
+des Modes». Peut-être certains ne le faisaient-ils point sans quelque
+ironie, et je fus tout d'abord surpris de constater, dès mon arrivée,
+que les Américains prenaient ce titre au sérieux. Mais, depuis, j'ai
+compris qu'un tel rôle, en apparence puéril, valait d'être joué. La mode
+est la seule industrie française qui soit prépondérante aux États-Unis.
+Et quelle source de fortune ne représente-t-elle pas? Nulle part, il
+n'est possible de voir une telle folie de luxe, une telle émulation dans
+la lutte pour l'élégance, un tel <i>respect</i> des fantaisies de la mode.
+Jamais une Américaine ne transforme au goût du jour une robe de l'autre
+saison; elle n'admet et ne porte que le <i>neuf</i>. Elle observe avec
+minutie les moindres transformations inventées par nos couturiers, et
+l'originalité les effraie si peu que c'est à New-York que les «maîtres»
+de la rue de la Paix adressent leurs plus audacieuses créations. Des
+sommes formidables sont réservées chaque année à la toilette féminine et
+nombreuses sont les maisons françaises qui doivent au faste yankee
+beaucoup de leur prospérité. Eh bien, tout cela menace de changer et
+nous avons à craindre non seulement la concurrence étrangère, mais
+encore un nouvel état d'esprit.</p>
+
+<p>Parlons d'abord de la concurrence: elle est acharnée et terrible. Elle
+vient surtout de l'Allemagne, qui compte aux États-Unis 400.000
+représentants pour 30.000 Français. Les Allemands étant sur place
+prennent aisément «position». À vrai dire, les modes inventées à Berlin
+ou à Munich ne sont pas acceptées par l'aristocratie new-yorkaise: les
+fameux «Quatre-Cents» dont le cercle est étroitement fermé, et les
+nouveaux millionnaires, les puissants industriels qui forment une
+société neuve à côté de cette élite, ont trop le souci d'imiter les
+arbitres du «smart set» pour s'adresser à d'autres couturiers que les
+nôtres. Mais la petite bourgeoisie commence à se laisser persuader par
+les catalogues alléchants, les journaux de mode qui annoncent les
+nouveautés parisiennes et sont édités par des maisons germaniques. La
+vente de nos soies diminue. Nos modistes ont moins de commandes.
+L'«Article de Paris» se fabrique meilleur compte à Boston ou à
+Baltimore. Et, malheureusement, les couturiers français semblent faire
+peu d'efforts pour maintenir le prestige utile de notre élégance chez un
+peuple admirateur de toutes les traditions et qui estime en nous ce
+culte du bon ton et des belles manières, symbole, à ses yeux, du plus
+glorieux passé.</p>
+
+<p>Je suis arrivé en Amérique au moment même où la plus curieuse évolution
+risque de se produire. Evolution n'est pas le terme exact, car c'est en
+quelque sorte un retour vers les moeurs anciennes. Deux faits d'inégale
+importance sont les prodromes de ce que je nommais le «nouvel état
+d'esprit»: la manifestation quasi officielle des suffragettes, l'arrivée
+au pouvoir du président Wilson.</p>
+
+<p>Les suffragettes?... Elles m'ont semblé, en vérité, bien différentes de
+celles qui font entendre à Londres leurs voix si turbulentes. Elles ont
+organisé le 3 mars 1913, à Washington, la veille de l'entrée du
+président à White-House, la plus singulière et la plus déroutante des
+processions. Un magnifique programme illustré, répandu à profusion,
+publiait, en même temps que les revendications féminines, les
+photographies des plus notoires suffragettes (et il y en a de
+charmantes!). Il annonçait aussi l'ordre dans lequel devait se dérouler
+la parade. Et tout était combiné à merveille, avec cet esprit d'ordre et
+de méthode qui caractérise la race. Venaient d'abord, à la suite de Mrs
+Richard Coke Burleson, la Grande Maréchale, les officiers de la
+«National American Woman suffrage Association» ayant à leur tête la
+présidente, la révérende Anna Howard Shaw, qui possède les plus hauts
+grades universitaires. Ensuite défilaient les nations où la femme a
+obtenu le droit de vote, celles où elles sont bien près de l'avoir et
+enfin celles où elles ne l'ont pas encore. Après quoi, c'était la grande
+cavalcade reconstituant l'historique de la cause féministe et
+représentant les diverses carrières dans lesquelles les femmes se sont
+distinguées, depuis les infirmières militaires jusqu'aux nourrices,
+depuis les doctoresses jusqu'aux avocates, depuis les écrivains et les
+professeurs jusqu'aux musiciennes et aux actrices. L'actrice se nommait
+miss Fola la Folette et possédait le plus délicieux visage.</p>
+
+<p>Et je vis, ce beau jour de printemps, le plus surprenant carrousel et la
+plus étrange mascarade.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/003a.png"><br><b>La brigade montée des suffragettes, à
+Washington.</b><br>--<i>Copyright Underwood and Underwood.</i></p>
+
+<p>Il y avait des chars et des automobiles, de somptueux costumes, des
+étendards multicolores. Et que dira de la «brigade montée» dirigée par
+miss Geneviève Wimsatt, un adorable cow-boy? Les femmes américaines
+montent à cheval comme les hommes et sont d'intrépides cavalières. Les
+banderoles claquaient au vent pour étaler la phrase fatidique: «Vote for
+Women». La présence de Mme Taft dans une tribune d'honneur donnait à
+cette manifestation une apparence officielle. Mais la plupart des
+spectatrices me parurent plus amusées que passionnées par l'allure
+martiale des 6.000 suffragettes. M. Wilson entendra-t-il les appels des
+acharnées lutteuses qui escomptent un changement de régime pour
+renverser «the present political organization of Society, from which
+women are excluded»?</p>
+
+<p>Le <i>New-York Times</i> m'ayant demandé mes impressions, je répondis que
+nous avions en France des idées différentes sur le rôle social des
+femmes, que leur faiblesse même faisait leur charme et que les
+Françaises craindraient trop de perdre certaines prérogatives en
+obtenant des <i>droits</i>. Bref, j'accumulai les habituels raisonnements,
+non sans laisser voir que je trouvais immoral d'imaginer qu'un homme
+pouvait--par quels moyens?--supplier une femme de lui donner sa voix.
+Aussi bien, au cours de la procession, les suffragettes avaient eu
+besoin du concours des policemen, et les suffragettes ne remplaceront
+jamais les policemen. Je donnai d'autres motifs d'ordre sentimental, et
+je fus hué par quelques aimables féministes.</p>
+
+<p>Tout de même il y a quelque chose de très sérieux dans ce mouvement. Si
+certaines suffragettes ne voient dans les manifestations publiques qu'un
+prétexte à costumes originaux et à plaisantes cavalcades, il en est
+d'autres qui travaillent avec une âpre volonté pour le triomphe de leurs
+idées. Beaucoup, comme Mrs Belmont, la mère de la duchesse de
+Marlborough, appartiennent à l'aristocratie. Et rien n'est plus tenace
+qu'une Américaine pour qui la moindre occupation n'est qu'un moyen de
+prouver son indépendance. Enfin neuf États sur trente-neuf ont accordé
+aux femmes le droit de vote. C'est un résultat.</p>
+
+<p class="mid">*<br>* *</p>
+
+<p>Le 4 mars, j'assistai à la parade en l'honneur de M. Wilson. La voiture
+qui contenait les deux présidents passa au milieu d'une foule énorme et
+enthousiaste. Le caractère yankee est si prompt, si peu inquiet, que
+l'assistance sembla fort peu se préoccuper de dissentiments politiques.
+Pour elle, le Président d'hier et le Président de demain--si
+différents--représentaient la nation et elle s'associa cordialement au
+geste de M. Wilson lorsqu'il salua avec noblesse le drapeau des
+États-Unis (1).</p>
+
+<blockquote><span class="sml"><b>Note 1:</b> Mais le public se contenta d'applaudir: car en Amérique on ne
+se découvre pas devant le drapeau.</span></blockquote>
+
+<p>Le défilé des troupes eut lieu dans un ordre parfait et j'admirai
+surtout les West Point Cadets dont l'allure est à la fois élégante et
+martiale. J'ai remarqué que les régiments des États du Sud sont d'une
+tenue supérieure à ceux du Centre. Cela, m'a-t-on dit, parce que les
+New-Yorkais sont trop préoccupés par le souci des affaires pour être
+<i>uniquement</i> des soldats. L'explication m'a paru typique. Et j'ai goûté
+d'autant mieux les pittoresques costumes du Virginia military Institute,
+des Richmond Blues et du 5e régiment de Maryland qui rappellent les
+uniformes brodés et soutachés du premier Empire.</p>
+
+<p>Mais ce que je ne saurais oublier, c'est la bizarre chevauchée des
+gouverneurs des États, tous en redingotes et coiffés de chapeaux hauts
+de forme, maintenant leurs coursiers bien en ligne, observant avec une
+gravité imperturbable l'allure militaire. Derrière eux, dans le même
+ordre merveilleux, d'autres cavaliers, les dignitaires civils en
+redingotes et en chapeaux hauts de forme, imitaient la démarche sévère
+de leurs chefs de troupe.</p>
+
+<p class="lef"><img alt="" src="images/003b.png"><br><b>
+&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;M. Wilson et M. Taft.</b></p>
+
+<p>Dès que cette somptueuse parade eut pris fin, j'observai dans les
+tribunes où se trouvait réunie la belle société de Washington un
+changement subit d'attitudes. On parla politique et j'entendis les
+doléances des républicains qui venaient d'assister au triomphe des
+démocrates.</p>
+
+<p>C'est que l'avènement de M. Wilson a une signification particulière. Et
+cette fois la belle confiance des Américains a lieu d'être troublée.
+C'est en approchant les deux Présidents que j'ai compris la tristesse
+soudaine et l'incertitude du monde des affaires. M. Taft m'avait fait
+l'honneur, deux jours avant son départ de White-House, de m'accorder une
+audience privée. Notre ambassadeur, l'aimable M. Jusserand, qui est à
+Washington le doyen du corps diplomatique, et M. Chandler Hale,
+secrétaire, d'État, avaient été mes gracieux introducteurs. M. Taft
+m'accueillit avec une bonhomie cordiale et me parla de Paris et de la
+France. Il m'entretint avec admiration de l'oeuvre de la Croix-Bouge
+dont il avait reçu des délégués quelque temps auparavant. Il me dit
+enfin que nous devions être heureux d'avoir désormais à la tête de notre
+pays un homme aussi éminent que M. Raymond Poincaré, dont la réputation
+aux États-Unis est immense. Ce prestige de M. Poincaré, je l'avais
+constaté déjà dans la société new-yorkaise où on le qualifie de «strong
+man». Puis M. Taft me questionna sur mes impressions d'Amérique. Après
+que je lui eus affirmé mon estime pour l'énergie et la puissance d'une
+nation où tout désir ambitieux se transforme en énergie utile, j'ajoutai
+que j'avais été frappé par l'antithèse des caractères si pondérés, si
+acharnés, si précis, lorsqu'il s'agissait du labeur quotidien, du
+«business» impérieux et dominateur, et si jeunes pourtant, si gais, si
+épris du luxe et du jeu. J'avouai que je trouvai un grand charme à ce
+côté un peu français.</p>
+
+<p>--Ainsi, dis-je, je suis toujours surpris lorsque je vois des hommes
+graves, des magistrats, des professeurs, des industriels célèbres, se
+livrer à une danse endiablée, à ce «pas du dindon», le turkey-trot qui
+fait fureur en Amérique.</p>
+
+<p>Sous la présidence de M. Wilson on ne dansera pas le «pas du dindon» à
+White-House.</p>
+
+<p>M. Wilson parle peu. On ne sait pas ce que pense M. Wilson. Et le monde
+des affaires qui apprécie la discrétion, accueillerait fort bien M.
+Wilson, s'il n'avait par ses premiers actes ébauché tout un programme
+qui l'effraie un peu.</p>
+
+<p>Avec le Président de demain, le ferment puritain est revenu à la surface
+des âmes américaines. Tout un parti s'exalte à la pensée de voir les
+moeurs sévères et rigoureuses d'autrefois renverser les idées actuelles.
+Car ce puritanisme marque un retour vers l'esprit des premiers
+conquérants du Nouveau-Monde. Le peuple, surtout, est satisfait: il
+pressent sa revanche contre les brasseurs de millions. Et certains
+industriels, pour la première fois, ne quitteront pas New-York au
+printemps, tellement les décisions présidentielles sont faites pour leur
+permettre toute crainte. Songez donc! M. Wilson a refusé le bal
+traditionnel qui eut toujours lieu le soir de l'installation à
+White-House; en outre, il proscrit le vin de sa table; il déclare qu'il
+ne veut plus d'avant-scène d'honneur au théâtre et que lorsqu'il va voir
+une pièce il entend que l'on supprime les tentures qui pourraient
+distinguer sa loge des autres; il prie les orchestres de ne jamais jouer
+l'hymne américain lorsqu'il paraît; il désire n'être qu'un simple
+citoyen parmi le peuple. Et le peuple est ravi.</p>
+
+<p>Mais c'est au tour des élégantes américaines d'écouter Mrs Wilson avec
+stupeur. Mrs Wilson blâme les femmes qui dépensent beaucoup d'argent
+pour leur toilette. Un budget minime doit suffire. Mrs Wilson et ses
+filles se contentent de consacrer 35 francs à un corsage et 200 francs à
+une robe. Tout budget féminin qui excède 5.000 francs est exagéré. Et
+les femmes des secrétaires d'État font chorus. Le gouvernement est
+économe, austère et pratique. Tout est changé. Les ambassadeurs n'auront
+plus à envisager les difficultés d'un séjour à New-York. Le faste
+devient une manière d'inconduite. L'excentricité est bannie des moeurs.
+Nous ne verrons plus partir de Paris ces scintillantes bottines
+mordorées et les gants mauves ou roses qu'osaient, porter les jeunes
+misses émancipées. On assure que la misère sera moins grande le jour où
+les trusteurs cesseront d'être prodigues. Le monde des affaires s'en
+amuserait s'il n'était inquiet. Mais voici que M. Wilson renonce au
+yacht qui faisait la joie de ses prédécesseurs. Et l'on s'effare. Les
+honneurs que M. Wilson repousse ne s'adressaient pas à sa personne, mais
+au chef d'une nation. L'Amérique puritaine ne sera plus la patrie des
+fêtes ruineuses ni des folles élégances.<br>
+
+<span class="rig"><span class="sc">André de Fouquières.</span></span></p><br><br>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/004.png"><br>
+<b>LES PETITES OUAILLES BLANCHES DE L'ABBÉ POPULAIRE<br>
+Midinettes sortant de l'église Saint-Roch après le sermon de midi:<br> la
+Révoltée, la Résignée, la Bavarde, la Frivole, la Rêveuse...</b></p>
+
+<p>C'est une charmante et bienfaisante idée qu'a eue un vicaire de la
+paroisse Saint-Roch, l'abbé Populaire, de convier en son église, pour
+une «neuvaine» spéciale, employée à de courts sermons familiers, «les
+ouvrières du quartier de l'Opéra». A midi, l'atelier a entr'ouvert ses
+portes et a laissé s'échapper toutes ces petites laborieuses, qui
+emplissent la rue d'un joyeux tumulte... Mais la libre flânerie est
+parfois mauvaise conseillère, et les gens d'expérience assurent qu'elle
+ne conduit ni à la sagesse ni au bonheur. Les quelque vingt minutes
+qu'elles lui consacraient, le prédicateur de Saint-Roch les a réclamées,
+pendant neuf jours, pour ses conférences. Vingt minutes, ce n'est guère!
+Mais il n'en faut point davantage pour faire méditer ces jeunes âmes, si
+frivoles en apparence, et si accessibles pourtant à la claire raison, et
+qui retrouvent avec tant de facile simplicité la foi de l'enfance.</p>
+
+<p>La «neuvaine des midinettes» a commencé la semaine dernière. Dans la
+salle des catéchismes qui leur avait été réservée, elles se pressaient,
+un peu émues sans doute, offrant par avance aux admonestations leurs
+têtes brunes et blondes. Pour ses débuts, le prêtre les mit en garde
+contre les dangers de l'imagination, qui est, affirma-t-il, funeste aux
+jeunes filles. Après avoir ainsi gourmande, très paternellement, les
+Rêveuses, l'abbé Populaire parla tour à tour, dans les conférences qui
+suivirent, des Frivoles, des Bavardes, des Résignées, des Révoltées et
+des Déchues. Et chacune reçut la petite leçon qu'elle méritait.</p>
+
+<p>Les voici toutes, au sortir de l'église, celles à qui l'excellent
+prédicateur vient de dire leurs vérités. Elles emportent avec elles la
+bonne parole, qui sans doute les rendra meilleures. Et, quand elles
+auront regagné l'atelier, les heures de travail leur paraîtront plus
+légères.</p>
+<br><br>
+<p class="mid"><img alt="" src="images/005a.png"><br><b>LA CONSÉCRATION DE LA VICTOIRE GRECQUE.<br>--A Janina: le
+Diadoque (qui allait être, le lendemain, le nouveau roi) assiste, avec
+les princes à la «Doxologie» célébrée par les Turcs de la ville en
+l'honneur de l'armée victorieuse.</b><br>--<i>Phot. prise par M. Jean Leune,
+pendant le discours du mufti.</i></p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/005b.png"></p>
+
+<table cellpadding="2" cellspacing="2" border="0"
+ style="width: 100%; text-align: left;" summary="illustration">
+ <tbody>
+ <tr>
+ <td style="vertical-align: top; width: 025%; text-align: right;">
+Le général Essad pacha. <i>Croquis de M. Jean Leune, à bord
+au Pylaros, le 22 mars.</i>
+ </td>
+ <td style="vertical-align: top; width: 050%; text-align: center;">
+<br>Le consul de France à Janina, M. E. Dussap, et sa femme,
+l'écrivain bien connu Guy Chantepleure.
+ </td>
+ <td style="vertical-align: top; width: 025%; text-align: center;">
+Le colonel Vehib bey. <i>Croquis de M. Jean Leune, à bord
+du Pylaros le 22 mars.</i>
+ </td>
+ </tr>
+ </tbody>
+</table>
+
+
+<h3>A JANINA</h3>
+
+<p>Pour compléter notre intéressante documentation sur la prise de Janina,
+nous ajoutons aujourd'hui aux notes et aux photographies de M. Jean
+Leune, publiées dans notre dernier numéro, cette page illustrée sur les
+lendemains de la victoire grecque. Ce sont encore, avec deux croquis
+rapides, par M. Jean Leune, des défenseurs de Janina, le général Essad
+pacha et le colonel Vehib bey, des photographies envoyées par notre
+intrépide correspondant à l'armée d'Epire. Voici le groupe sympathique
+et bien français que forment notre consul à Janina, M. Dussap et sa
+femme, connue en littérature sous le nom de Guy Chantepleure, deux
+vaillants qui, par leur attitude ferme et courageuse, ont su, à certains
+moments difficiles, imposer aux soldats turcs exaspérés le respect de la
+population grecque de la ville. Nos documents du bas de la page montrent
+des pièces de l'artillerie turque broyées sur la forte colline de
+Bizani, et constituent une sorte de bas-relief pour ce document de
+tableau d'histoire: le héros du jour, le Diadoque, assistant, sur un
+trône improvisé, à la cérémonie rituelle que les musulmans soumis
+célèbrent en l'honneur de leurs nouveaux maîtres.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/005c.png"><br><b>L'artillerie turque de Bizani: pièces de 85 et de 105mm<br>
+détruites ou gravement endommagées par les obus de l'artillerie
+grecque.</b><br>--<i>Phot. Jean Leune</i>.</p>
+<br><br>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/006a.png"><br><b>Le cercueil de Georges Ier transporté sur un affût de
+canon.</b>--.<i>Phot. A. Adossidès.</i></p>
+
+<h4>DE SALONIQUE AU PIRÉE.</h4>
+
+<p>A Salonique, le transfert, sur son yacht, <i>l'Amphitrite</i>, du roi
+assassiné, fut, le 25 mars dernier, une cérémonie très impressionnante.
+Parti de la résidence royale, le matin à 9 heures, le cortège funèbre,
+encadré de ces traditionnels evzones qui formaient la garde particulière
+du souverain défunt, s'achemina vers le port au milieu d'un immense
+concours de population recueillie. Toute la garnison avait pris les
+armes. Les drapeaux étaient surmontés de croix voilées de crêpe. Le
+cercueil, qui reposait sur un affût de canon, était enveloppé du drapeau
+national, sur lequel, à l'endroit de la tête, on avait placé la
+couronne, était suivi par la famille royale, et ce furent les princes et
+le nouveau roi lui-même qui, au port, transportèrent le corps à bord de
+<i>l'Amphitrite</i>. Il y eut, sur <i>l'Amphitrite</i>, un discours du métropolite
+parlant du roi «tombé au champ d'honneur». Et le bâtiment funèbre où
+s'était embarquée la reine Olga, soutenue par le roi Constantin, leva
+l'ancre et prit la direction du Pirée, où, retardé par le brouillard, il
+n'arriva que le 27 mars un peu avant midi. Il était attendu, sur le
+débarcadère, par tous les hauts dignitaires de la Cour et du royaume
+qui, dès que le bâtiment eut jeté l'ancre, montèrent à bord pour
+s'incliner, les premiers, devant la dépouille de leur souverain.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/006b.png"><br><b>LES FUNÉRAILLES DU ROI GEORGES A SALONIQUE.<br> Au
+débarcadère: les princes hellènes, fils et petits-fils du roi, enlèvent
+le cercueil royal de l'affût de canon pour le transporter sur
+<i>l'Amphitrite.</i> A gauche de notre photographie et à droite du cercueil,
+les princes Christophore, Nicolas, le nouveau diadoque Georges et le roi
+Constantin; à gauche du cercueil, les princes André, Alexandre et
+Georges.</b></p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/007a.png"><br><b>Arrivée au Pirée de <i>l'Amphitrite</i> portant le corps du<br>
+roi Georges.</b>--<i>Phot. A. Gaziadès.</i></p>
+
+<p>Pendant le débarquement du cercueil du roi Georges que continuaient de
+porter les princes de la famille royale, les batteries tirèrent des
+salves. Le corps fut, comme à Salonique, placé sur un affût de canon.
+Les deux reines et les princesses montèrent dans les voitures. Le roi
+suivit le cercueil que précédait le saint-synode et que traînaient sur
+son affût les marins hellènes. Derrière le nouveau souverain venaient
+les princes, le ministre luthérien, les ministres, les consuls
+étrangers, toutes les autorités civiles et militaires.</p>
+
+<p>Au débarcadère et sur tout le trajet, on avait arboré les couleurs
+funèbres, blanc et mauve. Des oriflammes flottaient au vent, portant le
+monogramme du roi en or, surmonté de la couronne.</p>
+
+<p>A la gare, un wagon mortuaire peint en blanc avec des bandes mauves
+latérales reçut le corps du souverain et, lorsque le train spécial
+s'ébranla pour se diriger sur la capitale, les canons des navires
+étrangers ancrés au Pirée tirèrent, en même temps que les batteries
+grecques, les salves de salut.</p>
+
+<p>A Athènes, le cortège se rendit, au milieu d'une affluence énorme, à la
+cathédrale tapissée de couronnes, où, après une cérémonie religieuse, le
+cercueil a été déposé dans une chapelle, en attendant le jour des
+funérailles solennelles.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/007b.png"><br><b>Le cercueil traîné sur un affût par les marins hellènes.</b>
+<i>--Phot. Rhomaïdès-Zeitz.</i></p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/007c.png"><br><b>LE RETOUR A ATHÈNES DE LA DÉPOUILLE MORTELLE DU ROI
+ASSASSINÉ.<br>--Le cortège funèbre quittant le débarcadère du Pirée.</b>--<i>Phot.
+A. Gaziadès.</i></p>
+
+<br><br>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/008a.png"><br><b>SOFIA FÊTE LA PRISE D'ANDRINOPLE.--Manifestation devant<br>
+la statue du tsar libérateur Alexandre II.</b>--<i>Phot. Karastoïanof.</i>]</p>
+
+<h3>LA PRISE D'ANDRINOPLE</h3>
+
+<p><i>Les communications entre Andrinople et Sofia restent momentanément
+difficiles et d'une désespérante lenteur. Aucune des photographies ou
+des correspondances dont l'envoi nous a été annoncé par dépêche n'a donc
+pu nous parvenir encore et ne nous parviendra avant la fin de cette
+semaine.</i></p>
+
+<p><i>On ignorerait tout, d'ailleurs, des conditions exactes dans lesquelles
+s'est produite la chute d'Andrinople, si deux longs et importants
+télégrammes d'un correspondant français et d'un correspondant italien
+(M. Ludovic Naudeau, du</i> Journal, <i>et M. Luigi Barzini, du</i> Corriere
+délia Sera) <i>n'avaient complété les brefs communiqués des états-majors
+bulgare et serbe et projeté un peu de lumière dans la chaos des
+nouvelles contradictoires et fantaisistes provenant de Sofia ou de
+Belgrade: prétendu anéantissement de la ville et de ses mosquées, mort
+supposée de Choukri pacha, etc.</i></p>
+
+<p><i>Notre collaborateur M. Réginald Kann--que nous avions envoyé, nos
+lecteurs le savent, en Bulgarie, après la rupture de l'armistice et la
+reprise des hostilités--serait arrivé à Andrinople dès le 27 mars avec
+MM. Naudeau et Barzini s'il n'avait été victime, à son retour de
+Silistrie, d'un assez grave accident dont il se remet peu à peu, mais
+qui a nécessité son retour en France.</i></p>
+
+<p><i>Quand M. Gustave Babin, parti à son tour pour la Bulgarie, a atteint
+Sofia, Andrinople était déjà aux mains des alliés. Il a pourtant
+continué sa route, et les impressions, les descriptions que nous
+attendons de lui auront un intérêt d'autant plus grand qu'elles seront
+illustrées d'après nature de dessins de M. Georges Scott.</i></p>
+
+<p><i>A la nouvelle de la chute d'Andrinople, nous avons pensé en effet que
+le peintre des émouvantes scènes de guerre dans les Balkans, dont
+plusieurs ont été reproduites ici même il y a trois semaines, devait
+aller sur les lieux compléter son admirable collection de Kirk-Kilissé
+et de Loule-Bourgas.</i></p>
+
+<p><i>M. Georges Scott a reçu aussitôt les autorisations nécessaires et, par
+l'Orient-Express jusqu'à Sofia, par les trains militaires ensuite, a
+gagné Andrinople où il a dû arriver mercredi, en compagnie de MM. les
+députés Messimy, ancien ministre de la Guerre, et Bênazet, rapporteur de
+la commission de l'armée.</i></p>
+
+<p><i>En attendant ses envois et ceux de M. Gustave Babin, voici un exposé
+succinct de tout ce que l'on sait actuellement de l'événement le plus
+sensationnel de la guerre des Balkans:</i></p>
+
+<p>La chute d'Andrinople, si longtemps, si fiévreusement attendue à Sofia,
+peut être célébrée par les Bulgares comme une belle et glorieuse
+victoire, mais elle ne met pas nécessairement fin à la guerre. Des trois
+points où les armées adverses de Thrace se trouvaient face à face,
+Boulaïr, Tchataldja, Andrinople, ce dernier est le seul dont la
+conservation ne semblait pas d'un intérêt vital pour les Ottomans. La
+perte des lignes de Tchataldja eût livré Constantinople au vainqueur;
+l'occupation de la péninsule de Gallipoli eût permis à la flotte grecque
+de pénétrer dans la Marmara et de bombarder Stamboul à revers; avec
+Andrinople, les Turcs ne voient disparaître qu'un gage précieux pour les
+négociations de paix et la capitulation de Choukri pacha, quoiqu'elle
+libère d'importants contingents alliés, modifie moins la situation
+stratégique que la situation morale au préjudice de la Turquie.</p>
+
+<p>Pour les Bulgares, quel soulagement! C'est l'épine qu'on s'arrache du
+pied, le cauchemar persistant qui se dissipe. De même que la résistance
+de Port-Arthur gêna, pendant toute l'année 1904, le haut commandement
+japonais sur le Chaho; de même la présence, sur sa ligne de
+communications, de la forteresse ennemie, a entravé constamment les
+opérations du général Savof.</p>
+
+<h4><span class="sc">l'attaque et la défense</span></h4>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/008b.png"><br><b>Après la prise d'Andrinople: la population de Sofia<br>
+acclame le ministre de Russie, M. Meklioudof.</b> <i>Phot. M. Bitschef.</i>]</p>
+
+<p>Trois méthodes s'offrent à l'assiégeant pour s'emparer d'un camp
+retranché: l'attaque de vive force, le siège régulier, l'investissement.
+L'attaque de vive force consiste à concentrer sur un ou plusieurs points
+de la ligne de défense un feu intense, à la faveur duquel l'infanterie
+se lance à l'assaut des ouvrages. Le siège régulier permet de
+s'approcher de la place lentement, par une avancée constante, en
+creusant une tranchée profonde qui se dirige en zigzag vers la ligne de
+défense; les travailleurs y progressent peu à peu, à l'abri du canon de
+la place; on parvient ainsi jusqu'aux forts qu'on peut détruire par la
+mine. Par l'investissement on se contente d'entourer la ville, de
+l'isoler, et on compte sur la famine pour l'obliger à capituler; c'est
+le procédé le moins onéreux, mais aussi le moins rapide.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/009.png"><br><b>LA CHUTE D'ANDRINOPLE.<br>--Carte des opérations bulgares
+contre les forts de l'Est, dont la prise d'assaut a entraîné la
+reddition de la ville.</b> <i>D'après les télégrammes de M. Ludovic Naudeau.</i></p>
+
+<p>L'armée bulgare était assez mal outillée pour entreprendre un siège
+régulier. Ses troupes techniques--sapeurs, mineurs, artificiers--sont
+peu nombreuses et de qualité médiocre, s'il faut en croire certains
+témoins oculaires, notamment notre collaborateur A. de Penennrun.
+D'ailleurs le terrain argileux des environs d'Andrinople se prête mal
+aux terrassements; les pluies diluviennes de l'automne ne s'infiltrant
+pas dans le sol, les tranchées restent inondées; puis, lorsque les
+gelées arrivent, le travail de sape devient encore plus dur et plus
+pénible. D'autre part, l'artillerie de siège de l'armée bulgare ne
+compte que des pièces de calibre moyen, 150 et 120mm dont un grand
+nombre d'un modèle archaïque. Pas une pièce de 20cm, pas un mortier. A
+l'artillerie de campagne sont allés tous les crédits disponibles; on a
+négligé le matériel lourd. Aussi la tâche imposée au général Ivanof,
+chargé des opérations du siège avec un personnel de pionniers
+insuffisant et un matériel médiocre, paraissait fort ingrate.</p>
+
+<p>Il est vrai que le camp retranché d'Andrinople ne présentait pas sur
+tout son développement des défenses également redoutables. Si les forts
+du secteur nord-ouest répondent à toutes les exigences de la guerre
+moderne, en revanche ceux du secteur est sont plus anciens et ne
+contiennent pas d'abris bétonnés; enfin, dans le secteur ouest et le
+secteur sud, les positions naturelles très solides n'ont été renforcées
+que sommairement par des redoutes de terre. L'infanterie et l'artillerie
+de campagne ottomane suffisaient amplement à la défense de toute la
+ligne; quant à l'artillerie lourde de Choukri pacha, elle était très
+supérieure à celle des assiégeants.</p>
+
+<h4>LES PHASES SUCCESSIVES DU SIÈGE</h4>
+
+<p>Lorsque les armées bulgares envahirent la Thrace, la 8e division
+descendant la Maritza, la 3e marchant du nord au sud convergèrent sur
+Andrinople. A cette période des hostilités il s'agissait de masquer la
+forteresse avec le moins de troupes possible afin de consacrer le
+maximum des effectifs à la lutte contre l'armée de campagne ennemie.
+L'investissement ne fut d'abord confié qu'à deux divisions et à une
+brigade de cavalerie qui suffirent à refouler les reconnaissances de
+Choukri pacha sur la ligne des forts et à rejeter ensuite dans la place
+une grosse colonne qui tentait de rejoindre l'aile gauche d'Abdullah
+pacha, engagée contre la 1re armée bulgare à Séliolou. L'arrivée d'une
+division nouvellement formée, puis d'unités serbes, permit, vers le 12
+novembre, de compléter l'encerclement d'Andrinople et de la couper de
+toute communication avec l'extérieur. A ce moment deux divisions serbes,
+celles du Timok (1er ban) et du Danube (2e ban), tenaient les secteurs
+ouest et nord-ouest; les 8e et 11e divisions bulgares, plus la brigade
+de réserve de la 9e division, formaient la ligne de blocus des secteurs
+est et sud.</p>
+
+<p>Le général Ivanof n'avait pas attendu que l'investissement fût achevé
+pour tenter des attaques brusquées sur plusieurs ouvrages de la défense,
+ceux des secteurs ouest et sud, qui sont les plus primitifs et les moins
+bien armés. Le 7 novembre, la 8e division s'emparait, après un combat de
+quelques heures, des retranchements de Kartal-Tépé, au sud du faubourg
+de Karagatch. Du côté ouest, il semble que les alliés aient été moins
+heureux et qu'après avoir occupé la position de Papas-Tépé ils en aient
+été chassés par un retour offensif de la garnison d'Andrinople. Jusqu'à
+la conclusion de l'armistice, au commencement de décembre, tous les
+efforts tentés pour reprendre Papas-Tépé ou pour déboucher de
+Kartal-Tépé vers Karagatch échouèrent.</p>
+
+<p>Lorsque les hostilités reprirent, dans les premiers jours de février, les
+alliés avaient renoncé, semble-t-il, à prendre Andrinople par une attaque
+de vive force, comptant sur le blocus et le bombardement pour amener
+Choukri pacha à capituler. La ville étant largement pourvue de vivres,
+les obus n'y causant que peu de ravages, cette tactique ne pouvait
+amener la reddition de la place. Le commandement bulgare s'en rendit
+enfin compte et, reprenant son premier plan d'action, décida d'enlever
+Andrinople d'assaut.</p>
+
+<p>Les opérations de la première période du siège avaient montré que les
+forts du secteur nord-ouest étaient trop puissants pour être pris à la
+baïonnette, que dans les secteurs ouest et sud l'espace manquait pour
+manoeuvrer. Restait le secteur est, le plus étendu, celui où la ceinture
+des ouvrages permanents forme un angle droit, dont le saillant, le fort
+d'Aïvas-Tabia, peut être attaqué à la fois par le nord et l'est; c'est
+le point faible de la ligne. Le général Ivanof résolut de faire exécuter
+des attaques dans tous les secteurs pour y fixer l'ennemi et de
+concentrer son principal effort sur Aïvas-Tabia et les forts voisins.</p>
+
+<p>M. Ludovic Naudeau, envoyé spécial du <i>Journal</i>, qui put parcourir le
+terrain du combat quelques heures après l'action, nous raconte comment
+deux formidables batteries, de quarante pièces chacune, furent établies
+au nord et à l'est d'Aïvas-Tabia; 25.000 fantassins massés à proximité
+attendaient à l'abri que le canon leur eût frayé un chemin pour courir à
+la baïonnette sur le fort ennemi. Pendant la nuit du 24 au 25,
+l'infanterie, sortant de ses couverts, chassait les Turcs d'une position
+avancée, le mamelon de Maslak, situé à 2 kilomètres en avant
+d'Aïvas-Tabia. A l'aube du 26, tout était prêt pour l'attaque décisive
+contre cet ouvrage déjà fortement maltraité par les projectiles des
+grosses pièces bulgares.</p>
+
+<h4><span class="sc">l'assaut final</span></h4>
+
+<p>«Cependant, dit notre confrère, le moment suprême était arrivé. Le
+général Ivanof avait donné l'ordre au 23e, au 56e, au 53e et à un
+bataillon du 6e de s'élancer à l'assaut d'Aïvas-Tabia. Le 23e, qui
+s'avançait en tête, s'efforça de parvenir jusqu'au réseau des fils de
+fer. Il est accueilli par une grêle de balles, qui, en quelques minutes,
+lui cause des pertes terribles. Il creuse hâtivement des tranchées, il
+s'abrite, il avance par bonds, il arrive jusqu'aux fils de fer, qu'il
+commence à briser à coups de pioche, à coups de pelle, à coups de
+crosse. Mais alors la fusillade turque est si intense que ce qui reste
+du régiment a un instant d'hésitation et commence à reculer. Il a déjà
+perdu 2.000 hommes. C'est alors que le colonel s'élance en tête de ses
+soldats, portant lui-même le drapeau du régiment. En même temps, des
+batteries d'artillerie de campagne et des «howitzers» viennent, sous un
+feu terrible, se mettre en position tout près du 23e régiment, qui,
+reprenant courage, se rue de nouveau. Il est 5 heures du matin. Le 23e,
+à l'assaut, se fraie un passage à travers les fils de fer barbelés. Les
+hommes lancent leurs capotes sur les ronces d'acier, puis ils passent
+tant bien que mal, grâce à ce bizarre expédient. Les Turcs, en face de
+l'ascension obstinée de ces furieux que rien n'arrête, commencent à
+hésiter à leur tour et, tout à coup saisis d'effroi, ils abandonnent
+leur position et ils s'enfuient vers la ville.</p>
+
+<p>» Les survivants du 23e sautent dans la tranchée. Ils sont dans le fort,
+que ne défend aucune force, et aussitôt l'artillerie bulgare (non
+seulement l'artillerie de campagne, mais un certain nombre d'obusiers)
+arrive au galop dans Aïvas-Tabia et y prend position. Déjà, on apprend
+qu'Hadjholou a été enlevé à 3 heures, et c'est le commencement de la
+fin. Toute la ligne des autres forts de l'est, désormais tournée et
+attaquée par le flanc, cède sans résistance. Aucune contre-attaque,
+aucun essai de reconquérir les positions enlevées par les assaillants
+n'est effectuera aucun, moment. La garnison de chaque fort s'enfuit,
+frappée de panique, ou bien elle se rend sans coup férir dans les autres
+secteurs.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/010b.png"><br><b>Le général bulgare Ivanof, le vainqueur
+d'Andrinople.</b><br><i>--Phot. G. Woltz.</i>]</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/010a.png"><br><b>La grande mosquée d'Andrinople. Cette photographie du
+célèbre monument, que l'on avait annoncé à tort avoir été détruit par
+les Turcs eux-mêmes avant l'entrée des Bulgares et qui est heureusement
+intact, a été prise cet hiver, pendant le siège.</b></p>
+
+<p>Il en est de même partout. Les défenseurs des forts, trouvant leur
+situation intenable, abandonnent la défense et mettent bas les armes.
+Des milliers de soldats, qui ont jeté leur fusil, se précipitent,
+affolés, vers la ville. Ils s'efforcent de se cacher dans les maisons
+des habitants et de se procurer des vêtements civils. Et, pendant que se
+passent ces scènes lamentables, deux régiments bulgares entrent
+tranquillement, étendards déployés, dans la ville. A 10 heures du matin,
+Choukri pacha, qui venait de faire arborer le drapeau blanc sur la tour
+du guet et qui avait aussi, paraît-il, envoyé des parlementaires dans
+les divers secteurs pour demander des assiégeants la cessation des
+hostilités, n'a pas même le temps de voir revenir ceux-ci. Il est pris,
+purement et simplement, dans l'un des forts, l'Hadirlik, où il s'était
+réfugié.»</p>
+
+<p>Ainsi s'écroulait, en quelques heures, la longue résistance de la
+garnison d'Andrinople.</p>
+
+<p>Ce brusque anéantissement laisse une impression d'étonnement, presque de
+stupeur. On pouvait croire que la famine, les privations avaient
+affaibli le moral des défenseurs. Il n'en est rien. La ville contenait
+encore des approvisionnements en quantité. Certaines denrées, telles que
+le sel et le sucre avaient atteint cent fois leur prix ordinaire; mais
+le grain ne manquait pas; des troupeaux entiers de boeufs et de moutons
+pâturaient dans les jardins; il fallut tuer les chevaux des officiers et
+des attelages d'artillerie pour ne pas les laisser tomber vivants aux
+mains des Bulgares. La soudaineté de l'ouragan d'obus qui s'abattit sur
+eux, la fougue extraordinaire de l'attaque, paraissent avoir déconcerté
+les garnisons des forts et provoqué, chez ces soldats fatigués, une
+panique analogue à celle qui s'empara de leurs compagnons d'armes à
+Kirk-Kilissé et Loule Bourgas. C'est la lassitude, non la faim, qui a eu
+raison de l'armée de Choukri pacha.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/011.png"><br><b>UN CHEF-D'OEUVRE DE L'ARCHITECTURE OTTOMANE.<br>--La grande
+mosquée Sélimié d'Andrinople, aux 999 fenêtres.</b></p>
+
+<p><i>Quel émouvant et magnifique symbole de la conquête que cette mosquée
+d'Andrinople, dont les puissantes assises reposaient, depuis des
+siècles, en terre ottomane, et qui, aujourd'hui, est tombée aux mains
+chrétiennes! Pour ceux que la force des armes a conduits jusqu'en ce
+sanctuaire de l'Islam, on ne saurait imaginer de prise plus superbe, ni
+mieux faite pour exalter l'imagination populaire; et il n'en doit pas
+être aussi de plus douloureuse au coeur des musulmans. A considérer ces
+voûtes hardies, d'où pendent les fils innombrables des lustres, ces
+colonnes, ces portiques, tout ce grandiose lieu de prière, on comprend
+l'obstination de la résistance turque... La mosquée du sultan Sélim, la
+mosquée aux 999 fenêtres, édifiée de 1568 à 1574 par Sinan, est une
+merveille de l'architecture ottomane. Formant un immense carré, agrandi,
+sur l'un des côtés, par l'enfoncement du «mihrab», elle dresse, à une
+hauteur de 35 mètres, sa coupole, qui porte sur huit arcades aux piliers
+arrondis. «La construction intérieure est en briques, sauf les piédroits
+et les corniches qui sont en pierre dure, dit, dans son bel ouvrage sur
+les Coupoles d'Orient et d'Occident, M. Alphonse Oosset; les piliers
+sont recouverts en partie de marbre, et disposés par panneaux en
+facettes étroites; les murs sont ornés de revêtements de faïence, puis
+de peintures... Les lampes suspendues en cercle donnent l'échelle de
+proportions à cet immense ensemble, où l'on ne sait ce qui est le plus à
+admirer, de l'inspiration du génie ou de l'exécution.» Des informations,
+aujourd'hui controuvées, avaient annoncé la destruction de la mosquée
+Sélimié: ce chef-d'oeuvre n'a fort heureusement souffert aucun dommage
+pendant le bombardement et après la chute de la ville.</i></p>
+
+<br><br>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/012.png"><br><b>L'INAUGURATION DU THÉÂTRE DES CHAMPS-ELYSÉES.<br>--La façade
+illuminée par le projecteur de la tour Eiffel.</b></p>
+
+<p>Cette partie de l'avenue Montaigne proche de la place de l'Aima, qui
+était jusqu'à présent peu passagère le soir, est maintenant devenue,
+entre 8 h. 1/2 et minuit, un foyer d'animation et de lumière. Le théâtre
+des Champs-Elysées, où deux salles, l'une consacrée à la musique,
+l'autre à la comédie, s'offrent simultanément au choix du public, a
+fait, cette semaine, son ouverture, et c'est, à l'arrivée et au départ
+des spectateurs, un va-et-vient d'automobiles croisant les rayons de
+leurs lanternes, tandis que la façade marmoréenne de ce nouveau palais
+resplendit, des portes jusqu'aux bas-reliefs du statuaire Bourdelle, de
+la blanche clarté frisante que lui dispense le projecteur de la tour
+Eiffel...</p>
+
+<p>L'inauguration du théâtre de musique, avec <i>Benvenuto Cellini</i>--que
+devait suivre, quelques jours plus tard, la première représentation de
+<i>l'Exilée</i> sur la scène de comédie--avait attiré une foule élégante et
+choisie, curieuse de voir les nouveautés promises, depuis longtemps, aux
+Parisiens. La salle claire, aérée, ne pouvait manquer de séduire par le
+confortable de son aménagement, qui permet au spectateur des commodités
+inaccoutumées, et par l'excellence de son acoustique. Il est certain
+qu'un heureux et considérable effort a été réalisé, grâce à M. Gabriel
+Astruc et à ses collaborateurs, les architectes Perret, pour doter la
+capitale d'un nouveau théâtre où l'on puisse goûter parfaitement les
+oeuvres lyriques; aussi le plaisir d'entendre a-t-il été sans mélange.
+La salle elle-même, toute en marbre gris rehaussé par les dorures des
+colonnes, avec sa coupole ornée d'importantes compositions décoratives
+du peintre Maurice Denis, est d'aspect sévère, non exempt de froideur.
+En ce moment où l'on s'ingénie à chercher un style inédit, tout essai,
+si intéressant soit-il, surprend volontiers notre goût. Peut-être
+regrettera-t-on seulement que celui-ci se soit trop directement inspiré
+de l'art mis en honneur à Munich et à Dresde: transplanté à Paris, il
+nous apparaît d'une solennité un peu sèche, délibérément indigente, et
+par là s'écartant de toute tradition française.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/013a.png"><br><b>A la «Comédie des Champs-Elysées» dirigée par M. Léon<br>
+Poirier: une scène de la pièce d'ouverture, <i>l'Exilée</i>, par M. Henry
+Kistemaeckers.</b></p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/013b.png"><br><b>Angle de la salle et de la scène du Théâtre lyrique,<br>
+dirigé par M. Gabriel Astruc.</b>--<i>Photographies Gerschel.</i></p>
+
+<h3>DEUX NOUVEAUX
+THÉÂTRES DANS UN MÊME MONUMENT, AUX CHAMPS-ELYSÉES</h3>
+
+<br><br>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/014a.png"><br><b>Devant les tribunes: le général Lyautey s'entretient avec<br>
+le consul d'Allemagne.</b>--<i>Phot. Nadelar.</i></p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/014b.png"><br><b>L'automobile des ministres chérifiens qui arrivent de<br>
+Rabat pour assister au concours hippique.</b></p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/014c.png"><br><b>Le général Lyautey félicitant un des vainqueurs du<br>
+concours, M. de Vaugelas, dont le cheval a franchi 1 m. 70 de hauteur.<br>
+
+
+LA PREMIÈRE RÉUNION SPORTIVE ET MONDAINE AU MAROC: LE CONCOURS HIPPIQUE
+DE CASABLANCA.</b>--<i>Photographies de Mareschal.</i></p>
+
+<p>Casablanca est en voie de devenir--en attendant le port bien outillé et
+les chemins de fer qui assureront sa prospérité--une des villes les
+mieux policées et les plus élégantes de l'Afrique du Nord. A y vivre, on
+ne se douterait point qu'il faut, presque chaque jour, continuer de se
+battre un peu plus loin en terre marocaine, pour conserver aux régions
+soumises et déjà organisées toute la sécurité qu'on leur a promise.</p>
+
+<p>Donc, tandis que les combats se succèdent au seuil des régions encore
+impénétrées, des réunions sportives et mondaines s'organisent à
+Casablanca en pleine prospérité économique. Un officier de chasseurs
+d'Afrique soutenu par le club élégant de la ville «l'Ampha Club», qui
+réunit les personnalités les plus distinguées des colonies française et
+anglaise, a pris l'initiative de ces réunions. Et voici comment fut
+organisé le premier concours hippique du Maroc, qui eut lieu le 23, le
+24 et le 25 mars, et dont le succès ne saurait étonner en ce pays où
+tout le monde monte à cheval et où une belle monture est le premier luxe
+des indigènes. Le résident général, qui fut un très brillant officier de
+cavalerie, et Mme Lyautey assistaient à cette réunion où toutes les
+notabilités étrangères étaient présentes ainsi que le pacha de
+Casablanca, Sr Guebbas, et les ministres chérifiens venus exprès, en
+automobile, de Rabat, pour suivre les épreuves que clôturèrent de
+splendides fantasias.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/015.png"><br><b>UN JOUR DE TEMPÊTE A CASABLANCA.--La jetée assaillie par
+un raz de marée.</b><br>--<i>Phot. A. Fouet.</i></p>
+
+<p>La mauvaise saison s'est fait rudement sentir, cette année, sur les
+côtes du Maroc, si peu propices aux navigateurs. Il ne s'est presque
+point passé de semaine où l'on n'ait eu à signaler quelque accident
+maritime, dû à la tempête, si souvent déchaînée en ces parages, et à
+l'insuffisance des abris. Les ports mêmes n'y offrent point aux bateaux
+de sûrs asiles: celui de Casablanca, que sa «barre» rend impraticable
+par les gros temps, ne leur a donné, tout cet hiver, qu'une hospitalité
+précaire. Tout récemment encore, le 23 mars, un raz de marée d'une
+extrême violence s'est abattu sur ses quais, les envahissant de ses eaux
+furieuses; mal contenues par les jetées trop basses, elles vinrent
+inonder les bâtiments de la douane, non sans grand dommage pour les
+marchandises qui y étaient déposées. Le même jour, deux voiliers
+étrangers se perdaient corps et biens dans 'la rade de Rabat, tandis
+qu'un troisième, la <i>Marguerite</i>, battant pavillon français, allait
+s'échouer, près de la ville, devant la caserne du tabor de police.</p>
+
+<p>Quelle fut l'impétuosité du raz de marée, à Casablanca, notre
+photographie le montre de saisissante manière: le petit port assailli
+par les vagues, sur lequel se dressent, abandonnées, les grues
+inactives, la barre qui roule, toute proche, ses flots menaçants, les
+navires mouillés au large, composent une sinistre image... Mieux que
+tout commentaire, elle fait comprendre l'urgente nécessité des travaux
+d'aménagement reconnus indispensables, et dont l'adjudication, conclue
+la semaine passée, permet d'espérer la réalisation prochaine.</p>
+<br><br>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/016.png"><br><b>DES AILES!--Une colonie d'hirondelles de mer dans un îlot<br>
+de l'archipel des Philippines.</b> <i>Phot. Chartes Martin.</i></p>
+
+<p>Cette gravure qui semble un fragment de «poncif» pour frise décorative
+est la reproduction sans retouche d'un instantané pris par un voyageur,
+M. Charles Martin, dans un îlot de l'archipel des Philippines. Elle
+représente une envolée de sternes, les unes tachetées de gris, les
+autres recouvertes d'une livrée noire, toutes également blanches sous
+les ailes et sous le ventre.</p>
+
+<p>La forme élancée de la sterne lui a valu le nom populaire d'hirondelle
+de mer. Pourtant ce gracieux palmipède a des moeurs bien différentes de
+celles du passereau qui vient nous annoncer chaque année le retour du
+printemps.</p>
+
+<p>La sterne est essentiellement un oiseau de mer. Elle vit par bandes qui
+creusent leurs nids sur quelque plage déserte, en plein Océan, ou aussi
+loin que possible d'une région habitée. Dès que les petits sont en âge
+de voler, elles émigrent en masse vers quelque terre lointaine, et,
+intrépides voyageuses, parcourent ainsi des distances inimaginables.
+Nous citerons le cas d'une des trente-huit espèces du genre: la sterne
+arctique. Cet oiseau pond ses oeufs et élève sa petite famille dans les
+parages du Pôle Nord, et s'en retourne hiverner sur les rivages du
+continent antarctique! Sauf le temps de la nidaison, sa vie se passe à
+faire la navette entre les deux extrémités de l'axe de la terre.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/017a.png"><br><span class="sml">
+M. Maurice Bertrand.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;
+ M. Edwards.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;
+ M. A. Hébrard.
+ Dr. A. de Rothschild.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;
+ M. H. Bernstein.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;</span></p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/017b.png"><br><span class="sml">
+Cte Hallez Claparède.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;
+ Cte Boni de Castellane.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;
+ M.Messager.
+ M. Astruc.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;
+ M. Sem dessinant M. Paul Robert.</span></p>
+
+<p class="mid"><b>UNE FANTAISIE DÉCORATIVE AU THÉÂTRE DES CHAMPS-ELYSÉES.<br>--Des croquis
+grandeur nature crayonnés par Sem sur les murs du bar.</b></p>
+
+<p>Tandis que, dans ce théâtre des Champs-Elysées dont l'inauguration a été
+l'événement parisien de la semaine, la façade s'orne d'une noble frise
+due au statuaire Bourdelle, qui a également composé. pour l'atrium
+d'entrée et les couloirs des loges, une suite de bas-reliefs
+mythologiques, d'autres parties de ce palais où tout concourt au plaisir
+des yeux ont reçu une décoration moins sévère. Un élégant bar-fumoir y
+accueille, pendant l'entr'acte, les spectateurs désireux d'échanger
+quelques propos parmi les nuées légères des cigarettes: pour égayer ce
+lieu aimable, où, les soirs de «générale» passeront tant de
+contemporains notoires, quel artiste était plus désigné que Sem, leur
+dessinateur attitré? Il a croqué, avec sa verve coutumière, sur deux
+panneaux appliqués aux murs, et qui ne paraissent point s'en distinguer,
+quelques-unes des silhouettes sans lesquelles on n'imagine pas le
+Tout-Paris de 1913. Exécutées à la grandeur naturelle, elles donnent
+l'impression d'avoir été jetées, d'un crayon preste, sur la pierre même.
+Ainsi vivantes et toutes proches, elles serviront de fond, si l'on peut
+dire, aux causeries qui s'échangeront là, entre deux actes...</p>
+
+<br><br>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/018a.png"><br><b>L'Institut et le Collège français de Madrid.</b></p>
+
+<h3>LA FRANCE ET SES SOEURS LATINES</h3>
+
+<p><i>A Madrid, l'inauguration de l'Institut français, à Rome, la
+constitution du comité Italia-Francia ont été, à peu de jours de
+distance, deux intéressantes et caractéristiques manifestations en
+faveur de l'amitié latine. Aussi réunissons-nous sous un même titre
+d'actualité les correspondances que nous avons reçues de Madrid et de
+Borné et qu'il comment de rapprocher.</i></p>
+
+<h3>L'INAUGURATION DE L'INSTITUT FRANÇAIS DE MADRID</h3>
+
+<p>Le 27 mars a eu lieu l'inauguration solennelle de l'Institut français de
+Madrid, sous la présidence de M. Steeg, ancien ministre de l'Instruction
+publique, délégué spécial du gouvernement français, et en présence du
+comte de Romanonès, président du Conseil espagnol, des ministres d'État,
+M. Navarro Reverter, et de l'Instruction publique, M. Lopez Muñoz, de
+l'ambassadeur de France M. Geoffray, de MM. Collignon, membre de
+l'Institut; Bayet, directeur de l'enseignement supérieur; Coullet,
+directeur au ministère de l'Instruction publique; des recteurs des
+Universités de Madrid, Bordeaux, Toulouse et Poitiers, de plus de
+cinquante universitaires français et autres notabilités des deux pays.
+L'Institut français de Madrid, analogue aux Écoles de Rome, d'Athènes,
+de Florence et de Saint-Pétersbourg, réunit désormais deux oeuvres
+naguère distinctes et d'ailleurs également méritoires. C'est, d'une
+part, l'École des hautes études hispaniques, fondée, sur l'initiative et
+sous la direction du savant archéologue M. Pierre Paris, par
+l'Université de Bordeaux pour permettre à de jeunes agrégés de
+poursuivre en Espagne leurs travaux, qui ont abouti déjà à des thèses
+fort remarquables. Et c'est, d'autre part, l'Union des Etudiants
+français et espagnols créée en 1908 par le doyen de la Faculté des
+lettres de Toulouse, M. É. Mérimée, pour organiser, à Madrid au
+printemps, à Burgos en été, deux séries de cours: espagnols à
+l'intention des maîtres ou élèves français se préparant à l'enseignement
+de cette langue; français pour les auditeurs espagnols, qui, l'an
+dernier, dépassaient, à Madrid, le chiffre de 150, tandis qu'à Burgos se
+formait une colonie scolaire de 125 Français. De ce double courant
+parallèle d' «échanges universitaires» franco-espagnols était née entre
+les Universités de Toulouse et Bordeaux, leurs promotrices, une «ardente
+et cordiale émulation», selon le mot de M. Steeg.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/018b.png"><br><b>Le discours de M. Steeg, représentant du gouvernement<br>
+français, à l'inauguration de l'institut français de Madrid.</b></p>
+
+<p>Mais toutes deux sentaient également, en raison même du succès de leur
+entreprise, l'urgente nécessité de substituer une installation
+définitive et personnelle à l'installation provisoire de l'École des
+études hispaniques en garni et de l'Union des étudiants à l'Université
+de Madrid, où le recteur, M. Condey Luque, leur offrait une affable
+hospitalité. L'heureuse coïncidence du transfert, dans un vaste terrain
+et un nouvel édifice, du Collège primaire et secondaire entretenu par la
+Société française d'enseignement de Madrid, le dévouement du président
+de cette Société, M. Delvaille, le zèle de nos ambassadeurs, MM. Revoil
+et Geoffray, les libéralités publiques et privées, ont permis d'édifier
+en moins d'un an auprès du Collège, dans un des meilleurs quartiers de
+Madrid, bel et sobre bâtiment, dû aux architectes MM. Galeron et Zabala,
+et qui offre un asile indépendant et confortable à la fois aux boursiers
+en mission d'études hispaniques et aux chargés de cours français à
+l'usage du public espagnol. C'est dans la grande salle de conférences
+qu'a eu lieu la cérémonie de l'inauguration de l'Institut, avec les
+discours de MM. Lapie, recteur de l'Université de Toulouse, Collignon,
+Delvaille, du ministre de l'Instruction publique espagnol, M. Lopez
+Muñoz, qui eut la délicate attention d'en prononcer une partie dans un
+français aussi correct que vibrant, et enfin de M. Steeg. Tous, après
+avoir retracé la genèse et défini le caractère de cette institution, ont
+célébré la reprise, consacrée par la ratification de l'accord marocain,
+des bons rapports franco-espagnols, dont l'interruption momentanée
+n'avait d'ailleurs point fait obstacle au succès de notre oeuvre
+universitaire. Mais encore fallait-il dissiper les préventions dont
+celle-ci pouvait être l'objet de la part de certains esprits
+susceptibles et enclins à regarder la création de cette sorte de Faculté
+française à Madrid comme une mainmise intellectuelle, si l'on peut dire,
+de la France sur l'Espagne. C'est à quoi s'est très opportunément
+appliqué M. Steeg en spécifiant que ce centre pédagogique et
+scientifique à la fois se conformerait au principe de la mutualité. Et
+l'annonce que, à la demande des universités françaises des notabilités
+espagnoles comme le docteur Ramon y Cajal, titulaire du prix Nobel, et
+l'éminent philologue Ménendez Pidal, iraient à leur tour donner des
+conférences en France, suivant l'exemple récent de M. Altamira,
+directeur de l'enseignement primaire, à la Sorbonne, en fut un gage
+suffisant.</p>
+
+<p>La cordialité qui n'a cessé de régner durant ces fêtes, à la séance
+d'inauguration comme au déjeuner offert par le comte de Romanonès à M.
+Steeg, au dîner, et à la brillante soirée de l'ambassade de France,
+s'est peut-être manifestée d'une façon plus expressive encore pendant
+l'excursion des délégués français à Tolède, où les exercices exécutes
+devant eux par l'École d'infanterie et les hymnes des deux pays joués
+par sa musique ont fourni l'occasion de toasts chaleureux en l'honneur
+de chaque armée. Quant au roi Alphonse XIII, partisan convaincu de
+l'entente franco-espagnole, si son accident de cheval a obligé de
+supprimer le déjeuner auquel il avait invité M. Steeg et la, réception
+des universitaires français au palais, l'audience précédemment accordée
+par lui à notre envoyé officiel avait témoigné de l'intérêt et de la
+sympathie qu'il porte à cette belle oeuvre.<br>
+
+<span class="rig"><span class="sc">J. Causse.</span></span></p><br><br>
+
+<h3>«FRANCE-ITALIE» ET «ITALIA-FRANCIA»</h3>
+
+<p>Dans la jolie villa Cavalieri s'est constitué à Rome, récemment, le
+comité Italia-Francia qui, sous la présidence honoraire du marquis
+Visconti-Venosta, travaillera de concert avec le comité France-Italie
+présidé par M. Pichon, à resserrer les liens qui unissent les deux pays.</p>
+
+<p>On remarquait parmi les assistants à la réunion: M. Luigi Luzzatti,
+ancien président du Conseil; le chef socialiste réformiste, le député
+Bissolati; M. Salvatore Barzilai, l'un des meilleurs orateurs du
+Parlement; le leader républicain Eugenio Chiesa; le sénateur Martini,
+ancien gouverneur de l'Érythrée; M. Carcano, conservateur,
+vice-président de la Chambre; le sénateur Pompéo Molmenti, bien connu;
+le sculpteur Léonardo Bistolfi; M. Guglielmo Ferrero, l'historien si
+apprécié en France.</p>
+
+<p class="rig"><img alt="" src="images/018c.png"><br><b>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;M. Luigi Luzzatti, qui préside<br> &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;le comité Italia-Francia.</b><br>
+<img alt="" src="images/018d.png"><br><b>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;Le commandeur Enea Cavalieri,<br> &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;secrétaire du comité
+Italia-Francia.</b></p>
+
+<p>Le comité qui s'est formé a désigné comme secrétaire général le
+commandeur Enea Cavalieri.</p>
+
+<p>Celui-ci, avec beaucoup d'amabilité, a bien voulu, en quelques mots, me
+dire, pour <i>l'Illustration</i>, quelles étaient les intentions du nouveau
+comité:</p>
+
+<p>«En nommant comme président d'honneur un diplomate tel que le marquis
+Visconti-Venosta, dont personne en France n'a oublié le rôle à la
+conférence d'Algésiras, nous avons voulu, me dit-il, montrer la
+tradition de la politique italienne qui a été toujours la plus cordiale
+vis-à-vis de la France.</p>
+
+<p>» Notre comité n'a pas, nominalement, de président effectif, mais, comme
+M. Luzzatti se trouve en tête des fondateurs du comité Italia-Francia,
+c'est lui qui remplit effectivement cette charge.</p>
+
+<p>» Nos statuts visent à la constitution de deux bureaux: l'un qui aura
+pour objet les études littéraires ou artistiques intéressant les deux
+pays, l'autre qui s'occupera des questions politiques et économiques.</p>
+
+<p>» Remarquez bien que nous ne voulons pas que notre activité économique
+devienne purement commerciale; certes, si de grandes questions touchant
+nos deux pays sont en jeu, nous y donnerons toute notre attention, mais
+nous ne voulons pas chercher à conclure des affaires.</p>
+
+<p>» Ce que nous désirons, c'est encourager tout ce qui se fait en Italie,
+pour mieux faire connaître et apprécier la France.</p>
+
+<p>» Nous organiserons des conférences, nous soutiendrons les institutions
+qui s'occupent de propager en Italie la langue et la culture françaises.</p>
+
+<p>» Nous espérons pouvoir bientôt envoyer une forte délégation porter au
+comité France-Italie à Paris les salutations de notre comité italien.»</p>
+
+<p>La presse a salué avec sympathie la formation du nouveau comité et les
+grands journaux romains y ont consacré leur éditorial.</p>
+
+<p>A peine constitué, le comité Italia-Francia a reçu de nombreuses
+adhésions de toutes les parties de l'Italie et il compte actuellement
+parmi ses membres la plupart des noms qui, à l'étranger, personnifient
+l'Italie intellectuelle.</p>
+
+<p>Il a devant lui un bel avenir pour le plus grand bien des deux nations
+latines.<br>
+
+<span class="rig"><span class="sc">Robert Vaucher.</span></span></p><br><br>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/019a.png"></p>
+
+<table cellpadding="2" cellspacing="12" border="0"
+ style="width: 100%; text-align: left;" summary="illustration">
+ <tbody>
+ <tr>
+ <td style="vertical-align: top; width: 50%; text-align: center;">
+<b>La voiture présidentielle à la sortie du congrès
+mutualiste.</b>
+ </td>
+ <td style="vertical-align: top; width: 50%; text-align: center;">
+<b>Le cortège officiel au château d'eau du Peyrou.</b>
+ </td>
+ </tr>
+ </tbody>
+</table>
+<br>
+
+
+
+<h3>LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE A MONTPELLIER</h3>
+
+<h4>M. POINCARÉ A MONTPELLIER</h4>
+
+<p>Pour sa première visite officielle aux provinces françaises, M. Raymond
+Poincaré a reçu, dimanche dernier, à Montpellier, un accueil
+inoubliable. On ne vit jamais, de mémoire de Méridional, et sous la
+pluie, un pareil enthousiasme, de plus chaleureuses ni de plus unanimes
+acclamations. Ajoutons aussi que rarement, un chef de l'État eut des
+gestes et des mots plus opportuns, plus heureux, et ne sut s'adresser
+avec plus de tact au coeur de la foule.</p>
+
+<p>M. Poincaré s'était rendu à Montpellier pour clôturer le congrès
+national de la mutualité française. Son voyage, au programme très
+chargé, fut cependant très court et l'on peut dire qu'il battit le
+record de la célérité. Alors, en effet, que les rapides ordinaires
+mettent une quinzaine d'heures pour couvrir les 850 kilomètres qui
+séparent Paris de l'Hérault, en moins de trente-quatre heures, M.
+Poincaré, accompagné de M. Louis Barthou, président du Conseil, et de M.
+Chéron, ministre du Travail, a effectué le trajet d'aller et retour,
+entendu vingt harangues, répondu autant de fois, prononcé deux beaux
+discours, présidé une séance solennelle et un banquet, assisté à une
+fête champêtre et visité une clinique et un hôpital.</p>
+
+<p>Les journaux quotidiens ont donné un compte rendu détaillé de ces fêtes
+et cérémonies auxquelles avait voulu assister un éminent ami de la
+mutualité et de tout ce qui est français, le prince de Monaco. L'une de
+nos photographies donne une vision de la foule massée devant le théâtre
+à l'instant où le président de la République, qui venait de clôturer le
+congrès mutualiste, sortait pour se rendre au manège d'artillerie où
+avait lieu le banquet de 2.500 couverts. La fête champêtre eut pour
+cadre la fameuse promenade du Peyrou, dominée par le château d'eau,
+d'où, lorsque le temps est clair, on aperçoit la mer. Des grisettes
+montpelliéraines, soeurs des midinettes de Paris, récitèrent un
+compliment en languedocien, et, sous des arceaux de verdure et de fleurs
+entrelacés, des groupes de jeunes garçons et de fillettes, de jolies
+<i>pitchounettes</i> en costume traditionnel, exécutèrent les danses locales
+de la Treille. M. Raymond Poincaré complimenta avec esprit, serra des
+mains, embrassa des enfants, entendit quarante fois <i>la Marseillaise</i>
+et, au bout de sa journée, salué par une dernière formidable
+acclamation, reprit, à 7 heures, le train de la capitale.</p>
+
+<h4>LA SUCCESSION DE M. LÉPINE</h4>
+
+<p>En revenant du voyage présidentiel où il remplissait pour la dernière
+fois les fonctions de directeur de la Sûreté générale, M. Hennion est
+allé recevoir des mains de M. Lépine le sceptre, ou, pour mieux dire, le
+bâton blanc de la préfecture de police.</p>
+
+<p>Le successeur de M. Lépine est né dans un bourg du département du Nord,
+à Gommegnies, près d'Avesnes. Il a même aujourd'hui la satisfaction
+d'être le maire de sa commune natale.</p>
+
+<p>Engagé dans l'infanterie pour cinq ans, M. Hennion quitta son régiment
+en 1885, avec les galons de sergent-major, et, dès l'année suivante, il
+entrait à la Sûreté générale. Nommé, un peu plus tard, commissaire
+spécial à Paris; puis envoyé, sur sa demande, à Verdun, comme
+commissaire de police (il y resta près de trois ans pour étudier le
+fonctionnement de la police en province), il était rappelé en 1893 à la
+Sûreté générale, et, depuis vingt ans, il n'a plus quitté ce service
+qu'il dirigeait depuis six ans.</p>
+
+<p class="rig"><img alt="" src="images/019b.png"><br>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;<b>M. Hennion.</b>--<i>Phot. Gerschel.</i></p>
+
+<p>Sa figure n'est pas encore aussi connue des Parisiens que celle de M.
+Lépine. Elle l'est, en tous cas, des habitués des champs de courses, où,
+pendant douze ans, M. Hennion pourchassa les parieurs <i>au livre</i> au
+grand profit du Trésor, qui du pari mutuel allait tirer les admirables
+ressources que l'on sait... On a vu aussi M. Hennion en province,
+puisqu'il y fut, à l'occasion de plus de cent voyages de chefs d'État,
+l'organisateur des services d'ordre.</p>
+
+<p>Mais, surtout, M. Hennion est le créateur de ces <i>brigades mobiles</i> qui
+ont transformé les conditions de travail du service des recherches.
+Grâce à lui encore, ce service se trouve aujourd'hui pourvu de tout
+l'outillage moderne qui ne lui a manqué que trop longtemps: archives
+criminelles centralisées à Paris, ateliers de photographie constitués
+dans les commissariats et aux sièges des brigades mobiles, application
+de plus en plus étendue de la téléphonie et de l'automobilisme aux
+opérations de Sûreté générale...</p>
+
+<p class="lef"><img alt="" src="images/019c.png"><br><b>M. Pujalet dans son ancien<br> cabinet du Louvre</b>--<i>Phot.<br>
+Vizsavona.</i></p>
+
+<p>Grand, robuste, la moustache courte et jeune, la démarche aisée, le
+geste prompt, le nouveau préfet de police est un quinquagénaire favorisé
+par la nature: il a le visage d'un homme de quarante ans à peine.</p>
+
+<p>M. Eugène Pujalet qui succède à M. Hennion comme directeur de la Sûreté
+générale n'est âgé que d'une quarantaine d'années. Il a débuté dans
+l'administration, il y a dix-neuf ans, comme chef de cabinet du préfet
+du Tarn. A vingt-trois ans, il était appelé à Paris connue secrétaire du
+directeur de la Sûreté générale, passait de ce service à la direction du
+cabinet de M. Blanc, préfet de police, et, en 1899, revenait à la Sûreté
+générale avec les fonctions d'inspecteur des commissariats spéciaux.
+Après le vol de la <i>Joconde</i>, on confia à M. Pujalet, jeune, énergique,
+plein d'initiative, la direction provisoire des musées nationaux où il
+réorganisa si bien la surveillance et la discipline du personnel que ses
+fonctions venaient, il y a quelques mois, de lui être confirmées à titre
+définitif... Définitif, on le croyait du moins, puisque voici le
+directeur des musées d'hier devenu le directeur de la Sûreté
+d'aujourd'hui.</p><br><br>
+
+
+
+<h3>DEUX PHOTOGRAPHIES<br>
+
+DU DÉFUNT ROI GEORGES DE GRÈCE</h3>
+
+<p>Un de nos excellents correspondants, M. Franz de Jessen, nous envoie de
+Copenhague, avec ces quelques lignes de commentaire, deux documents
+curieux et rares sur la jeunesse du roi Georges de Grèce qui vient
+d'être si lâchement assassiné après un règne prospère de cinquante ans:</p>
+
+<p>La première de ces photographies représente le roi, alors prince
+Guillaume de Danemark, en uniforme des cadets de la marine danoise. Elle
+date du mois de décembre 1862, c'est-à-dire quelques mois avant
+l'élection du prince au trône des Hellènes (30 mars 1863). Le prince
+fut, en effet, à l'époque de son élection, cadet de la marine
+danoise,--ni plus ni moins. Il est à faire remarquer qu'à ce moment son
+père (feu le roi Christian IX), n'avait pas encore pris possession de la
+couronne danoise, portée alors par le roi Frédéric VII (mort en novembre
+1863), tandis que le prince Christian n'était qu'héritier présomptif. La
+nomination du prince Guillaume au grade d'officier de marine n'eut lieu
+que le jour même où le roi Frédéric VII acceptait au nom du jeune prince
+l'offre apportée par la députation hellène, présidée par le vieux et
+fameux amiral Kanaris (audience solennelle au château de Krigtiansbors à
+Copenhague, 6 juin 1863).</p>
+
+<table cellpadding="2" cellspacing="12" border="0"
+ style="width: 100%; text-align: left;" summary="illustration">
+ <tbody>
+ <tr>
+ <td style="vertical-align: top; width: 35%; text-align: center;">
+<img alt="" src="images/020a.png"><br><b>Le prince Guillaume de Danemark en 1862, à la veille
+d'être appelé à gouverner le royaume de Grèce, sous le nom de Georges
+Ier.</b>
+ </td>
+ <td style="vertical-align: top; width: 65%; text-align: center;">
+<img alt="" src="images/020b.png"><br><b>Le roi Georges de Grèce après son avènement, en 1864,
+entouré de sa suite danoise.</b>
+ </td>
+ </tr>
+ </tbody>
+</table>
+
+<p>L'autre photographie est prise à Athènes après l'avènement du roi
+Georges, en été 1864.</p>
+
+<p>Le nouveau roi avait alors dix-huit ans. Il est entouré par sa suite
+<i>danoise</i>, c'est-à-dire les officiers danois qui l'ont accompagné en
+Grèce. Le roi est le jeune homme coiffé d'un chapeau melon, assis au
+milieu. Il a à ses côtés (également assis) le baron de Gyldenèvone. A
+gauche du roi (debout) le capitaine Funch, derrière le roi (debout) le
+lieutenant des dragons Hannibal Leth.</p>
+
+<br><br>
+
+<h3>LENDEMAIN DE RÉVOLUTION</h3>
+
+<h4>AU MEXIQUE</h4>
+
+<p>Si l'ordre règne maintenant à Mexico, après la violente tragédie, la
+sauvage guerre de rues, qui ensanglanta la ville et qui se termina par
+le meurtre du président Madero et du vice-président Suarez, des ruines
+demeurent que l'on mettra peut-être longtemps à relever.</p>
+
+<p>Les obus, qui, pendant trois jours, se croisèrent entre le palais où
+s'était retranché le gouvernement et l'arsenal où s'étaient fortifiés
+les révolutionnaires, portèrent un peu partout leur oeuvre de destruction
+et de mort, parmi les paisibles demeures et les monuments publics, dans
+les rues et sur les places qui, en certains endroits, furent jonchées de
+cadavres que l'on brûla sur place.</p>
+
+<p>Nous publions ici deux des nombreuses photographies qui nous ont été
+communiquées sur les lendemains de cette convulsion politique et qui
+témoignent de la violence aveugle de ce bombardement à l'intérieur d'une
+capitale.</p>
+<br><br>
+
+<h3>DOCUMENTS &amp; INFORMATIONS</h3>
+
+<p class="rig"><span class="sc">La production totale du diamant.</span></p><br><br>
+
+<p>Dans son <i>Traité de métallogénie</i>, M. de Launay cherche à évaluer la
+quantité totale de diamant extraite du sol depuis que l'on commença à
+apprécier ces brillants cailloux.</p>
+
+<p>Tous les anciens diamants venaient de l'Inde. Les mines de ce pays,
+aujourd'hui complètement épuisées, auraient fourni environ 2.000 kilos.</p>
+
+<p>En 1723 on découvrit les gisements du Brésil, qui ont donné 2.500 kilos
+de diamants représentant une valeur brute de 500 millions, soit 40
+francs le carat (1 carat = 20 centigrammes). Mais, depuis quelques
+années, la production annuelle est réduite à 350 carats ou 70 grammes.</p>
+
+<p>Aujourd'hui le monde entier est alimenté par les mines du Cap, trouvées
+en 1870. La production a atteint 3.600 carats en 1887 et en 1898; depuis
+lors, le syndicat des mines a limité l'extraction afin d'éviter la
+formation d'un stock trop considérable.</p>
+
+<p>Voici la production mondiale de 1909:</p>
+
+<pre>
+Cap (Cie de Beers). 1.860.000 carats.
+Transvaal. 1.929.492
+Orange. 656.319
+Afrique allemande. 400.000
+Guyane anglaise. 5.646
+Nouvelle-Galles du S. 2.205
+</pre>
+
+<p>La valeur des pierres diffère beaucoup selon la provenance; le diamant
+brut du Cap vaut en moyenne 40 francs le carat, celui du Transvaal, 16
+francs.</p>
+
+<p>M. de Launay est amené à évaluer ainsi la production totale du diamant
+depuis l'origine:</p>
+
+<pre>
+ Millions Valeurs en millions
+ de carats. de francs.
+
+Inde. 10 426
+Brésil (1723-1910). 12 500
+Afrique du Sud (1867-1910). 120 3.900
+
+Total. 142 4.826
+</pre>
+
+<p>Ces 142 millions de carats de diamant brut représentent 28,4 tonnes et 8
+mètres cubes, avec une valeur brute de près de 5 milliards.</p>
+
+<p>En tenant compte de la taille, le volume peut être diminué de moitié;
+mais la valeur marchande, aux cours actuels, peut être quintuplée. Nous
+arrivons donc à un total de 4 mètres cubes de diamants taillés, valant
+24 milliards et pouvant tenir dans une caisse mesurant 2 mètres de
+longueur et 2 mètres de largeur sur 1 mètre de hauteur.</p>
+
+<p>Devant de tels chiffres, qui font sourire les femmes et rougir le
+philosophe, on se demande comment le monde peut encore absorber chaque
+année pour 140 millions de diamants bruts qui, taillés, représentent un
+achat d'environ 600 millions.</p>
+
+<p class="rig"><span class="sc">L'aménagement des montagnes dauphinoises.</span></p><br><br>
+
+<p>L'<i>Association dauphinoise pour l'aménagement des montagnes</i> a pour but
+l'amélioration du domaine forestier et du régime pastoral dans les
+régions montagneuses du Dauphiné. Fondée à Grenoble, il y a quelques
+années, elle a déjà obtenu des résultats sérieux, malgré la faiblesse
+des ressources dont elle dispose.</p>
+
+<p>Grâce à une active propagande, plusieurs communes ont cessé d'accueillir
+les moutons de Provence qui venaient, chaque été, achever la dévastation
+de leurs pâturages, en même temps qu'ils rendaient impossible toute
+tentative de reboisement. Dans ces conditions, on a constaté, au bout de
+trois ou quatre ans, une véritable renaissance de la végétation
+forestière et pastorale; dans l'Oisans, notamment, des coteaux abrupts,
+rongés par le ruissellement et les avalanches, se couvrent peu à peu
+d'un manteau forestier protecteur. Les plantations réussissent dans la
+proportion d'environ 70%.</p>
+
+<p>Mais cela coûte cher. Beaucoup de communes ne comprennent pas encore
+leur véritable intérêt; d'autres ont des ressources si modiques que
+l'association doit prendre à sa charge le déficit causé dans la caisse
+municipale par la non-location. A ces frais et à ceux de propagande
+viennent s'ajouter les dépenses pour la création de pépinières et pour
+les plantations, et encore les subventions à diverses initiatives
+particulières, telles que les reboisements d'un caractère esthétique
+entrepris par le Syndicat d'initiative du Monestier-de-Clermont.</p>
+
+<p>L'association demande à ses adhérents une cotisation minime: 2 à 10
+francs, au gré de chacun. Il semble donc permis d'espérer que le nombre
+de ces adhérents augmentera rapidement, surtout dans les régions
+intéressées à une oeuvre dont personne ne saurait discuter l'utilité.</p>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/020c.png"></p>
+
+<table cellpadding="2" cellspacing="8" border="0"
+ style="width: 100%; text-align: left;" summary="illustration">
+ <tbody>
+ <tr>
+ <td style="vertical-align: top; width: 50%; text-align: center;">
+<b>Pylône d'une horloge publique<br> éventré par les obus.</b>
+ </td>
+ <td style="vertical-align: top; width: 50%; text-align: center;">
+<b>Maison criblée par la mitraille.<br></b>--<i>Photographies de M.
+J.-B. Moreau.</i>
+ </td>
+ </tr>
+ </tbody>
+</table>
+
+
+
+
+
+<h3>LES RUINES DE LA GUERRE CIVILE A MEXICO</h3>
+<br><br>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/021a.png"><br><b>Vue panoramique de Vendôme, montrant comment la ville est<br>
+dominée par la tour de Saint-Martin.</b>--<i>Phot. H. Chartier.</i></p>
+
+<p class="rig"><span class="sc">La fin d'un scandale.</span></p><br><br>
+
+<p>L'administration des Beaux-Arts a prononcé, la semaine dernière, le
+classement du clocher de Saint-Martin, à Vendôme: ainsi va prendre fin,
+à la satisfaction de tous les défenseurs de nos richesses monumentales
+menacées, et des Vendômois tout des premiers, le scandale qu'avait
+publiquement révélé, à la tribune de la Chambre, M. Maurice Barrés.</p>
+
+<p>Nous avons, dans notre numéro du 22 mars, publié les deux photographies
+qu'avait montrées à ses collègues le député de Paris, comme preuve des
+fâcheux travaux exécutés dans la tour. Pour répondre au désir qu'on nous
+a exprimé de divers côtés, nous reproduisons aujourd'hui une vue
+d'ensemble du clocher de Saint-Martin. Son seul aspect justifie
+l'émotion unanimement provoquée par l'acte de vandalisme dont il a été
+l'objet: c'est bien l'une des parures de Vendôme que l'on avait tenté de
+déshonorer, et que l'arrêté de classement vient de sauver fort à propos.</p>
+
+<p class="rig"><span class="sc">La disparition du Café anglais.</span></p><br><br>
+
+<p>Après Tortoni, la Maison Borée, le café du Helder, voici que disparaît
+le Café anglais. Un immeuble de rapport va remplacer la maison vieux
+jeu, aux fenêtres étroites et basses, qui, depuis longtemps, paraissait
+sommeiller au coin du boulevard et de la rue de Marivaux, dédaignant
+toute modernisation susceptible d'éblouir les passants qu'étonnait un
+pareil anachronisme à deux pas de l'Opéra et de l'Opéra-Comique.</p>
+
+<p>Fondé dans les dernières années du dix-huitième siècle, ce restaurant
+célèbre connut sa plus grande prospérité sous le second Empire. Gros
+financiers, artistes enrichis, littérateurs en vogue, princes de tous
+pays, s'y rencontraient avec l'aristocratique «jeunesse dorée» qui
+continuait avec autant de brio que ses aînés, mais peut-être moins de
+désinvolture, la tradition des soupers de la Régence. La finesse de la
+cuisine, la supériorité de la cave étaient aussi justement renommées que
+la discrétion du lieu et le ton imposé par une clientèle ultra-select.</p>
+
+<p>Après la guerre, les soupeurs d'antan se reposèrent; ceux de la nouvelle
+génération adoptèrent la brasserie, recherchant le coude à coude, la
+gaieté bruyante et l'addition discrète. Un instant, le Café anglais,
+acheté par une société, connut des jours moins heureux. En 1876, il fut
+acquis par le propriétaire actuel, M. Burdel, qui sut ramener chez lui
+une clientèle hésitante et s'en faire une nouvelle. On ne soupait plus
+guère au Café anglais; mais on y déjeunait et l'on y dînait. Les
+boursiers, quelques hommes de lettres parmi lesquels Sardou fut le
+client le plus fidèle, les riches étrangers, tous les gens fortunés
+sachant vraiment manger, fréquentaient assidûment cette maison hors rang
+dont la table continuait à lutter victorieusement avec celle des plus
+somptueux palaces. Au passant rapide, le Café anglais semblait vide et
+abandonné; en réalité, il faisait de brillantes affaires.</p>
+
+<p>Sa disparition est la conséquence de la plus-value formidable dont
+profitent depuis quelque temps les terrains du quartier de l'Opéra.
+L'immeuble, voué à la démolition immédiate, occupe une surface de 198
+mètres. Il a été vendu 1.500.000 francs, ce qui fait ressortir le prix
+du terrain à 7.000 francs le mètre.</p>
+
+<p class="rig"><span class="sc">Le prix d'un cuirassé en Angleterre et en Allemagne.</span></p><br><br>
+
+<p><i>L'Engineering</i> vient de publier des renseignements intéressants sur le
+prix actuel des navires de guerre construits en Angleterre et en
+Allemagne.</p>
+
+<p>Les cuirassés allemands du type <i>Kaiser</i>, construits par les chantiers
+impériaux, et ceux du type <i>Kaiserin</i>, construits par des chantiers
+privés, ont les mêmes caractéristiques générales: 170 mètres de
+longueur, 24.000 tonnes de déplacement, turbines de 28.000 chevaux ayant
+donné aux essais une vitesse de 21 noeuds. Les premiers ont coûté 59
+millions et demi; les autres, 60 millions.</p>
+
+<p>Les bâtiments anglais du type <i>King George V</i>, un peu moins gros que les
+unités allemandes (166 mètres de longueur et 23.000 tonnes de
+déplacement), ont la même puissance et la même vitesse; ils ne coûtent
+que 50.400.000 francs. En outre, l'armement, quoique très supérieur à
+celui des cuirassés allemands correspondants, a coûté environ 6.500.000
+francs de moins par navire.</p>
+
+<p>Le <i>Goeben</i>, croiseur de la marine germanique, mesure 184 mètres de
+longueur, déplace 22.600 tonnes avec une force de 52.000 chevaux; il a
+coûté 55 millions. Le <i>Lion</i>, de la marine britannique, mesure 198
+mètres, déplace 26.300 tonnes et utilise une puissance de 70.000
+chevaux; il a coûté 51.700.000 francs.</p>
+
+<p>De façon générale, l'écart des prix de construction entre les divers
+chantiers de l'Angleterre ne dépasse pas 2 %; et ces prix représentent
+une économie de 8 à 15 % sur ceux des chantiers allemands.</p>
+
+<p class="rig"><span class="sc">La maison de Balzac.</span></p><br><br>
+
+<p>Le ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts a tenu à classer
+parmi les monuments historiques le petit pavillon avec jardin que Balzac
+vint habiter à Paris, au numéro 24 actuel de la rue Pierre-Berton,
+lorsqu'il fut obligé de vendre, pour cause de dettes, son chalet des
+Jardies, à Sèvres.</p>
+
+<p>C'était, transformée au goût moderne, une aimable résidence du
+dix-huitième siècle appelée la Folie-Bertin, où Bertin de Blagny,
+financier artiste, avait donné plus d'une fête en l'honneur de Mlle Hus,
+pensionnaire du Théâtre-Français.</p>
+
+<p>Peut-être sa situation tenta-t-elle le grand écrivain du dix-neuvième
+siècle, plus encore que ses souvenirs. Car elle avait deux issues:
+ressource précieuse pour fuir les créanciers importuns. Là, l'auteur de
+la Comédie Humaine acheva, au cours de veilles laborieuses, sa grande
+histoire de la société moderne, avec Ursule Mirouet, la cousine Bette,
+Modeste Mignon, le Cousin Pons, et ce Mercadet qui fut comme un reflet
+de ses luttes avec ses créanciers.</p>
+
+<p>Le pavillon de la rue Berton est aujourd'hui le musée que la Société des
+Amis de Balzac a meublé de pieux souvenirs. Par la porte-fenêtre de la
+pièce, qui fut le cabinet de travail de l'écrivain, on accède au jardin
+où il aimait à se promener, vêtu d'un froc blanc de dominicain dont il
+avait fait son costume d'intérieur. Parfois même il y faisait porter sa
+baignoire, pour se reposer en plein air et dans l'eau.</p>
+
+<p class="rig"><span class="sc">Nidifications précoces.</span></p><br><br>
+
+<p>Avec les hivers particulièrement doux qui sont la règle depuis quelques
+années, les oiseaux commencent à se sentir désorientés, et on les voit
+faire leur nid et pondre en des saisons tout autres que la normale. Les
+faits qui suivent et qu'a recueillis un observateur anglais, dans le
+Cheshire, donnent l'impression que normalement il y a chez les oiseaux
+une tendance à une seconde saison reproductrice en automne, tendance qui
+se réalise quand le temps est favorable.</p>
+
+<p>En 1911, l'observateur en question a trouvé des oeufs de ramier le 25
+octobre; des oeufs de roitelet en décembre; de jeunes étourneaux aussi
+en décembre. En 1912, il a trouvé des oeufs de linotte (janvier), de
+roitelet (janvier), des jeunes d'étourneau (janvier), des oeufs de
+merle, de moineau, etc., en novembre et décembre. En 1913, il a vu des
+oeufs de merle en janvier; de jeunes étourneaux aussi en janvier, et de
+diverses autres espèces aussi des oeufs et des jeunes, toujours en
+janvier.</p>
+
+<p class="rig"><span class="sc">Le Japon et la Chine vus par un artiste.</span></p><br><br>
+
+<p>D'un récent voyage au Japon et en Chine, où il était allé chercher des
+sujets nouveaux d'inspiration, M. H. Le Riche, le peintre et dessinateur
+bien connu, a rapporté une ample moisson de croquis et d'études plus
+poussées, à l'huile et à l'aquarelle, dont, à plusieurs reprises,
+<i>L'Illustration</i> a eu la primeur. Ces études, M. Le Riche les réunit
+aujourd'hui en une exposition qui vient de s'ouvrir à la Galerie Georges
+Petit: elles constituent un ensemble d'un rare attrait, par lequel
+s'affirme le charme varié de ces impressions d'Extrême-Orient, dont nos
+lecteurs auront eu un délicat avant-goût.</p>
+<br><br>
+
+<h3>UNE GRANDE LORRAINE</h3>
+
+<p>Une Lorraine de grand coeur, qui fut l'une des premières à honorer la
+mémoire de nos soldats tués sur les champs de bataille de 1870, Mme
+veuve Adolphe Bezanson, née de Viville, belle-soeur de Paul Bezanson qui
+fut maire de Metz en des temps difficiles, de 1871 à 1877, vient de
+disparaître, à un âge très avancé. Sa mort a été vivement ressentie dans
+tout le pays annexé, où elle était entourée d'une touchante vénération.</p>
+
+<p class="lef"><img alt="" src="images/021b.png"><br>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;<b>Mme Adolphe Bezanson.</b><br>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;--<i>Phot. Prillot.</i></p>
+
+<p>Bien avant que fût fondée l'Association des Dames de Metz, Mme Bezanson
+s'était donné la noble tâche d'entretenir et de parer les tombes des
+Français tombés, pendant la guerre, autour de la grande ville lorraine.
+Chaque année, à la Toussaint, et quand revenaient les douloureux
+anniversaires, elle se rendait secrètement au cimetière Chambière,
+dissimulant sous ses vêtements des fleurs et de petits outils de
+jardinage, avec lesquels elle nettoyait pieusement les tertres. Plus
+tard, on osa rendre ostensiblement hommage à nos morts. L'honneur lui
+reste d'avoir commencé cette oeuvre du Souvenir, à laquelle les
+Alsaciens-Lorrains sont restés, malgré les obstacles, si fidèles.</p>
+
+<p>Mme Bezanson était titulaire de la médaille des anciens combattants de
+Gravelotte et de la médaille en or de la Société pour l'encouragement au
+bien. Cette distinction, qui ne se décerne qu'une fois par an, lui avait
+été remise solennellement par le président de la République en 1908.</p>
+
+<p>Metz a fait à cette grande Lorraine des obsèques émouvantes.</p>
+
+<p class="rig"><img alt="" src="images/022.png"><br>&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;<b>Le célèbre banquier américain, John Pierpont. Morgan.</b></p>
+
+<h3>PIERPONT MORGAN</h3>
+
+<p>M. Pierpont Morgan est mort à Rome, dimanche dernier. Il est mort après
+quelques jours de maladie, tout comme le plus modeste des rentiers...
+«Gastrite aiguë, compliquée de prostration nerveuse», disent les
+dépêches.</p>
+
+<p>Il avait soixante-seize ans, étant né le 17 avril 1837, à Hartford, dans
+le Connecticut. Et la première originalité de ce milliardaire fut de
+n'être pas «parti de rien». Il faut que les biographes en prennent leur
+parti; ils n'auront pas, cette fois, la ressource d'exciter
+l'imagination populaire, au récit d'aventures d'enfance pathétiques, de
+débuts misérables et attendrissants. Le jeune Pierpont Morgan, avant de
+devenir le roi de la finance, ne fut point le gamin qui apprend à lire
+tout seul, cire les bottes et vend des journaux dans les trains.
+Pierpont Morgan avait des papiers de famille et une généalogie. Ses
+aïeux, émigrés d'Angleterre aux États-Unis, s'étaient établis au
+Massachusetts en 1636; et voilà donc plus de deux siècles et demi qu'il
+existe en Amérique des parents de ce génial manieur d'affaires. Il avait
+fait, à Hartford, de bonnes études. Il avait été étudiant à Boston;
+puis, après un séjour en Suisse, il avait fait un stage en Allemagne, à
+l'Université de Gottingen. En 1857, à vingt ans, il entrait dans la
+maison de son père, qui était alors banquier à Londres.</p>
+
+<p>L'apprentissage ne fut pas long. Le propre du génie n'est pas seulement
+d'apprendre vite, mais de deviner ce qu'il ignore. Il se sépare, au bout
+de peu de temps, de son père, pour devenir à New-York son correspondant,
+en même temps que le directeur d'une banque qu'il y fonde,--la banque
+<i>Dabney Morgan and Co.</i> Le novice est désormais lancé. En moins de dix
+ans, il est l'un des rois des chemins de fer aux États-Unis.</p>
+
+<p>On a dit de Pierpont Morgan qu'il était un grand ami de notre pays.
+C'est vrai.</p>
+
+<p>On sait qu'au lendemain de la défaite de Sedan, une maison de banque
+vint la première, sans hésiter, au secours des vaincus: celle de Julius
+Spencer Morgan, qui prêta 250 millions au gouvernement de la Défense
+nationale; 250 millions grâce auxquels put être continuée la lutte, et
+sauvé l'honneur des vaincus. Nous ne devons pas oublier que, comme
+«correspondant» de son père aux États-Unis, Pierpont Morgan se trouvait
+naturellement associé à une opération où s'affirmait, en même temps que
+la vitalité du crédit français, la persistance d'amitiés puissantes et
+qui nous sont restées fidèles.</p>
+
+<p>Pierpont Morgan avait alors trente-quatre ans. Il allait entrer dans la
+plénitude de son influence et de son action. Action souveraine;
+influence telle qu'aucun industriel, aucun financier, n'en ont jamais
+connu de comparable à celle-là!</p>
+
+<p>Témoin des embarras et des catastrophes continuellement engendrés, aux
+États-Unis, par la lutte véritablement sauvage et meurtrière des
+concurrences, Pierpont Morgan avait pensé: «Il faut substituer à cette
+anarchie de l'ordre. <i>Il faut supprimer les concurrences</i>.»</p>
+
+<p>Il fallait donc pour cela transformer les concurrents en associés...
+C'était l'idée des trusts, dont la réalisation pouvait sembler une
+chimère monstrueuse et folle, et que pourtant le génie de Morgan
+réalisa. <i>Trust</i> des chemins de fer, <i>trusts</i> de l'acier, de la viande,
+de l'or, de la houille, des banques, de la navigation, cet homme
+prodigieux les <i>osa</i> tous! Qu'une telle audace ait eu parfois des effets
+très salutaires, et qu'on ait pu considérer, à de certaines heures,
+Pierpont Morgan comme le sauveur du crédit américain, cela ne semble
+point niable à quelques-uns... mais ce n'est pas non plus l'avis de
+tous, et ce sera le rôle des économistes de déterminer dans quelle
+mesure fut bienfaisante et dans quelle mesure put être préjudiciable à
+la condition économique des États-Unis l'oeuvre de <i>conquête</i>, absolument
+fantastique, poursuivie durant plus de trente années, par cet homme
+surprenant.</p>
+
+<p>Elle lui avait rapporté, à lui personnellement, une fortune de cinq ou
+six milliards, disent les uns,--de moins d'un milliard, affirment les
+autres. Il supportait avec flegme et simplicité le poids de cette
+richesse.</p>
+
+<p>C'était un homme de haute taille, corpulent (105 kilos!), avec une
+encolure de taureau, des mains puissantes, un nez énorme sous lequel
+grisonnait une moustache serrée autour des lèvres minces; et le plus
+impressionnant regard qu'on pût imaginer: un regard gris, pénétrant,
+dont des sourcils épais semblaient retenir la lumière...</p>
+
+<p>Il parlait peu. Il allait dans le monde le moins possible. Il était un
+homme de foyer, et un homme de travail. Jules Huret a ainsi décrit la
+maison où Pierpont; Morgan travaillait:</p>
+
+<p>«...La banque se trouve au coin de Wall Street. nº 23, et de Brad
+Street, n° 3.</p>
+
+<p>» Elle n'a que cinq étages uniformes. La façade est en pierre de taille.
+Au-dessus de l'entrée des bureaux où se dressent deux colonnes de marbre
+rougeâtre soutenant un petit portique triangulaire, je lis: «J. P.
+Morgan &amp; Co» découpé en relief dans la pierre du triangle. Sur toutes
+les fenêtres des étages supérieurs, loués à des bureaux privés, on voit,
+en lettres dorées, des noms de courtiers, de sociétés financières, etc.
+Rien d'imposant en vérité, n'était l'idée de la puissance qu'on se fait
+de l'homme qui monte tous les jours les six degrés de pierre du perron
+d'où il peut voir la statue de Washington.»</p>
+
+<p>Le bureau du «patron» fait suite à ceux des employés et des «grands
+chefs» qui ne sont séparés les uns des autres que par des cloisons
+basses. Le bureau de Morgan est au fond. Il n'y a même pas d'antichambre
+qui le sépare des autres. Des cloisons de verre l'entourent. Quiconque
+avait à parler à Morgan y pouvait entrer librement...</p>
+
+<p>Ce grand travailleur aura été un grand philanthrope. Il entretenait 300
+asiles de pauvres! Il fut aussi un grand amateur d'art, et sa collection
+particulière est une des plus merveilleuses qui soient au monde. La
+France enfin lui doit deux très beaux dons: le don d'une splendide
+collection de pierres précieuses qui est au Muséum; et celui du fameux
+«chef de Saint-Martin» qu'il restitua simplement à l'État français, le
+jour où, ayant payé fort cher cette relique, il apprit qu'elle était une
+propriété d'État... qui n'était: point à vendre.</p>
+
+<p>Pierpont Morgan laisse une veuve, trois filles et un fils qui lui
+succède. C'est, dans le monde, une grande figure de moins; et, pour
+l'Amérique, une véritable force qui disparaît.</p>
+
+<br><br>
+
+<h3>LES THÉÂTRES</h3>
+
+<p>L'Athénée représente en ce moment avec succès uns comédie qui semble
+devoir passer à juste titre pour la plus originale, la plus subtile et
+la plus raffinée de cet écrivain original, subtil et raffiné qu'est M.
+Abel Hermant. C'est <i>la Semaine folle</i>. La semaine folle est, à Venise,
+la semaine de carnaval; c'est pendant une semaine de carnaval à Venise
+que se déroule l'action que M. Abel Hermant a choisie comme prétexte à
+sa nouvelle étude de moeurs cosmopolites, un drame d'amour, qui ne se
+termine d'ailleurs pas tragiquement. L'héroïne de l'aventure a meublé à
+la russe son palais du Grand Canal et il se trouve que ces deux
+byzantinismes harmonisent à merveille leurs lignes hardies et leurs
+colorations violentes; or ce détail a quelque chose de naturellement
+symbolique, toute la pièce ayant ce caractère d'étrangeté forte et
+séduisante. Elle est jouée, tout à fait dans le ton qui convient, par
+Mlle Ventura, une Slave ardente, inquiétante et captivante, par M. André
+Brûlé, à qui on peut supérieurement accorder, au masculin, les mêmes
+qualificatifs, par M. Jacques de Péraudy et par MM. Guyon fils, Gallet,
+Guilhène.</p>
+
+<p>Le théâtre lyrique des Champs-Elysées, fondé et dirigé par M. Gabriel
+Astruc et dont nous avons montré plus haut l'effet extérieur et la
+disposition intérieure, a ouvert la série de ses spectacles par les
+représentations d'oeuvres de choix: d'abord <i>Benvenuto Cellini</i> de
+Berlioz, créé en 1838 et dont pourtant c'était seulement la 8e
+représentation! Ensuite--pour succéder à cet opéra si romantique quant à
+ses détails extérieurs, si humain quant à son expression--une pastorale:
+<i>le Freisehütz</i>, de Weber. joué, pour la première fois peut-être en
+France depuis un demi-siècle, sous sa forme originale. La troisième
+soirée a été exclusivement consacrée à un concert de musique français où
+voisinaient les noms de Chabrier, Lalo, Saint-Saens, Gabriel Fauré,
+Vincent d'Indy, Debussy, Paul Dukas, Inghelbrecht. On a vivement
+apprécié le soin attentif et délicat, le goût éclairé, intelligent et
+l'art, pour tout dire, avec lequel, dans une salle appropriée à cet
+effet, cette nouvelle direction théâtrale prépare et réalise ses
+spectacles musicaux.</p>
+
+<p><i>La Chaste Suzanne</i> est, à l'Apollo, la réapparition sous forme
+d'opérette d'un vaudeville, <i>le Fils à papa</i>, de MM. Mars et
+Desvallières, qui fut applaudi il y a quelques années au Palais-Royal.
+La pièce qui vient, ainsi transformée, de faire son tour du monde, n'a
+rien perdu de sa gaieté un peu libertine mais franche, que décuple
+l'entrain de la musique fraîche et mélodieuse de M. Jean Gilbert.</p>
+
+<p>A la Comédie-Royale, revue de M. Robert Dieudonné, <i>C'est fou!</i> qui
+s'applique à justifier assez plaisamment son titre et qui y réussit
+souvent.</p>
+<br><br>
+
+<p class="mid"><img alt="" src="images/023small.png"><br><a href="images/023large.png">(Agrandissement)</a></p>
+
+<br><br>
+<p class="mid"><img alt="" src="images/supp1.png"><br>
+Note du transcripteur: Les suppléments mentionnés en titre<br> ne nous ont pas été fournis.
+
+
+<br><br>
+</div>
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+<pre>
+
+
+
+
+
+End of Project Gutenberg's L'Illustration, No. 3658, 5 Avril 1913, by Various
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+WARRANTIES OF MERCHANTIBILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE.
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+interpreted to make the maximum disclaimer or limitation permitted by
+the applicable state law. The invalidity or unenforceability of any
+provision of this agreement shall not void the remaining provisions.
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+harmless from all liability, costs and expenses, including legal fees,
+that arise directly or indirectly from any of the following which you do
+or cause to occur: (a) distribution of this or any Project Gutenberg-tm
+work, (b) alteration, modification, or additions or deletions to any
+Project Gutenberg-tm work, and (c) any Defect you cause.
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+
+Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm
+
+Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
+electronic works in formats readable by the widest variety of computers
+including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists
+because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from
+people in all walks of life.
+
+Volunteers and financial support to provide volunteers with the
+assistance they need, are critical to reaching Project Gutenberg-tm's
+goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
+remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
+Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
+and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations.
+To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
+and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4
+and the Foundation web page at http://www.pglaf.org.
+
+
+Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive
+Foundation
+
+The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
+501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
+state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
+Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
+number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at
+http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent
+permitted by U.S. federal laws and your state's laws.
+
+The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S.
+Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered
+throughout numerous locations. Its business office is located at
+809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email
+business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact
+information can be found at the Foundation's web site and official
+page at http://pglaf.org
+
+For additional contact information:
+ Dr. Gregory B. Newby
+ Chief Executive and Director
+ gbnewby@pglaf.org
+
+
+Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation
+
+Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
+spread public support and donations to carry out its mission of
+increasing the number of public domain and licensed works that can be
+freely distributed in machine readable form accessible by the widest
+array of equipment including outdated equipment. Many small donations
+($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
+status with the IRS.
+
+The Foundation is committed to complying with the laws regulating
+charities and charitable donations in all 50 states of the United
+States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
+considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
+with these requirements. We do not solicit donations in locations
+where we have not received written confirmation of compliance. To
+SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any
+particular state visit http://pglaf.org
+
+While we cannot and do not solicit contributions from states where we
+have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
+against accepting unsolicited donations from donors in such states who
+approach us with offers to donate.
+
+International donations are gratefully accepted, but we cannot make
+any statements concerning tax treatment of donations received from
+outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.
+
+Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation
+methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
+ways including checks, online payments and credit card donations.
+To donate, please visit: http://pglaf.org/donate
+
+
+Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic
+works.
+
+Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm
+concept of a library of electronic works that could be freely shared
+with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project
+Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support.
+
+
+Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
+editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S.
+unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
+keep eBooks in compliance with any particular paper edition.
+
+
+Most people start at our Web site which has the main PG search facility:
+
+ http://www.gutenberg.org
+
+This Web site includes information about Project Gutenberg-tm,
+including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
+Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to
+subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.
+
+
+</pre>
+
+</body>
+</html>
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+
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--- /dev/null
+++ b/37886-h/images/005b.png
Binary files differ
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new file mode 100644
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Binary files differ
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+++ b/37886-h/images/006a.png
Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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+++ b/37886-h/images/014a.png
Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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--- /dev/null
+++ b/37886-h/images/015.png
Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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Binary files differ
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