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+The Project Gutenberg EBook of Éloge du sein des femmes, by
+Claude-François-Xavier Mercier de Compiègne
+
+This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
+almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
+re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
+with this eBook or online at www.gutenberg.org
+
+
+Title: Éloge du sein des femmes
+ Ouvrage curieux
+
+Author: Claude-François-Xavier Mercier de Compiègne
+
+Release Date: June 17, 2006 [EBook #18610]
+
+Language: French
+
+Character set encoding: ISO-8859-1
+
+*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK ÉLOGE DU SEIN DES FEMMES ***
+
+
+
+
+Produced by Chuck Greif, Carlo Traverso and the Online
+Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This
+file was produced from images generously made available
+by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at
+http://gallica.bnf.fr)
+
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+
+
+ÉLOGE DU SEIN DES FEMMES
+
+TIRÉ A 602 EXEMPLAIRES NUMÉROTÉS, SAVOIR:
+
+400 exemplaires in-8° couronne, papier vergé.
+150 -- -- carré, -- vélin.
+ 30 -- -- -- -- chine.
+ 30 -- -- -- -- whatman.
+ 2 -- -- -- -- peau vélin.
+
+N° 285
+
+OUVRAGE CURIEUX
+
+DANS LEQUEL ON EXAMINE S'IL DOIT ÊTRE DÉCOUVERT S'IL EST PERMIS DE LE
+TOUCHER QUELLES SONT SES VERTUS, SA FORME, SON LANGAGE, SON ÉLOQUENCE
+LES PAYS OÙ IL EST LE PLUS BEAU ET LES MOYENS LES PLUS SURS DE LE
+CONSERVER
+
+PAR
+
+MERCIER DE COMPIÈGNE
+
+QUATRIÈME ÉDITION
+
+REVUE, ANNOTÉE ET CONSIDÉRABLEMENT AUGMENTÉE
+
+[Illustration: Honni Soit Qui Mal Y Pense]
+
+PARIS
+
+A BARRAUD, EDITEUR-LIBRAIRE
+
+23, RUE DE SEINE
+
+1873
+
+
+
+
+AVANT-PROPOS.
+
+
+Ce fut en 1720 que parut à Amsterdam un volume intitulé les _Tétons_; il
+formait la troisième partie d'une série où figuraient déjà les _Yeux_ et
+le _Nez_; le frontispice ajoutait qu'il y avait là des «ouvrages
+curieux, galants et badins, composés pour le divertissement d'une
+certaine dame de qualité, par J. P. N. du C.» Une annonce faite par un
+libraire hollandais, en 1721, informe le public que l'auteur se
+proposait de passer successivement en revue «toutes les parties du corps
+humain;» projet scabreux qu'il n'eut pas le temps d'effectuer ou dont
+les difficultés l'arrêtèrent. Diverses indications permettaient
+d'ailleurs d'attribuer la rédaction de ce triple recueil à Étienne
+Roger, libraire actif, établi à Amsterdam, et qui mettait volontiers la
+main aux livres qu'il offrait au public. Toutefois les bibliographes les
+plus accrédités mettent l'oeuvre sur le compte de Jean-Pierre-Nicolas
+Ducommun, dit Véron, dont les initiales cadrent fort bien avec l'énoncé
+du titre, et qui est l'auteur de diverses pièces de vers (fort
+médiocres) insérées dans la troisième partie du recueil en question.
+
+Un quart de siècle s'écoula, et le volume mis au jour à Amsterdam
+reparut avec le titre suivant: _Éloge des tétons, ouvrage curieux,
+galant et badin, en vers et en prose_, publié par ***, Francfort, 1746,
+in-8. En 1775, cet _Eloge_ fut derechef réimprimé sous la rubrique de
+_Cologne, à l'enclume de vérité_, 1775; on y joignit diverses _pièces
+amusantes et la Rinomachie ou Combat des nez_.
+
+Vers la fin du siècle dernier, vivait à Paris un littérateur médiocre,
+mais actif, Claude-Francois-Xavier Mercier, surnommé de Compiègne, afin
+de le distinguer de divers autres Mercier; il était né dans cette ville
+en 1763. Se trouvant sans ressources pendant les orages de la
+Révolution, il demanda à sa plume des moyens d'existence; il se fit le
+vendeur de ses écrits, et il les multiplia rapidement. Il rédigeait, il
+compilait, il traduisait, il composait en prose et en vers une multitude
+d'in-18 qui se succédaient avec promptitude et qui portaient souvent
+l'empreinte de la rapidité avec laquelle ils étaient élaborés. Mercier
+d'ailleurs, il faut le reconnaître, manquait de goût, et son
+instruction était fort superficielle. Il a laissé divers écrits dont il
+est inutile de rappeler les titres, mais qui excitent, à bon droit, les
+craintes du chaste lecteur; il aimait à traiter des sujets bizarres; il
+mit en français, en y joignant des additions assez considérables, une
+facétie de l'Allemand Rodolphe Goclemin, et il les publia sous le titre
+d'_Eloge du pet_, dissertation historique, anatomique et philosophique
+sur son origine, son antiquité, ses vertus, sa figure, les honneurs
+qu'on lui a rendus chez les peuples anciens et les facéties auxquelles
+il a donné lieu (1799, in-18). Longtemps oubliés, les petits volumes
+sortis de l'officine de Mercier trouvent aujourd'hui des amateurs
+très-disposés à les recueillir; dans le nombre figure l'_Eloge du sein
+des femmes_, publié à Paris en 1800; c'est un _riffacimiento_ du volume
+dont nous avons mentionné trois éditions antérieures. Mais selon son
+usage, Mercier ne s'est point borné à une simple reproduction; il a
+supprimé des longueurs, il a ajouté des détails nouveaux, il a inséré
+des pièces de vers parmi lesquelles il en est d'assez agréables; il a
+remanié la division du texte original, qui se trouve offrir trois
+chapitres nouveaux; il a joint à tout ceci une gravure due à un burin
+peu exercé qui a reproduit gauchement un dessin lourd et maussade. Il
+eût été facile de trouver sans doute un artiste mieux inspiré.
+
+Le petit volume en question est devenu assez rare, surtout en bon état;
+nous avons pensé que quelques amateurs feraient bon accueil à une
+quatrième édition de cet _Eloge_; ils ne regretteront pas sans doute d'y
+trouver une sorte d'anthologie de ce que divers poëtes ont dit à propos
+du sein; nous avons dû nous borner à choisir, car si nous avions voulu
+tout reproduire, nous aurions grandement dépassé les bornes que nous
+avons dû nous prescrire; mais nous espérons que nos recherches, dans des
+volumes assez peu connus parfois, nous auront amenés à mettre la main
+sur des morceaux gracieux qu'on lira avec plaisir.
+
+
+
+
+ÉPITRE DÉDICATOIRE.
+
+
+SONNET.
+
+ _L'auteur du traité des Tetons
+ Chante si haut sur la matière
+ Qu'il donneroit musique entière,
+ S'il descendoit de quelques tons._
+
+ _Mais comme sa muse est altière,
+ Il n'ira pas chez ses Martons,
+ Chanter leurs tourelontontons,
+ De là jusqu'à la jarretière._
+
+ _Si cependant du haut en bas,
+ Il alloit pousser ses ébats;
+ On entendroit belle harmonie!_
+
+ _Vénus, peinte par tous ses traits,
+ Feroit éclater mille attraits
+ Dans une telle anatomie._
+
+ Par C. L. d'Ar.
+
+_Nota._ Nous avons supprimé l'épitre dédicatoire de Ducommun, sur
+l'édition d'Amsterdam, 1720, parce qu'elle n'a rien de neuf, ni de
+piquant; nous la remplaçons par une petite pièce de vers assez rare et
+qui vient ici fort à propos, puisqu'elle s'adresse aux dames.
+
+LES POMMES.
+
+ Le ciel, pour enchanter les hommes,
+ Vous a fait présent de six pommes:
+ Sur votre visage il a mis
+ Deux petites pommes d'apis
+ D'un bel incarnat empourprées,
+ Et que nature a colorées:
+ Les soucoupes et les cristaux
+ Ne portent pas de fruits si beaux.
+ Plus bas une fraîche tablette,
+ En supporte deux de rainette;
+ Et l'on trouve encore plus bas
+ Deux autres qu'on ne nomme pas.
+ Elles sont de plus grosse espèce,
+ Et n'ont pas moins de gentillesse:
+ Ce sont deux pommes de rambour,
+ Qu'on cueille au jardin de l'amour.
+ Voilà trois paires de jumelles
+ Qui font tourner bien des cervelles.
+ Ève perdit le genre humain,
+ N'ayant qu'une pomme à la main;
+ Mais notre appétissante mère,
+ En laissait voir deux sur son sein.
+ Et l'attrait des fruits de Cythère,
+ Dont l'aspect le mettait en train,
+ Fit succomber notre bon père.
+ Satan, dont l'esprit est malin,
+ Entrait aussi dans le mystère.
+ Pressés, comme Adam, de manger,
+ Nous pétillons d'impatience
+ Auprès du jardin potager
+ Dont vous portez la ressemblance.
+ Vive la pomme et les pommiers!
+ Leur aspect seul nous ravigotte:
+ On doit baiser les deux premiers,
+ Avec les seconds on pelotte:
+ Triomphe! amour! aux deux derniers.
+ Heureux qui les met en compotte!
+
+[Illustration]
+
+ÉLOGE DU SEIN DES FEMMES.
+
+
+
+
+CHAPITRE PREMIER.
+
+DES TÉTONS, DE LEUR POUVOIR ET DE LEURS CHARMES.
+
+
+J'avais d'abord le dessein de faire un traité de la supériorité du teint
+blanc sur le brun, et ces deux chansons de Cl. Marot m'en avaient fourni
+l'idée:
+
+
+DE LA BRUNE.
+
+ Pourtant si je suis brunette,
+ Amy, n'en prenez esmoy:
+ Autant suis ferme et jeunette,
+ Qu'une plus blanche que moy
+ Le blanc effacer je voy.
+
+ Couleur noire est toujours une,
+ J'ayme mieux donc estre brune
+ Avecques ma fermeté,
+ Que blanche comme la lune
+ Tenant de legereté.
+
+
+POUR LA BLANCHE.
+
+ Pourtant si le blanc s'efface,
+ Il n'est pas à despriser:
+ Comme luy le noir se passe,
+ Il a beau temporiser.
+
+ Je ne veux point mespriser,
+ Ne mesdire en ma revanche:
+ Mais l'ayme mieux estre blanche
+ Vingt ou trente ans ensuivant
+ En beauté nayve et franche,
+ Que noire tout mon vivant.
+
+Mais à quoi bon raisonner simplement sur les couleurs, lorsqu'il y a
+tant d'autres beautés plus solides chez les femmes! ce serait mal
+employer son temps, et abuser de la bonté de mes lectrices. Ce n'est
+donc, ni de vos pieds mignons, ni de vos belles mains potelées, ni de
+vos yeux brillants, ni de votre joli petit nez, ni des autres parties de
+votre charmant ensemble, que je veux vous entretenir aujourd'hui.
+N'appréhendez pas que je puisse vous faire rougir. Je suis de l'avis de
+Marot, lorsqu'il dit:
+
+ Arrière! mots qui sonnent salement,
+ Parlons aussi des membres seulement
+ Que l'on peut voir, sans honte, descouverts;
+ Et des honteux ne souillons point nos vers.
+ Car, quel besoin est de mettre en lumière
+ Ce qu'est nature à cacher coustumière?...
+
+Ainsi, pour ne pas vous tenir plus longtemps dans l'incertitude, c'est
+l'éloge des tétons que je vais faire. Le sujet est beau, il est grand,
+il a exercé les génies les plus élevés. Le cavalier Marin appelle les
+tétons des belles, deux tours vivantes d'albâtre, d'où l'amour blesse
+les amants: il les compare à deux écueils, contre lesquels notre liberté
+vient faire agréablement naufrage: il les appelle deux mondes de
+beautés, éclairés par deux beaux soleils, c'est-à-dire les yeux. Un
+poète français, qui n'est guères moins ingénieux que le cavalier Marin,
+moins magnifique dans ses peintures, mais plus juste et plus gai, les
+appelle dans une de ses chansons, deux pommes, et il ajoute:
+
+ Heureux qui peut monter sans bruit
+ Sur l'arbre qui porte ce fruit!
+
+Cyrano de Bergerac trouve mauvais que les écrivains modernes, qui
+veulent peindre une beauté parfaite, emploient l'or, l'ivoire, l'azur,
+le corail, les roses et les lis: il n'a pas plus raison de les tourner
+en ridicule, parce qu'ils clouent les étoiles dans les yeux des belles,
+et qu'ils dressent des montagnes de neige à la place de leur sein: en
+effet, ces expressions pompeuses sont dignes de ces grands objets, et le
+sein des femmes a des charmes encore au-dessus de ceux de leurs yeux.
+C'est ce que Cotin nous démontre par des vers sur une belle gorge:
+
+ Dans l'entretien délicieux
+ De la charmante Iris dont je suis idolâtre,
+ Va, pose, Amour, sur ses beaux yeux,
+ Le voile qu'elle a mis sur sa gorge d'albâtre.
+
+ Quand le printems a banni la froidure,
+ On ne voit point de si beaux lis
+ Aux jardins les plus embellis
+ Par les soins curieux qu'apporte la nature.
+
+ Depuis que de mon coeur je fis l'heureuse perte,
+ J'ai visité bien des climats,
+ En dépit des chaleurs, en dépit des frimats:
+ Et si je n'ai point fait de telle découverte.
+
+ Pour voir un objet sans pareil,
+ Il ne faut point courir sur tant de mers profondes,
+ Ni voir l'un et l'autre soleil,
+ Il faut voir ces deux petits mondes.
+
+ Pour rendre de mon sort tout l'univers jaloux,
+ Il suffit qu'à mes yeux leur blancheur on étale;
+ L'Aurore n'offrit rien à l'amoureux Céphale,
+ De si charmant et de si doux.
+
+ Ah! si, sans leur déplaire, on osait les toucher,
+ Et si deux belles mains n'y mettaient point d'obstacle,
+ Serait-ce point, par un miracle,
+ Amollir un coeur de rocher?
+
+ Dans l'entretien délicieux
+ De la divine Iris, dont je suis idolâtre:
+ Amour, en ma faveur, viens mettre sur ses yeux
+ Le voile qu'elle a mis sur sa gorge d'albâtre.
+
+Une belle gorge avait tant d'empire sur le coeur de Boursault, que pour
+en voir une, à travers la mousseline, il devenait amoureux jusques à la
+folie. C'est ce que prouvera ce beau fragment d'une lettre qu'il
+écrivait à son ami Charpentier:
+
+«Je vous ai fait promettre qu'après dîner nous irions ensemble chez la
+belle brune, avec qui nous jouâmes hier au logis de Mme Deshoulières: je
+vous dispense de me tenir parole, à moins que vous ne me donniez caution
+bourgeoise pour la sûreté de ma personne. Ce n'est pas que je doive rien
+appréhender pour ma liberté. Délivré de la tyrannie d'une blonde qui m'a
+fait soupirer quinze ou seize mois pour rien, j'ai fait serment de ne
+tomber de ma vie en de pareilles fautes; mais dans les tems de ma
+première servitude, il m'est échappé tant de sermens, j'en ai tenu si
+peu, que je n'ose plus me mettre au hasard de jurer de rien. Je trouvai
+hier votre brune si bien faite, ses yeux me parurent si brillans, sa
+bouche si petite, sa gorge, que je ne vis que par les yeux de la foi,
+est, je crois, si belle, que si vous n'eussiez arraché ma vue de dessus
+ses charmes, quand vous me fîtes souvenir qu'il était tems de nous en
+aller, je sentais déjà ce que je sentis la première fois que je
+commençai d'aimer. Mon coeur, que j'ai fait le gardien de ma franchise,
+m'a joué tant de tours, que, si tantôt je vous accompagne à la visite
+que vous avez dessein de rendre, je gage que j'en reviens aussi chargé
+d'amour, que si on le donnait _pro Deo_.»
+
+Le même auteur, faisant à sa maîtresse le portrait d'une belle, marque
+bien expressivement la victoire assurée que remporte une belle gorge sur
+une âme masculine.
+
+«En vérité, Babet, dit-il, si tu ne reviens bientôt de Bagnolet, tu
+cours risque de ne pas me trouver constant à ton retour. On me mena hier
+au bal, où je trouvai une jeune personne qui n'a pas moins de belles
+qualités que toi. Elle a les cheveux d'un blond cendré, tout-à-fait
+beau, mais qui n'approche pourtant pas de la couleur des tiens. Elle a
+le front grand et élevé, mais le tien l'est encore davantage. Ses
+sourcils qui ne paraissent presque point, parce qu'ils sont blonds, se
+montrent toutefois assez, pour faire remarquer que leur symétrie est la
+plus régulière du monde. Ses yeux, qui sont aussi noirs que les tiens
+sont bleus, sont si bien fendus, qu'ils ne jettent jamais un regard,
+sans faire une conquête. Ils ont autant de vivacité que les tiens ont de
+douceur, et ils semblent faits pour prendre de l'amour, comme les tiens
+pour en donner. On voit sur ses joues une nuance de blanc et d'incarnat
+si éclatante, qu'il semble qu'elle tienne des mains de l'art un présent
+qui ne vient que de celles de la nature, qui a pris tant de peine après
+elle, que, sans toi, qui es son chef-d'oeuvre, elle serait le plus beau
+de tous ses ouvrages. Son nez, qui n'est ni trop grand ni trop petit,
+est justement comme il le faut, pour avoir beaucoup de ressemblance avec
+le tien: sa bouche, qui n'est pas si petite que la tienne, est plus
+petite qu'aucune autre que j'aie jamais vue. Elle a les lèvres si
+fraîches et si vermeilles, que, depuis ton absence, je n'ai rien
+envisagé de plus charmant. Ses dents sont si blanches et si bien
+rangées, que je lui faisais cent contes risibles, pour avoir le plaisir
+de les voir souvent. Le trou qu'elle a au menton me fait souvenir
+qu'elle en a encore aux joues, ce qui donne une merveilleuse grâce au
+reste de son visage. Pour sa gorge, on peut dire:
+
+ Que c'est là que l'Amour, pour lancer tous ses traits,
+ Entre deux monts d'albâtre est campé tout exprès.
+
+«Je te jure, Babet, que je n'ai jamais rien vu de si aimable; si mon
+_galérien de coeur_, qui n'échappe jamais d'une chaîne que pour tomber
+dans une autre, ne se contentait de la gloire de tes fers:
+
+ Ma constance ébranlée allait faire naufrage.»
+
+N'est-ce pas la jolie gorge de Dorimène qui fait ainsi délirer
+Sganarelle, lorsqu'il dit:
+
+«Où allez-vous, belle mignonne, chère épouse future de votre époux
+futur? Eh bien! ma belle, c'est maintenant que nous allons être heureux
+l'un et l'autre! vous ne serez plus en droit de me rien refuser; je
+pourrai faire avec vous tout ce qui me plaira, sans que personne s'en
+scandalise. Vous allez être à moi, depuis la tête jusqu'aux pieds, et je
+serai le maître de tout! de vos petits yeux éveillés, de votre petit
+nez fripon, de vos lèvres appétissantes, de votre petit menton, de vos
+petits tétons rondelets, de votre, etc. Enfin toute votre personne sera
+à ma discrétion, et je serai à même pour vous caresser comme je voudrai.
+N'êtes-vous pas bien aise de ce mariage, mon aimable pouponne?»
+
+On croira peut-être que ce discours de Sganarelle est une gradation, et
+que ce qu'il laisse en blanc, est le plus fort objet de sa passion; je
+le veux bien, mais en ce cas, il a le goût un peu trop terrestre et
+grossier. Tel est celui de l'auteur des vers suivants, à sa maîtresse,
+sur un mal de gorge:
+
+ Il est bien peu galant de vous prendre à la gorge,
+ Ce mal qui dedans vous regorge;
+ C'est être à vous saisir un des plus maladroits;
+ Si j'avois, comme lui, sur vous droit de m'étendre,
+ Et, comme lui, le choix de ce qu'on peut vous prendre,
+ Je vous saisirois bien par des meilleurs endroits.
+
+Que dira-t-on de la pensée d'un autre auteur qui dit: l'amour ressemble
+à un jeu de paume; quand une fille se laisse baiser la main, cela vaut
+quinze; si elle souffre que l'on prenne un baiser sur ses lèvres, cela
+vaut trente; si elle permet que ce soit sur la gorge, cela vaut
+quarante-cinq: il ne faut plus qu'un coup, et le jeu est gagné.
+
+Je raconterai l'histoire suivante, parce qu'elle est vraie:
+
+«On a souvent parlé de la force du sang, mais on n'a pas aussi souvent
+parlé de la gorge; quoi-qu'avec beaucoup de raison, on appelle
+aujourd'hui les tétons, le _boute-en-train_. Le fait suivant prouve
+admirablement leur vertu, qu'on peut nommer de résurrection, et de
+résurrection de la chair. Dans la plupart des églises papistes où la
+superstition était dominante, il se faisait des cérémonies tout à fait
+extravagantes. La ville de... était un des plus fameux théâtres de ces
+représentations de mystères ridiculement fanatiques. C'était une coutume
+établie de temps immémorial, de représenter chaque année, dans la
+semaine sainte, les mystères de la passion. Pour aller au solide, sans
+s'amuser à la bagatelle, on ne manquait pas, le jour du vendredi saint,
+d'offrir aux dévots spectateurs une scène burlesque du crucifiement du
+Sauveur du monde. On choisissait pour cela un jeune homme de la ville,
+auquel on faisait porter une croix fort pesante, à laquelle on
+l'attachait avec des cordes au lieu de clous, et dans une nudité presque
+complète. Je dis presque, parce que l'impudeur n'était pas encore
+parvenue au point de dévoiler certaines parties qui doivent être
+cachées. On les voila donc chez notre jeune homme avec une ceinture de
+papier. Il faut remarquer que le jouvenceau était le corps du monde le
+mieux formé, le plus vigoureux en apparence, et de la plus belle carrure
+d'épaules. Et que la même coutume faisait choisir entre les plus belles
+filles de la ville, trois tendrons qu'on aurait pris pour des Vénus,
+pour représenter les trois Maries pleurantes au pied de la croix. On
+n'avait pas seulement égard aux traits réguliers du visage, ni à la
+finesse de la taille, on voulait qu'elles fussent encore richement
+pourvues du grand mobile de la tendresse, je veux dire fournies de
+tétons à l'Anglaise, que l'on laissait en pleine liberté d'émouvoir la
+copie du Christ. Or, l'année où se passa le fait que je raconte, le
+choix fut si bon (les prêtres se connaissent en attraits) que l'on mit
+sous la croix, dans le beau désordre de la douleur, les trois filles les
+plus ravissantes. On eût pris chacune d'elle pour Vénus, ou toutes trois
+pour les Grâces. Elles ne furent pas plutôt sous les yeux du crucifié,
+qu'elles firent miracle, je veux dire que, malgré la situation où il
+était, et la majesté de son personnage, les trois Maries produisirent
+l'effet le plus étonnant que puisse peindre la chronique scandaleuse.
+Notre Hercule galant, posté à l'avantage, avait en perspective une
+demi-douzaine de tétons capables, par leur systole et leur diastole, de
+subjuguer la vertu du plus froid anachorète, ce qui occasionna un
+incident très-comique et très-profane, car le crucifié, au lieu de
+prononcer du haut de sa croix des paroles dignes de celui qu'il
+représentait, prononça des turpitudes dignes de l'abolition éternelle
+d'une cérémonie aussi indécente, et telles en un mot qu'on peut les
+deviner. Enfin, n'y pouvant plus tenir, il ne put s'empêcher de crier:
+«Otez donc de devant mes yeux les trois Maries, ou le papier va
+crever.» Le scandale que fit naître une telle action, et des paroles qui
+compromettaient à ce point la religion, firent rentrer l'archevêque en
+lui-même, et lui firent comprendre qu'elles l'exposaient à la risée
+publique. Il supprima donc un usage, ou plutôt un abus qui tendait
+directement au mépris du culte, de manière qu'il n'en fut plus parlé
+depuis[1].
+
+[Note 1: Évariste Parny, auteur, en l'an VII, du poëme de la _Guerre
+des Dieux_, dans lequel on ne reconnaît plus le chantre délicatement
+voluptueux d'_Éléonore_, du _Lendemain_, et de la _Journée champêtre_, a
+fait usage de cette anecdote dans le deuxième chant de ce poëme,
+première édition. Il l'a supprimée dans la seconde édition, et c'est
+peut-être un second tort. C'est dans cet Éloge qu'il a trouvé ce mystère
+qu'il fait jouer à la famille de Dieu: il n'a donc pas eu le mérite
+d'une grande invention dans ce poëme.
+
+Pensant que le lecteur en sera satisfait, nous reproduisons ce morceau,
+qui du reste tient ici naturellement sa place:
+
+ Du Paradis la troupe infatigable,
+ Pour terminer, joua la Passion,
+ Et joua bien. Les conviés, dit-on,
+ Goûtèrent peu ce drame lamentable.
+ Mais un malheur qu'on n'avait pas prévu
+ Du dénouement égaya la tristesse:
+ Bien flagellé, le héros de la pièce
+ Était déjà sur la croix étendu.
+ On choisissait pour ce rôle pénible
+ Un jeune acteur intelligent, sensible,
+ Beau, vigoureux, et sachant bien mourir,
+ Il était nu des pieds jusqu'à la tête:
+ Un blanc papier qu'une ficelle arrête
+ Couvrait pourtant ce que l'on doit couvrir.
+ Charmante encore après sa pénitence,
+ La Magdelène au pied de la potence
+ Versait des pleurs: ses longs cheveux épars,
+ Son joli sein qui jamais ne repose,
+ Du crucifié attirait les regards.
+ Il voyait tout, jusqu'au bouton de rose;
+ Quelquefois même il voyait au-delà.
+ Prêt à mourir, cet aspect le troubla.
+ Il tenait bon; mais quelle fut sa peine,
+ Quand le feuillet vint à se soulever!
+ «Otez, dit-il, ôtez la Magdelène!
+ Otez-la donc, le papier va crever.»
+ Soudain il crève; et la Vierge elle-même
+ Pour ne pas rire a fait un vain effort.
+ «Le tour est bon, dit le Père suprême,
+ On le voit bien, le drôle n'est pas mort.»]
+
+Un peintre peut venir à bout de représenter aux yeux toutes les grâces
+d'un beau visage. Il échoue ordinairement, quand il essaye de peindre
+une belle gorge. La Motte en pourrait être une preuve dans le portrait
+suivant:
+
+ Toi, par qui ta toile s'anime.
+ Peintre savant, prends ton pinceau:
+ Et qu'à mes yeux ton art exprime
+ Tout ce qu'ils ont vu de plus beau.
+
+ Ne m'entends-tu pas? peins Silvie:
+ Mais choisis l'instant fortuné
+ Où, pour le reste de ma vie,
+ Mon coeur lui fut abandonné.
+
+ Au bal, en habit d'Espagnole,
+ Elle ôtoit un masque jaloux,
+ Plus promptement qu'un trait ne vole,
+ Je fus percé de mille coups.
+
+ Peins ses yeux doux et pleins de flamme,
+ D'où l'Amour me lança ses traits;
+ D'où ce Dieu s'asservit mon âme,
+ En un instant et pour jamais.
+
+ Peins son front plus blanc que l'ivoire.
+ Siége de l'aimable candeur;
+ Ce front, dont Vénus feroit gloire.
+ S'il y brilloit moins de pudeur.
+
+ Poursuis, peins l'une et l'autre joue,
+ La honte des roses, des lis;
+ Et sa bouche où l'Amour se joue,
+ Avec un éternel souris.
+
+ Peins sa gorge.... Mais non: arrête....
+ Ici, ton art est surmonté;
+ Ah! quelques couleurs qu'il apprête,
+ Tu n'en peux rendre la beauté.
+
+ Laisse cet inutile ouvrage;
+ Ah! de l'objet de mon ardeur
+ Il n'est qu'une fidelle image:
+ Que l'Amour grava dans mon coeur.
+
+La pièce suivante prouve que la gorge des mortelles est digne de plus
+d'amour et d'admiration que celle des déesses même, et que ces dernières
+en conviennent, ce qui est plus extraordinaire encore:
+
+ Au temps de l'aimable saison,
+ Iris rêvant dans la prairie,
+ S'endormit sur un mol gazon
+ Tapissé d'une herbe fleurie.
+ Zéphire, charmé de son teint,
+ Qui d'un vif incarnat se peint,
+ Vint d'abord faire le folâtre,
+ Autour de sa gorge d'albâtre.
+ Jalouse d'un transport si doux,
+ Flore gronda son infidelle,
+ Et lui dit, pleine de courroux:
+ Me préférer une mortelle!
+ Zéphire qui se sentoit fort,
+ Reparti: Voyez cette belle!
+ Flore jeta les yeux sur elle,
+ Et convint qu'il n'avait pas tort.
+
+Il n'est donc plus étonnant qu'en traduisant l'inimitable Anacréon, un
+de nos poëtes français ait dit:
+
+ Que ne suis-je la fleur nouvelle
+ Qu'au matin Climène choisit,
+ Qui sur le sein de cette belle
+ Passe le seul jour qu'elle vit!
+
+Le _Poëte sans fard_ a trouvé fort bon ce souhait, et l'a développé de
+cette manière:
+
+ Hélas! trop cruelle Silvie,
+ Permettez au moins que j'envie
+ Le beau sort de certaines fleurs
+ Dont vous vous parez avec grâce,
+ Et dont votre beau teint efface
+ Toutes les plus vives couleurs.
+ Oui: je voudrois être la rose
+ Que vous placez sur votre sein.
+ D'une telle métamorphose
+ Quel est, direz-vous, le dessein?
+ Le voici: par vos mains cueillie,
+ Mon destin seroit des plus doux;
+ Je n'aurois qu'un seul jour de vie,
+ Mais je ne vivrois que pour vous.
+
+Un poëte anacréontique du dix-neuvième siècle, non moins grand
+admirateur de cette belle portion des charmes du sexe qui fait tourner
+la tête au nôtre, exprime ainsi le même souhait, d'être changé en
+rose[2]:
+
+ AIR: _Je vais quitter ce que j'adore._
+
+ Vive, de la métempsycose
+ Le système consolateur,
+ Par lui mon esprit se repose
+ Sur un avenir enchanteur.
+ Que mon être se décompose,
+ L'espoir m'offre un riant tableau:
+ L'Amour, sous les traits d'une rose,
+ Me promet un être nouveau.
+
+ AIR: _Une fille est un oiseau._
+
+ Oh! comme je jouirais
+ De cette métamorphose!
+ Sur le sein d'une autre Rose
+ Comme je m'étalerais!
+ Centuplant pour plaire à Rose,
+ De mes doux parfums la dose,
+ Avec plaisir je m'expose,
+ A mourir sur ses attraits:
+ Mourir!... oui; mais je suppose
+ Que je puis d'une autre chose
+ Prendre encor la forme après. (_bis_.)
+
+[Note 2: Voy. _Le Bouquet de roses, ou le Chansonnier des Grâces_,
+première année, Favre, Palais-Égalité.]
+
+Le plaisant et érotique Le Pays, dans la lettre suivante adressée à sa
+Caliste, souhaite aussi de mourir sur son sein:
+
+«Quand je sortis hier de chez vous, j'en sortis avec une bonne
+résolution de m'aller tuer, afin d'avoir l'honneur de vous plaire une
+fois en ma vie, et de vous défaire pour jamais d'une personne
+incommode; mais jusques ici je n'ai pas exécuté mon dessein, à cause de
+l'embarras où je me suis trouvé à choisir un genre de mort. J'eus
+d'abord envie d'imiter feu Céladon, d'amoureuse mémoire, et de m'aller
+précipiter dans la rivière; mais j'eus peur que l'eau ne me rejetât sur
+les bords, aussi bien que lui, et que je ne fusse recueilli par quelques
+nymphes pitoyables qui, malgré moi, me sauvassent la vie. Il me prit
+aussi fantaisie de m'aller pendre à votre porte, à l'imitation du
+pendart Iphis; mais je m'imaginai que ce seroit vous déshonorer que de
+faire un gibet de votre porte; outre que c'est un genre de mort pour
+lequel j'ai eu de l'aversion dès le temps que j'étois petit enfant. Je
+pensai aussi à m'empoisonner, mais je crus que du poison ne seroit pas
+capable de m'ôter la vie, non plus qu'à Mithridate, à cause de la grande
+habitude que j'en ai faite. N'étant pas mort depuis si longtemps que je
+me nourris de crainte, de chagrin, d'inquiétude et de désespoir, qui
+sont les poisons du monde les plus violents, apparemment je ne pourrois
+pas mourir pour prendre de l'arsenic ou de l'antimoine. Je n'oubliai pas
+aussi qu'un poignard mis dans le sein étoit un bon expédient pour
+mourir: mais je crus que je ne devois pas choisir ce genre de mort
+qu'avoit choisi une femme qui mourut de regret d'avoir fait une chose
+que je meurs de regret de ne pouvoir faire. Mon désespoir est trop
+différent de celui de Lucrèce, pour ne pas mourir d'une mort
+différente. Enfin, Caliste, j'ai passé la nuit à chercher sans pouvoir
+trouver la mort dont je devois mourir. Au reste, ne croyez pas que ce
+soit la mort qui m'étonne, ce n'est que la manière de mourir qui
+m'inquiète: car, pour vous dire le vrai, après avoir vécu avec tant de
+chagrin, je voudrois bien mourir d'une mort qui me donnât un peu de
+plaisir. Je viens de penser à une qui seroit très-bien mon affaire: ce
+seroit, Caliste, de mourir entre vos bras, _pâmé sur votre sein_. Je
+sens bien en mon coeur que je n'ai pas d'horreur pour cette mort comme
+pour se noyer, s'empoisonner, se pendre ou se poignarder. Obligez-moi
+donc en me laissant mourir de cette sorte; car, puisqu'enfin vous voulez
+que je meure, que vous importe que ce soit de douleur ou de plaisir?»
+
+Je serais tenté de croire qu'il y a, dans le charme attaché à une belle
+gorge, un talisman, de la magie et de l'enchantement; ce qui pourtant
+détruit cette idée, c'est le sonnet suivant, adressé à des belles qui
+demandaient un secret, un sortilége et des paroles magiques pour se
+faire aimer:
+
+ Pourquoi me demander la ruse criminelle
+ Par quoi l'art des démons met les coeurs dans les fers?
+ Vous, de qui la magie est blanche et naturelle,
+ Et fait qu'à vos appas tant de voeux sont offerts.
+ Par vos charmes vainqueurs l'esprit le plus rebelle
+ Rend grâces à l'amour des maux qu'il a soufferts,
+ La flamme de vos yeux est trop pure et trop belle
+ Pour unir sa puissance à celle des enfers
+ Ce beau sein qui fait naître et vos lis et vos roses
+ Forme un enchantement de tant de belles choses,
+ Que leur force invincible a droit de tout charmer
+ Mais pour vous mieux servir de leur pouvoir extrême,
+ Ajoutez seulement ces trois mots: _je vous aime_;
+ Qui pourrait s'empêcher alors de vous aimer?
+
+
+LES DEUX SAINTS.
+
+ AIR: _La Fête des bonnes gens._
+
+ Qu'en ce jour tout résonne,
+ Des chants dictés par nos coeurs.
+ Dérobons à l'automne
+ Ce qui lui reste de fleurs;
+ Pour les belles, qu'on apprête
+ Des bouquets et des refrains;
+ C'est aujourd'hui la fête,
+ La fête de tous les saints.
+
+ Tous les saints, ah! Glycère,
+ C'est beaucoup pour un seul jour;
+ Toi, qui n'adore guère
+ Que le plaisir et l'Amour,
+ Deux patrons, c'est bien honnête;
+ Comme toi, je me restreins.
+ Et désormais je ne fête,
+ Ne fête que tes deux saints.
+
+ Ces deux saints que je chante
+ N'ont que des dehors flatteurs,
+ Et chacun d'eux m'enchante
+ Par de riantes couleurs.
+ Leur parure se compose
+ Du plus brillant des satins,
+ Ce sont deux boutons de rose
+ Qui couronnent tes deux saints.
+
+ Longtemps sans les connaître.
+ Je ressentis leur pouvoir;
+ Il t'en souvient peut-être,
+ C'est toi qui me les fis voir.
+ A ce spectacle sensible,
+ Vers eux j'étendis les mains
+ Non, non, il n'est pas possible
+ De voir de plus jolis saints.
+
+ Quoiqu'ils soient, ma Glycère,
+ Presqu'aussi durs qu'un rocher,
+ Parfois à ma prière
+ Ils se sont laissé toucher;
+ Jaloux de les voir encore,
+ Je donnerais, je le dis,
+ Pour ces deux saints que j'adore,
+ Tous les saints du Paradis.
+
+ FÉLIX.
+
+[Illustration]
+
+[Illustration]
+
+
+
+
+CHAPITRE II.
+
+DES BEAUX TÉTONS.
+
+
+Avant de déterminer la forme et les qualités qui rendent une gorge
+parfaite, examinons en quoi consiste la beauté d'une femme. Il faut,
+dit-on, qu'elle réunisse les trente points suivants:
+
+ La jeunesse.
+ Taille ni trop grande ni trop petite.
+ N'être ni trop grasse ni trop maigre.
+ La symétrie et la proportion de toutes les parties.
+ De beaux cheveux longs et déliés.
+ La peau délicate et polie.
+ Blancheur vive et vermeille.
+ Un front uni.
+ Les tempes non enfoncées.
+ Des sourcils comme deux lignes.
+ L'oeil bleu, à fleur de tête; et le regard doux.
+ Le nez un peu long.
+ Des joues un peu arrondies, avec une petite fossette.
+ Le rire gracieux.
+ Deux lèvres de corail.
+ Une petite bouche.
+ Dents blanches et bien rangées.
+ Le menton un peu rond et charnu, avec une fossette au bout.
+ Les oreilles petites, vermeilles et bien jointes à la tête.
+ Un cou d'ivoire.
+ Un sein d'_albâtre_.
+ _Deux boules de neige._
+ Une main blanche, longue et potelée.
+ Les doigts terminés en pyramides.
+ Des ongles de nacres, de perle, tournés en ovale.
+ L'haleine douce.
+ La voix agréable.
+ Le geste libre et sans affectation.
+ Le corsage délié.
+ La démarche modeste.
+
+On a dit qu'Hélène réunissait ces trente points. _Franciscus Corniger_
+les a mis en dix-huit vers latins. Vincentio Calmeta les a aussi mis en
+vers italiens qui commencent par _Dolce Flaminia_.
+
+Voici ceux de François Corniger:
+
+
+MULIERIS PULCHRITUDO.
+
+ _Triginta hæc habeat, quæ vult formosa videri
+ Foemina: sic Helenam fama fuisse refert.
+ Alba tria, et totidem nigra; et tria rubra; puellæ.
+ Tres habeat longas res, totidemque breves.
+ Tres crassas, totidem graciles, tria stricta, tot ampla,
+ Sint itidem huic formæ, sint quoque parva tria.
+ Alba cutis, nivei dentes albique capilli:
+ Nigri oculi, cunnus, nigra supercilia._
+ _Labra, genæ, atque ungues rubri. Sit corpore longo,
+ Et longi crines, sit quoque longa manus.
+ Sintque breves dentes; auris, pes. Pectora lata,
+ Et clunes, distent ipsa supercilia.
+ Cunnus et os strictam, stringunt ubi cingula stricta,
+ Sint coxæ et culus, vulvaque turgidula.
+ Subtiles digiti, crines et labra puellis.
+ Parvus sit nasus, parva mamilla, caput._
+
+En voici la traduction, que rapporte un vieux livre français intitulé:
+_De la louange et beauté des Dames_.
+
+ Trois choses blanches: la peau, les dents et les mains.
+ Trois noires: les yeux, les sourcils et les paupières.
+ Trois rouges: les lèvres, les joues et les ongles.
+ Trois longues: le corps, les cheveux et les mains.
+ Trois courtes: les dents, les oreilles et les pieds.
+ Trois larges: la poitrine ou le sein, le front et l'entre-sourcil.
+ Trois estroites: la bouche, _l'une et l'autre_,
+ la ceinture ou la taille et l'entrée du pied.
+ Trois grosses: le bras, la cuisse et le gros de la jambe.
+ Trois déliées: les doigts, les cheveux et les lèvres.
+ Trois petites: les tétins, le nez et la teste.
+
+L'auteur du _Procès et amples examinations sur la vie de
+Carême-Prenant_, etc., dit qu'une belle femme se compose des beautés de
+divers pays.
+
+ Qui voudra belle femme querre (chercher),
+ Prenne visage d'Angleterre,
+ Ayant le corps d'une Flamande
+ Et les tetins d'une Normande,
+ Entés sur un cul de Paris,
+ Il aura femme de bon prix.
+
+ * * * * *
+
+ Celle qui a les bras charnus,
+ Grosse mammelle, nez camus,
+ Longue raison et courtes mains,
+ Elle est sujette au bas des reins.
+
+ * * * * *
+
+ Fille qui fait tetins paroir (paraître)
+ Son corps par étroite vêture
+ On se peut bien apercevoir
+ Que son c.. demande pâture.
+
+Les trois quatrains ci-dessus sont tirés du _Momus Redivivus_, t. II, p.
+30 et 31, publié par Mercier de Compiègne, qui, lui-même, les a pris
+dans l'ouvrage cité plus haut.
+
+
+BLASON DE LA BELLE FILLE.
+
+ Une dame d'excellente beauté
+ En tous ses faits doit estre modérée,
+ Avoir le coeur rempli de loyauté,
+ Maintien rassis, contenance assurée;
+ Bouche riant, mignonne, savourée,
+ OEil verdelet, le front largettement,
+ Clere de vis[3], de couleur proprement.
+ Menton fourchu, la chevelure blonde.
+ Humble regard à lever doucement,
+ Parfaite en bien seroit la plus du monde.
+
+ Ferme tetin sur l'estomac planté,
+ Large entre-deux, rencontre relevée
+ Gorge plaisante, et le col long, santé,
+ Le nez traitiz[4], sourcille déliée,
+ Mollette main, blanche, bien alliée
+ De doigts et bras gresle tant seulement,
+ Gente de corps, taillée adroitement.
+ Hauteur moyenne et de belle faconde,
+ Gorriere[5] un peu, parler courtoyement,
+ Parfaite en bien seroit la plus du monde.
+
+ Parmy les rains bien fournis à planté,
+ Grosse cuisse et devant haut enc...ée,
+ Motte à plein poing, sans être trop hantée,
+ De doux accueil et de rebelle entrée,
+ Le ventre épais, barbe de frais rasée,
+ Tenir l'escu au besoing droitement,
+ Et son bourdon serrer estroitement,
+ Je ne m'enquiers du trop ou peu profonde,
+ Le compagnon porter joyeusement
+ Parfaite en bien seroit la plus du monde.
+
+ [Note 3: Visage.]
+
+ [Note 4: Bien fait, joli.]
+
+ [Note 5: Recherchée dans sa toilette.]
+
+
+ENVOY.
+
+ Prince gentil, pour vostre esbatement
+ Si vous trouvez un tel appointement
+ Au petit pied, jambe grossette et ronde,
+ Montez dessus et picquez hardiment,
+ Parfaite en bien seroit le plus du monde.
+
+ PIERRE DANCRE
+
+
+ÉPIGRAMME PAR LE SIEUR MOTIN.
+
+ Si les esprits sont amusez
+ A joüer aux Champs Elisez,
+ Quand ils veulent jouer aux quilles,
+ Les boules sont tetins de filles.
+ Il est bien vray qu'en cet esbat
+ La boule les quilles abbat,
+ Mais icy c'est une autre affaire,
+ Car aux quilles vient le contraire,
+ Puisqu'au lieu de les renverser
+ Les tetins les font redresser.
+
+
+CHANSON.
+
+ J'ayme une fille de village,
+ De qui le gros sein pommelé
+ Monstre qu'elle tient recelé
+ Sous sa cotte un gros pucelage.
+
+ Aussi est-ce à elle qu'on baille
+ De son village tout l'honneur,
+ Capable d'allumer un coeur
+ D'une autre flamme que de paille.
+
+Le plus galant des troubadours français, le célèbre Marot, nous instruit
+particulièrement de la beauté des tétons dans l'épigramme suivante:
+
+
+SUR LE BEAU TETIN.
+
+ Tetin refait, plus blanc qu'un oeuf,
+ Tetin de satin blanc tout neuf,
+ Tetin qui fait honte à la rose,
+ Tetin plus beau que nulle chose,
+ Tetin dur (non pas tetin, voire,
+ Mais petite boule d'yvoire)
+ Au milieu duquel est assise
+ Une frèze, ou une cerise,
+ Que nul ne void ne touche aussi;
+ Mais je gage qu'il est ainsi,
+ Tetin donc au petit bout rouge,
+ Tetin qui jamais ne se bouge,
+ Soit pour venir, soit pour aller,
+ Soit pour courir, soit pour baller,
+ Tetin gauche, tetin mignon,
+ Tousjours loing de son compagnon,
+ Tetin qui portes tesmoignage
+ Du demeurant du personnage.
+ Quand on te void il vient à maints
+ Une envie dedans les mains
+ De te taster, de te tenir:
+ Mais il se faut bien contenir
+ D'en approcher, bon gré ma vie,
+ Car il viendroit une autre envie.
+
+ O tetin ne grand, ne petit,
+ Tetin meur, tetin d'appétit,
+ Tetin qui nuict et jour criez,
+ Mariez moy tost mariez.
+ Tetin qui t'enfles et repousses
+ Ton gorgias de deux bons pousses,
+ A bon droit heureux on dira
+ Celui qui de laict t'emplira
+ Faisant d'un tetin de pucelle,
+ Tetin de femme entière et belle.
+
+Nous croyons faire plaisir au lecteur en mettant à la suite de la pièce
+de Marot celle de Guichard, qui lui sert de réponse.
+
+
+LES TÉTONS.--À CLÉMENT MAROT.
+
+ Sur les tétons, Marot, je pense comme vous:
+ C'est l'ornement, le trésor d'une belle.
+ A des tétons qui peut être rebelle?
+ L'oeil ne peut voir rien de plus doux.
+ Bienheureuse la main qui les tient à son aise!
+ Et plus heureuse encor la bouche qui les baise!
+ Hélas! pourquoi gêner leur liberté?
+ Nul ajustement ne les pare
+ Comme l'entière nudité.
+ Ce qu'il faut d'embonpoint, leur élasticité,
+ L'intervalle qui les sépare,
+ Ce poli du satin, cette aimable rondeur,
+ Du bouton incarnat de la rose naissante,
+ Ce bouton surpassant la forme et la couleur,
+ Ce transparent tissu de neige éblouissante,
+ Et l'azur qui dessous se divise et serpente.
+ Tout est vu, pressé, dévoré,
+ Le BEAU TETIN, par vous gentiment célébré
+ Valoit-il les tétons pour lesquels je soupire?
+ Mon cher Marot, eh quoi! ces tétons pleins d'appas
+ Ne vous font point revoler ici-bas!
+ J'en remettrois la gloire à votre lyre.
+
+ O de tous les tétons, tétons victorieux,
+ Chef-d'oeuvre de l'amour, tétons.... tétons des Dieux!
+ Foible mortel, renonce à chanter leur empire;
+ Tout l'Olympe assemblé n'y pourroit pas suffire;
+ Et, ce qui fait leur prix, ce qui fait mon bonheur,
+ Auprès de ces tétons je sens.... je sens un coeur.
+
+Benserade a rivalisé avec Marot dans l'apothéose des beaux tétons; car
+quel poëte ne les a pas chantés! et voici la belle définition qu'il en
+donne dans un sonnet:
+
+ Beau sein déjà presque rempli,
+ Bien qu'il ne commence qu'à poindre,
+ Tétons qui ne font pas un pli,
+ Et qui n'ont garde de se joindre.
+
+ De jeunesse ouvrage accompli,
+ Que de fard il ne faut pas oindre;
+ Si l'un est rond, dur et poli,
+ L'autre l'égale et n'est pas moindre.
+
+ Sein par qui les dieux sont tentés,
+ Digne échantillon de beautés,
+ Que le jour n'a point regardées;
+
+ Il garantit ce qu'il promet,
+ Et remplit toutes les idées
+ Du paradis du Mahomet
+
+La blancheur, la rondeur et la fermeté sont donc trois qualités
+essentiellement requises pour mériter aux tétons le nom de beaux. Marot,
+qui était connaisseur dans cette sorte de friandise, les aimait ronds,
+comme on le voit dans ces vers, qui renferment des conseils sur le choix
+d'une maîtresse.
+
+ Quand vous voudrez faire une amie,
+ Prenez-la de belle grandeur:
+ En son esprit non endormie,
+ Et son tetin bonne rondeur.
+ Douceur
+ En coeur,
+ Langage
+ Bien sage,
+ Dansant, chantant par bons accords,
+ Et ferme de coeur et de corps.
+
+ Si vous la prenez trop jeunette,
+ Vous en aurez peu d'entretien;
+ Pour durer, prenez-la brunette,
+ En bon poinct d'asseuré maintien:
+ Tel bien
+ Vaut bien
+ Qu'on fasse
+ La chasse
+ Du plaisant gibier amoureux:
+ Qui prend telle proye est heureux.
+
+Marot le prouve encore par ce rondeau:
+
+ Toutes les nuicts, je ne pense qu'en celle
+ Qui a le corps plus gent qu'une pucelle
+ De quatorze ans, sur le point d'enrager,
+ Et au dedans un coeur, pour abbréger,
+ Autant joyeux qu'eut onques demoiselle.
+
+ Elle a beau teint, un parler de bon zèle,
+ Et le tetin rond comme une groiselle,
+ N'ay-je donq pas bien cause de songer
+ Toutes les nuicts?
+ Touchant son coeur, je l'ay dans ma cordelle,
+ Et son mary n'a, sinon le corps d'elle;
+ Mais toutefois, quand il voudra changer,
+ Prenne le coeur, et pour le soulager,
+ J'auray pour moi le gent corps de la belle
+ Toutes les nuicts.
+
+Bois-Robert, né à Caen, en 1592, a aussi chanté le sein dans les stances
+suivantes:
+
+ Beau sein, belles bouches d'yvoire,
+ Vivants objects de ma memoire,
+ Cheres delices de mes jours,
+ Qui dedans vos rondes espaces
+ Cachez la demeure des Graces
+ Et la retraicte des Amours.
+
+ Gorge de lys, pommes d'albatre
+ De qui mon oeil est idolatre,
+ Source des amoureux desirs.
+ Parfait assemblage de charmes,
+ Digne sujet de tant de larmes,
+ De tant de vers et de soupirs:
+
+ Objects d'eternelle allegresse,
+ Petits messagers de jeunesse,
+ Petits gemeaux ambitieux,
+ Qui desja pour vous trop cognestre
+ Ne faisant encor que de naistre,
+ Vous enflez d'orgueil à nos yeux.
+
+ * * * * *
+
+ Plus heureux qui pour vous soupire;
+ Le mal qu'il se plaist d'endurer:
+ Mais, ô merveille que j'adore,
+ Je tiens bien plus heureux encore
+ Celuy qui vous fait souspirer.
+
+Charles Cotin nous fait voir dans le sonnet suivant _sur les tétons_,
+qu'ils doivent être fermes, ronds, et bien écartés l'un de l'autre.
+
+ Tandis que deux voisins sans se joindre véquirent,
+ Tous deux également de tous furent aimez;
+ Tous deux enflez d'orgueil et de grace animez.
+ Partagèrent entr'eux l'honneur qu'ils acquirent;
+
+ Tous deux avoient quinze ans à l'âge qu'ils naquirent;
+ Tous deux sur même moule ils paraissoient formez;
+ L'un l'autre ils se fuyoient de dépit enflammez,
+ L'un à l'autre enviant les conquêtes qu'ils firent.
+
+ Bien qu'un prince passât, ils ne s'ébranloient point;
+ Mais enfin leur orgueil s'enfla jusqu'à ce point,
+ Que leur triste union commença de paroître.
+
+ Ils se baisèrent tant, qu'ils en firent pitié;
+ L'amour de tous naquit de leur inimitié,
+ Et de leur union le mépris vint à naître.
+
+M. Le Pays paraît être du même goût, quand il dit à son Iris, dans le
+portrait qu'il fait d'elle:
+
+«Votre gorge semble avoir été faite au tour; et l'on peut dire que c'est
+une beauté achevée. Votre sein est digne de votre gorge; il est blanc,
+gras et potelé. Les deux petits globes qui le composent ne sont éloignez
+que de deux doigts, et cependant je suis assuré que de leur vie ils ne
+se sont baisez, quoi qu'ils soient frères, et qu'ils deussent bien
+s'aimer, si la ressemblance fait l'amitié.»
+
+L'auteur de la chanson picarde, qui commence par ces mots: _Ton himeur
+est, Catherene_, les aimait aussi avec cette qualité; il fait dire à
+l'amant:
+
+ Pour ta bouche elle est plus rouge
+ Que n'est la creste d'un cocq;
+ Et ta gorge qui ne bouge,
+ Paroit plus ferme qu'un roc.
+
+Une belle gorge étant la meilleure recommandation que puisse avoir une
+femme, elle ne saurait trop la voiler pour la garantir du hâle; car il
+en est peu de privilégiées aujourd'hui à qui l'on puisse adresser ce
+madrigal:
+
+ On a beau dire, Iris, pour louer votre teint,
+ Que sa blancheur est sans seconde:
+ Pour moi qui ne dis rien de flatteur ni de feint,
+ Je soutiens qu'il en est une plus grande au monde.
+ N'en déplaise à la vanité
+ De votre superbe visage;
+ Vos tétons, belle Iris, en bonne vérité,
+ Voudroient-ils en blancheur lui céder l'avantage?
+
+_La Puce de Mme des Roches_, Paris, 1583, in-4o; 1610, in-8o.
+Réimprimé, 1868, Paris, Jouaust, petit in-8o.
+
+On sait quelle fut l'origine de ce recueil. La haute société de Poitiers
+s'honorait alors de deux dames appartenant à la race des _Précieuses_,
+de Molière, c'étaient Mme des Roches et sa fille Catherine. Poëtes
+elles-mêmes, mais dans une mesure très-restreinte, elles réunissaient
+autour d'elles une société de beaux esprits. Les Grands-Jours, tenus à
+Poitiers en 1579, amenèrent autour de ces dames tous les magistrats que
+cette solennité avait appelés dans cette ville. Un jour, Étienne
+Pasquier aperçut une puce qui s'était «parquée au beau milieu du sein»
+de Mlle des Roches; il fit remarquer la témérité de l'animal; il
+s'ensuivit quelques propos badins; l'incident provoqua d'abord l'échange
+de deux pièces de vers entre Pasquier et Mlle des Roches; les savants
+magistrats, prenant fait et cause, se mirent à célébrer la puce en
+français, en latin, en espagnol, en grec même. Pasquier recueillit ces
+divers morceaux; de là vint le volume qui devait avoir pour titre: _la
+Puce de Mlle des Roches_, car ce ne fut pas madame sa mère qui fut
+l'héroïne de l'aventure. L'uniformité du sujet donne à ces compositions
+une teinte de monotonie, mais la forme en est toujours agréable, et on y
+trouve de gracieux détails. L'éditeur de 1868 a suivi le texte de
+l'édition de 1610, en notant les principales variantes (les préfaces des
+deux éditions sont tout à fait différentes); il s'est borné à reproduire
+les pièces françaises.
+
+Nous nous contenterons de citer la pièce ci-dessous, d'Étienne Pasquier.
+Elle résume à elle seule tout ce que les autres poëtes en ont pu dire.
+
+
+LA PUCE.
+
+ Ainsi que dedans le pré,
+ D'un vert émail diapré,
+ On voit que la blonde avette
+ Sur les belles fleurs volette,
+ Pillant la manne du ciel,
+ Dont elle forme son miel;
+ Ainsi, petite pucette,
+ Ainsi, puce pucelette,
+ Tu voles à tâton
+ Sur l'un et l'autre téton;
+ Or, ayant pris ta posture,
+ Tu t'en viens à l'aventure.
+ Soudain après héberger
+ Au milieu d'un beau verger,
+ Paradis qui me réveille,
+ Lorsque plus elle sommeille:
+ Là, prenant ton bel ébat,
+ Tu lui livres un combat,
+ Combat qui aussi l'éveille,
+ Lorsque plus elle sommeille.
+
+ Je ne veux ni du taureau,
+ Ni du cygne, blanc oiseau,
+ Ni d'Amphytrion la forme,
+ Ni qu'en pluye on me transforme.
+ Puisque ma dame se paist
+ Sans plus de ce qui te plaist,
+ Plust or à Dieu que je pusse
+ Seulement devenir puce!
+ Tantost je prendrois mon vol
+ Tout au plus haut de ton col,
+ Ou, d'une douce rapine,
+ Je sucerois ta poitrine,
+ Ou lentement, pas à pas,
+ Je me glisserois plus bas,
+ Et d'un muselin folastre,
+ Je serois puce idolastre,
+ Pinçottant je ne sçais quoi,
+ Que j'aime trop plus que moi!
+
+ Mais las! malheureux poëte!
+ Qu'est-ce qu'en vain je souhaite?
+ Cet échange affiert à ceux
+ Qui font leur séjour aux cieux.
+ Et partant, puce pucette,
+ Partant, puce pucelette,
+ Petite puce, je veux
+ Adresser vers toi mes voeux.
+ Si tu piques les plus belles,
+ Si tu as aussi des aisles
+ Tout ainsi que Cupidon,
+ Je te requiers un seul don
+ Pour ma pauvre âme altérée,
+ O puce! ô ma Cythérée!
+ C'est que ma dame, par toi,
+ Se puisse éveiller pour moi!
+ Que pour moi elle s'éveille,
+ Et ait la puce en l'oreille!
+
+ ÉTIENNE PASQUIER[6].
+
+ [Note 6: Étienne Pasquier, avocat,
+ naquit en 1529 et mourut en 1615.]
+
+
+MADRIGAL.
+
+ Le téton de Babet est plus blanc que l'albastre;
+ Pour estre ferme et rond il n'a point de pareil;
+ On ne peut sans amour voir son bouton vermeil,
+ Faut-il donc s'estonner si j'en suis idolastre!
+
+ Quand j'y porte la main de son consentement
+ Rien ne peut estre égal à mon contentement,
+ Je suis ravy d'avoir ce charmant privilége,
+ Mais quand elle s'oppose à mon ardent dessein,
+ O Babet! ô friponne, aussitost, m'escriay-je,
+ Vous faites bien la fière avec votre beau sein,
+ Ah! vrayment vostre sein est un beau sein de neige.
+
+ (_Nouveau mélange de pièces curieuses, tant en prose
+ qu'en vers_. Paris, A. de Sommaville, 1664, in-12.)
+
+Il existe un poëme allégorique et moral, intitulé: _Architrenius_,
+publié à Paris en 1517, in-4o, et dont l'auteur, Jean d'Hanteville ou
+d'Hanville, était un moine qui vivait à la fin du douzième siècle. Ce
+bon religieux mettait, dans ses vers, sans y entendre malice, des traits
+un peu vifs; il se plaît, par exemple, à tracer le portrait d'une jeune
+beauté; un passage est relatif au sein, il tombe dans notre domaine:
+
+ _Non implet longoeva sinum, puerilibus annis_
+ _Castigata sedes, teneroque rotundula botro...._
+
+Nous avons sous les yeux une traduction inédite de ce fragment:
+
+«Tel qu'une graine vermeille de raisin, un petit tetin, frais et poli,
+s'élève mollement sur un sein arrondi, et la couleur de rose contraste
+avec cette touffe de lys. Ces deux globes charmants sont grossis par
+l'effet de leur jeunesse, et non par le lait qui ne les a pas encore
+remplis. Un léger noeud de ruban les serre sans en comprimer la fermeté.
+Elevés au milieu d'une surface plane, ces monticules font voir au milieu
+d'eux comme un vallon.»
+
+
+LES DÉLICES DE LA POÉSIE GALANTE. Paris, Ribou, 1666, in-12.
+
+SIXAIN.
+
+ _En envoyant un bouquet de jassemin._
+
+ Allez, doux jassemin où l'amour vous appelle,
+ Et si vous approchez du beau sein de Philis,
+ Dont la blancheur ternit celle des plus beaux lis,
+ Avant que de mourir, dites à cette belle
+ Que je croirais mon sort bien doux
+ D'y pouvoir mourir avec vous.
+
+ SOMAISE.
+
+
+SUR UNE SANGSUE QUI PIQUE LE SEIN DE SYLVIE.
+
+ Quel objet de courroux se présente à ma vue?
+ Un insecte cruel, une noire sangsue
+ Pique un sein plus blanc que les lys,
+ Dont tous les traits sont accomplis.
+ Crois-tu bien te souler du sang de ma Silvie?
+ Sa blancheur te devrait détourner du dessein
+ De lui piquer le sein.
+ Si tu veux contenter ta malheureuse envie,
+ La peine suivra ton souhait,
+ Car soudain tu perdras la vie
+ Et tu n'auras sucé que des gouttes de lait.
+
+
+LE BUSC.
+
+Cette pièce étant un peu longue et assez médiocre, nous n'en
+reproduirons qu'un fragment:
+
+ Ce bois touche par privilege
+ Un double petit mont de neige
+ Qui, par un joli mouvement
+ Se soulève fort mollement
+ Et puis mollement se rabaisse,
+ Allant et revenant sans cesse
+ D'un air charmant et gracieux,
+ Comme s'il s'approchait des yeux
+ Pour ses beautés faire connoistre
+ Et puis mollement disparoistre.
+
+
+L'AMOUR SUR UNE GORGE REBONDIE.
+
+SONNET.
+
+ C'est ici qu'on peut voir qu'en l'un et l'autre monde
+ Je règne également et je donne des loix;
+ J'en ai deux aujourd'hui que j'habite à mon choix
+ Et dans chacun des deux ma gloire est sans seconde.
+
+ Sur deux fermes tétons mon empire se fonde;
+ J'y soumets sans efforts les plus superbes rois;
+ Il n'en est point qui puisse éviter mes exploits
+ Et que ma politique à la fin ne confonde.
+
+ Je ne crains pas, comme eux, les moindres changemens;
+ J'aime à voir remuer, et les soulèvemens
+ Servent à ma grandeur, s'ils font leur décadence.
+
+ Et quoy que les prudens et les plus advisés
+ Imputent la faiblesse aux États divisés,
+ Si les miens ne l'étoient, j'aurois moins de puissance.
+
+Louis XV demanda un jour à Bouret, secrétaire du cabinet, comment il
+trouvait la dauphine et si elle avait de la gorge. Il répondit que
+Marie-Antoinette était charmante de figure et qu'elle avait de beaux
+yeux. «Ce n'est pas cela dont je vous parle, répondit Sa Majesté, je
+vous demande si elle a de la gorge.--Sire, je n'ai pas pris la liberté
+de porter mes regards jusque-là.--Vous êtes un sot, continua le monarque
+en riant, c'est la première chose qu'on regarde aux femmes.»
+
+
+RONDEAU.
+
+ Au doulx chant de ces alouettes
+ En ces moys dauril et de may
+ Je me mettois en grand esmoy
+ De dire plusieurs bergerettes
+ La desirois mes amourettes
+ A les tenir aupres de moy
+ Au doulx chant.
+
+ Pour manier les mammelettes
+ Et leur bailler soubdain la foy
+ Tout ainsi que faire le doy
+ Dessus ces belles herbelettes
+ Au doulx chant.
+
+
+MARINO.
+
+Les tétons des belles sont deux tours vivantes d'albâtres d'où l'Amour
+blesse les amants. Ce sont deux écueils contre lesquels nos libertés
+vont agréablement faire naufrage; deux mondes de beauté éclairés par
+deux beaux soleils qui sont les yeux. Un auteur français les compare à
+deux pommes et s'écrie:
+
+ Heureux qui peut monter sans bruit
+ Sur l'arbre qui porte ce fruit.
+
+Au commencement du XVIIIe siècle, les dames portaient sur leur gorge
+découverte des croix et des petits Saint-Esprit en diamants. Aussi, un
+prédicateur s'écria-t-il un jour en chaire: «Bon Dieu! peut-on plus mal
+placer la croix qui représente la mortification, et le Saint-Esprit,
+auteur de toutes bonnes pensées.»
+
+Voici une pièce manuscrite attribuée à Voisenon; j'ignore si elle a été
+imprimée, mais comme elle est peu connue, les lecteurs seront sans
+doute charmés de la trouver ici.
+
+
+LES TETONS DE MA COUSINE.
+
+ Il te souvient de ce Pygmalion,
+ De la statue élégante qu'il aime,
+ Et que Vénus, pour sa dévotion,
+ Avoit changée en une autre elle-même.
+
+ En toi le cas pareil est arrivé;
+ Tu fus statue; car, par expérience
+ J'en suis certain, et ce qu'ici j'avance
+ Est dans ces vers un peu plus bas prouvé.
+
+ Étant encor bloc de marbre insensible
+ Tout étoit dur; tu n'avois nul ressort;
+ Vénus voulut t'amollir tout le corps
+ Pour te le rendre aux plaisirs plus flexible.
+
+ Pour recevoir et donner un baiser
+ Bien tendrement à l'amant qui te presse,
+ Elle amollit ta bouche enchanteresse,
+ Elle amollit tes bras pour l'embrasser.
+
+ Jambes d'abord et ce qui les surmonte
+ Gardent encor un peu de dureté,
+ Moins que le marbre, et si plus haut on monte,
+ On trouvera de l'élasticité.
+
+ Mais ce qui peut mieux prouver mon système,
+ Elle oublia de changer tes tétons;
+ Ils sont taillés aussi juste, aussi ronds
+ Et blancs et durs comme le marbre même.
+
+
+MADRIGAL.
+
+ Tout ici baise, Jeanneton,
+ Ton mouchoir baise ton téton,
+ Tes cheveux se baisent et rebaisent,
+ Je vois tes lèvres se baiser;
+ Et si toutes choses se baisent
+ Voudrais-tu bien me refuser?
+
+Je n'ai pas envie de déterminer positivement ici de quelle taille
+doivent être les tétons, ni prendre parti dans le différend qui pourrait
+s'élever sur la longueur, la largeur et la distance de ces deux parties
+du corps des belles; je dirai seulement que si les hommes ont raison de
+donner la préférence aux plus gros, d'autres n'ont pas tort de préférer
+un sein qui n'est pas fort garni. Il faut croire, sur ce point, que Le
+Pays parlait sérieusement et sans flatterie à sa Caliste, lorsqu'il
+s'exprimait ainsi:
+
+«Votre sein n'est pas des plus remplis, mais ce que vous en avez est
+blanc; et, s'il m'est permis de le dire comme je le pense, le morceau,
+pour être petit, ne laisse pas d'être délicat.»
+
+Une chose au moins que je puis avancer hardiment, c'est qu'une femme ne
+saurait être belle, si elle n'a une belle gorge et un beau sein. Aussi
+voyons-nous que de tous les faiseurs de portraits, aucun n'oublie les
+tétons, quand il veut peindre une beauté parfaite.
+
+M. Victor Cousin, dans son ouvrage sur _Mme de Longueville_, parle à
+diverses reprises de l'objet qui nous occupe. Décrit-il (t. Ier, p.
+321) un portrait de la duchesse par Anselme van Hull, il observe que «le
+sein à demi-découvert, paraît dans sa beauté modeste.» A-t-il l'occasion
+de retracer les traits d'Anne d'Autriche, de la duchesse de Chevreuse,
+de Mme de Montbazon, il n'oublie pas de vanter la perfection de leur
+gorge. Le philosophe éclectique, le traducteur de _Platon_, l'éditeur de
+l'infortuné _Abailard_, était connaisseur.
+
+[Illustration]
+
+[Illustration]
+
+
+
+
+CHAPITRE III.
+
+S'IL EST DE LA BIENSÉANCE QUE LES DAMES LAISSENT VOIR LEURS TÉTONS, ET
+S'IL EST PERMIS AUX AMANTS DE LES TOUCHER.
+
+
+La solution de ce problème présente de grandes difficultés, et pourrait
+être la matière d'une longue et savante dissertation; mais les longs
+ouvrages me font peur:
+
+ «Au lieu d'épuiser la matière,
+ Il n'en faut prendre que la fleur.»
+
+Molière fait dire au Tartuffe, qu'un sein découvert blesse l'âme, et
+fait naître de coupables pensées. Le petit-père André se récriait
+là-dessus avec beaucoup de zèle dans un de ses sermons: «Quand vous
+voyez, disait-il, ces tétons rebondis et qui se montrent avec tant
+d'impudence, bandez, messieurs, bandez-vous les yeux.» Un autre
+prédicateur turlupin, si ce n'est pas le même, défendait aux filles de
+découvrir leurs seins, et d'en laisser approcher la main entreprenante
+des amants; «car, disait-il pour terminer une violente sortie «quand la
+Hollande est prise, adieu les Pays-Bas.» Il faisait, par ce mot de
+Hollande, allusion au fichu de batiste ou de toile de Hollande qui
+couvrait alors le sein de nos belles, un peu plus que leur gaze
+très-claire ne le fait aujourd'hui.
+
+On trouve dans le _Cabinet satyrique_, les vers suivants:
+
+SUR LES FEMMES QUI MONTRENT LEUR SEIN.
+
+
+ÉPIGRAMME.
+
+ Les filles qui, au temps passé,
+ Souloient descouvrir leur visage,
+ Ceste coustume ont délaissé
+ Pour de leur sein nous faire hommage;
+ S'elles en continuent l'usage,
+ Descouvertes jusqu'à l'arçon,
+ Sus, sus! enfants, prenons courage,
+ Nous leur verrons bientost le c..
+
+
+QUATRAINS SUR LE MESME SUBJECT.
+
+ A vostre advis, si celle-là
+ Qui va la gorge descouverte
+ Ne faic pas signe par cela
+ Qu'elle voudroit estre couverte?
+
+ * * * * *
+
+ Madame, cachez vostre sein
+ Avec ce beau tetin de rose,
+ Car si quelqu'un y met la main,
+ Il y voudra mettre autre chose.
+
+ * * * * *
+
+ Les dames qui monstrent leurs seins,
+ Leurs tetins, leurs poictrines nuës,
+ Doit-on demander si tels saincts
+ Demandent chandelles menuës?
+
+
+STANCES SUR LA DÉFENSE DES GORGES DESCOUVERTES DES DAMES.
+
+ Je ne sçay par quelle malice
+ On dit aujourd'huy que c'est vice
+ De montrer son sein rondelet,
+ Veu qu'au temps premier d'innocence
+ La femme n'eut onc cognoissance
+ N'y de robe ny de colet.
+
+ Elle cheminoit toute nuë
+ Par les prés, sur l'herbe menuë,
+ Parlant avec son amoureux:
+ Blasmerons-nous les femmes belles
+ Qui commencent par leurs mamelles
+ A ramener ce temps heureux?
+
+ Il faut cacher la main sauvage,
+ Pleine de sang et de carnage,
+ Et couvrir la bouche qui ment,
+ Mais une mamelle gentille
+ Et le blanc tetin d'une fille
+ Ne se doit cacher nullement.
+
+ Il faut enfermer sans lumière,
+ Au plus profond d'une tanière
+ Le serpent et l'ours affamé,
+ Mais un beau sein que l'on descouvre
+ N'a le venin d'une couleuvre,
+ Pour estre clos et renfermé.
+
+ Fol est l'usurier qui resserre
+ Ses facultez dedans la terre
+ Et tient son or ensevely;
+ Mais les pucelles libérales,
+ Entre deux pommes bien esgales,
+ Montrent l'ivoire bien poly.
+
+ Tout aussi tost que nos déesses
+ Voulurent monstrer les richesses
+ De leurs beaux tétons précieux,
+ Amour, aveugle de nature,
+ Ne vola plus à l'aventure,
+ Et se desbanda les deux yeux.
+
+ Il rougit une double fraise
+ Dedans le feu de sa fournaise,
+ Deux soufflets furent les tétons,
+ Qui de chaudes vapeurs s'enflèrent
+ Et dedans nos âmes soufflèrent
+ Le feu d'amour que nous sentons.
+
+ Mais que servent ces jardinages,
+ Tant de couleurs et de feuillages,
+ Si l'oeil humain en est absent?
+ Et voyons-nous dessus l'espine
+ Fleurir une rose pourprine
+ Pour la cacher lorsqu'elle sent?
+
+ Quand Aquilon par l'air galope
+ Et qu'en janvier il envelope
+ La terre d'un pasle bandeau,
+ Tous ses plaisirs elle abandonne,
+ Elle gémit, elle frissonne,
+ Comme un prisonnier au cordeau.
+
+ Mais quand Zéphire la courtise,
+ Lui despouillant sa robe grise
+ Pleine de cent mille glaçons,
+ Elle est du soleil penetrée
+ Et enfante d'une ventrée
+ Mille fleurs de mille façons.
+
+ Vénus honteusement traictée,
+ Devant les dieux fut garottée
+ Avecques Mars, son favory;
+ Promptement accourut Jeunesse
+ Qui vint destacher sa maistresse,
+ En despit du cocu mary.
+
+ Pour éternelle récompense,
+ La mère d'Amour à Jouvence
+ Despoüilla ces deux monts charnus:
+ De là vient que les damoiselles,
+ Quand on leur taste leurs mamelles,
+ Ont souvenance de Vénus.
+
+Je ne prétends pas m'ériger en casuiste pour décider si les femmes
+peuvent et doivent montrer leur sein; mais quand je pourrais prouver,
+d'une manière péremptoire, qu'il est plus à propos que les femmes se le
+couvrent, je ne sais si j'aurais le courage de l'entreprendre. Je vois,
+d'un côté, tous les amants déchaînés contre moi, si je m'oppose ainsi à
+leurs plaisirs; et, d'un autre côté, toutes nos élégantes, furieuses de
+me voir condamner une mode qu'elles suivent presque généralement. Je
+citerai donc seulement ces vers de Mercier de Compiègne, qui me
+paraissent justes. Il dit, en parlant aux auteurs, au sujet du poëme de
+la _Guerre des Dieux_, dans lequel Parny s'égaye sur les tétons de la
+sainte Vierge, et ne gaze pas assez ses tableaux:
+
+ Revenez, le goût vous rappelle,
+ Mais gazez un peu vos tableaux;
+ Drapez Vénus: elle est plus belle
+ Quand un nuage la recèle;
+ Le demi-jour sied à Paphos.
+
+Voici les vers auxquels Mercier fait allusion:
+
+ Junon, Vénus et d'autres immortelles
+ Se moquaient de la brune Marie:
+ Son embarras, son air de modestie,
+ Servaient de texte aux illustres belles.
+ Mais n'en déplaise à ces juges sévères,
+ De grands yeux noirs, doux et voluptueux,
+ Des yeux voilés par de longues paupières,
+ Quoique baissés, sont toujours de beaux yeux.
+ Lorsqu'elle parle, une bouche de rose
+ Est éloquente et même on lui suppose
+ Beaucoup d'esprit. De pudiques tétons,
+ Bien séparés, bien fermes et bien ronds,
+ Et couronnés par une double fraise,
+ Chrétiens ou juifs, pour celui qui les baise,
+ N'en sont pas moins de fort jolis tétons.
+
+ PARNY.--_Guerre des Dieux_, ch. Ier.
+
+Le Pays est pour la mode qui trotte, quand il parle de cet air à sa
+Margoton:
+
+«J'ai un nouvel avis à vous donner sur ce que je vis hier que vous
+teniez vos petits tétons enfermez aussi exactement qu'une religieuse.
+Vous avez tort, Margoton, de tenir ainsi en prison deux jeunes innocens
+qui n'ont point encore commis de crime. Je vous assure qu'ils souffrent
+cette clôture à contrecoeur. Malgré le linge qui les resserre, j'ai
+remarqué qu'ils en soupirent de tristesse, et qu'ils en sont tout enflés
+de colère. A cause que vous êtes sage de bonne heure, vous voulez
+peut-être qu'ils vous imitent; mais ne savez-vous pas qu'ils sont plus
+jeunes que vous: que vous avez quatorze ans, qu'ils n'ont que quatorze
+mois; et qu'ainsi, quand vous seriez déjà sérieuse, il leur seroit
+permis de faire encore les badins? Lorsque vous n'étiez pas plus âgée
+qu'ils le sont présentement, votre nourrice n'avoit point de honte de
+vous montrer toute nue; pourquoi en auriez-vous donc de nous montrer à
+nud deux jeunes enfans qui ne sont jamais si beaux que quand ils sont
+découverts? N'est-ce point que la tante qui vous gouverne a peur que, si
+vous les laissiez sans contrainte, ils n'usassent mal de leur liberté,
+et qu'ils ne l'employassent à attaquer la nôtre? Si c'est pour cette
+raison qu'elle vous les fait couvrir si soigneusement, elle devroit
+aussi vous obliger à cacher vos yeux et vos autres appas, puisque vous
+n'en avez aucun qui ne dérobe tous les jours quelque coeur ou quelque
+liberté. Mais je veux lui apprendre que vos tétons en deviendront plus
+malicieux, plus ils seront enfermés. Car si, dans leur prison, ils
+découvrent quelque trou par où ils puissent voir le jour, ils se
+mettront là en sentinelle, pour assassiner le premier homme qui les
+regardera: si bien qu'on fera mieux de leur donner liberté toute
+entière; car alors on s'apprivoisera avec eux tout de bon, ils en
+deviendront moins dangereux.»
+
+Louis XIII ne fut point de cet avis, lui qui ne pouvait souffrir la vue
+d'un sein découvert, ainsi qu'on en peut juger par l'anecdote suivante:
+
+Chacun sait que Louis XIII était impuissant ou à peu près. Un conseil de
+médecins, après l'avoir visité, déclara que jamais postérité ne
+sortirait de lui. Aussi, ce fils atrabilaire d'un père si galant,
+haïssait le sexe en général. Les femmes lui inspiraient un éloignement
+qui tenait de l'aversion. La vue d'un sein même jeune, frais et ferme le
+dégoûtait. Il ressentait le même dégoût et presque de l'effroi à la vue
+d'autres charmes plus secrets. Chez lui, la nature ne se taisait pas
+seulement à leur approche, elle se révoltait. De là cette réputation de
+chasteté que les courtisans ont faite à ce monarque; de là l'infécondité
+d'Anne d'Autriche après dix années de mariage, et le délaissement
+déplorable de cette voluptueuse princesse.
+
+L'inclination que Louis XIII éprouva pour Mlle d'Hautefort ne dément
+point cette assertion; elle l'appuie au contraire d'un sensible
+témoignage. Louis s'était attaché à cette jeune personne parce qu'elle
+était organisée comme lui. Elle ne laissait voir aucune des faiblesses
+naturelles aux dames. Un écrivain ingénieux a dit que Louis XIII n'était
+amoureux que depuis la ceinture jusqu'en haut, et que ses amours étaient
+vierges. Cette pruderie était poussée si loin qu'elle donna lieu à une
+impolitesse qui trouve naturellement sa place ici. Dans un voyage que
+fit Louis XIII, il s'arrêta à Poitiers. Il y eut un grand couvert; on
+recherchait avidement alors ces exhibitions de souverain, comparables à
+celles des ménageries, sauf l'argent donné à la porte. Une jeune
+spectatrice de l'appétit royal avait le sein découvert; Louis XIII,
+ayant arrêté un moment sa vue sur cette indignité, enfonça son chapeau
+sur ses yeux et les tint baissés pendant tout le reste du dîner.
+Jusque-là ce n'était que de la chasteté, voici quelque chose de plus. La
+dernière fois que le prince pudibond but, il retint une gorgée de vin
+dans sa bouche, puis, visant en chasseur habile, lança cette réserve sur
+les appas indiscrètement exposés. La pauvre fille, dégouttante du
+liquide projectile, sortit toute confuse et s'évanouit dans la pièce
+voisine. Un écrivain jésuite, le père Barri, en rapportant cette
+anecdote, assure que «cette _gorge_ découverte méritait bien cette
+_gorgée_.» Jeu de mots pitoyable, qui ne persuadera point qu'un
+souverain, encore même que ce ne soit pas tout à fait un homme, puisse
+se conduire de la sorte avec une femme.
+
+On trouve le quatrain suivant, dans un livre fort rare, intitulé:
+_Procès et amples examinations sur la vie de Carême-Prenant_, et dans le
+_Momus Redivivus_, que j'ai déjà cités:
+
+ Fille qui fait tétin paroir,
+ Son corps par étroite vêture,
+ On se peut bien apercevoir
+ Que son c.. demande pature.
+
+Claude de Pontoux, poëte et médecin, né en 1530, à Châlons-sur-Saône,
+n'a guère chanté que l'amour. Il nous a laissé une chanson que nous
+rapportons ici parce qu'elle est relative au sujet que nous traitons:
+
+ Ma petite Jeanneton
+ Me permet bien que je taste
+ Son beau col et son menton,
+ Et veut bien que je m'ebaste:
+ Mais sitôt que je me haste
+ De ravir le beau bouton
+ Qui fleurit sur son téton
+ Et les fraisettes jumelles,
+ Elle me dit en riant:
+ Ne touchez pas là, friand;
+ C'est le joyau des pucelles.
+
+
+LA PUDEUR.
+
+ Pourquoi, belle Aglaé, nous faire apercevoir
+ Ce sein éblouissant où le regard s'attache?
+ On aime le fichu qui le laisse entrevoir;
+ Mais on aime encor plus la pudeur qui le cache.
+
+ED. CORBIÈRE.
+
+Charles Cotin soutient, dans les jolis vers suivants, que c'est une
+précaution inutile que de cacher les tétons.
+
+ Vous cachez votre sein, mais vous montrez vos yeux,
+ Qui de tout vaincre ont le beau privilège;
+ N'est-ce pas me sauver du milieu de la neige,
+ Pour m'exposer au feu des cieux?
+
+Montreuil semble épouser le parti contraire, lorsqu'il fait le reproche
+suivant à sa maîtresse:
+
+ Pourquoi me montrer votre sein,
+ Puisqu'un fâcheux jaloux s'oppose à mon dessein?
+ Votre bonté me tue autant qu'elle me plaît;
+ Mes yeux sont trop heureux, ma bouche est malheureuse,
+ Et pour mon pauvre coeur, il ne sait ce qu'il est.
+
+Boursault trouve que les tétons des belles sont très-bien, quand ils ne
+sont ni trop cachés, ni trop découverts. Il s'exprime ainsi dans une
+lettre où il fait à Mlle de Beaumont le portrait de sa maîtresse, qu'il
+nomme Climène: «Climène a les cheveux aussi noirs que vous les avez
+blonds; et, comme vous les avez du plus beau blond qui ait jamais été,
+elle les a du plus beau noir du monde. Elle a le front assez grand,
+assez élevé, pour être admirablement beau; et les sourcils qui sont au
+bas sont si noirs, et la symétrie en est si délicate, que pour les
+arranger avec tant de justesse, il semble que la nature ait emprunté les
+mains de l'art. Ses yeux ravissent la franchise, quand ils ont toute
+leur vivacité, et touchent l'âme, quand ils ont toute leur langueur. Son
+nez, qui passe pour un peu gros parmi ceux qui ne s'y connoissent pas,
+passe pour tout à fait beau parmi ceux qui s'y connoissent. Ses joues
+inspirent de l'amour, quand elles ont de la rougeur; et, quand elles
+n'en ont point, elles donnent de la tendresse. C'est dommage que sa
+bouche soit si petite, parce qu'il en sortiroit en foule toutes les
+bonnes choses qui n'en sortent que l'une après l'autre, à cause des
+limites du passage; et si j'osois me servir du mot précieux
+d'ameublement de bouche, pour dire ce que je pense de ses dents, je vous
+protesterois qu'il n'y en a jamais eu de plus riche que le sien. Elle a
+les lèvres d'une couleur fort vive, et elle ne les mord jamais. Son
+menton passeroit pour impertinent, s'il avoit l'audace d'être laid, et
+de se mêler avec toutes les beautés qui sont sur un si charmant visage.
+_Le point dont elle se couvre la gorge, est assez raisonnable pour en
+laisser voir assez peu, pour ne point causer de desirs qui blessent le
+respect que l'on doit à Climène: et toutefois il en montre assez pour
+donner envie de voir le reste. Tout le défaut qu'elle a, cette gorge,
+c'est qu'elle est aussi dure que son coeur._ Au reste, malgré la peine
+que lui cause un amour qui la chagrine, et qui la rend plus maigre
+qu'elle ne devroit l'être, elle a les mains si belles, que je ne suis
+jamais si ravi que lorsqu'elle m'en donne des soufflets, etc., etc.»
+
+Marot, dans cette épigramme sur Barbe et sur Jacquette, prétend que le
+sein, couvert ou non, fait la même impression sur les coeurs.
+
+ Quand je voy Barbe, en habit bien duisant,
+ Qui l'estomac blanc et poly _descoeuvre_,
+ Je la compare à maint rubis luisant,
+ Fort bien taillé, mis de mesmes en oeuvre.
+ Mais quand je voy Jacquette qui se coeuvre
+ Le dur tetin, le corps de bonne prise,
+ D'un simple gris accoustrement de frise,
+ Adonc je dy pour la beauté d'icelle,
+ Ton habit gris est une cendre grise
+ Couvrant un feu qui tousjours estincelle.
+
+La meilleure raison qui puisse excuser les femmes qui découvrent leur
+sein, c'est qu'il y a longtemps que cela se pratique ainsi; or, une
+ancienne coutume passe pour une loi parmi les jurisconsultes.
+D'ailleurs, elles tiennent pour maxime qu'il suffit à une femme d'être
+chaste de la ceinture en bas. Cependant je doute fort que cette dernière
+raison prévalût, quand même on n'aurait pas lu ces vers sur une femme
+trop libre dans ses discours:
+
+ Une belle et galante dame,
+ Écoutant volontiers les contes un peu gras,
+ Disoit pour s'excuser: il suffit qu'une femme
+ Soit chaste seulement de la ceinture en bas.
+ --Oh! oh! dit un railleur, la maxime est commode,
+ Et sur un tel avis, le sexe féminin
+ Pourra bien amener la mode
+ De la ceinture d'arlequin.
+
+Enfin, je suppose, et j'avoue si l'on veut, que les dames ont la liberté
+de mettre leurs tétons au jour pour vous proposer un autre cas. S'il est
+permis de les voir, n'aurons-nous pas aussi la permission de les
+toucher? La main et la bouche ne peuvent-elles pas avoir le même
+privilège que la vue? Vous m'allez répondre que non: tous les amants
+sont cependant d'un autre avis, hormis Scarron et fort peu d'autres. Ce
+sale et burlesque auteur, dans son épître chagrine au maréchal d'Albert,
+déclare que
+
+ Les _patineurs_ sont très-insupportables,
+ Même aux beautez qui sont très-_patinables_.
+
+Dans son _Roman comique_, il condamne encore Ragotin, d'avoir voulu un
+peu patiner, et il dit que _c'est une galanterie provinciale qui tient
+plus du satyre que de l'honnête homme._ J'appelle de ses décisions.
+Peut-on blâmer le procédé d'un galant homme, qui, voyant un sein
+charmant, deux globes d'albâtre, voudrait, par le tact, s'assurer s'ils
+ont la dureté désirable, et cela uniquement pour s'instruire? J'approuve
+le procédé d'un homme galant qui, après avoir patiné les tétons d'une
+dame, improvisa encore cette chanson par-dessus le marché:
+
+ Mort de ma vie!
+ En voyant ces tétons,
+ Belle Sylvie,
+ Si beaux, si blancs, si ronds;
+ Pour savoir s'ils sont durs, j'ai formé le dessein
+ De passer mon envie,
+ Et d'y porter la main,
+ Mort de ma vie!
+
+N'est-ce pas, en effet, une cruauté inouie de nous mettre devant les
+yeux ces beaux meubles, et de nous défendre de les regarder et d'y
+toucher? J'en prends le galant abbé Cotin à témoin; écoutez-le se
+plaindre à sa maîtresse:
+
+ Vous me défendez d'approcher
+ De votre bouche sans pareille:
+ Votre gorge est une merveille,
+ Qu'on n'ose ni voir, ni toucher,
+ Le moins coupable des humains,
+ Et qui souffre le plus de peine,
+ C'est, ô trop aimable inhumaine,
+ Un amant sans yeux et sans mains.
+
+C'est, hélas! nous faire éprouver l'affreux supplice de Tantale; c'est
+nous condamner à la mort de Moyse, qui expira en voyant la terre
+promise, et qui n'y put entrer. Un autre poëte qui n'avait pu commander
+à ses mains, se justifia de cette distraction, avec beaucoup d'esprit,
+par la pièce suivante:
+
+ Je suis un imprudent, un sot, un téméraire,
+ Je n'ai point de raison, j'ai l'esprit mal tourné;
+ Je n'ai pour tout talent que celui de déplaire;
+ Indigne de vous voir, digne d'être berné.
+
+ Voilà, Philis, les épithètes
+ Que je reçois de vous, en l'humeur où vous êtes;
+ Et de tout ce courroux vous avez pour raison,
+ Que ma main a voulu toucher votre téton.
+
+ C'est trop punir, Philis, une main criminelle:
+ Que nous sommes, hélas! bien différens d'humeur!
+ Pour toucher votre sein vous me faites querelle,
+ Moi, je ne vous dis rien d'avoir touché mon coeur!
+
+Si, par hasard, la main s'égare dans le transport que fait naître une
+gorge rivale de celle de Léda ou d'Hébé, après que l'on a fait le
+serment d'être circonspect, croyez-vous que ce parjure soit
+irrémissible? Non, sans doute; ces sermens ne lient pas; je suis
+persuadé que Jupiter a absous l'amant qui va parler:
+
+ «Je promets tous les jours de ne jamais toucher
+ Les neiges du beau sein dont l'amour me consume,
+ Mais je ne saurais m'empêcher
+ De suivre une si douce et si belle coutume.
+ Cruels devoirs! injustes ennemis!
+ Pensez-vous qu'Amarante ignore
+ Qu'amour, comme un enfant qui n'a pas l'âge encore,
+ Doit être dispensé de ce qu'il a promis?»
+
+ «_Jupiter è coelo perjuria ridet amantum._»
+
+Je sais bon gré à Boursault d'être pour les patineurs.
+
+«Ah! juste Dieu, dit-il à M. Charpentier, que la maîtresse à qui je ne
+suis que par votre moyen est vertueuse! Pour lui avoir aujourd'hui baisé
+deux ou trois fois la main, elle m'a vigoureusement querellé; voyez ce
+qui m'arriveroit, si je faisois pis. Je n'ai osé lui dire que je ne
+faisois l'amour que pour _baiser_, et que j'aimerais autant être
+amoureux _ad honores_, que de ne pas faire les fonctions requises à la
+qualité que ses yeux m'ont contraint de prendre. Je croyois, en vérité,
+qu'étant amant déclaré d'une fille, c'en étoit être plus d'à moitié le
+mari, et qu'on faisoit toujours quelques pas du côté de l'amour défendu,
+avant que d'en venir à l'amour permis. A vous dire le vrai, je me lasse
+d'être amant, s'il n'y a que cela à faire. Il est juste, si j'ai la
+discrétion de ne rien demander à la belle, qui lui coûte quelque chose,
+qu'elle ait la complaisance de me laisser prendre ce qui ne lui coûte
+rien. La charmante Clotilde, que vous connoissez pour avoir autant de
+vertu que fille du monde, en use d'une façon bien plus galante. Quand,
+lundi, je revins de la campagne, après deux baisers qu'elle reçut aussi
+goulûment que je les lui donnois, son fichu qui vint à tomber, m'ayant
+obligé de couvrir sa gorge de mes deux mains, de peur que d'autres ne la
+vissent, elle m'en remercia le plus civilement qu'il lui fut possible,
+et me demanda si je n'avois besoin que de cela. Il n'y a rien qui
+satisfasse tant, ni qui revienne à si peu de frais.»
+
+«Si vous mettez la main au devant d'une fillette, elle la repoussera
+vite, et dira: laissez cela. Quand je dis le devant, je l'entends comme
+faisoit monsieur le feu premier médecin, qui ayant tâtonné l'estomac
+d'une belle demoiselle couchée et un peu malade, coule sa main plus bas,
+et, venant à l'intersection du corps, s'y avançoit, quand elle lui dit:
+«Hé! monsieur, que pensez-vous faire?--Mademoiselle, je croyois que vous
+fussiez comme les vaches de notre pays; que vous eussiez les tetins
+entre les jambes.»
+
+_Moyen de parvenir_, ch. IX.
+
+De tout temps le clergé s'escrima en termes plus ou moins crus sur
+l'indécence de la toilette des femmes. Vers 1700, la duchesse de
+Bourgogne (Marie-Adélaïde de Savoie) devait tenir un enfant avec
+_Monseigneur_; mais au moment de procéder à la cérémonie, l'officiant ne
+trouva pas que la marraine, qui avait une robe de chasse, se présentât à
+l'église en _habit décent_, et le baptême fut remis. Or, veut-on savoir
+ce qu'on appelle à la cour l'_habit décent_? Il consiste à se montrer
+avec la gorge et les épaules entièrement découvertes, la chute des reins
+bien marquée, les bras nus jusqu'au coude, et un pied de rouge sur le
+visage. L'habit de chasse cache toutes ces nudités, et les dames le
+portent sans rouge.... Cependant le curé appelle ce costume
+_indécent_.... Il n'y a que manière de s'entendre sur les mots.
+
+On trouve dans les _Chroniques de l'Oeil de Boeuf_, à l'année 1711, le
+passage suivant:
+
+«La morale donna le jour de l'an des étrennes de sa façon aux dames de
+Paris; c'est un ouvrage en 2 volumes in-12, intitulé: _De l'abus des
+nudités de gorge_. Je n'aurais jamais cru qu'on pût en écrire si long
+sur une telle matière; mais elle s'est étendue sous la main de l'auteur.
+Chaque tentation que cet usage immodeste peut faire naître est traitée
+dans un chapitre à part, où se déroule une longue énumération de
+conséquences dont la moindre entraîne le péché mortel; on peut juger des
+autres. Il faut convenir que les femmes de notre époque accusent le nu
+d'une manière toute lacédémonienne; point de refuge pour les regards
+dévots, vainement leur chaste prunelle semble-t-elle dire:
+
+ «Ah! cachez-moi ce sein, que je ne saurais voir»,
+
+on persiste à le leur montrer: ici, c'est une robe sans ceinture, telle
+qu'on la met en sautant du lit; là, c'est une gorge débordant du corset
+complaisant; plus loin, ce sont des bras et des épaules dont la nudité
+se réunit à celle des poitrines pour assaillir les continences
+ecclésiastiques. Forcé dans les derniers retranchements de sa pudeur
+sacrée, le curé de Saint-Étienne-du-Mont s'écriait l'autre jour en
+chaire:
+
+«Pourquoi, mesdames, ne pas vous couvrir en notre présence; sachez que
+nous sommes de chair et d'os comme les autres hommes!»
+
+L'auditoire s'étant mis à rire, le prédicateur ajouta: «Quand on vous
+parle à mots couverts, vous faites la sourde oreille; quand on vous
+parle en termes clairs, vous riez: comment donc vous prendre?
+
+«Vous verrez qu'il faudra que le roi envoie ses mousquetaires par la
+ville, matin et soir, afin de faire rentrer nos coquettes dans le
+devoir, et les gorges dans les corsets.»
+
+Les robes des femmes, longues dans les premiers siècles de la monarchie,
+se raccourcirent sous Philippe de Valois, et restèrent très-fermées
+jusqu'à Charles VI, et serrées de manière à dessiner les formes de la
+taille. Alors seulement les femmes commencèrent à se découvrir les bras,
+la gorge et les épaules, et comme la pente est rapide dans le
+relâchement des moeurs, elles renouvelèrent sous Charles VII l'antique
+usage des bracelets et des colliers.
+
+La cour décente et sévère d'Anne de Bretagne arrêta un moment le torrent
+de ce luxe; mais celles de Charles IX et surtout de Henri III, trop
+fameux par ses goûts honteux, hâtèrent le débordement; Henri IV,
+quoique très-galant, s'y opposa vainement. François 1er vint y mettre
+le comble en favorisant le luxe et la galanterie, et prêchant lui-même
+d'exemple. La cour de Louis XIV acheva ce que ses prédécesseurs avaient
+si bien commencé; l'opulence et la volupté y régnèrent souverainement.
+Nous avons dit plus haut ce qu'on entendait dans cette cour débauchée
+par _habit décent_.
+
+Nous ne pouvons terminer ce chapitre sans parler de cette fameuse secte
+qui se forma en Hollande et dont Bayle, dans son _Dictionnaire
+critique_, au mot _Mammillaires_, nous instruit fort amplement. Voici,
+sans y rien changer, cet article qui trouve ici naturellement sa place:
+
+MAMMILLAIRES, secte parmi les anabaptistes. On ne sait pas bien le temps
+où ce nouveau schisme se forma; mais on donne la ville de Harlem pour le
+lieu natal de cette subdivision. Elle doit son origine à la liberté
+qu'un jeune homme se donna de mettre la main au sein d'une fille qu'il
+aimait, et qu'il voulait épouser. Cet attouchement parvint à la
+connaissance de l'Église, et là-dessus on délibéra sur les peines que le
+délinquant devait souffrir; les uns soutinrent qu'il devait être
+excommunié, les autres dirent que sa faute méritait grâce, et ne
+voulurent jamais consentir à son excommunication. La dispute s'échauffa
+de telle sorte qu'il se forma une rupture totale entre les tenans. Ceux
+qui avaient témoigné de l'indulgence pour le jeune homme furent nommés
+Mammillaires[7]. En un certain sens, cela fait honneur aux anabaptistes;
+car c'est une preuve qu'ils portent la sévérité de la morale beaucoup
+plus loin que ceux que l'on nomme rigoristes dans les Pays-Bas[8]. Je
+rapporterai à ce propos un certain conte que l'on fait du sieur Labadie.
+
+[Note 7: Il n'est pas besoin de faire ici l'étymologiste. Tous ceux
+qui entendent le François savent que le mot _mamelle_, qui n'est plus du
+bel usage, signifie la même chose que _teton_.]
+
+[Note 8: Les Casuistes les plus relâchez, les Sanchez et les
+Escobars, condamnent l'attouchement des tétons: ils conviennent que
+c'est une impureté et une branche de la luxure, l'un des sept péchez
+mortels. Mais si je ne me trompe, ils n'imposent pas au coupable une
+pénitence fort sévère: et il y a plusieurs païs dans l'Europe où ils
+sont presque contraints de traiter cela comme les petites fautes que
+l'on appelle _quotidianæ incursiones_. On est si accoûtumé à cette
+mauvaise pratique dans ces pays-là, et c'est un spectacle si ordinaire
+jusques au milieu des rues, à l'égard surtout du commun peuple, que les
+casuistes mitigés se persuadent que cette habitude efface la moitié du
+crime: ils croient qu'on ne l'envisage point sous l'idée d'une liberté
+fort malhonnête, et que le scandale du spectateur est très-petit. C'est
+pourquoi ils passent légèrement sur cet article de la confession. Je ne
+pense pas que jamais aucun rigoriste ait différé pour un tel sujet
+l'absolution de son pénitent, non pas même dans les climats où cette
+espèce de patinage est peu usitée, et passe pour une de ces libertés
+dont les personnes de l'autre sexe sont obligées de se fâcher tout de
+bon. Ainsi les anabaptistes sont les plus rigides de tous les moralistes
+chrétiens, puisqu'ils condamnent à l'excommunication celui qui touche le
+sein d'une maîtresse qu'il veut épouser, et qu'ils rompent la communion
+ecclésiastique avec ceux qui ne veulent pas excommunier un tel galant.
+(_Notes de Bayle._)]
+
+«Tous ceux qui ont ouï parler de ce personnage savent qu'il recommandait
+à ses dévots et à ses dévotes quelques exercices spirituels, et qu'il
+les dressait au recueillement intérieur et à l'oraison mentale. On dit
+qu'ayant marqué à l'une de ses dévotes un point de méditation, et lui
+ayant fort recommandé de s'appliquer tout entière pendant quelques
+heures à ce grand objet, il s'approcha d'elle lors qu'il la crut la plus
+recueillie, et lui mit la main au sein. Elle le repoussa brusquement, et
+lui témoigna beaucoup de surprise de ce procédé, et se préparait à lui
+faire des censures, lorsqu'il la prévint: «Je vois bien, ma fille, lui
+dit-il sans être déconcerté, et avec un air dévot, que vous êtes encore
+bien éloignée de la perfection: reconnoissez humblement vôtre foiblesse;
+demandez pardon à Dieu d'avoir été si peu attentive aux mystères que
+vous deviez méditer. Si vous y aviez apporté toute l'attention
+nécessaire, vous ne vous fussiez pas aperçue de ce qu'on faisoit à votre
+gorge. Mais vous étiez si peu détachée des sens, si peu concentrée avec
+la Divinité, que vous n'avez pas été un moment à reconnoître que je vous
+touchois. Je voulois éprouver si votre ferveur dans l'oraison vous
+élevoit au-dessus de la matière, et vous unissoit au Souverain-Être, la
+vive source de l'immortalité et de la spiritualité, et je vois avec
+beaucoup de douleur que vos progrès sont très-petits; vous n'allez que
+terre à terre. Que cela vous donne de la confusion, ma fille, et vous
+porte à mieux remplir désormais les saints devoirs de la prière
+mentale.» On dit que la fille, ayant autant de bon sens que de vertu, ne
+fut pas moins indignée de ces paroles que de l'action de Labadie, et
+qu'elle ne voulut plus ouïr parler d'un tel directeur. Je ne garantis
+point la certitude de tous ces faits, je me contente d'assurer qu'il y a
+beaucoup d'apparence que quelques-uns de ces dévots si spirituels, qui
+font espérer qu'une forte méditation ravira l'âme et l'empêchera de
+s'apercevoir des actions du corps, se proposent de patiner impunément
+leurs dévotes, et de faire encore pis. C'est de quoi l'on accuse les
+Molinosistes. En général, il n'y a rien de plus dangereux pour l'esprit
+que les dévotions trop mystiques et trop quintessenciées, et sans doute
+le corps y court quelques risques, et plusieurs y veulent bien être
+trompés.
+
+«J'ai ouï dire que des gens d'esprit soutinrent un jour dans une
+conversation qu'il n'y aura jamais de _Basiaires_, ou d'_Osculaires_,
+entre les Anabaptistes. Ce seraient des gens qu'on retrancherait de sa
+communion, parce qu'ils n'auroient pas voulu consentir que l'on
+excommuniât ceux qui donnent des baisers à leurs maîtresses. Or voici le
+fondement de ceux qui nioient qu'on puisse attendre un tel schisme. Il
+n'est pas possible, disoient-ils, qu'au cas qu'il y eût des casuistes
+assez sévères pour vouloir que l'excommunication fût la peine d'un
+baiser, comme il s'en est trouvé d'assez rigides pour vouloir faire
+subir cette pénitence à celui qui avoit touché les tétons de sa
+maîtresse. Ces deux cas ne sont point pareils. Les lois de la galanterie
+de certains peuples, continuoient-ils, ont établi de génération en
+génération, et surtout parmi les personnes du Tiers-État, que les
+baisers soient presque la première faveur, et que l'attouchement des
+tétons soit presque la dernière, ou la pénultième. Quand on est élevé
+sous de tels principes, on ne croit faire, on ne croit souffrir que peu
+de chose par des baisers, et l'on croit faire ou souffrir beaucoup par
+le maniement du sein. Ainsi, quoique les administrateurs des lois
+canoniques ayent fort crié contre le jeune homme qui fut protégé par les
+Mammillaires, il ne s'en suit pas qu'ils crieroient contre l'autre
+espèce de galanterie. Ils deféreroient à l'usage, ils pardonneroient des
+libertés qui ne passent que pour les premiers élémens ou pour l'alphabet
+des civilités caressantes. Je ne rapporte ces choses que pour faire voir
+qu'il n'y a point de matière sur quoi la conversation des personnes de
+mérite ne descende quelquefois. Il n'est pas inutile de faire connoître
+cette foiblesse des gens d'esprit. En conscience, une telle spéculation
+méritoit-elle d'être examinée? Et, après tout, n'eût-il pas bien mieux
+valu ne point répondre décisivement de l'avenir? _De futuro contingenti
+non est quoad nos determinata veritas_, disent judicieusement les
+maîtres dans les écoles de philosophie.
+
+«Notez en passant qu'il y a eu des pays où l'on supposoit que le premier
+baiser qu'une fille recevoit de son galant était celui des fiançailles.
+Voici ce qu'on lit dans l'_Histoire de Marseille_: «Le fiancé donnoit
+ordinairement un anneau à la fiancée le jour des fiançailles, et lui
+faisoit encore quelque présent considérable en reconnoissance du baiser
+qu'il lui donnoit. En effet, Fulco, vicomte de Marseille, fit donation,
+l'an 1005, à Odile, sa fiancée, pour le premier baiser, de tout le
+domaine qu'il avoit aux terres de Sixfours, de Cireste, de Soliers, de
+Cuge et d'Olieres. Cet usage étoit fondé à ce que j'estime sur la loi
+_Si à sponso_, qui ordonnoit que lorsque le mariage n'avoit pas son
+effet, la fiancée gagnoit la moitié des présens qu'elle avoit reçus du
+fiancé, car les anciens croioient que la pureté d'une fille étoit
+flétrie par un seul baiser, mais cette loi est présentement abrogée en
+ce royaume.»
+
+[Illustration]
+
+[Illustration]
+
+
+
+
+CHAPITRE IV.
+
+DU LANGAGE DES TÉTONS.
+
+
+Tous les êtres créés ont un langage, depuis les roseaux du barbier de
+Midas, jusqu'aux hydrophobes auteurs des plates brochures qui inondent
+cette capitale.
+
+Le père Bougeant s'est immortalisé par son charmant ouvrage _Sur le
+langage des bêtes_, qui a été traduit en italien. Les yeux ont une
+rhétorique connue de tout le monde. Les mains ont leur idiome; les pieds
+des amans font merveille dans leur mystérieux quatuor sous la table; les
+genoux s'en mêlent aussi; les fleurs parlent en Asie; et les coeurs, les
+coeurs! on sait combien ils sont éloquens, bavards et tyrans. J'en
+dirais long sur ce chapitre, et l'ami Boufflers, qui a dit de si jolies
+choses sur le _coeur_, embellirait bien mon texte. Doit-on être surpris,
+d'après cela, que les tétons aient aussi reçu de la nature un organe
+expressif, et des moyens oratoires? Non, sans doute; ils ont une langue,
+et Le Pays est mon autorité, dans le récit d'un songe qu'il fit sur deux
+beaux tétons. Il écrit à une dame de ses amies:
+
+«Je n'ai point dormi cette nuit, Madame, ou du moins, le songe que j'ai
+fait occupoit si sensiblement mon esprit, que j'ai cru veiller en fort
+bonne compagnie. J'ai cru avoir toujours auprès de moi les deux tétons
+de Madonte, et les voir avec ce même éclat qui me surprit hier au soir
+quand votre main obligeante les délivra de la prison qui les enfermoit.
+Vous pouvez bien croire, Madame, que je n'ai pas gardé le silence dans
+une si belle occasion de parler: mais, pourrez-vous croire que ces jolis
+tétons m'ont aussi parlé, et que notre conversation a été fort agréable?
+Que ceci ne vous surprenne point, les tétons ont, pour ceux qui les
+entendent, leur langage, aussi bien que les yeux. Comme je les ai
+trouvez en humeur de causer, j'ai eu la curiosité de leur faire cent
+questions sur leurs aventures, auxquelles ils m'ont répondu le plus
+galamment du monde. J'aurois bien envie de vous redire ici tout notre
+entretien, mais il sera plus aisé de vous l'écrire. Voici pourtant
+quelques-unes de leurs paroles que j'ai impatience de vous apprendre,
+parce qu'elles m'ont semblé les plus jolies. C'est la réponse qu'ils
+m'ont faite sur l'étonnement que je leur ai témoigné qu'ils fussent
+ainsi séparez, et qu'ayant l'un avec l'autre tant de rapport, ils
+vécussent en mauvais voisins, sans s'approcher, sans se baiser, enfin
+comme des ennemis irréconciliables. Il est vrai, m'ont-ils dit, nous
+sommes ennemis, et la ressemblance ne fait point chez nous ce qu'elle
+fait partout ailleurs. Elle nous oblige à nous haïr; et notre réciproque
+jalousie nous tiendra toujours éloignez. Quoique nous n'ayons qu'un même
+coeur et qu'un même intérêt, nous n'avons aucune disposition à nous
+unir. L'Amour, qui est un petit boute-feu, nourrit entre nous cette
+division. Il nous promet de nous aimer tous deux pendant que nous nous
+haïrons, et jure de nous quitter aussitôt que notre haine cessera. Mais,
+de bonne foi, aimables tétons, ai-je répliqué, ne seriez-vous point
+comme quelques-uns de vos frères, qui jamais ne se touchent le jour, et
+qui se baisent pendant toute la nuit; qui ont inclination à s'approcher,
+et qui ne vivent éloignez que par contrainte? Vous serez étonnée,
+Madame, que j'aye osé leur parler d'une manière si désobligeante, mais
+sachez que ce n'a été que par adresse. Car quoique je n'eusse point de
+pareils sentimens, je voulois les obliger à m'ôter le doute que je
+témoignois, en souffrant que mes doigts fussent avec mes yeux témoins de
+leur division. Ma ruse a réussi comme je l'avois désiré; les deux tétons
+de Madonte s'étant un peu enflez de colère et d'orgueil, à cause de mon
+injuste soupçon, ont consenti que je fisse l'épreuve que je souhaitois,
+et cette épreuve a d'abord fait sentir à mes mains la vérité qui avait
+paru à mes yeux.
+
+Après cela, je ne me suis plus étonné qu'ils eussent tant de disposition
+à la haine; car j'ai trouvé tant de dureté dans l'un et dans l'autre,
+qu'il n'y a pas apparence que rien les puisse jamais attendrir. Au
+reste, Madame, je gage que votre belle parente ne sait rien de ce qu'ont
+fait chez moi ses tétons. J'ai appris d'eux-mêmes qu'ils font bien
+d'autres choses, sans son congé; ils m'ont dit que lorsqu'elle y pense
+le moins, ils se divertissent à prendre des coeurs, partout où ils
+trouvent des yeux, et que c'est leur passe-temps le plus ordinaire. Ils
+m'ont dit même que quand ils ont pris quelqu'un, et que Madonte s'en
+apperçoit, elle le traite aussi cruellement que si sa prise l'avoit
+offensée. Elle l'insulte, dans son esclavage, elle ne lui donne aucun
+secours, et prend plaisir à le voir mourir de langueur.»
+
+Ce Le Pays était un très-rude patineur. Sa Caliste lui avait promis de
+l'aller voir, dans le tems qu'une cruelle fièvre le travailloit et
+l'avait mis dans un état pitoyable. Il lui fait premièrement le portrait
+de son visage de cette sorte:
+
+«Pour ma mine, vous ne vîtes jamais rien de si étrange: mes yeux sont
+devenus plus grands que tout le reste de mon visage, et il vous sera
+facile, s'il vous en prend fantaisie, de compter mes dents au travers de
+la peau de mes joues. Il ne faudra pas vous étonner, si je vous fais
+froide mine; je la fais à tout le monde, et me la fais à moi-même, quand
+je me regarde au miroir. Quelqu'envie que j'aye de vous plaire, je ne
+pourrai point m'empêcher de vous faire laide grimace.» Il ajoute
+ensuite:
+
+«Ce qu'il y a de bon, Caliste, c'est que mes mains, dont vous vous êtes
+plainte tant de fois, ne vous donneront aucun sujet de me quereller. Je
+vous jure qu'en l'humeur où je suis, les tétons de la belle Hélène, qui
+assurément devoient être des plus beaux, puisqu'ils firent tant jouer
+des mains les Troyens et les Grecs, ne me feroient pas présentement
+tirer les miennes de dessous ma fourrure. Jugez, par là, si vous auriez
+à craindre du reste, et si vous ne vous en irez pas de chez moi sans
+avoir crié contre mes emportemens!»
+
+Marot avait le même défaut que Le Pays, et ne laissait échapper aucune
+occasion de mettre ses yeux au bout de ses doigts. Il aurait bien
+souhaité, un jour des Innocents, de savoir où était le lit de sa belle,
+pour la faire passer par l'étamine. N'en pouvant venir à bout, il se
+contenta de lui écrire ces vers:
+
+ Très-chère soeur si je savois où couche
+ Vostre personne au jour des innocens,
+ De bon matin j'irais à vostre couche.
+ Voir ce gent corps que j'ayme entre cinq cens:
+ Adonc, ma main (veu l'ardeur que je sens),
+ Ne se pourrait bonnement contenter,
+ Sans vous toucher, tenir, tâter, tenter;
+ Et si quelqu'un survenoit d'adventure,
+ Semblant ferois de vous innocenter:
+ Seroit-ce pas honneste couverture?
+
+Après tout, si ce qu'on vient d'alléguer, n'engage point les belles à
+laisser aux amans les coudées franches et les mains libres, il n'en est
+pas moins vrai que toutes n'ont pas cette austérité. La Corine du tendre
+Ovide ne faisait pas tant la renchérie. Elle alla un jour trouver ce
+poëte dans un équipage très-galant, et dans ce désordre voluptueux qui
+favorise et provoque si bien la liberté des mains: Ovide lui-même nous
+l'apprend dans une de ses élégies amoureuses:
+
+ Le chaud que le midi fait naître sur la terre,
+ Aux plaisirs d'exercice avoit livré la guerre:
+ Quand je m'allai jeter tout fatigué, tout las,
+ Sur un lit de repos qui ne m'en servit pas.
+ J'attendois la Beauté dont mon âme est charmée.
+ Ma fenêtre n'étoit ouverte, ni fermée,
+ Et ces deux changements se cédant tour-à-tour,
+ Laissoient voir un combat de la nuit et du jour.
+ L'on voit dans les forêts de ces sombres lumières,
+ Qui ne sont ni clartez, ni ténèbres entières,
+ Et tels sont du soleil les timides flambeaux,
+ Lorsqu'il vient sur la terre, ou qu'il va sous les eaux.
+ Tel est le tems obscur qu'il faut donner aux dames;
+ De peur que la clarté ne trahisse leurs flâmes.
+ L'Amour est un enfant qu'on nous a peint sans yeux,
+ Et ce dieu veut toujours être aveugle en ses jeux.
+ Après quelques momens, je vis entrer Corine;
+ Sous l'habit du plaisir, qu'elle avoit bonne mine!
+ Un voile transparent, de ses rares beautés
+ Dans un léger nuage étouffoit les clartés.
+ Il faisoit à ma vue entière violence,
+ Sans sauver mes desirs de leur impatience:
+ Et ses cheveux, poussés d'un mouvement jaloux,
+ Cachoient toute sa gorge à mes transports si doux.
+ Corine valoit bien qu'ils me fissent querelle.
+ Jamais Sémiramis n'avoit paru si belle;
+ Et ceux qui de Laïs chantèrent les attraits,
+ N'avoient, pour les toucher, formé tant de souhaits.
+ Le linge me déplut, quoiqu'assez favorable;
+ J'en fis avec Corine un combat agréable,
+ Sa main vint au secours; mais je lus dans ses yeux,
+ Que son coeur et sa main se trahissoient entr'eux.
+ Sa vertu vouloit faire une honnête retraite,
+ Ses efforts languissans demandoient sa défaite
+ Et je vis peu d'obstacles en ce plaisir égal
+ A vaincre un ennemi qui se défendoit mal.
+ Quand son voile en tombant la laissa toute nue,
+ Jamais rien de si beau ne s'offrit à ma vue.
+ La nature sans art fait honte aux ornemens,
+ Jamais de si beaux bras n'unirent deux amans.
+ Jamais de deux couleurs gorge si bien mêlée
+ Ne fut par les baisers doucement accablée.
+ Et jamais les voisins de ce qu'on ne dit pas,
+ N'étalèrent aux yeux de si charmans appas.
+ Je regardai longtems, mais en pareil mystère,
+ L'on ne peut pas toujours regarder sans rien faire.
+ Je fis donc ce qu'on fait loin des regards fâcheux,
+ Et lorsque des amants le veulent bien tous deux.
+ Quand j'eus fait mon devoir, en homme de courage,
+ Corine pour dormir me prêta son visage:
+ Je pris un doux repos sur ce lit de corail,
+ Mais certes le repos ne vaut pas le travail,
+ Grands Dieux! qui me voyez peut-être avec envie;
+ Laissez-moi me choisir les plaisirs de la vie.
+ Je renonce au sommeil, et le milieu du jour,
+ Comme il est le plus chaud, est plus propre à l'amour.
+
+O femmes auxquelles il est si difficile d'échapper aux moyens de
+séductions multipliées contre vous, je pense que la mode que vous avez
+établie de nous découvrir gratuitement ce que vous avez de plus beau,
+est un excellent moyen de diminuer nos désirs par l'habitude de voir, et
+par la satiété; mais si, dans le tête-à-tête, vous voulez conserver
+toute votre raison, et ne point donner de droits sur vous, en faisant un
+ingrat ou un inconstant, n'oubliez pas de défendre les jeux de mains,
+dont les conséquences sont funestes à la vertu; retenez bien le sens de
+ces vers, que vous vous ferez expliquer avant de rien permettre, et vous
+me remercierez:
+
+ _Post visum, risus, post risum, venit ad usum:
+ Post usum tactus: post tactum, venit ad actum.
+ Post actum, fructus: post fructum, poenitet actum._
+
+Toutes les gradations de l'audace sont expliquées dans le distique
+suivant, et toute la tactique de l'amour y est développée:
+
+ _Visus et alloquium: tactus, post oscula, factum:
+ Ni fugias tactus, vix evitabitur actus._
+
+La chair est faible, l'esprit est prompt. La pudeur a contre elle cinq
+ennemis terribles, désignés ci-dessus, c'est-à-dire la vue, l'entretien,
+le toucher, le baiser et le fait. Si vous n'évitez pas le toucher, vous
+n'éviterez pas le fait. Un amant qui a obtenu un baiser, est un sot s'il
+reste en chemin; songez-y.
+
+ _Oscula qui sumpsit, si non et coetera sumpsit,
+ Hæc quoque quae data sunt, perdere dignus erit._
+
+[Illustration]
+
+
+
+
+CHAPITRE V.
+
+DES LAIDS TÉTONS.
+
+
+Il est possible que ce chapitre ne plaise pas à toutes les femmes; mais
+sera-ce leur faute? sera-ce la nôtre? N'y en aura-t-il pas beaucoup qui
+voudront en appeler de notre jugement? Nous touchons la corde sensible,
+et nous sommes de plus en plus effrayés des précautions à prendre pour
+ménager l'amour-propre. Comment un sein doit-il être, pour être laid?
+Voyons ce qu'en ont dit les différents auteurs qui ont traité cette
+belle matière. C'est à présent que je sens tout ce qu'a de pénible
+l'emploi d'historiographe des tétons; que ne puis-je sauter à
+pied-joints sur ce maudit chapitre! Pourquoi ne marche-t-on pas toujours
+sur des fleurs dans cette vie? Pourquoi? pourquoi?... Eh, mon Dieu!
+tous ces pourquoi-là allongeraient mon chapitre; hâtons-nous de glisser
+sur les difficultés, courons dans une mauvaise route, pour nous reposer
+et nous rafraîchir, quand nous serons arrivés à son terme.
+
+Je compte d'abord pour laids tétons, ceux d'une taille énorme, par
+exemple, ceux de Mme de Bouillon, du _Roman comique, qui en avait la
+valeur de vingt livres distribuées à poids égaux sous chaque aisselle_.
+
+Ceux de Paquette, à qui Le Pays dit: _«Pour votre gorge et vos tétons,
+ils ne sont pas blancs; mais, certes, il y a de la chair et si les
+tétons s'achetoient à la livre, vous pourriez vous vanter d'être plus
+riche que votre maîtresse.»_
+
+Le _Poëte sans fard_ drape compétemment une femme, qui avait des tétons
+aussi gros que des pis de vache. Il lui dit:
+
+ Philis, tu demandes pourquoi
+ Je ne sens point d'amour pour toi?
+ La raison est, que tes mamelles
+ Te vont jusques sous les aisselles;
+ Que ton nez est des plus punais,
+ Et que ta bouche sent mauvais!
+ Je crois d'ailleurs, ô vieille vache!
+ Puisqu'enfin tu le veux savoir,
+ Que tout ce que l'habit me cache
+ Est encor plus vilain que ce qu'il laisse voir.
+
+Je mets encore au nombre des tétons dégoûtants, ceux qui ressemblent à
+la suie, comme ceux de Tisiphone: Despréaux, dans son _Dialogue des
+morts_, fait ainsi faire à Sapho, l'un des personnages du _Grand
+Cyrus_[9], le portrait de cette blonde du royaume de Pluton:
+
+«Vous croyez que je ne connois pas Tisiphone; c'est une de mes
+meilleures amies. Vous ne serez peut-être pas fâché que je vous en fasse
+le portrait. L'illustre fille dont j'ai à vous parler, a quelque chose
+de _si furieusement_ beau, elle est si terriblement agréable, que je
+suis _épouvantablement_ empêchée, quand il vous en faut faire la
+description. Elle a les yeux vifs et perçans, petits, bordés d'un
+certain incarnat qui en relève _étrangement_ l'éclat. Comme elle est
+naturellement propre, est-elle aussi naturellement négligée; et cette
+négligence fait qu'on peut voir souvent sa gorge, qui est toute
+semblable à celle d'une Amazone, à la réserve que les Amazones n'avaient
+qu'une mamelle brûlée, et que l'aimable Tisiphone les a toutes deux. Ses
+cheveux sont longs et annelez, et semblent autant de serpenteaux qui se
+jouent autour de sa tête, et qui se viennent jouer sur son visage.»
+
+[Note 9: Boileau en a fait une maligne application à Mlle de Scudéri
+même, l'auteur de ce roman, à laquelle tous les auteurs d'alors
+donnaient le nom de Sapho. Le poëte Le Brun nous retrace les écarts de
+Boileau, dans ses vers contre la citoyenne Th... P..., auteur de _Sapho_
+et de _Camille_, et autres femmes auteurs.]
+
+De plus, je trouve laids des tétons, quoique beaux, quand la personne
+qui en est pourvue est trop coquette, ou plutôt impudique. Ce caractère
+efface toutes les beautés qu'elle pourrait avoir. Telle était la
+Macette, à laquelle le satyrique Regnier, plutôt par ironie que
+sérieusement, donne des éloges plaisants, quand il lui dit, pour la
+louer, que ses cheveux sont aussi dorés qu'une orange, plus frisés qu'un
+chardon; que le soleil n'est auprès du brillant de ses yeux, qu'un
+cierge de la Chandeleur, et que sa mine de poupée prend les esprits à la
+pipée et les appétits à la glu. Ensuite, lui parlant de ses tétons qui
+ne marquent que de la lascivité, il s'exprime ainsi:
+
+ Les Grâces, d'amour échauffées,
+ Nud-pieds, sans juppes, décoiffées,
+ Se tiennent toutes par la main,
+ Et d'une façon sadinette
+ Se branlant à l'escarpolette,
+ Sur les ondes de votre sein.
+
+Outre cela, je déclare que des tétons me paraissent laids, quelque bien
+tournés qu'ils puissent être, quand le sexe les fait servir de prétexte
+pour être infidèle. Une Cloris dit à une Philis, dans Regnier que je
+viens de citer:
+
+ La foi n'est plus aux coeurs qu'une chimère vaine,
+ Tu dois, sans t'arrêter à la fidélité,
+ Te servir des amans comme des fleurs d'été,
+ Qui ne plaisent aux yeux qu'étant toutes nouvelles:
+ Nous avons de nature au sein doubles mamelles,
+ Deux oreilles, deux yeux et divers sentimens,
+ Comment ne pourrions-nous avoir divers amans?
+ Je connois mainte femme à qui tout est de mise,
+ Qui changent plus souvent d'amant que de chemise.
+
+Pour voir la laideur d'un téton dans toute son étendue, on n'a qu'à lire
+l'épigramme que voici, faite par Marot, sur le laid tétin:
+
+ Tetin qui n'a rien que la peau,
+ Tetin fine, tetin de drapeau,
+ Grand'tetine, longue tetasse,
+ Tetin, doy-je dire bezace;
+ Tetin au grand vilain bout noir,
+ Comme celui d'un entonnoir.
+ Tetin qui brimballe à tous coups
+ Sans estre esbranlé, ne secous,
+ Bien se peut vanter qui te taste,
+ D'avoir mis la main à la paste.
+
+ Tetin grillé, tetin pendant,
+ Tetin flestry, tetin rendant
+ Vilaine bourbe en lieu de laict,
+ Le diable te fit bien si laid.
+
+ Tetin pour tripe reputé,
+ Tetin, ce cuide-je, emprunté
+ Ou desrobbé en quelque sorte,
+ De quelque vieille chevre morte,
+ Tetin propre pour en enfer
+ Nourrir l'enfant de Lucifer.
+
+ Tetin boyau long d'une gaule,
+ Tetasse à jetter sur l'espaule,
+ Pour faire (tout bien compassé)
+ Un chaperon du temps passé,
+ Quand on te void, il vient à maints
+ Une envie dedans les mains,
+ De te prendre avec les gants doubles,
+ Pour en donner cinq ou six couples
+ De souflets sur le nez de celle
+ Qui te cache sous son aisselle.
+
+ Va, grand vilain tetin puant,
+ Tu fournirois bien en suant
+ De civettes et de parfums
+ Pour faire cent mille defuncts.
+ Tetin de laideur despiteuse,
+ Tetin, dont nature est honteuse,
+ Tetin des vilains le plus brave,
+ Tetin, dont le bout toujours bave,
+ Tetin fait de poix et de glus:
+ Bran, ma plume, n'en parlez plus,
+ Laissez-le là, ventre Saint-George,
+ Vous me feriez rendre ma gorge.
+
+Bon Dieu! le vilain objet!... hélas! le suivant, peint par Benserade,
+n'est pas plus gracieux; pourquoi des poëtes se plaisent-ils ainsi à
+tremper leurs plumes dans l'ordure? c'est qu'il faut des ombres aux
+tableaux.
+
+ Pendantes et longues mamelles,
+ Où les perles et l'oripeau,
+ N'imposent à pas un chapeau;
+ Molles et tremblantes jumelles.
+ Tetasses de grosses femelles,
+ A couvrir d'un épais drapeau,
+ Peau bouffie et rude, moins peau
+ Que cuir à faire des semelles,
+ De vieille vache aride pis:
+ Que ne puis-je dire encor pis
+ D'un sein qui tombe en pourriture!
+ Sein d'où s'exhale par les airs,
+ Un air qui corrompt la nature;
+ Sein propre à nourrir des cancers.
+
+Clément Marot et Benserade ne sont pas les seuls qui se soient occupés
+de décrire les vilains tétons; Rabelais, dans son épître à une vieille,
+Motin, Regnier, Sygognes, Maynard, se sont plu à nous détailler ces
+horreurs.
+
+Maynard passant en revue tout le corps d'une vieille ridée, arrivé à ses
+tétons, s'écrie:
+
+ Vos tetins, dont la peau craquette
+ Comme laurier qu'au feu l'on jette,
+ A toucher ne sont point plus doux
+ Que le dessus d'un vieux registre,
+ Et comme un bissoc de belistre,
+ Ils vous tombent sur les genoux.
+
+Un peu plus loin, Sygogne, dans sa satyre contre une vieille sorcière,
+dit:
+
+ Vostre estomach faict en estrille
+ Pourroit encor servir de grille,
+ Vos flancs de herse on de rateau,
+ Et de vos pendantes mamelles
+ Un bissac ou des escarcelles
+ Pour mettre l'argent du bordeau.
+
+En voilà assez sur ce sujet peu ragoûtant; nous renvoyons les lecteurs
+amoureux de ces sortes d'écrits, au _Cabinet satyrique_; ils trouveront
+là-dedans de quoi se satisfaire.
+
+Les tétons sont la dernière beauté qui vient au sexe, et la première qui
+est confisquée: il est peu de ces femmes privilégiées qui les conservent
+comme Ninon et Gabrielle B.... C'est pour cela qu'elles en ont un soin
+tout particulier, et qu'elles confient leurs enfants au sein mercenaire
+des nourrices.
+
+Malgré cela, vingt ans de mariage gâtent les tétons les mieux faits. Ils
+ne sont pas non plus à l'épreuve de la vieillesse. Comme elle ternit le
+teint le plus vif, qu'elle éteint les yeux les plus brillants, elle
+amollit les tétons les plus rebondis. C'est ce que nous apprennent ces
+stances contre une dame qui avait vieilli à la cour, et qui se voulait
+marier:
+
+ Quoi! vous vous mariez! douce et tendre mignonne,
+ Et ne l'avez encore été!
+ Je ne vois rien du tout dessus votre personne,
+ Qui ne prêche la chasteté.
+
+ Pour de l'âge, on sait bien que vous n'en manquez guère,
+ Votre visage étant garant
+ Que ce qu'on fait pour vous, se pouvoit fort bien faire
+ Du règne de Henri-le-Grand.
+
+ Vous éloignant d'ici, les beautés de la reine
+ Ont purgé ce noble séjour:
+ De même qu'un torrent, votre sortie entraîne
+ Toute l'ordure de la Cour.
+
+ Celui qui vous épouse, en témoignant sa flamme,
+ N'établit pas mal son renom:
+ Qui s'est bien pu résoudre à vous prendre pour femme,
+ Ira bien aux coups de canon.
+
+ Comme vous n'êtes plus qu'une vieille relique.
+ Objet de la compassion.
+ Dès qu'on dit que sur vous un sacrement s'applique,
+ On pense à l'Extrême-Onction.
+
+ Qui se lie avec vous espère un prompt veuvage,
+ Ou, peut-être, ce pauvre amant
+ Entend que le contrat de votre mariage
+ Passe pour votre testament.
+
+ Vous seriez bien sa mère, et la foi conjugale
+ Est mal placée entre vous deux:
+ L'inceste est en effet une chose si sale,
+ Que le portrait en est hideux.
+
+ Les plus intemperez de votre bonne grâce,
+ Ne donneroient pas un teston,
+ Et l'on doit s'avouer qu'on est à la besace,
+ Quand on vous touche le téton.
+
+ Souffrez ce petit mot, sans traiter de satire,
+ Un stile si franc et si doux:
+ Vous êtes en un point où l'on ne peut médire,
+ Quelque mal qu'on dise de vous.
+
+Urbain Chevreau[10], dans ses stances _sur une vieille amoureuse_, p.
+150 de ses poésies, édition de 1656, in-12, décrit ainsi sa gorge:
+
+ Cependant, vous vous ajustez,
+ Et votre gorge aux libertés
+ Semble encor faire des menaces:
+ Mais chaque jour nous regrettons
+ Qu'il n'en reste plus que les traces:
+ Et que vous ayez des besaces
+ Où vous avez eu des tétons.
+
+[Note 10: Le recueil de ses poésies est rare. Il s'y trouve quelques
+morceaux faibles, mais on le lit avec plaisir. Voyez ses épigrammes et
+son _Remède d'amour_, dans le recueil intitulé: _le Furet littéraire_ ou
+les _Fleurs du Parnasse_, 1 vol. in-12.]
+
+Antoine Legrand nous démontre le pouvoir des ans d'une manière
+très-pathétique:
+
+«L'arrière-saison, dit-il, a ses plaisirs: son utilité égale bien les
+incommodités qu'elle nous apporte. Elle est l'attente des laboureurs, et
+la récompense des vignerons; si elle dépeuple les campagnes et leurs
+collines, elle remplit leurs caves de vin, leurs greniers de grains et
+leurs granges de moissons. Mais, dès qu'une femme approche de la
+vieillesse, que ses cheveux prennent la couleur des cendres, que les
+rides sillonnent son front, que ses yeux commencent à jetter de la cire,
+que ses joues lui tombent sur le menton et que ces deux montagnes de
+lait deviennent une double besace pleine de sang; elle cesse d'être le
+souhait des hommes, ses amants en ont horreur: ceux qui la recherchaient
+auparavant la haïssent.»
+
+Tout le monde connaît la réponse ingénieuse et maligne de Voltaire à une
+dame qui présumait trop de sa gorge. Deguerle, auteur de l'_Eloge des
+perruques_, l'a mise en vers. La voici:
+
+ Dans certain cercle assez galant,
+ Certaine dame fort coquette,
+ Allait chantant
+ Papillonnant
+ En débitant
+ Mainte sornette.
+ L'espiègle, comme une autre, avait été jeunette
+ Un demi-siècle auparavant.
+ Vieille, laide et coquette! autant
+ Vaudroit, ma foi, singe en cornette.
+ Un gros chanoine, aux yeux dévots,
+ Du vénérable sein de la Vénus antique,
+ Lorgnoit en tapinois les vieux débris jumeaux,
+ Qu'agitait avec art maint soupir méthodique,
+ Sous la gaze trop véridique.
+ --Fripon, dit l'éternelle, où vont donc vos regards?
+ Ces petits coquins-ci feront damner votre âme
+ Voltaire l'entendit:--Petits coquins, madame
+ Dites plutôt de grands pendards.
+
+La voici autrement:
+
+
+LA MÉTAMORPHOSE.
+
+ Gertrude à vingt ans fut jolie:
+ Elle avoit deux petits tettons
+ Qu'Ariste aimoit à la folie
+ Et nommoit ses petits frippons.
+ Ariste fit un long voyage,
+ Et revint après vingt-cinq ans.
+ Je laisse à penser quel ravage
+ Chez Gertrude avoit fait le temps.
+ Sur les frippons, par habitude,
+ Ariste jeta ses regards:
+ --Ah! mes petits frippons, Gertrude,
+ Sont devenus de grands pendards.
+
+Après avoir parlé des femmes qui ont une laide gorge, il est à propos de
+parler de celles qui n'en ont pas du tout. Un renard pris au piège, au
+moment où il se propose de croquer une poule, un créancier qui se repaît
+avec volupté de l'espérance de faire saisir les meubles d'un malheureux
+débiteur et trouve la maison vide, éprouvent moins d'humeur et de
+surprise qu'un galant qui, après mille efforts pour découvrir et dévorer
+de son oeil furtif une belle gorge, n'en trouve que la place.
+
+Le citoyen Mercier de Compiègne, auteur de la traduction du
+_Vendangeur_, de _Rosalie et Gerblois_, de _Gérard de Velsen_, etc.,
+raconte ainsi dans un volume de ses _Soirées de l'Automne_, la
+vengeance d'un galant, qui avait éprouvé un pareil échec:
+
+
+LE FICHU MENTEUR.
+
+CONTE.
+
+ Près d'une ci-devant beauté,
+ Dorval fatiguant sa visière,
+ Cherchoit si le double hémisphère
+ Apparoîtrait à son oeil enchanté.
+ Vains efforts! la recherche avide
+ Que trompe un gros fichu menteur,
+ N'offre à ses regards que du vide
+ Dont enrage l'observateur.
+ Bref, il n'étoit resté le moindre atôme
+ A la dame de ses appas.
+ Pour se venger, que fait notre homme?
+ Où fut logé ce qu'il ne trouve pas,
+ Adroitement une carte est glissée;
+ De l'action la dame embarrassée
+ Lui dit: Dorval, que faites vous?...
+ --Ah! de grâce, point de courroux!
+ Il ne faut pas que ceci vous étonne,
+ Je voulois voir un mien ami,
+ Mais, hélas! n'y trouvant personne,
+ Ainsi que l'usage l'ordonne,
+ Je laisse ma carte chez lui.»
+
+[Illustration]
+
+[Illustration]
+
+
+
+
+CHAPITRE VI.
+
+DES CONTRÉES OÙ LES FEMMES SONT LE MIEUX PARTAGÉES DE TÉTONS.
+
+
+C'est ici qu'il nous faudrait les talents de Tavernier, de Paul Lucas,
+de Levaillant, de Christophe Colomb, de Bougainville et de Pallas, il
+faudrait avoir vu tous les pays du monde pour décider quels sont ceux
+pour lesquels les tétons viennent le mieux, et je n'ai voyagé qu'en
+Suisse et en Allemagne. J'ai vu à Neufchatel et à Berne les tétons les
+plus jolis que l'on puisse voir, très-bien apprivoisés, et qui, dans le
+tête-à-tête, ne se refusaient jamais à l'hommage que les mains voulaient
+leur rendre.
+
+Le Corrége, l'Albane, le Titien, prirent le type des beautés qu'ils
+peignirent, dans les Italiennes de leur temps. Rome et son territoire
+en offrent encore d'éclatants exemples; et, à l'âge du retour, les
+Romaines ont de superbes épaules. Mais c'est en Sicile et en Toscane, à
+Florence et à Sienne, même à Venise, que naissent les plus séduisantes
+beautés de l'Italie; car, dans la Lombardie et le voisinage des Alpes,
+les formes plus volumineuses et plus massives, sont bien moins
+enchanteresses. Les belles Françaises vivent surtout vers Avignon,
+Marseille, et dans l'ancienne Provence, peuplée jadis par une colonie
+grecque de Phocéens. Plus au nord, le sang des Cauchoises, des Picardes
+et des Belges est plus beau, et la peau est d'une blancheur plus
+éclatante, mais il y a certainement moins de finesse dans les contours
+et de délicatesse dans les formes. A Paris, l'on rencontre en général
+moins de beautés que de grâces dans la démarche et toutes les manières.
+Les Marseillaises et la plupart des Languedociennes ont aussi moins de
+gorge que les Normandes, les Belges, les Suissesses. Les plus grandes
+beautés de l'Espagne sont dans l'Andalousie et à Cadix: on les dit
+très-exigeantes en plus d'un genre, capricieuses, et pourtant
+très-constantes dans leur attachement; elles concilient le dérèglement
+des moeurs avec l'observance la plus scrupuleuse des devoirs religieux.
+La ville de Guimanarez et ses environs sont peuplés des plus charmantes
+Portugaises, la plupart courtes et vives, qui présentent en général
+beaucoup de gorge, tandis que les Castillanes n'en ont presque pas.
+Toutes ont ces beaux yeux noirs, cette taille svelte et souple, ce teint
+pâle, cet air sérieux, dédaigneux même, qui peuvent enflammer les
+grandes passions, et rebuter les hommages frivoles et vulgaires.
+
+On connaît le teint éblouissant, les traits expressifs, la physionomie
+fine et touchante des Anglaises; plusieurs ont la gorge et l'élégant
+corsage des Normandes; elles sont presque toutes blondes, quelquefois
+même rousses. En Écosse, leur teint devient d'un blanc fade comme aux
+Hollandaises: mais celles-ci montrent souvent de l'embonpoint, beaucoup
+de gorge, une carnation pâle et molle. De toutes les Allemandes, les
+Saxonnes emportent le prix de la beauté; on ne rencontre peut-être pas
+un laid visage dans le territoire d'Hildesheim; le teint charmant de
+tous les habitants fait dire en proverbe que les femmes y croissent
+comme les fleurs. Quoique les Autrichiennes ne soient pas laides, les
+Hongroises paraissent généralement plus belles; mais, dans toutes les
+nations germaniques, elles pèchent souvent par un excès d'embonpoint.
+
+A Gratz, en Styrie, une infinité de femmes et de demoiselles ont des
+amants et en changent publiquement sans qu'on y trouve à redire;
+cependant elles sont très-dévotes. Les femmes y ont un beau teint blanc,
+de gros tétons, mais un peu trop massifs.
+
+Plus au nord, les Polonaises méritent d'être remarquées. Elles ont la
+blancheur mais aussi, dit-on, la froideur de la neige. Les femmes
+russes sont, au contraire, fort amoureuses, mais l'abus des bains de
+vapeur, ou plutôt l'atmosphère chaude où elles vivent, rend bientôt mous
+et flasques tous leurs appas; sous leurs chaudes pelisses elles couvent
+d'ardentes passions, aussi les accuse-t-on de préférer toujours en amour
+le physique au moral.
+
+Les Albanaises sont plus agréables que les Morlaques; celles-ci portent
+une peau tannée, de longues mamelles pendantes, avec un mamelon noir.
+
+On trouve à Dresde, à Leipsik, à Halle, de simples grisettes dont les
+tétons blancs, rebondis et bien taillés, seraient capables d'orner le
+sein des reines du monde; la Saxe est surtout le climat où ces
+dariolettes sont de la meilleure qualité. Il paraît que le sexe de la
+Souabe est aussi abondamment pourvu de ces attraits, si l'on en doit
+croire l'apologie qu'a faite d'eux certain étudiant de l'université de
+Tubingue, et que l'on a trouvée écrite à la tête de son _Corpus juris
+civilis_:
+
+ _Hæc Tubingiacis dos est perpulchra puellis,
+ Ubera magna, pudor tenuis, vulvæque patentes,
+ Res angusta domi, foris ampla, et splendida dixi._
+
+Si nous en croyons la comtesse d'Aulnoy, les Espagnoles n'ont point de
+gorge et n'en veulent point avoir; voici comme elle en parle: «C'est une
+beauté pour les dames espagnoles de n'avoir point de gorge, et elles
+prennent de bonne heure des précautions pour l'empêcher de venir.
+Lorsque le sein commence à paraître, elles mettent dessus de petites
+plaques de plomb, et se bandent comme les enfants que l'on emmaillote.
+Il est vrai qu'il s'en faut peu qu'elles n'ayent la gorge aussi unie
+qu'une feuille de papier, à la réserve des trous que la maigreur y
+creuse, et ils sont toujours en grand nombre.»
+
+Plaignons l'aveuglement de ces Espagnoles qui outragent la nature, en
+refusant des bienfaits dont elle est si avare; plaignons aussi ces
+Françaises que la manie de revêtir les habits d'homme porte tous les
+jours à détruire ce chef-d'oeuvre si gracieux et si attrayant de leur
+sexe; le délire de cette espèce d'hermaphrodites me fait pitié et
+m'irrite. Vite, éloignons cette idée affligeante en admirant les beaux
+tétons de l'Angleterre. Tous les connaisseurs qui ont voyagé dans cette
+partie de l'Europe s'accordent à dire que la Grande-Bretagne est la mère
+nourrice des beaux tétons. Voilà ce que Le Pays écrivait de Londres à un
+de ses amis:
+
+«Ce que nous avons vu de plus qu'à Paris, ç'a été un grand nombre de
+fort belles femmes, qui sont toutes copieusement partagées de tétons.
+Comme c'est une marchandise qui est ici à grand marché, et assez
+précieuse en France, nous avions résolu d'en acheter un bon nombre, et
+de vous les envoyer tous dans une barque, attachés deux à deux avec du
+ruban couleur de feu, qui est ici, comme vous savez très-beau et en
+très-grande abondance. Nous étions persuadés que cette marchandise vous
+plairait, et que vous seriez bien aise d'en fournir à quantité de vos
+amies, qui en ont bon besoin, et qui les achèteraient volontiers. Mais
+comme les commis des Traites foraines ne laissent rien passer sans le
+visiter, nous avons changé de dessein, sachant fort bien que c'est une
+marchandise qui se gâte, pour peu qu'on la visite, et qu'ainsi elle
+auroit bientôt perdu toute sa beauté et tout son éclat quand elle seroit
+entre vos mains.»
+
+Dans une autre lettre qu'il écrit de la même ville à une dame, il lui
+donne cette commission:
+
+«Dites à Mme de la L. G. que si elle étoit en Angleterre, elle ne seroit
+pas la reine des tétons, comme elle l'est à..., puisque les dames de ce
+royaume en ont qui ne cèdent point aux siens. La différence qu'il y a,
+c'est qu'on patine les tétons d'Angleterre dès la première connoissance,
+et sans grande cérémonie; que pour elle, elle ne laisse pas seulement
+voir les siens après six mois de soins et de services.»
+
+Pavillon, dans un endroit de sa lettre à Mme Pelissari, sur le voyage de
+sa fille en Angleterre, dit:
+
+«Le défunt pays de Cocagne, de très-heureuse mémoire, ne valoit guère
+mieux que celui-ci.
+
+ Le Prince[11] qu'en sa cour peu de monde environne,
+ Peut être aisément abordé:
+ Il n'est presque jamais gardé
+ Que par le seul respect qu'on porte à sa personne.
+ On le voit aussitôt qu'on vous a présenté.
+ Malgré l'éclat de la couronne,
+ Celui que sa grandeur étonne,
+ Est rassuré par sa bonté.
+ Ses sujets sont dans l'opulence.
+ Ses champs produisent à souhait,
+ Et vous ne sentez sa puissance
+ Que par les biens qu'elle vous fait.
+ La terre sans impôts et le ciel sans colère
+ Nous laissent en repos jouir de notre bien.
+ Le Roi ne lève presque rien,
+ Et Jupiter n'y tonne guère.
+ Tout votre sexe à cheveux blonds,
+ À teint de lys, à beau corsage,
+ Magnifique en habits, en train, en équipage,
+ Fait marcher devant son visage
+ Une infinité de tétons.
+
+[Note 11: C'est Charles II, prince aussi salace, aussi voluptueux
+que nos Henri III, Charles VII, Henri IV et François Ier. Le C. Mercier,
+auteur de l'An 2440, et de tant de drames, a fait sur ce prince un drame
+intitulé: _Charles II dans un certain lieu_. Il n'a point avoué cette
+production, mais nous assurons qu'elle est de lui. Un nommé _Brémont_ a
+fait l'histoire scandaleuse des amours de ce roi avec Miladi
+Castelmaine, duchesse de Keweland et la femme de Milord Canduche, dans
+un petit roman allégorique intitulé _Hattigé, ou les amours du roi de
+Tamaran_, Cologne 1676. 1 vol. in-16 de 120 pages. Le duc de Buckingham
+joue un beau rôle dans cette chronique scandaleuse.]
+
+Il dit encore dans un autre endroit de la même lettre:
+
+«Nous mènerons au premier jour votre fille à Windsor; c'est un lieu
+charmant où le bon roi Stuart tient maintenant cour plénière. Elle
+prétend lui demander un don, qui est la réformation des tétons dans
+toute l'étendue de son royaume, suivant le modèle qu'elle lui en
+présentera elle-même. Vous saurez, madame, qu'en tous ces quartiers, la
+plupart des tétons, sous prétexte qu'ils sont blancs comme neige, n'ont
+point honte d'aller tout nuds dans les rues, et qui plus est, de se
+baiser hardiment à la vue de tout le monde, sans crainte de Dieu et des
+hommes. Les gens du pays pensent que cette réforme sera facile à
+établir, parce que les tétons de ce territoire étant de leur nature fort
+dociles, on peut aisément les réduire à en faire tout ce qu'on voudra.»
+
+Avant de finir, je dois encore dire que j'ai vu dans des couvents toutes
+sortes de beaux tétons; il est vrai que ce n'est que la figure et non la
+forme. J'y ai trouvé des tétons naissants et des tétons formés, où rien
+ne manquait que la permission de les voir à découvert et de sentir s'ils
+étaient durs. Peindrai-je ces touffes de lys et de roses mollement
+comprimées par la guimpe, ces sphères de neige qui croissaient à l'ombre
+des autels, et qui ne pouvaient être accessibles qu'aux doigts sacrés du
+pater et du directeur, ou d'un jardinier discret et charmant? Comme je
+ne produirais rien de neuf et de piquant dans ces descriptions d'objets
+que j'ai toujours aimés, et que j'ai très-rarement vus, tels que ma
+muse les voudrait peindre, je crois plus sage de renvoyer mon lecteur,
+pour qu'il n'y perde rien, aux friandes peintures qu'en ont faites
+Voltaire, dans sa _Pucelle_, Piron, Dorat, et autres poëtes érotiques
+modernes, et je me borne à dire: vive un sein de couvent!...
+
+Ceci me remet dans l'esprit un sonnet pour une belle personne, à qui les
+tétons étaient venus depuis qu'elle était religieuse.
+
+ Ci gisent les tétons de la jeune Sylvie,
+ Pitoïable passant, admire et plains leur sort.
+ Ils n'avoient pas du ciel encor reçu la vie,
+ Qu'on les avoit déjà destinez à la mort.
+
+ On ne consulta point leur naturelle envie:
+ Leur courroux fait bien voir qu'on leur a fait grand tort,
+ Puisqu'on les voit s'enfler contre la tyrannie
+ Qui les mit au tombeau par un barbare effort.
+
+ Mais ce qui te fera plaindre leur aventure,
+ C'est qu'on les tient vivants dans cette sépulture,
+ Comme étant convaincus d'un horrible forfait.
+
+ Tout leur crime pourtant n'est que d'avoir sçu plaire;
+ Peur moi, ne voyant pas quel mal ils avoient fait,
+ Je crois qu'on les punit de ceux qu'ils pouvoient faire.
+
+Si des Européennes nous passons aux femmes de la race, où plutôt de
+l'espèce nègre, nous leur trouverons généralement une disposition
+extrême à la lasciveté et même une conformation particulière dans les
+organes sexuels. Comme cette espèce d'hommes est moins propre au
+développement des facultés intellectuelles, elle est aussi plus disposée
+aux fonctions purement animales, et la plupart des nègres sont _bene
+mutonati_. Les négresses paraissent conformées dans la même proportion,
+de sorte que les européens les trouvent fort larges. Toutes ont, comme
+on sait, une gorge très-volumineuse, et bientôt molle et pendante, même
+dans les climats où l'on ne peut pas en accuser la chaleur
+atmosphérique, comme au nord des États-Unis; mais ce qui surtout les
+distingue de la race blanche, c'est le prolongement naturel des nymphes,
+et quelquefois du clitoris, bien moins commun chez les femmes blanches
+que chez les négresses.
+
+Les femmes cafres, les mieux constituées de toutes les négresses, et les
+plus fortes, ont un caractère plus ardent et plus viril; les négresses
+joloffes et mandingues, sans être aussi bien formées, et avec un sein
+plus tombant, une transpiration d'odeur porracée, paraissent cependant
+encore agréables dans leur première jeunesse. Leur peau est douce et
+soyeuse comme le satin. Mais elles déploient une lubricité et des
+passions inouïes dans nos climats; elles semblent porter dans leur sein
+enflammé tous les feux de l'Afrique. Pour exciter davantage l'ardeur de
+l'homme, les Égyptiennes coptes se frottent les parties sexuelles de
+parfums stimulants, comme d'ambre, de civette et de musc. Aussi, un
+proverbe des Turcs dit: Prends une blanche pour les yeux; mais pour le
+plaisir, prends une Égyptienne, ou une négresse.
+
+On convient cependant que les négresses sont excellentes mères; la
+plupart ont beaucoup de lait; les mamelles des Égyptiennes étaient
+renommées par leur volume extrême dès le temps de Juvénal:
+
+ _In Meroe crasso majorem infante papillam._
+
+A la Nouvelle-Hollande, la parure d'une belle Malaie consiste toute en
+sa peau, étrangement bariolée de piqûres de diverses couleurs, et c'est
+ce qu'on appelle _tatouage_; toutes ont soin d'assouplir leur peau par
+le bain et par l'huile de coco; elles se vêtissent de tissus de
+feuillage ou d'écorces légères qui ne dérobent point la vue de leurs
+charmes secrets. Elles n'ont pas toujours la gorge pendante des
+négresses; elle est même assez petite dans les premiers temps de la
+puberté.
+
+Ne pensons pas que les négresses soient toujours dépourvues de beauté;
+elles ont aussi leur prix. On en a vu de fort jeunes, ayant un nez droit
+et presque aquilin, et avec une figure qui, si nous en exceptons la
+couleur, n'aurait pas déparé une Européenne: on n'y remarquait point
+cette vilaine moue des Éthiopiens; l'avancement des joues y était
+presque insensible, et le sein, parfaitement placé, n'y était pas
+flasque et pendant, mais d'une agréable rotondité. Considérons ces
+lèvres d'un rouge éclatant de corail sur un fond d'ébène soyeux, cette
+petite bouche, qui ressemble à un bouton vermeil et frais de rose, posé
+sur du velours noir; contemplons cette double rangée de perles
+brillantes, ces grands et beaux yeux pleins de feu; admirons la douce
+aménité du visage, cette suavité des formes, cette voluptueuse
+flexibilité, ce balancement, cette souplesse dégagée de tous les
+mouvements, bien plus sensible dans les négresses que dans les
+Européennes; et s'il m'était permis de peindre tant d'autres attraits
+qui ne sont ordinairement couverts, dans ces esclaves infortunées, que
+du voile de la simple innocence, à combien de femmes laides, quoique
+blanches, paraîtraient-elles préférables pour des yeux non prévenus!
+
+[Illustration]
+
+[Illustration]
+
+
+
+
+CHAPITRE VII.
+
+DE L'ÉLOQUENCE DES TÉTONS.
+
+
+Il y a eu deux Phryné, outre celle qui est célèbre par la statue d'or
+massif qu'elle donna au temple de Jupiter, avec cette inscription: _De
+l'intempérance des Grecs_; et les murailles de Thèbes qu'elle avait
+rebâties. Il ne faut pas confondre cette illustre courtisane grecque
+avec une autre Phryné que l'on avait surnommée ainsi d'un mot grec, qui
+signifie _crible_, parce qu'elle criblait et ruinait ses amants, sans en
+être plus riche; comme font presque toutes celles que nous voyons
+aujourd'hui briller sur les mille et un théâtres de notre luxurieuse
+capitale.
+
+Une troisième (celle dont je veux parler), fut accusée d'impiété par les
+Athéniens, et traduite devant l'aréopage, pour subir la peine capitale
+que méritait ce crime. Les juges, impassibles comme la loi, admiraient
+sans en être émus, les grâces les plus attrayantes, la toilette la plus
+voluptueusement raffinée, des yeux qui avaient fait tomber aux pieds de
+la nymphe les personnages les plus distingués, les philosophes, les
+sages et les chefs de la République. L'auditoire était nombreux. La
+pitié, le tendre intérêt se peignait sur tous les visages, et rien ne
+pouvait soustraire la courtisane au supplice; la déposition des nombreux
+témoins ne laissait plus d'espoir, le crime était avéré, les juges
+allaient, en gémissant tout bas, prononcer la redoutable sentence;
+l'avocat de l'accusée avait épuisé toutes les ressources de l'art
+oratoire, mais toute son éloquence était perdue. Tout à coup une idée
+lumineuse et hardie, produite par la tentative la plus désespérée,
+exalte sa tête, et lui fournit un moyen de gagner sa cause. Il découvre
+brusquement le sein de sa belle cliente, et ce spectacle inattendu a
+produit dans toute l'assemblée une espèce de délire; on croit voir Vénus
+elle-même, qui sous les traits d'une mortelle, a quitté Chypre et
+Amathonte, pour recueillir l'hommage des Grecs, et demander la grâce de
+l'accusée. La gravité des juges cède au charme vainqueur de
+l'étonnement, du plaisir et de l'admiration. La bouche ne trouve pas
+d'expression pour rendre le sentiment, mais le silence et l'avidité des
+regards, un cri général d'intérêt et de compassion, tout complète le
+triomphe de Phryné. Elle était suppliante, éplorée, courbée sous le
+poids de l'improbation: un sein paraît, la chance tourne, elle commande
+en souveraine, elle asservit tout ce qui porte les yeux sur elle: «Eh
+bien, ajoute le défenseur, profitant du succès de son stratagème, si
+elle est coupable, qui de vous, Athéniens, osera condamner à la mort ce
+que la nature a formé de plus beau? Osez regarder celle dont vous voulez
+verser le sang, et si vous le pouvez, oubliez que vous êtes hommes.» Il
+dit, et l'Aréopage, quittant son auguste caractère, a repris unanimement
+les sentiments d'humanité. Phryné est déclarée innocente, et portée chez
+elle en triomphe.
+
+Cette manière de justifier n'est pas encore abolie, dit à ce sujet le
+galant Saint-Evremont; il y a bien de belles femmes, coupables quand on
+ne les voit pas, qui deviennent innocentes aussitôt, quand on les voit.
+Souvent même, les juges punissent les femmes pour un certain crime
+qu'ils voudraient bien avoir commis avec elles.
+
+Ceux de mes lecteurs qui aiment la poésie, liront avec plaisir cette
+même anecdote, racontée avec plus de grâce par le citoyen Deguerle, déjà
+cité.
+
+
+PHRYNÉ DEVANT L'ARÉOPAGE.
+
+ Phryné plaidoit devant l'Aréopage;
+ Si l'on en croit plus d'un docte écrivain[12].
+ Grave parut le cas en arbitrage:
+ Il s'agissait du service divin.
+ «Quoi! de Vesta (criait un peuple nain)
+ Oser railler l'immortel pucelage!
+ Et des époux rire au nez de Vulcain!
+ Au feu, l'impie! au feu! de par Jupin.»
+ La gent dévote au sénat faisait rage:
+ La belle Grecque y perdit son latin.
+
+ Vous connaissez ces deux formes jumelles
+ Qu'en demi-globe, à l'ombre de ses ailes,
+ L'Amour assied sur un trône pareil:
+ Pommes de neige où couvent étincelles:
+ La gaze y voit, loin de l'oeil du soleil,
+ Poindre à quinze ans la fraise au teint vermeil.
+ Froide raison, à genoux devant elles!
+ Que de procès, en maint sage conseil,
+ N'ont point gagné ces avocats femelles?
+ Si plaideuse onc en connut le talent,
+ C'était la nôtre. Or ça (dit la rusée,
+ Quand elle vit sa rhétorique usée):
+ «Mettons en jeu mon dernier argument.»
+ Et la voilà qui garde un long silence....
+ Puis on la voit et sourire et rougir;
+ Couleur de rose! équivoque nuance!
+ Peins-tu la honte, ou peins-tu le plaisir?
+ Sa main distraite a dérangé la gaze
+ Où se cachaient les lys d'un cou charmant.
+ Grâce au hasard d'un second mouvement,
+ L'aiguille d'or a glissé de sa base:
+ Adieu le voile au tissu transparent,
+ Fardeau léger dont se charge le vent!
+ Que d'attraits nuds! un feu subit embrase
+ Et spectateurs et sénat en extase.
+ Que ne dit pas à l'oeil qui s'y connaît,
+ D'un joli sein le langage muet?
+ Bavards diserts, gens à brillante emphase,
+ Vous n'avez point le charme de sa phrase!
+ Pour une pomme on vit Pergame en feu;
+ Au Paradis, Eve pour une pomme
+ Sonna l'alarme entre le diable et Dieu.
+ Grâce à Phryné, nos Rhadamante, en somme,
+ Pour une seule en apercevaient deux.
+ Bien qu'on soit juge, on n'en est pas moins homme;
+ Et c'est pour voir, enfin, qu'on a des yeux.
+ Bref: en dépit et de Vesta la vierge,
+ Et du bon prêtre, et du pauvre Vulcain,
+ Phryné dicta le véto du scrutin.
+ Brûlé ne fut, pour cette fois qu'un cierge:
+ Cierge en l'honneur du bienheureux _trio_
+ Mis hors de cour au milieu des _bravo_.
+ Gens timorés diront: «L'Aréopage
+ En ce jour-là fit nargue à l'équité.»
+ Mais qui de nous aurait été plus sage?
+ Il oublia les dieux pour leur image:
+ Est-on de marbre auprès de la beauté?
+
+ Or maintenant, gentes Parisiennes,
+ A l'oeil coquet, au teint frais et fleuri:
+ Galant essaim, amour d'une autre Athènes,
+ Mais qui jamais de Vesta n'avez ri:
+ Venez à moi! venez, vierges pudiques,
+ Douces mamans, et vous femmes uniques,
+ Honneur d'un père, ou trésor d'un mari!
+ Je veux juger vos fredaines honnêtes....
+ Quels bras mignons! Quel sein!... Pour m'émouvoir,
+ Chastes Vénus, restez comme vous êtes:
+ Pas n'est besoin de jeter le mouchoir.
+
+[Note 12: Quintilien, Aristote, etc.]
+
+La gorge de Phryné a sans donte servi de modèle au charmant poëte latin,
+Jérôme Amalthée, dans les vers suivants. L'on ne peut rien ajouter à la
+délicatesse de cette petite pièce:
+
+ _Fert nitido duo poma sinu formosa Lycoris
+ Illa eadem nitido fert duo fraga sinu.
+ Sunt mammæ duo poma; duo sunt fraga papillæ:
+ Poma nives vincunt, fraga colore rosas.
+ Hæc amor exugens: valant, ait, ubera matris!
+ Dulcius his manat nectar ab uberibus._
+
+La réponse suivante, remplie d'innocence et de naïveté, prouve que les
+femmes connaissent dès leur plus bas âge, tout le pouvoir de leurs
+attraits naissants, et que la nature sage et prévoyante a mis en elles
+un instinct infaillible pour juger de leurs effets. Or, ces effets n'ont
+lieu que quand leur gorge est à moitié ou tout à fait découverte: nous
+n'apprendrons jamais aux femmes à tirer parti de leurs charmes.
+
+ Agnès, d'un oeil content, voyait déjà paroître
+ Ses jeunes et tendres appas;
+ Quinze printemps l'avaient vu croître,
+ Et son coeur soupirait pour le jeune Lycas.
+ Un jour, à sa maman austère,
+ Agnès parut, le sein à demi-nu,
+ Pourquoi n'avoir point de fichu?
+ Lui dit-elle d'un ton sévère.
+ Agnès répond, en soupirant tout bas,
+ De beaux habits pour moi, vous êtes trop avare,
+ Et si je cache mes appas,
+ Avec quoi voulez-vous, maman, que je me pare?
+
+Anacréon dit que pour être beau, le sein ne doit pas être plus gros que
+deux oeufs de tourterelle; le citoyen Mercier (de Compiègne) t. III des
+_Soirées d'Automne_, p. 100, nous donne un tableau gracieux d'une gorge
+de cette espèce, dans le conte suivant, intitule: _la Fraise et l'Oeuf_:
+
+ De fraises fraîchement cueillies,
+ Hélène portait un panier;
+ La rosée y faisait briller
+ Mille perles des plus jolies.
+ Hélène, encore à ses quinze ans,
+ Autant que ses fruits pouvait plaire
+ Aux connaisseurs les plus friands;
+ Par-ci, par-là, notre laitière
+ Avait rangé de très-gros oeufs,
+ Frais pondus, blancs comme batiste,
+ Et dont l'éclat, sur le fruit amétiste,
+ Formait un tout harmonieux.
+ Pour plaire à l'engageante Hélène,
+ Qui les offrait d'un air si gracieux,
+ En la lorgnant, de sa corbeille pleine,
+ Au hasard je tire un d'entre eux
+ Que cinq doigts entouraient à peine,
+ Que vois-je! Effet délicieux!
+ Sur le gros bout une fraise écrasée,
+ Et là, par le hasard placée,
+ Sur l'aréole carminée
+ Forma ce bouton radieux
+ D'où distille l'humeur lactée,
+ Imprégné de l'onde sucrée.
+ L'ensemble enfin rendait au mieux
+ Un sein naissant, digne des dieux.
+ Je contemplais, avec avidité,
+ Cette image simple et fidèle
+ Des sources de la volupté;
+ Et voulant mettre en parallèle
+ L'image et la réalité,
+ Près des tétons dévoilés de la belle,
+ Qui se prêtait, en riant, à ce jeu,
+ L'oeuf fut placé; mais si la pastourelle
+ Y gagna, ce fut de bien peu.
+
+
+L'ORIGINE DU PETIT BOUT DES TÉTONS.
+
+ Au temps passé n'avoit, à ce qu'on dit,
+ Femme au tetin ce rouge boutonnet,
+ Et Priapus qui étoit en crédit,
+ Oreilles eut sous son petit bonnet;
+ Mais quelque dieu les lui coupa tout net,
+ Puis en forma la retonne gentille
+ Que fait aller mainte superbe fille,
+ Sentant qu'elle a du mâle la dépouille.
+ Et de là vient que tous les coups que fouille
+ Au sein de son amie un amoureux ardent,
+ Ce bon galant frémit incontinent
+ De grands plaisirs, et s'étend à merveilles,
+ Comme disant: je prendrai mes oreilles.
+
+GRÉCOURT.
+
+Voltaire, dans _Zadig_, nous donne un exemple charmant de l'éloquence
+des tétons.
+
+La jeune veuve Almona, sauvée du bûcher par Zadig, lui en avait voué
+beaucoup de reconnaissance. Zadig, accusé de crimes imaginaires par des
+ministres jaloux de son influence, fut jugé et condamné à son tour à
+être brûlé à petit feu. Almona résolut de le tirer de là. Elle roula son
+dessein dans sa tête, sans en parler à personne. Zadig devait être
+exécuté le lendemain; elle n'avait que la nuit pour le sauver: voici
+comme elle s'y pris, en femme charitable et prudente.
+
+Elle se parfuma; elle releva sa beauté par l'ajustement le plus riche et
+le plus galant, et alla demander une audience secrète au chef des
+prêtres des étoiles. Quand elle fut devant ce vieillard vénérable, elle
+lui parla en ces termes: «Fils aîné de la Grande-Ourse, frère du
+Taureau, cousin du Grand-Chien (c'étaient les titres de ce pontife), je
+viens vous confier mes scrupules. J'ai bien peur d'avoir commis un péché
+énorme, en ne me brûlant pas dans le bûcher de mon cher mari. En effet,
+qu'avais-je à conserver, une chair périssable, et qui est déjà toute
+flétrie.» En disant ces paroles, elle tira de ses longues manches de
+soie, ses bras nus d'une forme admirable et d'une blancheur
+éblouissante. «Vous voyez, dit-elle, le peu que cela vaut.» Le pontife
+trouva dans son coeur que cela valait beaucoup. Ses yeux le dirent, et
+sa bouche le confirma; il jura qu'il n'avait vu de sa vie de si beaux
+bras. «Hélas! lui dit la veuve, les bras peuvent être un peu moins mal
+que le reste; mais vous m'avouerez que la gorge n'était pas digne de mes
+attentions.» Alors elle laissa voir le sein le plus charmant que la
+nature eût jamais formé. Un bouton de rose sur une pomme d'ivoire n'eût
+paru auprès que de la garance sur du buis, et les agneaux sortant du
+lavoir auraient semblé d'un jaune brun. Cette gorge, ces grands yeux
+noirs qui languissaient en brillant doucement d'un feu tendre, ces joues
+animées de la plus belle pourpre, mêlée au blanc de lait le plus pur, ce
+nez, qui n'était pas comme la tour du mont Liban, ces lèvres, qui
+étaient comme deux bordures de corail renfermant les plus belles perles
+de la mer d'Arabie, tout cela ensemble fit croire au vieillard qu'il
+avait vingt ans. Il fit, en bégayant, une déclaration tendre. Almona, le
+voyant enflammé, lui demanda la grâce de Zadig.
+
+«Hélas! dit-il, ma belle dame, quand je vous accorderais sa grâce, mon
+indulgence ne servirait de rien, il faut qu'elle soit signée de trois
+autres de mes confrères.--Signez toujours, dit Almona.--Volontiers, dit
+le prêtre, à condition que vos faveurs seront le prix de ma
+facilité.--Vous me faites trop d'honneur, dit Almona, ayez seulement
+pour agréable de venir dans ma chambre après que le soleil sera couché,
+et dès que la brillante étoile _Sheat_ sera sur l'horizon; vous me
+trouverez sur un sofa couleur de rose, et vous en userez comme vous
+pourrez avec votre servante.»
+
+Elle sortit alors, emportant avec elle la signature, et laissa le
+vieillard plein d'amour et de défiance de ses forces. Il employa le
+reste du jour à se baigner; il but une liqueur composée, de la cannelle
+de Ceylan, et des précieuses épices de Tidor et de Ternate, et attendit
+avec impatience que l'étoile _Sheat_ vint à paraître.
+
+Cependant, la belle Almona alla trouver le second pontife. Celui-ci
+l'assura que le soleil, la lune et tous les feux du firmament n'étaient
+que des feux follets, en comparaison de ses charmes. Elle lui demanda la
+même grâce, et on lui proposa d'en donner le prix. Elle se laissa
+vaincre, et donna rendez-vous au second pontife au lever de l'étoile
+_Algenib_. De là, elle passa chez le troisième et chez le quatrième
+prêtre, prenant toujours une signature, et donnant un rendez-vous
+d'étoile en étoile. Alors elle fit avertir les juges de venir chez elle
+pour une affaire importante. Ils s'y rendirent: elle leur montra les
+quatre noms, et leur dit à quel prix les prêtres avaient vendu la grâce
+de Zadig. Chacun d'eux arriva à l'heure prescrite; chacun fut bien
+étonné d'y trouver ses confrères, et plus encore d'y trouver les juges
+devant qui leur honte fut manifestée. Zadig fut sauvé.
+
+Voltaire, _Zadig_.
+
+[Illustration]
+
+[Illustration]
+
+
+
+
+CHAPITRE VIII.
+
+MOYEN DE CONSERVER LA GORGE.
+
+
+Voici, sexe charmant, le chapitre qui doit faire auprès de toi la
+fortune de cet éloge. Que nous servirait, mesdames, d'avoir chanté la
+plus belle partie de vous-même, si notre art ne vous instruisait encore
+à la conserver dans toute sa fraîcheur.
+
+Plume aimable et facile du chantre badin des _Perruques_[13], viens pour
+un moment sous mes doigts; et que les grâces, en nous lisant, croyent
+encore lire quelques pages du docteur Akerlio.
+
+[Note 13: _Éloge des Perruques_, enrichi de notes plus amples que le
+texte; par le docteur Akerlio (Deguerle). Paris, an VII, 1 vol. in-12.
+
+Cet _Éloge_ badin a trouvé grâce auprès des savants comme auprès des
+dames, malgré les traits malins qu'il s'est permis de décocher contre
+les têtes à perruques de toute espèce. Loué par tous les journaux sans
+en excepter la _Décade_, il n'a pu fléchir le courroux du terrible
+_Victor-Campagne_, dont l'oeil perçant a vu tout seul, dans cet élégant
+badinage, une horrible contre-révolution, Voy. le _Flambeau_, du 18
+floréal an VII.]
+
+Mais déjà mon sujet m'inspire! Or, écoutez, mesdames; j'ai toussé, je
+commence.
+
+La parure est à la beauté ce que l'esprit est au savoir. On ne se plaît
+guère sans un peu de coquetterie; pour retenir dans ses bras son céleste
+époux, Junon même eut besoin un jour de la ceinture de Vénus. Que l'art
+de la toilette soit donc votre première étude; mais anathème éternel à
+ces corps meurtriers, où la taille la plus svelte perd dans sa prison de
+baleine son élégance naturelle! Un simple corset suffit à la
+conservation des formes. Qu'une bande légère, fixée vers la partie
+moyenne de la poitrine, embrasse mollement la région inférieure de
+chaque hémisphère, en soutienne adroitement le poids sur un support
+invisible, et laisse entrevoir à l'oeil éveillé du désir, cette
+mappemonde mobile, sur laquelle l'imagination la plus froide aime à
+voyager quelquefois[14]. Gloire à toi, docte et galant Alphonse[15]! Le
+premier, tu proclamas courageusement la liberté des gorges, leurs
+amants te doivent une statue; et j'ai placé la tienne dans mon boudoir.
+
+[Note 14: Gentil Bernard a dit (_Art d'aimer_, ch. II):
+
+ Qu'un sein trop humble à sa place arrêté
+ Offre un amour de son frère écarté.]
+
+[Note 15: Alphonse Leroi, médecin de la Faculté de Paris, a publié,
+en 1772, de savantes _Recherches sur l'habillement des femmes et des
+enfants_. L'auteur de cet ouvrage utile s'y déchaîne avec une sainte
+colère contre l'usage des _corps baleinés_, dont l'usage était général à
+l'époque où il écrivait, et qu'un caprice de la mode menace de
+ressusciter aujourd'hui.]
+
+Une _douce chaleur_, en dilatant les solides, peut aider au
+développement d'un sein virginal. Une belle gorge aime à braver demi-nue
+l'action d'une température modérée. Mais le froid est son ennemi mortel.
+Qu'elle en évite soigneusement les rigoureuses atteintes; ou bientôt, au
+lieu de cette élastique fermeté qui fait le premier charme d'un sein de
+lys, elle n'offrira plus au doigt délicat de l'amour, qu'une solidité
+squirreuse, éternel écueil des désirs.
+
+Ce sein trop humble n'ose, dites-vous, se montrer au jour. Eh bien!
+connaissez donc les secrets du génie. Le _fluide électrique_ commande à
+la foudre même; il peut, à la voix d'un praticien habile, imprimer aux
+vaisseaux sanguins, une turgescence favorable. Souffrez, mesdames, qu'on
+vous _magnétise_: le docteur Mesmer n'a point d'égal dans l'art de
+donner à certains charmes une expansion délicieuse.
+
+Le malade résiste-t-il à la _verge_ électrique, à la magie du _baquet_;
+la mécanique vient pour vous au secours de la physique. Que dans sa
+double cavité, une officieuse _ventouse_ embrasse, sans les blesser, vos
+deux globes d'albâtre. L'air ainsi raréfié, hâtera sans douleur le
+développement de la gorge rebelle.... C'est peu: un contact indiscret
+vient-il à déformer par accident le bouton de vos roses jumelles?
+retournez, mesdames, à l'heureuse _ventouse_: le bouton ranimé reprendra
+bientôt sa forme et sa fraîcheur.
+
+Belles sans expérience, vous qui pleurez ingénuement à votre quinzième
+année, l'absence du plus doux attrait dont se pare un buste féminin,
+consolez-vous! il n'est point de mal sans remède. Plus d'une prêtresse
+de Vénus tient magasin de _seins postiches_. Vous pouvez avoir à vil
+prix la plus belle gorge du monde, dans une paire de _cartons bombés_.
+
+Et vous, honneur de votre sexe, femmes intéressantes qui voulez unir en
+même temps le plaisir d'être épouses et l'orgueil d'être mères, ne
+craignez rien: à l'aide d'une petite ruse, on est maintenant à la fois
+et _nourrice_ et _jolie_. Déjà l'oeil marital commence-t-il à lire avec
+peine les ravages de l'allaitement sur un mamelon déprimé? voyez la
+_gomme élastique_ se façonner pour vous en chapeau complaisant[16].
+L'aiguille l'a criblé tout exprès de légers tuyaux capillaires, pour
+fournir un libre passage au lait nourricier. Sous la _forme_ couleur de
+rose dont il est hermétiquement couvert, le sein maternel cache ainsi
+sans péril sa passagère laideur; et, par cette innocente imposture, il
+satisfait à la fois la nature et l'amour.
+
+[Note 16: Ce _chapeau_ s'appelle, en termes techniques, _bout de
+sein_.]
+
+De graves professeurs d'_hygiène_ ne voient de salut pour les belles
+gorges, que dans un régime d'anachorète. A les entendre, il n'est pour
+nos Vénus qu'un moyen sûr de conserver leurs charmes: c'est de n'en
+faire aucun usage[17]. Le jeûne, selon eux, est encore une recette
+unique: pour éterniser la beauté, vive (disent-ils) l'art de mourir de
+faim.
+
+[Note 17: Comme si la gorge la plus _respectable_ ressemblait aux
+cantiques de feu Pompignan dont Voltaire a dit quelque part:
+
+ Sacrés ils sont, car personne n'y touche.]
+
+Quant à nous, indulgents casuistes, nous sentons combien la chair est
+fragile. Cette _abstinence_ surnaturelle n'appartient qu'aux purs
+esprits; _de tout un peu_, c'est la devise des corps. Le plus grand des
+philosophes, Épicure, fut par excellence l'apôtre de la volupté, et
+notre rigorisme, mesdames, ne vous défend que l'excès.
+
+Ainsi, bien que l'eau soit, d'après Hippocrate, la boisson conservatrice
+des belles formes, nos ordonnances moins rigides vous permettent l'usage
+modéré des liqueurs[18]. Nous n'aurons pas la cruauté d'interdire aux
+dames le café du matin[19]; mais que le sucre et le lait adroitement
+mélangés, lui servent toujours de correctif. Funeste au système nerveux,
+l'abus du _café à l'eau_ a desséché plus d'un joli sein[20].
+
+[Note 18: Même spiritueuses et fermentées: le _trop_ seul est de
+trop.]
+
+[Note 19: Il y aurait presque autant d'inhumanité à défendre au beau
+sexe le _thé au lait_; ainsi, nous lui en permettons l'usage, d'autant
+plus que l'habitude qui, comme on sait, est une seconde nature, a mis,
+grâce à la mode, presque tous nos estomacs _à l'anglaise_.]
+
+[Note 20: Quelle que soit notre indulgence, nous devons en
+conscience inviter les poitrines délicates à substituer à l'usage du
+_thé_ et du _café_, celui du _chocolat_ ou du _cacao_. Les liqueurs
+proprement dites peuvent être, dans le même cas, remplacées avec succès
+par le vin et la bière; mais le vin doit être _généreux_, et la bière de
+bonne qualité. Parmi les aliments les plus amis de la _gorge_ sont les
+végétaux, les substances _amylacées_, riz, truffes, etc. Les ragoûts
+trop épicés ne sont pas sans périls; ainsi que les acides, ils minent
+l'embonpoint, et produisent enfin la maigreur, hideuse ennemie de la
+beauté.]
+
+Pourquoi faut-il que le plaisir ait aussi ses regrets? Sexe enchanteur!
+quel feu n'allume pas dans nos sens le seul aspect de tes pommes de
+neige. Il nous faudrait mourir, si les flammes dont tu nous consumes ne
+te brûlaient toi-même! Ah! pour le bonheur de l'homme, succombe
+quelquefois aux douces tentations que tu fais naître! mais, pour
+l'honneur de tes charmes, résiste plus souvent encore à l'attrait du
+désir! La fleur des champs que le papillon se plaît à baiser,
+s'effeuille enfin sous l'aile de l'insecte brillant: ainsi la fleur d'un
+beau sein finit par se faner sous les caresses d'un indiscret amour. La
+rose de la volupté ressemble à Titon dans les bras de l'Aurore: chaque
+baiser la vieillit d'un lustre[21], et le bouton du matin, le soir
+n'est plus qu'une épine[22].
+
+[Note 21: En profonds commentateurs, n'oublions pas de dire ici: «Il
+y a lustre et lustre; le lustre vulgaire est de cinq années, celui de la
+rose est de cinq minutes.»]
+
+[Note 22: C'est ce qui fait dire à je ne sais quel poëte, en parlant
+de je ne sais quelle nymphe:
+
+ Lise, à quinze ans, avait un sein superbe;
+ La pauvre Lise, à vingt ans, n'en a plus.
+ Pourquoi, dit-on?--C'est qu'aux chemins battus
+ On ne vit jamais croître l'herbe.]
+
+Vous, dont la fougue égarée poursuit la jouissance au péril de vos
+charmes! ah! du moins, quand vos sens sont calmés, hâtez-vous de réparer
+en secret les outrages du plaisir. Autrefois tributaires du génie
+monacal, la botanique et la chimie opposaient au développement des
+gorges nonnettes le froid _nénuphar_ et le mystique _agnus castus_.
+Libres aujourd'hui, ces deux sciences aiment à préparer de concert
+d'utiles restaurants aux seins débilités. Connaissez l'art des
+_frictions_ réparatrices. Elles entretiennent dans sa fraîcheur le satin
+de la peau; elles rendent aux formes affaissées leur souplesse et leur
+ressort; par elles, les lys disparus sous le feu du baiser, ont retrouvé
+bientôt leur première blancheur. Salut, savante Tolleret[23]! La
+renommée de tes _pommades_ a volé des bords de la Seine aux rives du
+Mississipi. Le sein de la belle Poppée[24] n'eut jadis pour ressource
+que le _bain de lait d'ânesse_; les gorges égyptiennes ne connaissent
+que _l'hermodacte_[25]. Mais ces recettes merveilleuses, les tiennes les
+ont éclipsées. C'est à ta voix que, pour la sécurité d'un sein galant,
+l'olive et l'amande offrent à la fois leur huile adoucissante; que la
+pimprenelle et la rose prodiguent leur essence aromatique; que la
+cannelle et la fleur d'orange s'unissent à la crême en pâtes odorantes,
+et s'étendent en _masque_ officieux[26] sur plus d'un sein décrépit.
+
+[Note 23: Madame Tolleret, célèbre par ses découvertes dans l'art de
+restaurer les gorges, du temps de Mercier.]
+
+[Note 24: Poppée, impératrice romaine, seconde femme de Néron. Sa
+Majesté tigre éventra d'un coup de pied sa royale épouse, sans respect
+pour sa belle gorge.]
+
+[Note 25: L'hermodacte est l'_iris tuberosa_ des botanistes.]
+
+[Note 26: Nous ne parlons point ici par métaphore. La grande
+toilette exige aujourd'hui deux masques; un, comme on sait, sur le
+visage, l'autre sur la poitrine.]
+
+Non, tu n'auras point fait d'ingrates, ô toi, dont le génie tutélaire a
+bien mérité des gorges! Permets que leur chantre, en terminant leur
+éloge, te proclame leur bienfaitrice. Un grain de leur encens t'est dû.
+Puisse ton nom briller désormais en lettres d'or dans les fastes de la
+beauté! Puisse, éternisée par la reconnaissance féminine, ta mémoire ne
+périr qu'avec le dernier téton!
+
+[Illustration]
+
+
+
+
+CHAPITRE IX.
+
+RECETTES VIRGINALES.--MOYENS A EMPLOYER POUR EFFACER LES RIDES ET
+DIMINUER L'AMPLEUR DU VENTRE ET DE LA GORGE ET DE LA FAIRE CROÎTRE A
+CELLES QUI SONT PRIVÉES DE CE BEL ORNEMENT.
+
+
+Quelquefois, après la grossesse, la gorge et le ventre restent flétris
+et plus volumineux. L'art offre ici plusieurs moyens: ils sont ou
+mécaniques, ou thérapeutiques; les premiers consistent dans
+l'application de bandelettes pour le sein, et de larges bandes sur le
+ventre, aussitôt après les couches, avec la précaution de les resserrer
+graduellement, pour laisser à l'organe de la génération les moyens de
+contraction qui lui sont alors nécessaires. L'habit européen est, à cet
+effet, plus favorable aux femmes que la veste asiatique qui, ne
+contenant point les intestins, permet à la texture molle de leurs
+enveloppes, d'acquérir des dimensions énormes. Plus soigneuses de leur
+gorge et de leurs pieds, les Géorgiennes, les Otaïtiennes, les
+Chinoises, les Bayadères captivent leur gorge enfantine dans un étui,
+qu'elle ne peut dépasser[27], et emprisonnent, dès le berceau, dans une
+_babouche_ étroite, leur pied qui ne s'accroît que très-peu. On a
+ridiculisé ce goût fondé cependant sur quelque raison. En effet, une
+main calleuse, un pied plat et long annoncent une basse extraction, une
+vie exercée aux travaux les plus rudes, tandis qu'un pied mignon,
+présage flatteur d'attraits plus cachés, semble être le résultat d'une
+éducation soignée: et ne fît-on que retracer cette fameuse Rhodope, déjà
+citée par nous, dont le joli soulier, emporté par un aigle et tombé à
+Memphis, dans le bain du roi _Psammétique_, fit marcher son petit pied à
+si grands pas vers la fortune, et valut à Rhodope les honneurs du trône;
+on avouera qu'on a quelque droit à placer ce genre d'attrait parmi ceux
+qui exercent sur l'homme un grand empire.
+
+[Note 27: Nous n'avons point en France le bois mobile et léger dont
+se servent, pour cet usage, les Bayadères, mais nous pouvons le
+remplacer avec avantage par la gomme élastique, qui, par sa flexibilité
+et sa légèreté, ne peut froisser ni déformer les contours qu'elle serait
+destinée à faire éclore. On connaît à présent le moyen de dissoudre
+cette gomme ou plutôt ce _gluten_ animal.]
+
+On a vanté la mélisse pilée et appliquée sur la gorge, et l'arbrisseau
+de Vénus, le myrte, s'honore d'offrir aussi un moyen de faire
+disparaître les traces du culte qu'on rendit à la divinité auquel il est
+consacré. En général, les sumacs (_rhus coriaria_), les chênes (_quercus
+ilex_), les épines, les arbousiers et tous les végétaux styptiques
+contiennent un _tannin_ très-propre à cet usage.
+
+Enfin, le médecin des dames[28] dit:
+
+_Si mulierum sinus pudoris sit nimium dilatatus, quod accidit tùm
+propter partus, tùm propter frequentes coïtus, debent mulieres tunc uti
+sequentibus remediis_[29]:
+
+Prenez, dit-il, noix de galle encore vertes, faites-les bouillir dans du
+vin avec quelques clous de girofle, trempez-y un linge et appliquez.
+
+[Note 28: Le Camus, homme grave, érudit, et qui s'honora cependant
+de tracer l'hygiène de la beauté sous le nom d'Abdeker.]
+
+[Note 29: On pourrait nous reprocher nos citations latines, celle-ci
+s'excuse d'elle-même, et les mères prudentes nous en sauront gré; quant
+aux autres, nous avons ménagé, aux jeunes agréables du jour, l'occasion
+de se montrer, auprès des belles, érudits à peu de frais.]
+
+Ou bien: alun, sang-dragon, gomme arabique, suc d'acacia, feuilles de
+plantain, de renouée, de tormentille, fleurs et fruits de grenadier,
+capsules de glands, sorbes non mûres, roses de Provins, faites bouillir
+dans du vinaigre, et appliquez au moyen de compresses.
+
+Ou: quatre onces d'huile d'amandes amères, une once de cire blanche;
+faites fondre au bain-marie; ajoutez deux gros d'alun, une once de suie
+et un gros d'orcanette, vous avez une pommade styptique[30]; ou, enfin:
+alun, une once, acide vitriolique, demi-gros; faites fondre dans quatre
+onces de vinaigre et quatre onces d'eau de plantain ferrée; ajoutez deux
+onces d'esprit de vin et servez-vous-en, mais avec discrétion, pour
+imbiber, avec une éponge, certaines parties qui laisseraient des preuves
+non équivoques de fécondité, ou au moins, comme disait Fontenelle, que
+l'_amour avait passé par là_.
+
+Un moyen plus simple et non moins efficace, c'est d'extraire le tannin,
+en versant de l'eau sur du tan en poudre dans un appareil semblable à
+celui des salpêtriers. Cette eau, en traversant le tan, lui enlève une
+portion de son principe styptique; versée sur du nouveau, elle en
+dissout une autre quantité, et ainsi de suite jusqu'à ce que le tan soit
+plus disposé à lui en enlever qu'à lui en céder; alors la concentration
+est parfaite, et on l'emploie comme les décoctions ci-dessus
+prescrites; mais tous ces moyens ne peuvent que succéder aux
+compressions graduelles des bandes à sec, et longtemps après que tous
+les résultats de couche sont terminés, ou bien on courrait le risque
+d'une suppression souvent mortelle et toujours douloureuse. Enfin, avec
+les mêmes précautions, les bains froids et répétés offrent le plus sûr
+comme le moins dangereux de tous les topiques.
+
+[Note 30: Cette pommade rappelle l'aventure assez plaisante du jeune
+abbé de Fl..., qui, en ayant trouvé sur une toilette et ayant les lèvres
+gercées, les en frotta innocemment et sans penser à mal, mais avec un
+tel succès, que le matin, en s'éveillant, il ne pouvait ouvrir la
+bouche. Pareille aventure arriva également à M. le comte de Rochefort.
+Voici comment il la raconte dans ses _Mémoires_. Mlle de Menneville,
+fille d'honneur de la reine mère, ayant demandé à ce dernier un habit
+d'homme, en secret:
+
+«Je le lui portai dans sa chambre. Mais comme il n'y avoit personne pour
+le recevoir, je le mis sous son lit où elle m'avoit dit de le mettre, et
+m'en fus causer avec la bonne femme Mme du Tilleul, sous-gouvernante des
+filles, qui étoit de mes bonnes amies. Comme toutes les chambres des
+filles, ou, pour parler plus juste, toutes les loges étoient ouvertes,
+car elles ressembloient proprement à celles des comédiens, j'aperçus, en
+me promenant avec elle, sur une toilette, des peignes, une boëte à
+poudre, et tous les autres ingrédiens qui servent à l'ajustement d'une
+fille, et niant remarqué entr'autres choses une petite boëte de pommade,
+j'en voulus prendre pour me frotter les mains que j'avois un peu rudes.
+Je la trouvai toute d'une autre couleur que celle de l'ordinaire, ainsi
+croiant qu'elle pouvoit servir aux lèvres, où j'avois un peu mal, j'en
+mis assez imprudemment. Mais je ne fus pas longtemps à m'en repentir, au
+même temps mes lèvres me firent un mal enragé, ma bouche se rétrécit,
+mes gencives se ridèrent, et quand je vins à vouloir parler, je fis rire
+tellement Mme du Tilleul, que je jugeai qu'il falloit que je fusse bien
+ridicule. Ce qui fut le pis fut que je ne pus presque articuler aucune
+parole, et, courant promptement à un miroir, je me fus regarder, et me
+fis tant de honte à moi-même, que je m'enfuis pour me cacher. En m'en
+allant je trouvai M. le duc de Roquelaure qui entroit pour venir faire
+la cour à quelqu'une des filles, et étant tout étonné de me voir de la
+sorte, il me demanda qui m'avoit mis en cet état. Je lui contai
+naïvement mon infortune, à quoi il me fit réponse, en se moquant de moi,
+que je n'avois que ce que je méritois, qu'à mon âge je devois savoir
+qu'il y avoit de toutes sortes de pommade; que celle que j'avais prise
+n'étoit ni pour les mains ni pour les cheveux, et qu'elle étoit un peu
+plus rare. Il me quitta après s'être ainsi raillé de moi, et s'en allant
+dans la chambre de la reine-mère, il lui fit sa cour à mes dépens.
+Aussitôt tout le monde accourut pour me voir, et voiant que j'avais
+aprêté manière de rire, j'en aurois ri, tout le premier, s'il m'avoit
+été permis d'ouvrir la bouche. Cette aventure fut le sujet de
+l'entretien de toute la cour, pendant plus de huit jours, et on le manda
+même à Nantes, où le roi étoit, qui pour être si sérieux ne put
+s'empêcher de rire. Pour moi, j'en avois tout autant d'envie que les
+autres quand je pensois à cet accident, mais quoi que je m'étuvasse la
+bouche d'eau fraîche, et tantôt de vin tiède, il n'y eut que le temps
+qui m'aporta du soulagement.»]
+
+POMMADE VIRGINALE DITE A LA COMTESSE.
+
+Sulfate de zinc 40 gr.
+Noix de galle )
+ > 20 gr.
+Noix de cyprès )
+
+Écorce de grenade )
+Feuilles de myrte > 30 gr.
+Sumac )
+
+Mélangez ces substances pulvérisées avec quantité suffisante d'onguent
+rosat. Cette pommade a la propriété de resserrer le sphyncter ou muscles
+constricteurs de la vulve et du vagin trop relâchés.
+
+ _Formulaire magistral._
+
+On doit d'ailleurs scrupuleusement observer que tous ces topiques,
+lotions ou pommades, ne doivent jamais s'employer pendant le tribut
+lunaire, ou toute autre hémorrhagie utérine; et qu'ils ne sont suivis du
+succès désiré, qu'en s'imposant la sagesse la plus austère. La femme
+déjà trompée, et qui s'exposerait encore à l'être, n'est plus digne de
+notre intérêt, et du motif bien pur qui nous anime à consoler son sexe
+des injustices du nôtre.
+
+Quant au moyen de s'opposer au développement excessif de la gorge, l'art
+offre des procédés certains pour réprimer ce luxe de la nature, de même
+qu'il en présente pour la forcer à accorder ses dons à celles envers qui
+elle s'est montrée trop avare en ce point; et nous croyons faire plaisir
+à nos lectrices, en publiant, en leur faveur, le manuscrit suivant,
+trouvé dans les décombres du délicieux château de _Crécy_, bâti pour la
+belle _Pompadour_, qui paraît avoir profité de la recette qu'il
+contient. On sait qu'elle n'obtint que fort tard, le genre d'attrait
+dont il s'agit ici. On pardonnera à l'auteur ses peintures un peu vives
+en faveur de son motif.
+
+«Vous m'ordonnez, madame, de consulter l'oracle d'Épidaure, pour ajouter
+à vos attraits ce que vous seule y trouvez à désirer: que peut, en
+effet, demander aux dieux, celle qui réunit à la majesté, la douceur; à
+l'élégance des formes, la régularité des traits; enfin, à l'air imposant
+de la reine des dieux, la fraîcheur des bergères du Mont Ida? Heureux
+disciple d'Esculape, je suis appelé, par votre confiance dans mon art, à
+embellir la beauté même: plus occupé de mon bonheur qu'effrayé de ma
+témérité, je vais tenter d'unir à vos attraits des charmes nouveaux; et
+j'ose croire au succès, puisque vos beaux yeux m'encouragent d'un
+regard.
+
+«Dans ce siècle fortuné, où, renonçant au vain luxe des mots, les
+savans s'occupent avec succès des choses, on applaudit au novateur
+heureux qui soulève le voile de la nature, pourvu qu'il en obtienne une
+réponse.... On veut même que les oracles qu'il surprend à l'antique
+déesse soient précis, et l'on pardonne à la nudité de ses expressions,
+pourvu que son but soit moral, c'est-à-dire, tende à la perfection, au
+bonheur de l'humanité. J'ose donc essayer, madame, de vous apprendre
+l'art d'acquérir ce nouvel attrait qui fera de vous le modèle de la
+beauté, et donnera à nos jeunes Françaises la confiance de vous imiter;
+cet attrait qui anime le poëte, enflamme le peintre, ravit le sculpteur,
+inspire le musicien, et fait délirer depuis le simple cultivateur sous
+le chaume, jusqu'au grave philosophe au sein de ses livres poudreux; cet
+attrait, dont les fières amazones consentaient à sacrifier la moitié
+pour gagner en adresse ce qu'elles perdaient en appas; cet attrait, dont
+la pomme de Paris n'offrait qu'une imparfaite image, et qui la fit
+tomber de ses mains; enfin, cet attrait qui date des premiers jours du
+monde, si c'est par lui qu'il faut expliquer cette autre pomme plus
+fatale, auquel le genre humain doit, dit-on, la perte du bien et la
+connaissance du mal.
+
+«S'il est recherché par les hommes, les femmes s'honorent de l'offrir à
+nos yeux, c'est l'aiguillon du plaisir, le prélude du bonheur!... C'est
+le secret de ce don charmant que, sans m'arrêter à le depeindre, je
+voudrais conquérir pour les femmes qui en sont privées, et quoique ce ne
+soit point une fiction, c'est dans la fable que je puiserai la leçon que
+je viens vous offrir.
+
+
+LA COUPE D'HÉBÉ (ALLÉGORIE).
+
+«Hébé, trop jeune encore, ne comptait que quatorze printemps: le lys et
+la rose se disputaient ou plutôt se partageaient l'honneur de nuancer
+son teint.... de grands yeux bleus, où déjà se peignait l'amour sans
+qu'elle s'en doutât, s'ouvraient lentement sous de noires et longues
+paupières; un front uni, un nez droit, une bouche de la couleur et de la
+forme d'un bouton de rose qui s'entrouvre, une haleine qui en avait le
+parfum, des dents d'un émail opalin, de charmantes fossettes offrant des
+niches à l'amour indécis[31], un col blanc et onduleux, une taille et
+flexible et légère, des bras arrondis, des doigts délicats; enfin de
+petits pieds effleurant à peine les parvis de l'olympe.... Hébé avait
+tout en partage, et les dieux, auxquels elle versait le nectar dans la
+coupe de l'immortalité, étaient plus enivrés de ses charmes que de sa
+liqueur éthérée.... elle réunissait tout.... tout? non.... quelque
+chose manquait à ses charmes, et ce fut l'orgueilleuse Junon qui s'en
+aperçut. Hébé entrait dans cet âge où la nature indécise semble n'avoir
+qu'ébauché son chef-d'oeuvre. Offrant également les attraits des deux
+sexes, elle n'avait point encore reçu ce double présent qui décèle une
+vierge et que caresse l'oeil furtif de l'amant timide.... Le dieu de la
+foudre lui-même, souriant à la remarque de l'auguste Junon, témoigne le
+désir de voir Hébé parfaite.... Il dit, et fils aussi soumis que galant
+époux, Vulcain prend la coupe des mains d'Hébé; il en couvre l'un des
+hémisphères du sein de Vénus, et l'arrondit sur ce modèle à la vue des
+dieux frémissants d'envie et de volupté. Sous son léger marteau le métal
+docile s'étend, se contourne, se creuse, et façonnée de même sur le
+second hémisphère de la belle déesse, naît une seconde coupe. Le dieu de
+Lemnos les place sur le sein d'Hébé qui, ainsi parée, ressemble à la
+chaste Pallas; bientôt sous ces deux coupes protectrices son sein
+s'élève, un double mont bondit, et sa gorge s'accroît sans dépasser ces
+heureuses limites. Les dieux applaudissent.... Cette ingénieuse
+invention passa jusqu'en Grèce; l'Inde s'en fit honneur, mais elle se
+perdit comme tous les usages antiques et fut conservée par les seules
+Bayadères.... Ces coupes amoureuses furent réservées pour les banquets
+des dieux, et ce sont elles qui, remises depuis aux mains d'Hébé,
+désaltèrent encore les fortunés habitants de l'Empyrée, et leur
+inspirent les désirs, l'espérance et la joie en leur rappelant le moule
+heureux sur lequel elles furent arrondies.
+
+[Note 31: Portrait exact de Mme de Pompadour.
+
+ «Ainsi qu'Hébé la jeune Pompadour
+ A deux jolis trous sur la joue,
+ Deux trous charmans où le plaisir se joue,
+ Qui furent faits par la main de l'Amour.»
+
+_OEuv. de Bernis._]
+
+«C'est ce prodige de la mythologie que l'art veut reproduire pour vous,
+belles, à qui il ne manque que cet attrait pour être accomplies, et vous
+aussi pour qui sa possession excusera l'absence des autres.
+
+«En drapant légèrement les formes imparfaites de votre douce amie,
+jeunes époux, imitez le disque rond de Phébé; échancrez[32] l'étoffe en
+dessinant les contours absents des attraits que vous désirez; que votre
+main utilement caressante et instruite à la volupté par le dieu de
+Délos, sache promener des doigts mobiles sur l'aréole de ce sein non
+encore développé[33]; que de fréquentes titillations fassent frémir ses
+fibres; bientôt la papille se gonfle, et les esprits appelés par ces
+douces frictions enflent les muscles qui, profitant d'une liberté
+inconnue, se frayent une route nouvelle; une lymphe nourricière baigne
+les glandes qui se dilatent; le réseau éclatant et poli qui les
+renferme, participant de l'éréthisme général, s'arrondit sous les doigts
+créateurs: comme la fleur, condamnée à périr sous les glaçons de
+l'hiver, se développe et naît au jour, sous le verre diaphane, et sous
+les douces influences d'une chaleur factice; de même les sucs élaborés
+sous la main de l'époux fortuné s'accumuleront en dessinant les
+voluptueux contours des beaux modèles que nous a transmis le ciseau des
+Phidias et des Praxitelle.
+
+[Note 32: Ce vêtement couvre trop le nu, il faut l'_échancrer_
+davantage.
+
+ _Pygmalion_, scène lyrique. J. J.]
+
+[Note 33: Quant aux jeunes vierges à qui la décence interdit le
+secours d'une main caressante, il est un moyen qu'elles pourront
+employer sous l'oeil d'une mère flattée d'ajouter à leurs perfections,
+sans admettre un tiers dans leur confidence; le voici: appliquez sur la
+place de la gorge un hémisphère en bois léger et creux ou en gomme
+élastique et percé à son milieu, à peu près comme les ventouses de
+verre, dont se servent les jeunes accouchées pour aspirer le lait; à
+l'orifice s'adapterait un tube de verre ou un tuyau de gomme élastique,
+au moyen duquel une succion plusieurs fois répétée, chaque jour,
+finirait par développer l'attrait tant souhaité.
+
+_Note du manuscrit._
+
+Un de nos amis qui, dans son voyage en Égypte, a su à la fois faire des
+observations sur l'art de guérir et sur les moeurs, nous assure que les
+femmes de ce pays se servent, avec succès, pour la même intention, de la
+mie d'un pain arrondi, façonnée au contour de la forme que l'on désire,
+et appliquée encore chaude sur le sein. Cette substance, dit ce savant
+que réclame avec honneur la chirurgie française, porte en elle un
+principe végéto-animal, qui, développé par le calorique, pénètre
+rapidement le sein, excite l'érection de ses papilles nerveuses, gonfle
+le système glanduleux, et y cause un ferment, un prurit voluptueux,
+bientôt suivis du développement successif de l'appareil mammaire et du
+tissu cellulaire qui le recouvre. C'est ce même principe vireux qui agit
+si énergiquement comme dérivatif de l'humeur goutteuse aux extrémités
+inférieures, en appliquant du _levain_ à la plante des pieds. On
+pourrait activer ce moyen par de légères frictions d'huile très-volatile
+sur le sein, et d'une lotion astringente sur les parties qui
+l'environnent; au reste, le volupté fait éclore la gorge, comme le
+printemps fait éclore la rose, et tous les praticiens connaissent la
+correspondance de l'_utérus_ au sein.]
+
+«L'une des coupes fameuses dont il s'agit ici, madame, s'est perdue, ou
+plutôt aimons à croire que les dieux l'ont retirée pour conserver le
+type du beau, s'il se trouvait perdu sur la terre; l'autre est célèbre
+par ce banquet où l'amoureuse Cléopâtre fit publiquement aux yeux
+extasiés d'Antoine, non la fastueuse expérience de dissoudre une perle
+dans un breuvage qui n'eût pas épargné l'organe complice de sa
+forfanterie, mais celle bien plus merveilleuse de l'exacte application
+de ce moule divin, sur sa gorge ravissante. Elle orne aujourd'hui un
+_Musæum_ fameux en Europe, et nous pourrons la consulter pour donner à
+vos formes le degré d'extension avoué par le goût, si vous accordez à
+mes avis le droit de concourir à la naissance de l'attrait dont vous
+désirez la possession. Je dois vous dire enfin, madame, que c'est de
+l'abus des moyens que je viens de vous indiquer qu'est né un singulier
+usage, chez les femmes turques, dont les époux, par je ne sais quel goût
+bizarre, préfèrent une gorge volumineuse et tombante, et qui, pour se
+procurer ce double _agrément_, usent avec excès des bains chauds et du
+_massement_, opération inconnue en Europe. Ce n'est, certes, pas à cette
+espèce de perfection que je désire vous voir atteindre, et la nature
+heureusement vous a formée de manière à ne pas satisfaire les
+inclinations turques; mais l'art hippocratique offre encore des
+ressources aux femmes dont l'accroissement de la gorge aurait besoin
+d'être prévenu, et c'est dans le même moyen qui favorise son
+développement qu'elles trouveront celui de sa répression. Les belles
+favorites du commandeur des croyants, les Circassiennes, les
+Géorgiennes, les Mingréliennes, opposent, dès l'âge de douze ans, à leur
+gorge naissante, un léger rempart de bois de santal qu'elle ne peut
+franchir; et ce genre d'attrait acquiert chez elles, par la compression,
+une fermeté que l'on rencontre difficilement chez les femmes des autres
+peuples.
+
+«Pardonnez, madame, ces détails que la nature de votre demande a rendus
+nécessaires, et puisse l'application de cette théorie ajouter encore,
+s'il est possible, aux charmes qui ont mérité l'hommage d'un autre
+Jupiter. Puissé-je alors aussi, jeune encore et médecin peu connu,
+obtenir par mes soins votre entière confiance, et par le succès de mes
+recettes, le triomphe d'une nouvelle Hébé; dût une moderne Junon
+accabler de sa persécution[34] l'inventeur satisfait de sa réussite.»
+D.M.V.S.M.
+
+[Note 34: La belle Pompadour suivit le conseil du jeune docteur,
+elle acquit en effet l'attrait qui manquait seul à ses charmes, et
+ouvrit, par reconnaissance, à son médecin une carrière qu'il parcourut
+avec éclat.
+
+Si l'on trouve ce fragment un peu libre, accusons-en plutôt nos moeurs
+que l'auteur qui vivait dans un temps où le Français se scandalisait
+plus des actions que des écrits; il pense maintenant tout le contraire,
+et l'on ferait aujourd'hui le procès de _Vénette_, _Tissot_ et
+_Montesquieu_ s'ils publiaient l'_Onanisme_, le _Tableau de l'amour
+conjugal_ et le _Temple de Gnide_; en sommes-nous plus chastes et plus
+vertueux? l'interprétation que l'on donnera à cet article répondra à
+cette question. Au surplus, nous protestons de la pureté de nos motifs,
+et nous n'avons point écrit pour les _Tartuffes de moeurs_, mais pour
+cette belle moitié du genre humain qui ne connaît de mal que celui que
+les pervers lui enseignent.]
+
+Nous ne pouvons mieux terminer ce chapitre qu'en rapportant l'anecdote
+suivante, qui en est le corollaire.
+
+Sous Louis XIV, le supplice de la Brinvilliers fut un exemple
+insuffisant pour arrêter les empoisonnements. Une _chambre ardente_ fut
+instituée pour juger de ces crimes. L'arrestation et le procès de la
+Voisin firent découvrir dans les papiers de cette dernière, une foule de
+lettres qui compromettaient des gens de la plus haute condition. La
+Voisin était accusée d'avoir vendu des poisons, des charmes, et divers
+secrets magiques pour se faire aimer. La duchesse de Foix avait été
+arrêtée sur la déposition d'un simple billet d'elle trouvé chez la
+Voisin, et dont le sens était plus obscur que propre à baser une
+accusation. Louis XIV, ne voulant pas que sur un indice si léger une
+dame de haute distinction fût emprisonnée, se réserva de l'interroger
+lui-même dans ses cabinets, où elle fut conduite avec son propre
+carrosse par le capitaine des gardes en quartier.
+
+«Reconnaissez-vous ce billet, madame la duchesse? lui dit Sa Majesté
+d'un ton sévère, mais doux.
+
+--Sire, il est de ma main; je ne puis ni ne veux le nier.
+
+--A merveille! Maintenant dites-moi, je vous prie, avec la même
+franchise, ce que signifient ces mots: _Plus je frotte, moins ils
+poussent_.
+
+--Ah! sire, s'écria la duchesse en se jetant aux pieds du roi, daignez
+m'épargner un tel aveu.
+
+--Je ne le puis, madame, songez que je vous appelle devant moi pour vous
+sauver un affront public; ce motif me donne tous les droits à votre
+confiance, et dans l'intérêt de votre honneur je vous ordonne de parler.
+
+--J'obéirai, sire! reprit en tremblant Mme de Foix, rouge jusqu'aux
+yeux.... Depuis deux ou trois ans je m'aperçois que mon mari me néglige
+après m'avoir souvent reproché un défaut... non, jamais je n'oserai
+achever....
+
+--Continuez, duchesse....
+
+--Il est des charmes, reprit l'accusée, dont la nature se montre
+prodigue envers des femmes, avare envers d'autres....
+
+--Poursuivez, je vous prie.
+
+--Eh bien! sire, mon mari n'aime que les dames auxquelles la nature a
+prodigué....
+
+--Prodigué quoi?
+
+--Ce qui excède les belles proportions dans Mme de Montespan et manque à
+Mme de La Vallière... comme à moi, sire....
+
+--Ah! m'y voici, s'écria Louis XIV en s'excusant d'un défaut trop
+prolongé de pénétration.... Et je vois, poursuivit le monarque
+interrogateur, que vous aviez demandé à la Voisin....
+
+--Une pommade dont elle disait des merveilles, ajouta Mme de Foix en
+baissant les yeux.
+
+--Cependant _plus vous frottiez, moins ils poussaient_.
+
+--Hélas! oui.
+
+--C'était un malheur; mais ce n'était pas un crime, et je suis enchanté,
+duchesse, de vous avoir épargné la honte d'un tel aveu devant la
+_chambre ardente_. Je vous rends le malheureux billet qui vous causa
+deux heures d'inquiétude; retournez tranquillement à votre hôtel. Je ne
+vois de coupable ici que l'époux qui délaisse une femme aussi jolie que
+vous; je veux en toucher quelques mots au duc. Il est un moyen plus
+heureux que celui dont vous avez fait l'essai pour obtenir de la nature
+elle-même ce que vous recherchiez par artifice; nous en causerons avec
+votre mari, et j'espère qu'il l'emploiera.»
+
+ * * * * *
+
+ÉTUDE PHYSIOLOGIQUE SUR LES MAMELLES OU SEINS.
+
+Les mamelles (_mammæ_, des Latins; _mastoï_, des Grecs; _poppa_, en
+italien; _teta_, _ubre_, en espagnol) subissent les mêmes phases dans
+leur développement, que les organes essentiels de la reproduction. Elles
+sont peu apparentes dans le jeune âge et ne commencent à prendre le
+développement qu'elles doivent acquérir que lorsque l'appareil génital
+est apte à perpétuer l'espèce; et comme ce n'est que chez les individus
+femelles qu'elles parviennent à leur état complet, elles ne présentent
+pendant les premiers temps de la vie aucune différence chez l'un et
+l'autre sexe.
+
+C'est donc vers l'époque où la femme devient apte aux plaisirs de la
+maternité, que les seins commencent à acquérir tout le développement
+dont ils sont susceptibles, ainsi que les formes gracieuses qui en font
+un si brillant ornement: avant la puberté, ils n'en forment que le noyau
+et se flétrissent après le temps de la faculté de reproduire. Cependant
+il n'est pas sans exemple de voir des jeunes filles encore loin de cette
+brillante époque, offrir des mamelles parfaitement conformées et
+susceptibles de fournir du lait. Les auteurs rapportent, à cet égard,
+des exemples fort curieux; mais tous tendent à prouver que ce
+développement précoce fut toujours le résultat d'irritations exercées
+sur le mamelon.
+
+Le développement des mamelles se fait ordinairement en raison de celui
+des organes spéciaux de la génération, en sorte que la bonne
+conformation des seins peut, en général, servir de mesure à celle de ces
+derniers. Ainsi, l'homme qui recherche dans la femme, non-seulement ce
+qu'elle peut offrir de gracieux, mais encore tout ce qui peut dénoter
+une grande puissance génératrice et un vif sentiment de l'amour, est-il
+toujours enthousiaste d'un beau sein. A peine la femme, la plus
+accomplie sous tous les autres rapports, peut-elle éveiller en lui le
+moindre sentiment de volupté, si elle ne se trouve pourvue de ce superbe
+ornement. Cependant, on voit quelquefois des femmes dont les parties
+sexuelles sont parfaitement développées et propres aux plaisirs ainsi
+qu'à la propagation, quoiqu'elles n'offrent que quelques traces de ces
+organes, tandis que d'autres, avec le sein le plus volumineux, ne sont
+nullement accessibles aux désirs voluptueux ni aptes à la génération.
+
+C'est évidemment en vertu des liens de l'étroite sympathie qui unissent
+les seins et les organes sexuels, que s'opère le développement
+simultané.
+
+Les mamelles sont situées au milieu de la poitrine, l'une à droite et
+l'autre à gauche, directement sur les muscles pectoraux; elles sont au
+nombre de deux: il est rare de trouver des femmes qui en aient trois ou
+quatre donnant toutes du lait. Cependant, les annales de la science
+citent un grand nombre de femmes et même d'hommes multimammes; le plus
+souvent, le nombre des mamelles est porté à trois: deux présentent la
+position et le volume ordinaires, et la troisième est située sur la
+ligne médiane, un peu plus bas que les deux autres, ou bien au-dessous
+de l'une d'elles à droite ou à gauche. Lorsque la mamelle surnuméraire
+est médiane, elle reste ordinairement peu volumineuse, même pendant
+l'allaitement; les mamelles surnuméraires latérales diffèrent au
+contraire fort peu des mamelles normales et peuvent, comme elles,
+fournir du lait. Lorsqu'il existe quatre mamelles, elles sont
+ordinairement bilatérales et placées comme les mamelles abdominales des
+animaux, l'une au-dessous de l'autre; cette disposition est moins
+commune que la précédente, et la présence de cinq mamelles est plus rare
+encore. Percy n'en rapporte qu'un seul cas observé par M. Gorre. Ce cas
+fut présenté par une femme valaque trouvée, en l'an VIII, parmi les
+nombreux prisonniers faits à l'armée autrichienne et qui ne tarda pas à
+périr de froid et de misère. Sur les cinq mamelles de cette femme,
+quatre étaient très-saillantes, disposées sur deux rangs, gonflées et
+pleines de lait; la cinquième était médiane et située à cinq pouces de
+l'ombilic; elle n'était pas plus volumineuse que celle d'une fille
+impubère.
+
+On a aussi constaté que des mamelles surnuméraires pouvaient se
+présenter sur d'autres points du corps; ainsi, M. Robert a fait
+connaître le fait d'une femme multimamme de ce genre, laquelle
+descendait elle-même d'une mère dont les mamelles étaient plus
+nombreuses que d'habitude. Mais, chez elle, la mamelle surnuméraire
+était placée à la partie externe de la cuisse gauche, près de l'aîne.
+Jusqu'à la première grossesse, cette mamelle fut prise pour un simple
+_noevus_; mais à cette époque elle se développa et acquit le volume de
+la moitié d'un citron; l'enfant tétait alternativement l'une des
+mamelles pectorales et celle-ci, qu'on pourrait appeler inguinale.
+
+Thomas Bartholin vit une Danoise qui en offrait trois, dont deux étaient
+placées dans leur situation naturelle, et l'autre à la partie inférieure
+du _sternum_, en sorte qu'elles représentaient une espèce de pyramide
+renversée. Tout le monde sait que la belle Anne de Boulen, épouse de
+Henri VIII, roi d'Angleterre, avait, outre six doigts à chaque main,
+trois mamelles à la partie antérieure de sa poitrine. Un moine de Corbie
+rapporte avoir vu une paysanne qui nourrissait trois jumeaux de quatre
+mamelles indistinctement, dont deux étaient situées au-devant de la
+poitrine, et les deux autres au dos.
+
+Les mamelles bien proportionnées sont un des principaux ornements des
+femmes, particulièrement lorsqu'elles sont accompagnées d'une gorge bien
+taillée et recouverte d'une peau fine. Il faut aussi qu'elles soient
+blanches, rondes, et médiocrement écartées l'une de l'autre; qu'elles ne
+soient placées ni trop haut, ni trop proche des aisselles; et enfin
+qu'elles ne soient ni trop grosses, ni pendantes: voilà les conditions
+qu'elles doivent avoir pour être belles et propres à donner de l'amour;
+mais ce ne sont pas les meilleures ni les plus capables de contenir le
+lait.
+
+En nul endroit du corps, la peau n'est si fine, si délicate, si lisse,
+si douce au toucher et si blanche qu'aux environs des mamelles. Là les
+téguments ont acquis une telle ténuité, qu'ils sont entièrement
+transparents et laissent facilement apercevoir les ramuscules veineux
+qui serpentent agréablement dessous, notamment dans le voisinage de la
+portion rosée, et dont la couleur bleuâtre, en formant un heureux
+contraste avec la blancheur de la peau, en relève si fortement l'éclat,
+et donne tant de lustre à la beauté du sein. Ces globes, au reste,
+plaisent d'autant plus à la vue que cette belle portion de la peau est
+plus tendue par des glandes mammaires volumineuses, et que la femme
+jouit de plus d'embonpoint. Il est cependant des personnes fort maigres
+naturellement dont ces glandes sont si développées que, malgré cet état,
+elles offrent un sein solide, bien tendu, et de la plus grande beauté.
+
+C'est à la partie centrale de chaque moitié des parois thoraciques
+qu'est situé le sein dans sa belle conformation. Trop dégagés en dehors
+et portés sous les aisselles, ces organes laissent entre eux un grand
+vide, peu agréable à la vue, et peuvent éprouver, de la part des bras
+portés en bas et surtout en dedans, des pressions plus ou moins fortes
+dont la fréquence nuit à leur développement, les déforme et même les
+atrophie. Trop rapprochés du centre de la poitrine, ils se confondent
+l'un avec l'autre, et de ce défaut de dégagement résulte l'imperfection
+de ces rotondités élégantes qui concourent tant à la beauté physique du
+sexe. Trop relevés vers le cou, les seins confondent leurs brillants
+contours avec ceux de l'épaule, reçoivent des chocs continuels des
+mouvements brusques de la clavicule, et sont sans cesse exposés à
+l'influence nuisible de l'atmosphère, dont la femme ne peut se garantir
+que par des vêtements grotesques et répudiés par la véritable
+coquetterie. Situés trop intérieurement, ils semblent rapprocher les
+femmes des animaux mammifères, et demandent à être relevés sans cesse
+par des corsets, dont la pression continuelle peut porter les plus
+fâcheuses atteintes à ces organes délicats.
+
+La figure des beaux seins est ronde, et représente un demi-globe; mais
+les bons nourriciers, au contraire, sont avancés en dehors, et
+ressemblent à une poire, tels sont en général ceux des Comtoises; ce qui
+fait qu'ils ont de la peine à se soutenir, principalement quand ils sont
+pleins de lait.
+
+On ne peut pas bien déterminer leur grandeur; elle varie suivant les
+nations: les Indiennes et les Siamoises les ont si longs, qu'elles
+peuvent les jeter par-dessus leurs épaules. Ils différent encore suivant
+les individus; quelques femmes les ont naturellement petits et d'autres
+gros; ces dernières sont les meilleures nourrices, pourvus qu'ils ne
+soient pas trop charnus. Leur grosseur dépend aussi de l'âge; ils
+commencent à pousser à 14 ans, ils ont alors la figure d'un demi-globe;
+ils sont petits, mais durs et fermes; ils grossissent à mesure qu'elles
+avancent en âge; ils se flétrissent aux femmes qui approchent la
+cinquantaine; et plus une femme vieillit, plus elle les a mous et
+flasques, n'y restant plus à la fin que des peaux.
+
+Le mamelon est une petite éminence qui s'élève au milieu de la mamelle;
+il est d'une substance spongieuse, assez semblable à celle du gland de
+la verge, c'est pourquoi il se relève, se gonfle et se roidit lorsqu'on
+le suce ou bien qu'on le chatouille. Il a un rapport intime avec les
+parties de la génération. Les mamelons se dressent et prennent part aux
+sensations suscitées dans l'appareil génital par le coït ou autres
+moyens d'excitation. Les titillations de ces boutons rosés y font naître
+un sentiment de volupté qui, se communiquant en un clin-d'oeil au siége
+spécial de la jouissance, embrase la femme et la sollicite puissamment à
+l'acte de la reproduction. Quels sont les moyens d'une si frappante
+communication entre des organes si éloignés? Quelques auteurs prétendent
+que ce sentiment si vif, si agréable, a été donné à cette partie afin
+que l'enfant y cause en la suçant un doux chatouillement, et que la
+femme y trouvant un singulier plaisir, elle se porte plus volontiers à
+donner à téter à son enfant aussi souvent qu'il en a besoin.
+
+Il est reconnu que la succion du lait éveille des sentiments de volupté
+au bénéfice de l'appareil générateur. Cabanis disait que des nourrices
+lui avaient fait l'aveu qu'elles devaient à l'enfant qu'elles
+allaitaient de véritables jouissances. La solidarité des seins,
+relativement à l'appareil sexuel, est un fait constant; aussi la
+sécrétion du lait augmente-t-elle généralement sous l'influence de
+l'excitation de l'organe générateur. C'est le cas dans lequel était
+cette femme, qui voyait le lait sortir de ses seins quand son mari
+accomplissait avec elle l'acte du coït. On a dit aussi que l'observation
+avait utilisé cet acte physiologique, que, voyant les animaux se prêter
+avec complaisance à la manoeuvre par laquelle on leur enlevait leur
+lait, on avait établi, dans le but d'en augmenter la quantité, une
+action directe sur l'organe générateur. Hérodote rapporte que les
+Scythes introduisaient un bâton poli dans la vulve de leurs juments
+quand ils leur enlevaient leur lait. Bayeu a raconté que dans les
+Pyrénées les gens occupés à traire les vaches plaçaient une de leurs
+mains dans la vulve; enfin, s'il faut en croire Levaillant, les
+Hottentots soufflent de l'air dans les parties sexuelles des animaux
+avant de les traire.
+
+La jeune fille devient-elle pubère, aussitôt les seins répondent à
+l'appel de la matrice, et cette corrélation se reproduit à chaque nouvel
+éveil de cet organe. Elle se moule en quelque façon sur les conditions
+dans lesquelles il se trouve. Dans l'état ordinaire de la vie, une
+action, quelle qu'elle soit, sur l'appareil générateur a toujours du
+retentissement dans les seins, et réciproquement. Ainsi, une sensation
+voluptueuse venant directement de l'utérus et de ses annexes est
+comprise et perçue dans les organes de la lactation; de même les
+sentiments lascifs peuvent trouver accès près des voies génitales en
+partant des seins. C'est la raison pour laquelle Hippocrate croyait que
+le lait venait de la matrice.
+
+N'est-ce pas à cette corrélation, à cette excitation génésique provoquée
+par l'allaitement qu'il faut attribuer le fait de luxure inouï,
+diabolique, que rapporte M. le docteur Andrieux? Un enfant, qu'on avait
+pourvu d'une nourrice jeune et vigoureuse, dépérissait chaque jour. Les
+parents affligés cherchaient en vain la cause de cet état: on finit par
+la découvrir. Mais où trouver des mots pour exprimer leur surprise et
+leur colère, quand ils trouvèrent cette malheureuse, exténuée,
+délirante, avec son nourrisson qui cherchait encore dans une succion
+affreuse, et inévitablement stérile, un aliment que les seins auraient
+pu seuls donner!!! Pour parvenir facilement à son but, elle attendait
+que le cri de la faim se fît entendre; l'enfant, dans cet instant, ouvre
+la bouche comme pour chercher le sein, il saisit alors avidement le bout
+du doigt, ou tout corps quelconque souple et arrondi qu'on place entre
+ses lèvres, et exerce immédiatement sur lui des efforts répétés de
+succion.
+
+Les exemples d'une pareille dépravation doivent heureusement être fort
+rares.
+
+La plupart des filles élevées chez des religieuses ne peuvent, selon ces
+dernières, plaire au Créateur que par des imperfections. Avoir de la
+gorge, être belle, sont assurément deux sujets de réprobation; l'enfer,
+ouvert à celles qui portent un sein arrondi, attend sa proie avec
+impatience; c'est ainsi que s'exprime le fanatisme dans l'intérieur des
+maisons d'éducation religieuse. Quelques jeunes filles, adoptant ces
+idées, prennent chaque jour quelques subtances capables d'interrompre ou
+d'affaiblir la nutrition: tel est, par exemple, l'usage du vinaigre bu à
+jeun; en altérant les forces digestives, il arrête le cours des
+sécrétions ou en diminue l'énergie, d'où le défaut d'accroissement des
+seins avec l'amaigrissement général qui résulte de cette détestable
+coutume. Des remèdes aussi dangereux, ou plus violents, employés dans
+les mêmes vues, doivent donc être bannis sans retour, puisque ce n'est
+qu'en détruisant la santé qu'ils amènent le changement d'organisation
+qu'on souhaite.
+
+En 1829, le docteur Récamier publia un ouvrage en deux volumes,
+intitulé: _Recherches sur le traitement du cancer par la compression
+méthodique simple et combinée._ M. Récamier, appelé souvent dans les
+couvents, s'est trouvé à portée d'y faire l'observation suivante:
+
+Dans les couvents, les religieuses, dans le but de réprimer
+l'envahissement mondain d'une gorge trop volumineuse, compriment les
+glandes mammaires avec des rondelles d'amadou. Les seins, par le fait de
+la compression et de l'iode qui se trouve naturellement dans l'amadou,
+s'atrophient; mais ce que les religieuses de nos jours n'ont pas prévu,
+c'est que, en raison de la solidarité dont nous nous entretenons,
+l'appareil reproducteur profite du retrait des glandes mammaires. Or,
+comme le bassin est l'expression de l'état anatomique et physiologique
+de la matrice, il en résulte que les hanches et les muscles fessiers des
+femmes soumises à cette opération acquièrent un énorme développement. Il
+me reste à savoir si un surcroît de nourriture et de développement de
+l'appareil générateur n'est pas un obstacle de plus à la chasteté; et si
+ces intéressantes recluses n'en ressentent pas plus vivement les
+aiguillons de la chair, que la religion leur défend d'écouter.
+
+Mais il est temps de revenir à notre sujet, duquel nous nous sommes un
+peu écarté. Le mamelon est rose et petit aux vierges; l'aréole qui
+l'entoure est d'une teinte plus ou moins foncée, suivant les individus;
+elle l'est en général davantage chez les personnes qui ont la peau
+brune, les yeux et les cheveux noirs, que chez les femmes blondes,
+faibles et délicates. L'étendue de ce cercle est de deux centimètres
+environ; il s'élargit et prend une teinte plus foncée chez celles qui
+ont fait des enfants; le mamelon devient livide et gros aux nourrices,
+et il est noir et flétri chez les vieilles femmes.
+
+ * * * * *
+
+Un ouvrage de ce genre ne pouvant se terminer par des matières médicales
+aussi sérieuses, nous donnons une fort jolie chanson de M. Aug. Gilles,
+pour le clore convenablement.
+
+
+LES TÉTONS.
+
+ Air: _Elle aime à rire, elle aime à boire._
+
+ J'ai pris pour muse une égrillarde
+ A qui la romance déplaît;
+ Chaque jour elle se complaît
+ A rendre ma muse gaillarde.
+ La gaudriole en mes cartons,
+ A ses yeux offre une lacune,
+ Elle me garderait rancune, )
+ > _Bis_
+ Si je ne chantais les tétons.)
+
+ * * * * *
+
+ Dans le sein fécond qui le porte,
+ L'homme fait neuf mois de séjour;
+ Impatient de voir le jour,
+ De ses pieds il frappe à la porte.
+ A peine est-il né qu'à tâtons
+ Le jeune espiègle entre en licence,
+ Et, sans égards pour la décence,
+ A sa mère il prend les tétons.
+
+ * * * * *
+
+ Chacun de vous a sa manie,
+ Amis; mais je ne doute point
+ Que votre penchant sur ce point,
+ Avec le mien ne s'harmonie.
+ Et je crois bien que nous goûtons
+ Même plaisir et même ivresse,
+ Quand notre main frôle et caresse
+ Tour-à-tour deux jolis tétons.
+
+ * * * * *
+
+ Il est un usage contraire
+ A la pudeur qui vous régit;
+ Votre modestie en rougit;
+ Mais elle ne peut s'y soustraire.
+ Belles, quand nous vous accostons,
+ De l'arc-boutant de la nature
+ Votre oeil furtif prend la mesure,
+ Le notre toise les tétons.
+
+ * * * * *
+
+ Dumont dit à son fils Hilaire:
+ --Il faut enfin te décider,
+ Et conduire, sans plus tarder,
+ Au temple d'hymen Rose ou Claire.
+ --Papa, mon choix est fait; partons:
+ De Claire la beauté me flatte,
+ Mais elle a la poitrine plate
+ Et sa soeur a de gros tétons.
+
+ * * * * *
+
+ Paul et Justine se conviennent.
+ L'amour paraît combler leurs voeux;
+ C'est à leurs mutuels aveux
+ Pourtant que l'un à l'autre ils tiennent:
+ Grâce à leurs marchands de cartons,
+ Aux amateurs ils font des niches,
+ L'un avec des mollets postiches
+ Et l'autre avec de faux tétons.
+
+ * * * * *
+
+ Nature dit à la fillette,
+ Qui les voit poindre en son corset:
+ Craignez que le noeud d'un lacet
+ N'en comprime la peau douillette;
+ Qu'entre leurs deux jolis boutons
+ Le même espace s'interpose:
+ Dans vingt ans où je les pose
+ Qu'Amour trouve encor les tétons.
+
+ * * * * *
+
+ A notre liberté publique
+ Je tiens par goût et par devoir,
+ Et dans aucun temps le pouvoir
+ Ne m'a fait changer de tactique.
+ Au diable les ventrus gloutons
+ De Villèle et de Bonaparte;
+ Car la liberté sans la Charte
+ C'est une femme sans tétons.
+
+ AUG. GILLES.
+
+FIN.
+
+
+
+
+TABLE DES MATIÈRES.
+
+Avant-propos
+
+Épître Dédicatoire.--Sonnet.--Les pommes
+
+Chap. I.--Des tétons.--De leur pouvoir et de leurs
+charmes.--De la brune.--Pour la blanche.--Marot.--Marin.--Cyrano
+de Bergerac.--Vers de Cotin sur une belle gorge.--Boursault.--Le
+coeur volé.--Parny.--Le crucifié.--La Motte.--Le Poëte sans
+fard.--Le Pays.--Les deux saints
+
+Chap. II.--Des beaux tétons.--La femme parfaite ou les
+trente points de beauté.--_Mulieris pulchritudo._--_Le
+Momus redivivus._--Blason de la belle fille.--Épigramme
+par le sieur Motin.--Chanson.--Sur le beau tétin.--Les
+tétons.--Benserade.--Bois-Robert.--La puce de Mme des
+Roches.--Madrigal.--Les délices de la poésie galante.--Sur
+une sangsue qui pique le sein de Sylvie.--Le buse.--L'amour
+sur une gorge rebondie.--Louis XV et la gorge de
+Marie-Antoinette.--Un amant dans le portrait de sa
+belle.--Marino.--Voisenon: les tétons de ma
+cousine.--Madrigal.--Victor Cousin
+
+Chap. III.--S'il est de la bienséance que les dames laissent
+voir leurs tétons, et s'il est permis aux amante de les
+toucher.--Molière.--Le petit père André.--Sur les femmes
+qui montrent leur sein.--Stances sur la défense des gorges
+découvertes des dames.--La vue d'un sein dégoûtait
+Louis XIII.--Mlle d'Hautefort.--La gorgée de vin sur
+un sein découvert.--Le père Barri.--Claude de Pontoux.
+--La pudeur.--Scarron.--Moyen de parvenir.--La
+duchesse de Bourgogne.--Mammillaires
+
+Chap. IV.--Du langage des tétons.--Le père Bougeant.--Les
+Innocents.--Ovide et Corine
+
+Chap. V.--Des laids
+tétons.--Boileau.--Le Brun.--Régnier.--Sygognes.--Maynard.--Urbain
+Chevreau.--Antoine Legrand.--Voltaire.--Deguerle.--La
+métamorphose.--Mercier de Compiègne.--Le fichu menteur
+
+Chap. VI.--Des contrées où les femmes sont le mieux partagées
+de tétons.--Les tétons des Anglaises.--Les tétons
+de couvents.--Les tétons africains
+
+Chap. VII.--De l'éloquence des tétons.--Phryné devant
+l'Aréopage.--La fraise et l'oeuf.--Zadig
+
+Chap. VIII.--Moyens de conserver la gorge.--Les seins
+postiches.--Mme Tolleret.--Poppée
+
+Chap. IX.--Recettes virginales.--Moyens à employer pour
+effacer les rides et diminuer l'ampleur du ventre et de la
+gorge; moyens pour la faire croître à celles qui sont privées
+de ce bel ornement.--Mémoires de Rochefort.--Fontenelle.--Pommade
+virginale dite à la comtesse.--Mme de Pompadour.--La coupe
+d'Hébé.--J. J. Rousseau.--La duchesse de Foix.--Étude physiologique sur
+les mamelles ou seins.--Cabanis.--L'action de donner
+à téter procure de véritables jouissances à certaines femmes.--Fait
+de luxure inouï d'une nourrice, rapporté par le
+docteur Audrieux.--Inconvénients de comprimer la gorge
+des religieuses.--Les tétons, chanson finale
+
+FIN DE LA TABLE.
+
+19193. PARIS.--TYPOGRAPHIE LAHURE rue de Fleurus, 9
+
+
+
+
+
+
+End of the Project Gutenberg EBook of Éloge du sein des femmes, by
+Claude-François-Xavier Mercier de Compiègne
+
+*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK ÉLOGE DU SEIN DES FEMMES ***
+
+***** This file should be named 18610-8.txt or 18610-8.zip *****
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+Produced by Chuck Greif, Carlo Traverso and the Online
+Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This
+file was produced from images generously made available
+by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at
+http://gallica.bnf.fr)
+
+
+Updated editions will replace the previous one--the old editions
+will be renamed.
+
+Creating the works from public domain print editions means that no
+one owns a United States copyright in these works, so the Foundation
+(and you!) can copy and distribute it in the United States without
+permission and without paying copyright royalties. Special rules,
+set forth in the General Terms of Use part of this license, apply to
+copying and distributing Project Gutenberg-tm electronic works to
+protect the PROJECT GUTENBERG-tm concept and trademark. Project
+Gutenberg is a registered trademark, and may not be used if you
+charge for the eBooks, unless you receive specific permission. If you
+do not charge anything for copies of this eBook, complying with the
+rules is very easy. You may use this eBook for nearly any purpose
+such as creation of derivative works, reports, performances and
+research. They may be modified and printed and given away--you may do
+practically ANYTHING with public domain eBooks. Redistribution is
+subject to the trademark license, especially commercial
+redistribution.
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+*** START: FULL LICENSE ***
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+Gutenberg-tm electronic work and you do not agree to be bound by the
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+used on or associated in any way with an electronic work by people who
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+things that you can do with most Project Gutenberg-tm electronic works
+even without complying with the full terms of this agreement. See
+paragraph 1.C below. There are a lot of things you can do with Project
+Gutenberg-tm electronic works if you follow the terms of this agreement
+and help preserve free future access to Project Gutenberg-tm electronic
+works. See paragraph 1.E below.
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+or PGLAF), owns a compilation copyright in the collection of Project
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+collection are in the public domain in the United States. If an
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+1.E.7. Do not charge a fee for access to, viewing, displaying,
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+ prepare (or are legally required to prepare) your periodic tax
+ returns. Royalty payments should be clearly marked as such and
+ sent to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation at the
+ address specified in Section 4, "Information about donations to
+ the Project Gutenberg Literary Archive Foundation."
+
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+ License. You must require such a user to return or
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+ and discontinue all use of and all access to other copies of
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+ distribution of Project Gutenberg-tm works.
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+electronic work or group of works on different terms than are set
+forth in this agreement, you must obtain permission in writing from
+both the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and Michael
+Hart, the owner of the Project Gutenberg-tm trademark. Contact the
+Foundation as set forth in Section 3 below.
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+effort to identify, do copyright research on, transcribe and proofread
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+works, and the medium on which they may be stored, may contain
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+of Replacement or Refund" described in paragraph 1.F.3, the Project
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+fees. YOU AGREE THAT YOU HAVE NO REMEDIES FOR NEGLIGENCE, STRICT
+LIABILITY, BREACH OF WARRANTY OR BREACH OF CONTRACT EXCEPT THOSE
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+TRADEMARK OWNER, AND ANY DISTRIBUTOR UNDER THIS AGREEMENT WILL NOT BE
+LIABLE TO YOU FOR ACTUAL, DIRECT, INDIRECT, CONSEQUENTIAL, PUNITIVE OR
+INCIDENTAL DAMAGES EVEN IF YOU GIVE NOTICE OF THE POSSIBILITY OF SUCH
+DAMAGE.
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+refund. If you received the work electronically, the person or entity
+providing it to you may choose to give you a second opportunity to
+receive the work electronically in lieu of a refund. If the second copy
+is also defective, you may demand a refund in writing without further
+opportunities to fix the problem.
+
+1.F.4. Except for the limited right of replacement or refund set forth
+in paragraph 1.F.3, this work is provided to you 'AS-IS', WITH NO OTHER
+WARRANTIES OF ANY KIND, EXPRESS OR IMPLIED, INCLUDING BUT NOT LIMITED TO
+WARRANTIES OF MERCHANTIBILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE.
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+1.F.5. Some states do not allow disclaimers of certain implied
+warranties or the exclusion or limitation of certain types of damages.
+If any disclaimer or limitation set forth in this agreement violates the
+law of the state applicable to this agreement, the agreement shall be
+interpreted to make the maximum disclaimer or limitation permitted by
+the applicable state law. The invalidity or unenforceability of any
+provision of this agreement shall not void the remaining provisions.
+
+1.F.6. INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the
+trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone
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+with this agreement, and any volunteers associated with the production,
+promotion and distribution of Project Gutenberg-tm electronic works,
+harmless from all liability, costs and expenses, including legal fees,
+that arise directly or indirectly from any of the following which you do
+or cause to occur: (a) distribution of this or any Project Gutenberg-tm
+work, (b) alteration, modification, or additions or deletions to any
+Project Gutenberg-tm work, and (c) any Defect you cause.
+
+
+Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm
+
+Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
+electronic works in formats readable by the widest variety of computers
+including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists
+because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from
+people in all walks of life.
+
+Volunteers and financial support to provide volunteers with the
+assistance they need, is critical to reaching Project Gutenberg-tm's
+goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
+remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
+Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
+and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations.
+To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
+and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4
+and the Foundation web page at http://www.pglaf.org.
+
+
+Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive
+Foundation
+
+The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
+501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
+state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
+Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
+number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at
+http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent
+permitted by U.S. federal laws and your state's laws.
+
+The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S.
+Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered
+throughout numerous locations. Its business office is located at
+809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email
+business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact
+information can be found at the Foundation's web site and official
+page at http://pglaf.org
+
+For additional contact information:
+ Dr. Gregory B. Newby
+ Chief Executive and Director
+ gbnewby@pglaf.org
+
+Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation
+
+Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
+spread public support and donations to carry out its mission of
+increasing the number of public domain and licensed works that can be
+freely distributed in machine readable form accessible by the widest
+array of equipment including outdated equipment. Many small donations
+($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
+status with the IRS.
+
+The Foundation is committed to complying with the laws regulating
+charities and charitable donations in all 50 states of the United
+States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
+considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
+with these requirements. We do not solicit donations in locations
+where we have not received written confirmation of compliance. To
+SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any
+particular state visit http://pglaf.org
+
+While we cannot and do not solicit contributions from states where we
+have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
+against accepting unsolicited donations from donors in such states who
+approach us with offers to donate.
+
+International donations are gratefully accepted, but we cannot make
+any statements concerning tax treatment of donations received from
+outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.
+
+Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation
+methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
+ways including checks, online payments and credit card
+donations. To donate, please visit: http://pglaf.org/donate
+
+
+Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic
+works.
+
+Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm
+concept of a library of electronic works that could be freely shared
+with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project
+Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support.
+
+Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
+editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S.
+unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
+keep eBooks in compliance with any particular paper edition.
+
+Most people start at our Web site which has the main PG search facility:
+
+ http://www.gutenberg.org
+
+This Web site includes information about Project Gutenberg-tm,
+including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
+Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to
+subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.
+
+*** END: FULL LICENSE ***
+
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+++ b/18610-h/18610-h.htm
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+ The Project Gutenberg eBook of Éloge du sein des femmes, by Mercier de Compiègne.
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+ </head>
+<body>
+
+
+<pre>
+
+The Project Gutenberg EBook of Éloge du sein des femmes, by
+Claude-François-Xavier Mercier de Compiègne
+
+This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with
+almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or
+re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included
+with this eBook or online at www.gutenberg.org
+
+
+Title: Éloge du sein des femmes
+ Ouvrage curieux
+
+Author: Claude-François-Xavier Mercier de Compiègne
+
+Release Date: June 17, 2006 [EBook #18610]
+
+Language: French
+
+Character set encoding: ISO-8859-1
+
+*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK ÉLOGE DU SEIN DES FEMMES ***
+
+
+
+
+Produced by Chuck Greif, Carlo Traverso and the Online
+Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This
+file was produced from images generously made available
+by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at
+http://gallica.bnf.fr)
+
+
+
+
+
+
+</pre>
+
+
+<h1>&Eacute;LOGE DU SEIN DES FEMMES</h1>
+
+<p class="center">
+<span class="smcap">Tir&eacute; A</span> 602 <span class="smcap">exemplaires num&eacute;rot&eacute;s, savoir</span>:</p>
+<table summary="exemplaires">
+<tr>
+<td align="right">400</td>
+<td align="right">exemplaires</td>
+<td>in-8&deg;</td>
+<td>couronne,</td>
+<td>papier</td>
+<td>verg&eacute;.</td>
+</tr>
+<tr>
+<td align="right">150</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">carr&eacute;,</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td>v&eacute;lin.</td>
+</tr>
+<tr>
+<td align="right">30</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td>chine.</td>
+</tr>
+<tr>
+<td align="right">30</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td>whatman.</td>
+</tr>
+<tr>
+<td align="right">2</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td align="center">&mdash;</td>
+<td>peau v&eacute;lin.</td>
+</tr>
+</table>
+
+<h4>N&deg; 285</h4>
+
+<h3>OUVRAGE CURIEUX</h3>
+
+<h3>DANS LEQUEL ON EXAMINE S'IL DOIT &Ecirc;TRE D&Eacute;COUVERT S'IL EST PERMIS DE LE
+TOUCHER QUELLES SONT SES VERTUS, SA FORME, SON LANGAGE, SON &Eacute;LOQUENCE
+LES PAYS O&Ugrave; IL EST LE PLUS BEAU ET LES MOYENS LES PLUS SURS DE LE
+CONSERVER</h3>
+
+<h3>PAR</h3>
+
+<h1>MERCIER DE COMPI&Egrave;GNE</h1>
+
+<h3>QUATRI&Egrave;ME &Eacute;DITION</h3>
+
+<h3><span class="smcap">REVUE, ANNOT&Eacute;E ET CONSID&Eacute;RABLEMENT AUGMENT&Eacute;E</span></h3>
+
+<div class="center">
+ <img src="images/frontispiece.png"
+ alt="Honni Soit Qui Mal Y Pense" title="Honni Soit Qui Mal Y Pense" />
+</div>
+
+<h3>PARIS</h3>
+
+<h3>A BARRAUD, EDITEUR-LIBRAIRE</h3>
+
+<h3>23, <span class="smcap">RUE DE SEINE</span></h3>
+
+<h3>1873</h3>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+
+<p><a name="table" id="table"></a></p>
+<table summary="table">
+
+<tr><td>
+<b>TABLE DES MATI&Egrave;RES.</b><br /><br />
+<a href="#AVANT-PROPOS"><b>AVANT-PROPOS.</b></a><br /><br />
+
+<a href="#EPITRE_DEDICATOIRE"><b>&Eacute;PITRE D&Eacute;DICATOIRE.&mdash;Sonnet.&mdash;Les pommes</b></a><br /><br />
+
+<a href="#CHAPITRE_PREMIER"><b>CHAPITRE I.&mdash;Des t&eacute;tons.&mdash;De leur pouvoir et de leurs charmes.&mdash;De
+la brune.&mdash;Pour la blanche.&mdash;Marot.&mdash;Marin.&mdash;Cyrano
+de Bergerac.&mdash;Vers de Cotin sur une belle gorge.&mdash;Boursault.&mdash;Le c&oelig;ur vol&eacute;.&mdash;Parny.&mdash;Le crucifi&eacute;.&mdash;La
+Motte.&mdash;Le Po&euml;te sans fard.&mdash;Le Pays.&mdash;Les deux saints</b></a><br /><br />
+
+<a href="#CHAPITRE_II"><b>CHAPITRE II.&mdash;Des beaux t&eacute;tons.&mdash;La femme parfaite ou les
+trente points de beaut&eacute;.&mdash;<i>Mulieris pulchritudo.</i>&mdash;<i>Le
+Momus redivivus.</i>&mdash;Blason de la belle fille.&mdash;&Eacute;pigramme
+par le sieur Motin.&mdash;Chanson.&mdash;Sur le beau t&eacute;tin.&mdash;Les
+t&eacute;tons.&mdash;Benserade.&mdash;Bois-Robert.&mdash;La puce de
+M<sup>me</sup> des Roches.&mdash;Madrigal.&mdash;Les d&eacute;lices de la po&eacute;sie
+galante.&mdash;Sur une sangsue qui pique le sein de Sylvie.&mdash;Le
+buse.&mdash;L'amour sur une gorge rebondie.&mdash;Louis XV
+et la gorge de Marie-Antoinette.&mdash;Un amant dans le portrait
+de sa belle.&mdash;Marino.&mdash;Voisenon: les t&eacute;tons de ma
+cousine.&mdash;Madrigal.&mdash;Victor Cousin</b></a><br /><br />
+
+<a href="#CHAPITRE_III"><b>CHAPITRE III.&mdash;S'il est de la biens&eacute;ance que les dames laissent
+voir leurs t&eacute;tons, et s'il est permis aux amante de les
+toucher.&mdash;Moli&egrave;re.&mdash;Le
+petit p&egrave;re Andr&eacute;.&mdash;Sur les femmes
+qui montrent leur sein.&mdash;Stances sur la d&eacute;fense des gorges
+d&eacute;couvertes des dames.&mdash;La vue d'un sein d&eacute;go&ucirc;tait
+Louis XIII.&mdash;M<sup>lle</sup> d'Hautefort.&mdash;La gorg&eacute;e de vin sur
+un sein d&eacute;couvert.&mdash;Le p&egrave;re Barri.&mdash;Claude de Pontoux.
+&mdash;La pudeur.&mdash;Scarron.&mdash;Moyen de parvenir.&mdash;La
+duchesse de Bourgogne.&mdash;Mammillaires</b></a><br /><br />
+
+<a href="#CHAPITRE_IV"><b>CHAPITRE IV.&mdash;Du langage des t&eacute;tons.&mdash;Le p&egrave;re Bougeant.&mdash;Les
+Innocents.&mdash;Ovide et Corine</b></a><br /><br />
+
+<a href="#CHAPITRE_V"><b>CHAPITRE V.&mdash;Des laids
+t&eacute;tons.&mdash;Boileau.&mdash;Le Brun.&mdash;R&eacute;gnier.&mdash;Sygognes.&mdash;Maynard.&mdash;Urbain
+Chevreau.&mdash;Antoine Legrand.&mdash;Voltaire.&mdash;Deguerle.&mdash;La m&eacute;tamorphose.&mdash;Mercier de Compi&egrave;gne.&mdash;Le fichu menteur</b></a><br /><br />
+
+<a href="#CHAPITRE_VI"><b>CHAPITRE VI.&mdash;Des contr&eacute;es o&ugrave; les femmes sont le mieux partag&eacute;es
+de t&eacute;tons.&mdash;Les t&eacute;tons des Anglaises.&mdash;Les t&eacute;tons
+de couvents.&mdash;Les t&eacute;tons africains</b></a><br /><br />
+
+<a href="#CHAPITRE_VII"><b>CHAPITRE VII.&mdash;De l'&eacute;loquence des t&eacute;tons.&mdash;Phryn&eacute; devant
+l'Ar&eacute;opage.&mdash;La fraise et l'&oelig;uf.&mdash;Zadig</b></a><br /><br />
+
+<a href="#CHAPITRE_VIII"><b>CHAPITRE VIII.&mdash;Moyens de conserver la gorge.&mdash;Les seins
+postiches.&mdash;M<sup>me</sup> Tolleret.&mdash;Popp&eacute;e</b></a><br /><br />
+
+<a href="#CHAPITRE_IX"><b>CHAPITRE IX.&mdash;Recettes virginales.&mdash;Moyens &agrave; employer pour
+effacer les rides et diminuer l'ampleur du ventre et de la
+gorge; moyens pour la faire cro&icirc;tre &agrave; celles qui sont priv&eacute;es
+de ce bel ornement.&mdash;M&eacute;moires de Rochefort.&mdash;Fontenelle.&mdash;Pommade
+virginale dite &agrave; la comtesse.&mdash;M<sup>me</sup>
+de Pompadour.&mdash;La coupe d'H&eacute;b&eacute;.&mdash;J. J. Rousseau.&mdash;La
+duchesse de Foix.&mdash;&Eacute;tude physiologique sur
+les mamelles ou seins.&mdash;Cabanis.&mdash;L'action de donner
+&agrave; t&eacute;ter procure de v&eacute;ritables jouissances &agrave; certaines femmes.&mdash;Fait
+de luxure inou&iuml; d'une nourrice, rapport&eacute; par le
+docteur Audrieux.&mdash;Inconv&eacute;nients de comprimer la gorge
+des religieuses.&mdash;Les t&eacute;tons, chanson finale</b></a><br /><br />
+</td></tr>
+</table>
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="AVANT-PROPOS" id="AVANT-PROPOS"></a><a href="#table">AVANT-PROPOS.</a></h2>
+
+
+<p>Ce fut en 1720 que parut &agrave; Amsterdam un volume intitul&eacute; les <i>T&eacute;tons</i>; il
+formait la troisi&egrave;me partie d'une s&eacute;rie o&ugrave; figuraient d&eacute;j&agrave; les <i>Yeux</i> et
+le <i>Nez</i>; le frontispice ajoutait qu'il y avait l&agrave; des &laquo;ouvrages
+curieux, galants et badins, compos&eacute;s pour le divertissement d'une
+certaine dame de qualit&eacute;, par J. P. N. du C.&raquo; Une annonce faite par un
+libraire hollandais, en 1721, informe le public que l'auteur se
+proposait de passer successivement en revue &laquo;toutes les parties du corps
+humain;&raquo; projet scabreux qu'il n'eut pas le temps d'effectuer ou dont
+les difficult&eacute;s l'arr&ecirc;t&egrave;rent. Diverses indications permettaient
+d'ailleurs d'attribuer la r&eacute;daction de ce triple recueil &agrave; &Eacute;tienne
+Roger, libraire actif, &eacute;tabli &agrave; Amsterdam, et qui mettait volontiers la
+main aux livres qu'il offrait au public. Toutefois les bibliographes les
+plus accr&eacute;dit&eacute;s mettent l'&oelig;uvre sur le compte de Jean-Pierre-Nicolas
+Ducommun, dit V&eacute;ron, dont les initiales cadrent fort bien avec l'&eacute;nonc&eacute;
+du titre, et qui est l'auteur de diverses pi&egrave;ces de vers (fort
+m&eacute;diocres) ins&eacute;r&eacute;es dans la troisi&egrave;me partie du recueil en question.</p>
+
+<p>Un quart de si&egrave;cle s'&eacute;coula, et le volume mis au jour &agrave; Amsterdam
+reparut avec le titre suivant: <i>&Eacute;loge des t&eacute;tons, ouvrage curieux,
+galant et badin, en vers et en prose</i>, publi&eacute; par ***, Francfort, 1746,
+in-8. En 1775, cet <i>Eloge</i> fut derechef r&eacute;imprim&eacute; sous la rubrique de
+<i>Cologne, &agrave; l'enclume de v&eacute;rit&eacute;</i>, 1775; on y joignit diverses <i>pi&egrave;ces
+amusantes et la Rinomachie ou Combat des nez</i>.</p>
+
+<p>Vers la fin du si&egrave;cle dernier, vivait &agrave; Paris un litt&eacute;rateur m&eacute;diocre,
+mais actif, Claude-Francois-Xavier Mercier, surnomm&eacute; de Compi&egrave;gne, afin
+de le distinguer de divers autres Mercier; il &eacute;tait n&eacute; dans cette ville
+en 1763. Se trouvant sans ressources pendant les orages de la
+R&eacute;volution, il demanda &agrave; sa plume des moyens d'existence; il se fit le
+vendeur de ses &eacute;crits, et il les multiplia rapidement. Il r&eacute;digeait, il
+compilait, il traduisait, il composait en prose et en vers une multitude
+d'in-18 qui se succ&eacute;daient avec promptitude et qui portaient souvent
+l'empreinte de la rapidit&eacute; avec laquelle ils &eacute;taient &eacute;labor&eacute;s. Mercier
+d'ailleurs, il faut le reconna&icirc;tre, manquait de go&ucirc;t, et son
+instruction &eacute;tait fort superficielle. Il a laiss&eacute; divers &eacute;crits dont il
+est inutile de rappeler les titres, mais qui excitent, &agrave; bon droit, les
+craintes du chaste lecteur; il aimait &agrave; traiter des sujets bizarres; il
+mit en fran&ccedil;ais, en y joignant des additions assez consid&eacute;rables, une
+fac&eacute;tie de l'Allemand Rodolphe Goclemin, et il les publia sous le titre
+d'<i>Eloge du pet</i>, dissertation historique, anatomique et philosophique
+sur son origine, son antiquit&eacute;, ses vertus, sa figure, les honneurs
+qu'on lui a rendus chez les peuples anciens et les fac&eacute;ties auxquelles
+il a donn&eacute; lieu (1799, in-18). Longtemps oubli&eacute;s, les petits volumes
+sortis de l'officine de Mercier trouvent aujourd'hui des amateurs
+tr&egrave;s-dispos&eacute;s &agrave; les recueillir; dans le nombre figure l'<i>Eloge du sein
+des femmes</i>, publi&eacute; &agrave; Paris en 1800; c'est un <i>riffacimiento</i> du volume
+dont nous avons mentionn&eacute; trois &eacute;ditions ant&eacute;rieures. Mais selon son
+usage, Mercier ne s'est point born&eacute; &agrave; une simple reproduction; il a
+supprim&eacute; des longueurs, il a ajout&eacute; des d&eacute;tails nouveaux, il a ins&eacute;r&eacute;
+des pi&egrave;ces de vers parmi lesquelles il en est d'assez agr&eacute;ables; il a
+remani&eacute; la division du texte original, qui se trouve offrir trois
+chapitres nouveaux; il a joint &agrave; tout ceci une gravure due &agrave; un burin
+peu exerc&eacute; qui a reproduit gauchement un dessin lourd et maussade. Il
+e&ucirc;t &eacute;t&eacute; facile de trouver sans doute un artiste mieux inspir&eacute;.</p>
+
+<p>Le petit volume en question est devenu assez rare, surtout en bon &eacute;tat;
+nous avons pens&eacute; que quelques amateurs feraient bon accueil &agrave; une
+quatri&egrave;me &eacute;dition de cet <i>Eloge</i>; ils ne regretteront pas sans doute d'y
+trouver une sorte d'anthologie de ce que divers po&euml;tes ont dit &agrave; propos
+du sein; nous avons d&ucirc; nous borner &agrave; choisir, car si nous avions voulu
+tout reproduire, nous aurions grandement d&eacute;pass&eacute; les bornes que nous
+avons d&ucirc; nous prescrire; mais nous esp&eacute;rons que nos recherches, dans des
+volumes assez peu connus parfois, nous auront amen&eacute;s &agrave; mettre la main
+sur des morceaux gracieux qu'on lira avec plaisir.</p>
+
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="EPITRE_DEDICATOIRE" id="EPITRE_DEDICATOIRE"></a><a href="#table">&Eacute;PITRE D&Eacute;DICATOIRE.</a></h2>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">SONNET.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>L'auteur du trait&eacute; des Tetons</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Chante si haut sur la mati&egrave;re</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Qu'il donneroit musique enti&egrave;re,</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>S'il descendoit de quelques tons.</i><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>Mais comme sa muse est alti&egrave;re,</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Il n'ira pas chez ses Martons,</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Chanter leurs tourelontontons,</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>De l&agrave; jusqu'&agrave; la jarreti&egrave;re.</i><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>Si cependant du haut en bas,</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Il alloit pousser ses &eacute;bats;</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>On entendroit belle harmonie!</i><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>V&eacute;nus, peinte par tous ses traits,</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Feroit &eacute;clater mille attraits</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Dans une telle anatomie.</i><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i6">Par C. L. d'Ar.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p><i>Nota.</i> Nous avons supprim&eacute; l'&eacute;pitre d&eacute;dicatoire de Ducommun, sur
+l'&eacute;dition d'Amsterdam, 1720, parce qu'elle n'a rien de neuf, ni de
+piquant; nous la rempla&ccedil;ons par une petite pi&egrave;ce de vers assez rare et
+qui vient ici fort &agrave; propos, puisqu'elle s'adresse aux dames.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">LES POMMES.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Le ciel, pour enchanter les hommes,<br /></span>
+<span class="i0">Vous a fait pr&eacute;sent de six pommes:<br /></span>
+<span class="i0">Sur votre visage il a mis<br /></span>
+<span class="i0">Deux petites pommes d'apis<br /></span>
+<span class="i0">D'un bel incarnat empourpr&eacute;es,<br /></span>
+<span class="i0">Et que nature a color&eacute;es:<br /></span>
+<span class="i0">Les soucoupes et les cristaux<br /></span>
+<span class="i0">Ne portent pas de fruits si beaux.<br /></span>
+<span class="i0">Plus bas une fra&icirc;che tablette,<br /></span>
+<span class="i0">En supporte deux de rainette;<br /></span>
+<span class="i0">Et l'on trouve encore plus bas<br /></span>
+<span class="i0">Deux autres qu'on ne nomme pas.<br /></span>
+<span class="i0">Elles sont de plus grosse esp&egrave;ce,<br /></span>
+<span class="i0">Et n'ont pas moins de gentillesse:<br /></span>
+<span class="i0">Ce sont deux pommes de rambour,<br /></span>
+<span class="i0">Qu'on cueille au jardin de l'amour.<br /></span>
+<span class="i0">Voil&agrave; trois paires de jumelles<br /></span>
+<span class="i0">Qui font tourner bien des cervelles.<br /></span>
+<span class="i0">&Egrave;ve perdit le genre humain,<br /></span>
+<span class="i0">N'ayant qu'une pomme &agrave; la main;<br /></span>
+<span class="i0">Mais notre app&eacute;tissante m&egrave;re,<br /></span>
+<span class="i0">En laissait voir deux sur son sein.<br /></span>
+<span class="i0">Et l'attrait des fruits de Cyth&egrave;re,<br /></span>
+<span class="i0">Dont l'aspect le mettait en train,<br /></span>
+<span class="i0">Fit succomber notre bon p&egrave;re.<br /></span>
+<span class="i0">Satan, dont l'esprit est malin,<br /></span>
+<span class="i0">Entrait aussi dans le myst&egrave;re.<br /></span>
+<span class="i0">Press&eacute;s, comme Adam, de manger,<br /></span>
+<span class="i0">Nous p&eacute;tillons d'impatience<br /></span>
+<span class="i0">Aupr&egrave;s du jardin potager<br /></span>
+<span class="i0">Dont vous portez la ressemblance.<br /></span>
+<span class="i0">Vive la pomme et les pommiers!<br /></span>
+<span class="i0">Leur aspect seul nous ravigotte:<br /></span>
+<span class="i0">On doit baiser les deux premiers,<br /></span>
+<span class="i0">Avec les seconds on pelotte:<br /></span>
+<span class="i0">Triomphe! amour! aux deux derniers.<br /></span>
+<span class="i0">Heureux qui les met en compotte!<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="center">
+ <img src="images/010.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="CHAPITRE_PREMIER" id="CHAPITRE_PREMIER"></a><a href="#table">CHAPITRE PREMIER.</a></h2>
+
+<h3>DES T&Eacute;TONS, DE LEUR POUVOIR ET DE LEURS CHARMES.</h3>
+
+
+<p>J'avais d'abord le dessein de faire un trait&eacute; de la sup&eacute;riorit&eacute; du teint
+blanc sur le brun, et ces deux chansons de Cl. Marot m'en avaient fourni
+l'id&eacute;e:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">DE LA BRUNE.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Pourtant si je suis brunette,<br /></span>
+<span class="i0">Amy, n'en prenez esmoy:<br /></span>
+<span class="i0">Autant suis ferme et jeunette,<br /></span>
+<span class="i0">Qu'une plus blanche que moy<br /></span>
+<span class="i0">Le blanc effacer je voy.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Couleur noire est toujours une,<br /></span>
+<span class="i0">J'ayme mieux donc estre brune<br /></span>
+<span class="i0">Avecques ma fermet&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Que blanche comme la lune<br /></span>
+<span class="i0">Tenant de legeret&eacute;.<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">POUR LA BLANCHE.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Pourtant si le blanc s'efface,<br /></span>
+<span class="i0">Il n'est pas &agrave; despriser:<br /></span>
+<span class="i0">Comme luy le noir se passe,<br /></span>
+<span class="i0">Il a beau temporiser.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Je ne veux point mespriser,<br /></span>
+<span class="i0">Ne mesdire en ma revanche:<br /></span>
+<span class="i0">Mais l'ayme mieux estre blanche<br /></span>
+<span class="i0">Vingt ou trente ans ensuivant<br /></span>
+<span class="i0">En beaut&eacute; nayve et franche,<br /></span>
+<span class="i0">Que noire tout mon vivant.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Mais &agrave; quoi bon raisonner simplement sur les couleurs, lorsqu'il y a
+tant d'autres beaut&eacute;s plus solides chez les femmes! ce serait mal
+employer son temps, et abuser de la bont&eacute; de mes lectrices. Ce n'est
+donc, ni de vos pieds mignons, ni de vos belles mains potel&eacute;es, ni de
+vos yeux brillants, ni de votre joli petit nez, ni des autres parties de
+votre charmant ensemble, que je veux vous entretenir aujourd'hui.
+N'appr&eacute;hendez pas que je puisse vous faire rougir. Je suis de l'avis de
+Marot, lorsqu'il dit:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Arri&egrave;re! mots qui sonnent salement,<br /></span>
+<span class="i0">Parlons aussi des membres seulement<br /></span>
+<span class="i0">Que l'on peut voir, sans honte, descouverts;<br /></span>
+<span class="i0">Et des honteux ne souillons point nos vers.<br /></span>
+<span class="i0">Car, quel besoin est de mettre en lumi&egrave;re<br /></span>
+<span class="i0">Ce qu'est nature &agrave; cacher coustumi&egrave;re?...<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Ainsi, pour ne pas vous tenir plus longtemps dans l'incertitude, c'est
+l'&eacute;loge des t&eacute;tons que je vais faire. Le sujet est beau, il est grand,
+il a exerc&eacute; les g&eacute;nies les plus &eacute;lev&eacute;s. Le cavalier Marin appelle les
+t&eacute;tons des belles, deux tours vivantes d'alb&acirc;tre, d'o&ugrave; l'amour blesse
+les amants: il les compare &agrave; deux &eacute;cueils, contre lesquels notre libert&eacute;
+vient faire agr&eacute;ablement naufrage: il les appelle deux mondes de
+beaut&eacute;s, &eacute;clair&eacute;s par deux beaux soleils, c'est-&agrave;-dire les yeux. Un
+po&egrave;te fran&ccedil;ais, qui n'est gu&egrave;res moins ing&eacute;nieux que le cavalier Marin,
+moins magnifique dans ses peintures, mais plus juste et plus gai, les
+appelle dans une de ses chansons, deux pommes, et il ajoute:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Heureux qui peut monter sans bruit<br /></span>
+<span class="i0">Sur l'arbre qui porte ce fruit!<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Cyrano de Bergerac trouve mauvais que les &eacute;crivains modernes, qui
+veulent peindre une beaut&eacute; parfaite, emploient l'or, l'ivoire, l'azur,
+le corail, les roses et les lis: il n'a pas plus raison de les tourner
+en ridicule, parce qu'ils clouent les &eacute;toiles dans les yeux des belles,
+et qu'ils dressent des montagnes de neige &agrave; la place de leur sein: en
+effet, ces expressions pompeuses sont dignes de ces grands objets, et le
+sein des femmes a des charmes encore au-dessus de ceux de leurs yeux.
+C'est ce que Cotin nous d&eacute;montre par des vers sur une belle gorge:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i4">Dans l'entretien d&eacute;licieux<br /></span>
+<span class="i0">De la charmante Iris dont je suis idol&acirc;tre,<br /></span>
+<span class="i4">Va, pose, Amour, sur ses beaux yeux,<br /></span>
+<span class="i0">Le voile qu'elle a mis sur sa gorge d'alb&acirc;tre.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i2">Quand le printems a banni la froidure,<br /></span>
+<span class="i4">On ne voit point de si beaux lis<br /></span>
+<span class="i4">Aux jardins les plus embellis<br /></span>
+<span class="i0">Par les soins curieux qu'apporte la nature.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Depuis que de mon c&oelig;ur je fis l'heureuse perte,<br /></span>
+<span class="i4">J'ai visit&eacute; bien des climats,<br /></span>
+<span class="i0">En d&eacute;pit des chaleurs, en d&eacute;pit des frimats:<br /></span>
+<span class="i0">Et si je n'ai point fait de telle d&eacute;couverte.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i4">Pour voir un objet sans pareil,<br /></span>
+<span class="i0">Il ne faut point courir sur tant de mers profondes,<br /></span>
+<span class="i4">Ni voir l'un et l'autre soleil,<br /></span>
+<span class="i4">Il faut voir ces deux petits mondes.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Pour rendre de mon sort tout l'univers jaloux,<br /></span>
+<span class="i0">Il suffit qu'&agrave; mes yeux leur blancheur on &eacute;tale;<br /></span>
+<span class="i0">L'Aurore n'offrit rien &agrave; l'amoureux C&eacute;phale,<br /></span>
+<span class="i4">De si charmant et de si doux.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Ah! si, sans leur d&eacute;plaire, on osait les toucher,<br /></span>
+<span class="i0">Et si deux belles mains n'y mettaient point d'obstacle,<br /></span>
+<span class="i4">Serait-ce point, par un miracle,<br /></span>
+<span class="i4">Amollir un c&oelig;ur de rocher?<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i4">Dans l'entretien d&eacute;licieux<br /></span>
+<span class="i0">De la divine Iris, dont je suis idol&acirc;tre:<br /></span>
+<span class="i0">Amour, en ma faveur, viens mettre sur ses yeux<br /></span>
+<span class="i0">Le voile qu'elle a mis sur sa gorge d'alb&acirc;tre.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Une belle gorge avait tant d'empire sur le c&oelig;ur de Boursault, que pour
+en voir une, &agrave; travers la mousseline, il devenait amoureux jusques &agrave; la
+folie. C'est ce que prouvera ce beau fragment d'une lettre qu'il
+&eacute;crivait &agrave; son ami Charpentier:</p>
+
+<p>&laquo;Je vous ai fait promettre qu'apr&egrave;s d&icirc;ner nous irions ensemble chez la
+belle brune, avec qui nous jou&acirc;mes hier au logis de M<sup>me</sup> Deshouli&egrave;res: je
+vous dispense de me tenir parole, &agrave; moins que vous ne me donniez caution
+bourgeoise pour la s&ucirc;ret&eacute; de ma personne. Ce n'est pas que je doive rien
+appr&eacute;hender pour ma libert&eacute;. D&eacute;livr&eacute; de la tyrannie d'une blonde qui m'a
+fait soupirer quinze ou seize mois pour rien, j'ai fait serment de ne
+tomber de ma vie en de pareilles fautes; mais dans les tems de ma
+premi&egrave;re servitude, il m'est &eacute;chapp&eacute; tant de sermens, j'en ai tenu si
+peu, que je n'ose plus me mettre au hasard de jurer de rien. Je trouvai
+hier votre brune si bien faite, ses yeux me parurent si brillans, sa
+bouche si petite, sa gorge, que je ne vis que par les yeux de la foi,
+est, je crois, si belle, que si vous n'eussiez arrach&eacute; ma vue de dessus
+ses charmes, quand vous me f&icirc;tes souvenir qu'il &eacute;tait tems de nous en
+aller, je sentais d&eacute;j&agrave; ce que je sentis la premi&egrave;re fois que je
+commen&ccedil;ai d'aimer. Mon c&oelig;ur, que j'ai fait le gardien de ma franchise,
+m'a jou&eacute; tant de tours, que, si tant&ocirc;t je vous accompagne &agrave; la visite
+que vous avez dessein de rendre, je gage que j'en reviens aussi charg&eacute;
+d'amour, que si on le donnait <i>pro Deo</i>.&raquo;</p>
+
+<p>Le m&ecirc;me auteur, faisant &agrave; sa ma&icirc;tresse le portrait d'une belle, marque
+bien expressivement la victoire assur&eacute;e que remporte une belle gorge sur
+une &acirc;me masculine.</p>
+
+<p>&laquo;En v&eacute;rit&eacute;, Babet, dit-il, si tu ne reviens bient&ocirc;t de Bagnolet, tu
+cours risque de ne pas me trouver constant &agrave; ton retour. On me mena hier
+au bal, o&ugrave; je trouvai une jeune personne qui n'a pas moins de belles
+qualit&eacute;s que toi. Elle a les cheveux d'un blond cendr&eacute;, tout-&agrave;-fait
+beau, mais qui n'approche pourtant pas de la couleur des tiens. Elle a
+le front grand et &eacute;lev&eacute;, mais le tien l'est encore davantage. Ses
+sourcils qui ne paraissent presque point, parce qu'ils sont blonds, se
+montrent toutefois assez, pour faire remarquer que leur sym&eacute;trie est la
+plus r&eacute;guli&egrave;re du monde. Ses yeux, qui sont aussi noirs que les tiens
+sont bleus, sont si bien fendus, qu'ils ne jettent jamais un regard,
+sans faire une conqu&ecirc;te. Ils ont autant de vivacit&eacute; que les tiens ont de
+douceur, et ils semblent faits pour prendre de l'amour, comme les tiens
+pour en donner. On voit sur ses joues une nuance de blanc et d'incarnat
+si &eacute;clatante, qu'il semble qu'elle tienne des mains de l'art un pr&eacute;sent
+qui ne vient que de celles de la nature, qui a pris tant de peine apr&egrave;s
+elle, que, sans toi, qui es son chef-d'&oelig;uvre, elle serait le plus beau
+de tous ses ouvrages. Son nez, qui n'est ni trop grand ni trop petit,
+est justement comme il le faut, pour avoir beaucoup de ressemblance avec
+le tien: sa bouche, qui n'est pas si petite que la tienne, est plus
+petite qu'aucune autre que j'aie jamais vue. Elle a les l&egrave;vres si
+fra&icirc;ches et si vermeilles, que, depuis ton absence, je n'ai rien
+envisag&eacute; de plus charmant. Ses dents sont si blanches et si bien
+rang&eacute;es, que je lui faisais cent contes risibles, pour avoir le plaisir
+de les voir souvent. Le trou qu'elle a au menton me fait souvenir
+qu'elle en a encore aux joues, ce qui donne une merveilleuse gr&acirc;ce au
+reste de son visage. Pour sa gorge, on peut dire:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Que c'est l&agrave; que l'Amour, pour lancer tous ses traits,<br /></span>
+<span class="i0">Entre deux monts d'alb&acirc;tre est camp&eacute; tout expr&egrave;s.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>&laquo;Je te jure, Babet, que je n'ai jamais rien vu de si aimable; si mon
+<i>gal&eacute;rien de c&oelig;ur</i>, qui n'&eacute;chappe jamais d'une cha&icirc;ne que pour tomber
+dans une autre, ne se contentait de la gloire de tes fers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Ma constance &eacute;branl&eacute;e allait faire naufrage.&raquo;<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>N'est-ce pas la jolie gorge de Dorim&egrave;ne qui fait ainsi d&eacute;lirer
+Sganarelle, lorsqu'il dit:</p>
+
+<p>&laquo;O&ugrave; allez-vous, belle mignonne, ch&egrave;re &eacute;pouse future de votre &eacute;poux
+futur? Eh bien! ma belle, c'est maintenant que nous allons &ecirc;tre heureux
+l'un et l'autre! vous ne serez plus en droit de me rien refuser; je
+pourrai faire avec vous tout ce qui me plaira, sans que personne s'en
+scandalise. Vous allez &ecirc;tre &agrave; moi, depuis la t&ecirc;te jusqu'aux pieds, et je
+serai le ma&icirc;tre de tout! de vos petits yeux &eacute;veill&eacute;s, de votre petit
+nez fripon, de vos l&egrave;vres app&eacute;tissantes, de votre petit menton, de vos
+petits t&eacute;tons rondelets, de votre, etc. Enfin toute votre personne sera
+&agrave; ma discr&eacute;tion, et je serai &agrave; m&ecirc;me pour vous caresser comme je voudrai.
+N'&ecirc;tes-vous pas bien aise de ce mariage, mon aimable pouponne?&raquo;</p>
+
+<p>On croira peut-&ecirc;tre que ce discours de Sganarelle est une gradation, et
+que ce qu'il laisse en blanc, est le plus fort objet de sa passion; je
+le veux bien, mais en ce cas, il a le go&ucirc;t un peu trop terrestre et
+grossier. Tel est celui de l'auteur des vers suivants, &agrave; sa ma&icirc;tresse,
+sur un mal de gorge:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Il est bien peu galant de vous prendre &agrave; la gorge,<br /></span>
+<span class="i2">Ce mal qui dedans vous regorge;<br /></span>
+<span class="i0">C'est &ecirc;tre &agrave; vous saisir un des plus maladroits;<br /></span>
+<span class="i0">Si j'avois, comme lui, sur vous droit de m'&eacute;tendre,<br /></span>
+<span class="i0">Et, comme lui, le choix de ce qu'on peut vous prendre,<br /></span>
+<span class="i0">Je vous saisirois bien par des meilleurs endroits.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Que dira-t-on de la pens&eacute;e d'un autre auteur qui dit: l'amour ressemble
+&agrave; un jeu de paume; quand une fille se laisse baiser la main, cela vaut
+quinze; si elle souffre que l'on prenne un baiser sur ses l&egrave;vres, cela
+vaut trente; si elle permet que ce soit sur la gorge, cela vaut
+quarante-cinq: il ne faut plus qu'un coup, et le jeu est gagn&eacute;.</p>
+
+<p>Je raconterai l'histoire suivante, parce qu'elle est vraie:</p>
+
+<p>&laquo;On a souvent parl&eacute; de la force du sang, mais on n'a pas aussi souvent
+parl&eacute; de la gorge; quoi-qu'avec beaucoup de raison, on appelle
+aujourd'hui les t&eacute;tons, le <i>boute-en-train</i>. Le fait suivant prouve
+admirablement leur vertu, qu'on peut nommer de r&eacute;surrection, et de
+r&eacute;surrection de la chair. Dans la plupart des &eacute;glises papistes o&ugrave; la
+superstition &eacute;tait dominante, il se faisait des c&eacute;r&eacute;monies tout &agrave; fait
+extravagantes. La ville de... &eacute;tait un des plus fameux th&eacute;&acirc;tres de ces
+repr&eacute;sentations de myst&egrave;res ridiculement fanatiques. C'&eacute;tait une coutume
+&eacute;tablie de temps imm&eacute;morial, de repr&eacute;senter chaque ann&eacute;e, dans la
+semaine sainte, les myst&egrave;res de la passion. Pour aller au solide, sans
+s'amuser &agrave; la bagatelle, on ne manquait pas, le jour du vendredi saint,
+d'offrir aux d&eacute;vots spectateurs une sc&egrave;ne burlesque du crucifiement du
+Sauveur du monde. On choisissait pour cela un jeune homme de la ville,
+auquel on faisait porter une croix fort pesante, &agrave; laquelle on
+l'attachait avec des cordes au lieu de clous, et dans une nudit&eacute; presque
+compl&egrave;te. Je dis presque, parce que l'impudeur n'&eacute;tait pas encore
+parvenue au point de d&eacute;voiler certaines parties qui doivent &ecirc;tre
+cach&eacute;es. On les voila donc chez notre jeune homme avec une ceinture de
+papier. Il faut remarquer que le jouvenceau &eacute;tait le corps du monde le
+mieux form&eacute;, le plus vigoureux en apparence, et de la plus belle carrure
+d'&eacute;paules. Et que la m&ecirc;me coutume faisait choisir entre les plus belles
+filles de la ville, trois tendrons qu'on aurait pris pour des V&eacute;nus,
+pour repr&eacute;senter les trois Maries pleurantes au pied de la croix. On
+n'avait pas seulement &eacute;gard aux traits r&eacute;guliers du visage, ni &agrave; la
+finesse de la taille, on voulait qu'elles fussent encore richement
+pourvues du grand mobile de la tendresse, je veux dire fournies de
+t&eacute;tons &agrave; l'Anglaise, que l'on laissait en pleine libert&eacute; d'&eacute;mouvoir la
+copie du Christ. Or, l'ann&eacute;e o&ugrave; se passa le fait que je raconte, le
+choix fut si bon (les pr&ecirc;tres se connaissent en attraits) que l'on mit
+sous la croix, dans le beau d&eacute;sordre de la douleur, les trois filles les
+plus ravissantes. On e&ucirc;t pris chacune d'elle pour V&eacute;nus, ou toutes trois
+pour les Gr&acirc;ces. Elles ne furent pas plut&ocirc;t sous les yeux du crucifi&eacute;,
+qu'elles firent miracle, je veux dire que, malgr&eacute; la situation o&ugrave; il
+&eacute;tait, et la majest&eacute; de son personnage, les trois Maries produisirent
+l'effet le plus &eacute;tonnant que puisse peindre la chronique scandaleuse.
+Notre Hercule galant, post&eacute; &agrave; l'avantage, avait en perspective une
+demi-douzaine de t&eacute;tons capables, par leur systole et leur diastole, de
+subjuguer la vertu du plus froid anachor&egrave;te, ce qui occasionna un
+incident tr&egrave;s-comique et tr&egrave;s-profane, car le crucifi&eacute;, au lieu de
+prononcer du haut de sa croix des paroles dignes de celui qu'il
+repr&eacute;sentait, pronon&ccedil;a des turpitudes dignes de l'abolition &eacute;ternelle
+d'une c&eacute;r&eacute;monie aussi ind&eacute;cente, et telles en un mot qu'on peut les
+deviner. Enfin, n'y pouvant plus tenir, il ne put s'emp&ecirc;cher de crier:
+&laquo;Otez donc de devant mes yeux les trois Maries, ou le papier va
+crever.&raquo; Le scandale que fit na&icirc;tre une telle action, et des paroles qui
+compromettaient &agrave; ce point la religion, firent rentrer l'archev&ecirc;que en
+lui-m&ecirc;me, et lui firent comprendre qu'elles l'exposaient &agrave; la ris&eacute;e
+publique. Il supprima donc un usage, ou plut&ocirc;t un abus qui tendait
+directement au m&eacute;pris du culte, de mani&egrave;re qu'il n'en fut plus parl&eacute;
+depuis<a name="FNanchor_1_1" id="FNanchor_1_1"></a><a href="#Footnote_1_1" class="fnanchor">[1]</a>.</p>
+
+<p>Un peintre peut venir &agrave; bout de repr&eacute;senter aux yeux toutes les gr&acirc;ces
+d'un beau visage. Il &eacute;choue ordinairement, quand il essaye de peindre
+une belle gorge. La Motte en pourrait &ecirc;tre une preuve dans le portrait
+suivant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Toi, par qui ta toile s'anime.<br /></span>
+<span class="i0">Peintre savant, prends ton pinceau:<br /></span>
+<span class="i0">Et qu'&agrave; mes yeux ton art exprime<br /></span>
+<span class="i0">Tout ce qu'ils ont vu de plus beau.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Ne m'entends-tu pas? peins Silvie:<br /></span>
+<span class="i0">Mais choisis l'instant fortun&eacute;<br /></span>
+<span class="i0">O&ugrave;, pour le reste de ma vie,<br /></span>
+<span class="i0">Mon c&oelig;ur lui fut abandonn&eacute;.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Au bal, en habit d'Espagnole,<br /></span>
+<span class="i0">Elle &ocirc;toit un masque jaloux,<br /></span>
+<span class="i0">Plus promptement qu'un trait ne vole,<br /></span>
+<span class="i0">Je fus perc&eacute; de mille coups.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Peins ses yeux doux et pleins de flamme,<br /></span>
+<span class="i0">D'o&ugrave; l'Amour me lan&ccedil;a ses traits;<br /></span>
+<span class="i0">D'o&ugrave; ce Dieu s'asservit mon &acirc;me,<br /></span>
+<span class="i0">En un instant et pour jamais.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Peins son front plus blanc que l'ivoire.<br /></span>
+<span class="i0">Si&eacute;ge de l'aimable candeur;<br /></span>
+<span class="i0">Ce front, dont V&eacute;nus feroit gloire.<br /></span>
+<span class="i0">S'il y brilloit moins de pudeur.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Poursuis, peins l'une et l'autre joue,<br /></span>
+<span class="i0">La honte des roses, des lis;<br /></span>
+<span class="i0">Et sa bouche o&ugrave; l'Amour se joue,<br /></span>
+<span class="i0">Avec un &eacute;ternel souris.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Peins sa gorge.... Mais non: arr&ecirc;te....<br /></span>
+<span class="i0">Ici, ton art est surmont&eacute;;<br /></span>
+<span class="i0">Ah! quelques couleurs qu'il appr&ecirc;te,<br /></span>
+<span class="i0">Tu n'en peux rendre la beaut&eacute;.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Laisse cet inutile ouvrage;<br /></span>
+<span class="i0">Ah! de l'objet de mon ardeur<br /></span>
+<span class="i0">Il n'est qu'une fidelle image:<br /></span>
+<span class="i0">Que l'Amour grava dans mon c&oelig;ur.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>La pi&egrave;ce suivante prouve que la gorge des mortelles est digne de plus
+d'amour et d'admiration que celle des d&eacute;esses m&ecirc;me, et que ces derni&egrave;res
+en conviennent, ce qui est plus extraordinaire encore:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Au temps de l'aimable saison,<br /></span>
+<span class="i0">Iris r&ecirc;vant dans la prairie,<br /></span>
+<span class="i0">S'endormit sur un mol gazon<br /></span>
+<span class="i0">Tapiss&eacute; d'une herbe fleurie.<br /></span>
+<span class="i0">Z&eacute;phire, charm&eacute; de son teint,<br /></span>
+<span class="i0">Qui d'un vif incarnat se peint,<br /></span>
+<span class="i0">Vint d'abord faire le fol&acirc;tre,<br /></span>
+<span class="i0">Autour de sa gorge d'alb&acirc;tre.<br /></span>
+<span class="i0">Jalouse d'un transport si doux,<br /></span>
+<span class="i0">Flore gronda son infidelle,<br /></span>
+<span class="i0">Et lui dit, pleine de courroux:<br /></span>
+<span class="i0">Me pr&eacute;f&eacute;rer une mortelle!<br /></span>
+<span class="i0">Z&eacute;phire qui se sentoit fort,<br /></span>
+<span class="i0">Reparti: Voyez cette belle!<br /></span>
+<span class="i0">Flore jeta les yeux sur elle,<br /></span>
+<span class="i0">Et convint qu'il n'avait pas tort.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Il n'est donc plus &eacute;tonnant qu'en traduisant l'inimitable Anacr&eacute;on, un
+de nos po&euml;tes fran&ccedil;ais ait dit:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Que ne suis-je la fleur nouvelle<br /></span>
+<span class="i0">Qu'au matin Clim&egrave;ne choisit,<br /></span>
+<span class="i0">Qui sur le sein de cette belle<br /></span>
+<span class="i0">Passe le seul jour qu'elle vit!<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Le <i>Po&euml;te sans fard</i> a trouv&eacute; fort bon ce souhait, et l'a d&eacute;velopp&eacute; de
+cette mani&egrave;re:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">H&eacute;las! trop cruelle Silvie,<br /></span>
+<span class="i0">Permettez au moins que j'envie<br /></span>
+<span class="i0">Le beau sort de certaines fleurs<br /></span>
+<span class="i0">Dont vous vous parez avec gr&acirc;ce,<br /></span>
+<span class="i0">Et dont votre beau teint efface<br /></span>
+<span class="i0">Toutes les plus vives couleurs.<br /></span>
+<span class="i0">Oui: je voudrois &ecirc;tre la rose<br /></span>
+<span class="i0">Que vous placez sur votre sein.<br /></span>
+<span class="i0">D'une telle m&eacute;tamorphose<br /></span>
+<span class="i0">Quel est, direz-vous, le dessein?<br /></span>
+<span class="i0">Le voici: par vos mains cueillie,<br /></span>
+<span class="i0">Mon destin seroit des plus doux;<br /></span>
+<span class="i0">Je n'aurois qu'un seul jour de vie,<br /></span>
+<span class="i0">Mais je ne vivrois que pour vous.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Un po&euml;te anacr&eacute;ontique du dix-neuvi&egrave;me si&egrave;cle, non moins grand
+admirateur de cette belle portion des charmes du sexe qui fait tourner
+la t&ecirc;te au n&ocirc;tre, exprime ainsi le m&ecirc;me souhait, d'&ecirc;tre chang&eacute; en
+rose<a name="FNanchor_2_2" id="FNanchor_2_2"></a><a href="#Footnote_2_2" class="fnanchor">[2]</a>:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">AIR: <i>Je vais quitter ce que j'adore.</i><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Vive, de la m&eacute;tempsycose<br /></span>
+<span class="i0">Le syst&egrave;me consolateur,<br /></span>
+<span class="i0">Par lui mon esprit se repose<br /></span>
+<span class="i0">Sur un avenir enchanteur.<br /></span>
+<span class="i0">Que mon &ecirc;tre se d&eacute;compose,<br /></span>
+<span class="i0">L'espoir m'offre un riant tableau:<br /></span>
+<span class="i0">L'Amour, sous les traits d'une rose,<br /></span>
+<span class="i0">Me promet un &ecirc;tre nouveau.<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">AIR: <i>Une fille est un oiseau.</i><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Oh! comme je jouirais<br /></span>
+<span class="i0">De cette m&eacute;tamorphose!<br /></span>
+<span class="i0">Sur le sein d'une autre Rose<br /></span>
+<span class="i0">Comme je m'&eacute;talerais!<br /></span>
+<span class="i0">Centuplant pour plaire &agrave; Rose,<br /></span>
+<span class="i0">De mes doux parfums la dose,<br /></span>
+<span class="i0">Avec plaisir je m'expose,<br /></span>
+<span class="i0">A mourir sur ses attraits:<br /></span>
+<span class="i0">Mourir!... oui; mais je suppose<br /></span>
+<span class="i0">Que je puis d'une autre chose<br /></span>
+<span class="i0">Prendre encor la forme apr&egrave;s. (<i>bis</i>.)<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Le plaisant et &eacute;rotique Le Pays, dans la lettre suivante adress&eacute;e &agrave; sa
+Caliste, souhaite aussi de mourir sur son sein:</p>
+
+<p>&laquo;Quand je sortis hier de chez vous, j'en sortis avec une bonne
+r&eacute;solution de m'aller tuer, afin d'avoir l'honneur de vous plaire une
+fois en ma vie, et de vous d&eacute;faire pour jamais d'une personne
+incommode; mais jusques ici je n'ai pas ex&eacute;cut&eacute; mon dessein, &agrave; cause de
+l'embarras o&ugrave; je me suis trouv&eacute; &agrave; choisir un genre de mort. J'eus
+d'abord envie d'imiter feu C&eacute;ladon, d'amoureuse m&eacute;moire, et de m'aller
+pr&eacute;cipiter dans la rivi&egrave;re; mais j'eus peur que l'eau ne me rejet&acirc;t sur
+les bords, aussi bien que lui, et que je ne fusse recueilli par quelques
+nymphes pitoyables qui, malgr&eacute; moi, me sauvassent la vie. Il me prit
+aussi fantaisie de m'aller pendre &agrave; votre porte, &agrave; l'imitation du
+pendart Iphis; mais je m'imaginai que ce seroit vous d&eacute;shonorer que de
+faire un gibet de votre porte; outre que c'est un genre de mort pour
+lequel j'ai eu de l'aversion d&egrave;s le temps que j'&eacute;tois petit enfant. Je
+pensai aussi &agrave; m'empoisonner, mais je crus que du poison ne seroit pas
+capable de m'&ocirc;ter la vie, non plus qu'&agrave; Mithridate, &agrave; cause de la grande
+habitude que j'en ai faite. N'&eacute;tant pas mort depuis si longtemps que je
+me nourris de crainte, de chagrin, d'inqui&eacute;tude et de d&eacute;sespoir, qui
+sont les poisons du monde les plus violents, apparemment je ne pourrois
+pas mourir pour prendre de l'arsenic ou de l'antimoine. Je n'oubliai pas
+aussi qu'un poignard mis dans le sein &eacute;toit un bon exp&eacute;dient pour
+mourir: mais je crus que je ne devois pas choisir ce genre de mort
+qu'avoit choisi une femme qui mourut de regret d'avoir fait une chose
+que je meurs de regret de ne pouvoir faire. Mon d&eacute;sespoir est trop
+diff&eacute;rent de celui de Lucr&egrave;ce, pour ne pas mourir d'une mort
+diff&eacute;rente. Enfin, Caliste, j'ai pass&eacute; la nuit &agrave; chercher sans pouvoir
+trouver la mort dont je devois mourir. Au reste, ne croyez pas que ce
+soit la mort qui m'&eacute;tonne, ce n'est que la mani&egrave;re de mourir qui
+m'inqui&egrave;te: car, pour vous dire le vrai, apr&egrave;s avoir v&eacute;cu avec tant de
+chagrin, je voudrois bien mourir d'une mort qui me donn&acirc;t un peu de
+plaisir. Je viens de penser &agrave; une qui seroit tr&egrave;s-bien mon affaire: ce
+seroit, Caliste, de mourir entre vos bras, <i>p&acirc;m&eacute; sur votre sein</i>. Je
+sens bien en mon c&oelig;ur que je n'ai pas d'horreur pour cette mort comme
+pour se noyer, s'empoisonner, se pendre ou se poignarder. Obligez-moi
+donc en me laissant mourir de cette sorte; car, puisqu'enfin vous voulez
+que je meure, que vous importe que ce soit de douleur ou de plaisir?&raquo;</p>
+
+<p>Je serais tent&eacute; de croire qu'il y a, dans le charme attach&eacute; &agrave; une belle
+gorge, un talisman, de la magie et de l'enchantement; ce qui pourtant
+d&eacute;truit cette id&eacute;e, c'est le sonnet suivant, adress&eacute; &agrave; des belles qui
+demandaient un secret, un sortil&eacute;ge et des paroles magiques pour se
+faire aimer:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Pourquoi me demander la ruse criminelle<br /></span>
+<span class="i0">Par quoi l'art des d&eacute;mons met les c&oelig;urs dans les fers?<br /></span>
+<span class="i0">Vous, de qui la magie est blanche et naturelle,<br /></span>
+<span class="i0">Et fait qu'&agrave; vos appas tant de v&oelig;ux sont offerts.<br /></span>
+<span class="i0">Par vos charmes vainqueurs l'esprit le plus rebelle<br /></span>
+<span class="i0">Rend gr&acirc;ces &agrave; l'amour des maux qu'il a soufferts,<br /></span>
+<span class="i0">La flamme de vos yeux est trop pure et trop belle<br /></span>
+<span class="i0">Pour unir sa puissance &agrave; celle des enfers<br /></span>
+<span class="i0">Ce beau sein qui fait na&icirc;tre et vos lis et vos roses<br /></span>
+<span class="i0">Forme un enchantement de tant de belles choses,<br /></span>
+<span class="i0">Que leur force invincible a droit de tout charmer<br /></span>
+<span class="i0">Mais pour vous mieux servir de leur pouvoir extr&ecirc;me,<br /></span>
+<span class="i0">Ajoutez seulement ces trois mots: <i>je vous aime</i>;<br /></span>
+<span class="i0">Qui pourrait s'emp&ecirc;cher alors de vous aimer?<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">LES DEUX SAINTS.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">AIR: <i>La F&ecirc;te des bonnes gens.</i><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i2">Qu'en ce jour tout r&eacute;sonne,<br /></span>
+<span class="i0">Des chants dict&eacute;s par nos c&oelig;urs.<br /></span>
+<span class="i2">D&eacute;robons &agrave; l'automne<br /></span>
+<span class="i0">Ce qui lui reste de fleurs;<br /></span>
+<span class="i0">Pour les belles, qu'on appr&ecirc;te<br /></span>
+<span class="i0">Des bouquets et des refrains;<br /></span>
+<span class="i2">C'est aujourd'hui la f&ecirc;te,<br /></span>
+<span class="i0">La f&ecirc;te de tous les saints.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i2">Tous les saints, ah! Glyc&egrave;re,<br /></span>
+<span class="i0">C'est beaucoup pour un seul jour;<br /></span>
+<span class="i2">Toi, qui n'adore gu&egrave;re<br /></span>
+<span class="i0">Que le plaisir et l'Amour,<br /></span>
+<span class="i0">Deux patrons, c'est bien honn&ecirc;te;<br /></span>
+<span class="i0">Comme toi, je me restreins.<br /></span>
+<span class="i0">Et d&eacute;sormais je ne f&ecirc;te,<br /></span>
+<span class="i0">Ne f&ecirc;te que tes deux saints.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i2">Ces deux saints que je chante<br /></span>
+<span class="i0">N'ont que des dehors flatteurs,<br /></span>
+<span class="i2">Et chacun d'eux m'enchante<br /></span>
+<span class="i0">Par de riantes couleurs.<br /></span>
+<span class="i0">Leur parure se compose<br /></span>
+<span class="i0">Du plus brillant des satins,<br /></span>
+<span class="i0">Ce sont deux boutons de rose<br /></span>
+<span class="i0">Qui couronnent tes deux saints.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i2">Longtemps sans les conna&icirc;tre.<br /></span>
+<span class="i0">Je ressentis leur pouvoir;<br /></span>
+<span class="i2">Il t'en souvient peut-&ecirc;tre,<br /></span>
+<span class="i0">C'est toi qui me les fis voir.<br /></span>
+<span class="i0">A ce spectacle sensible,<br /></span>
+<span class="i0">Vers eux j'&eacute;tendis les mains<br /></span>
+<span class="i0">Non, non, il n'est pas possible<br /></span>
+<span class="i0">De voir de plus jolis saints.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i2">Quoiqu'ils soient, ma Glyc&egrave;re,<br /></span>
+<span class="i0">Presqu'aussi durs qu'un rocher,<br /></span>
+<span class="i2">Parfois &agrave; ma pri&egrave;re<br /></span>
+<span class="i0">Ils se sont laiss&eacute; toucher;<br /></span>
+<span class="i0">Jaloux de les voir encore,<br /></span>
+<span class="i0">Je donnerais, je le dis,<br /></span>
+<span class="i0">Pour ces deux saints que j'adore,<br /></span>
+<span class="i0">Tous les saints du Paradis.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i6">F&Eacute;LIX.<br /></span>
+</div></div>
+<div class="center">
+ <img src="images/028.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<div class="center">
+ <img src="images/030.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+<h2><a name="CHAPITRE_II" id="CHAPITRE_II"></a><a href="#table">CHAPITRE II.</a></h2>
+
+<h3>DES BEAUX T&Eacute;TONS.</h3>
+
+
+<p>Avant de d&eacute;terminer la forme et les qualit&eacute;s qui rendent une gorge
+parfaite, examinons en quoi consiste la beaut&eacute; d'une femme. Il faut,
+dit-on, qu'elle r&eacute;unisse les trente points suivants:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">La jeunesse.<br /></span>
+<span class="i0">Taille ni trop grande ni trop petite.<br /></span>
+<span class="i0">N'&ecirc;tre ni trop grasse ni trop maigre.<br /></span>
+<span class="i0">La sym&eacute;trie et la proportion de toutes les parties.<br /></span>
+<span class="i0">De beaux cheveux longs et d&eacute;li&eacute;s.<br /></span>
+<span class="i0">La peau d&eacute;licate et polie.<br /></span>
+<span class="i0">Blancheur vive et vermeille.<br /></span>
+<span class="i0">Un front uni.<br /></span>
+<span class="i0">Les tempes non enfonc&eacute;es.<br /></span>
+<span class="i0">Des sourcils comme deux lignes.<br /></span>
+<span class="i0">L'&oelig;il bleu, &agrave; fleur de t&ecirc;te; et le regard doux.<br /></span>
+<span class="i0">Le nez un peu long.<br /></span>
+<span class="i0">Des joues un peu arrondies, avec une petite fossette.<br /></span>
+<span class="i0">Le rire gracieux.<br /></span>
+<span class="i0">Deux l&egrave;vres de corail.<br /></span>
+<span class="i0">Une petite bouche.<br /></span>
+<span class="i0">Dents blanches et bien rang&eacute;es.<br /></span>
+<span class="i0">Le menton un peu rond et charnu, avec une fossette au bout.<br /></span>
+<span class="i0">Les oreilles petites, vermeilles et bien jointes &agrave; la t&ecirc;te.<br /></span>
+<span class="i0">Un cou d'ivoire.<br /></span>
+<span class="i0">Un sein d'<i>alb&acirc;tre</i>.<br /></span>
+<span class="i0"><i>Deux boules de neige.</i><br /></span>
+<span class="i0">Une main blanche, longue et potel&eacute;e.<br /></span>
+<span class="i0">Les doigts termin&eacute;s en pyramides.<br /></span>
+<span class="i0">Des ongles de nacres, de perle, tourn&eacute;s en ovale.<br /></span>
+<span class="i0">L'haleine douce.<br /></span>
+<span class="i0">La voix agr&eacute;able.<br /></span>
+<span class="i0">Le geste libre et sans affectation.<br /></span>
+<span class="i0">Le corsage d&eacute;li&eacute;.<br /></span>
+<span class="i0">La d&eacute;marche modeste.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>On a dit qu'H&eacute;l&egrave;ne r&eacute;unissait ces trente points. <i>Franciscus Corniger</i>
+les a mis en dix-huit vers latins. Vincentio Calmeta les a aussi mis en
+vers italiens qui commencent par <i>Dolce Flaminia</i>.</p>
+
+<p>Voici ceux de Fran&ccedil;ois Corniger:</p>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">MULIERIS PULCHRITUDO.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>Triginta h&aelig;c habeat, qu&aelig; vult formosa videri</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Foemina: sic Helenam fama fuisse refert.</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Alba tria, et totidem nigra; et tria rubra; puell&aelig;.</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Tres habeat longas res, totidemque breves.</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Tres crassas, totidem graciles, tria stricta, tot ampla,</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Sint itidem huic form&aelig;, sint quoque parva tria.</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Alba cutis, nivei dentes albique capilli:</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Nigri oculi, cunnus, nigra supercilia.</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Labra, gen&aelig;, atque ungues rubri. Sit corpore longo,</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Et longi crines, sit quoque longa manus.</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Sintque breves dentes; auris, pes. Pectora lata,</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Et clunes, distent ipsa supercilia.</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Cunnus et os strictam, stringunt ubi cingula stricta,</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Sint cox&aelig; et culus, vulvaque turgidula.</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Subtiles digiti, crines et labra puellis.</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Parvus sit nasus, parva mamilla, caput.</i><br /></span>
+</div></div>
+
+<p>En voici la traduction, que rapporte un vieux livre fran&ccedil;ais intitul&eacute;:
+<i>De la louange et beaut&eacute; des Dames</i>.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Trois choses blanches: la peau, les dents et les mains.<br /></span>
+<span class="i0">Trois noires: les yeux, les sourcils et les paupi&egrave;res.<br /></span>
+<span class="i0">Trois rouges: les l&egrave;vres, les joues et les ongles.<br /></span>
+<span class="i0">Trois longues: le corps, les cheveux et les mains.<br /></span>
+<span class="i0">Trois courtes: les dents, les oreilles et les pieds.<br /></span>
+<span class="i0">Trois larges: la poitrine ou le sein, le front et l'entre-sourcil.<br /></span>
+<span class="i0">Trois estroites: la bouche, <i>l'une et l'autre</i>, la ceinture ou la taille et l'entr&eacute;e du pied.<br /></span>
+<span class="i0">Trois grosses: le bras, la cuisse et le gros de la jambe.<br /></span>
+<span class="i0">Trois d&eacute;li&eacute;es: les doigts, les cheveux et les l&egrave;vres.<br /></span>
+<span class="i0">Trois petites: les t&eacute;tins, le nez et la teste.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>L'auteur du <i>Proc&egrave;s et amples examinations sur la vie de
+Car&ecirc;me-Prenant</i>, etc., dit qu'une belle femme se compose des beaut&eacute;s de
+divers pays.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Qui voudra belle femme querre (chercher),<br /></span>
+<span class="i0">Prenne visage d'Angleterre,<br /></span>
+<span class="i0">Ayant le corps d'une Flamande<br /></span>
+<span class="i0">Et les tetins d'une Normande,<br /></span>
+<span class="i0">Ent&eacute;s sur un cul de Paris,<br /></span>
+<span class="i0">Il aura femme de bon prix.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div>
+<div class="stanza">
+<span class="i0">Celle qui a les bras charnus,<br /></span>
+<span class="i0">Grosse mammelle, nez camus,<br /></span>
+<span class="i0">Longue raison et courtes mains,<br /></span>
+<span class="i0">Elle est sujette au bas des reins.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Fille qui fait tetins paroir (para&icirc;tre)<br /></span>
+<span class="i0">Son corps par &eacute;troite v&ecirc;ture<br /></span>
+<span class="i0">On se peut bien apercevoir<br /></span>
+<span class="i0">Que son c.. demande p&acirc;ture.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Les trois quatrains ci-dessus sont tir&eacute;s du <i>Momus Redivivus</i>, t. II, p.
+30 et 31, publi&eacute; par Mercier de Compi&egrave;gne, qui, lui-m&ecirc;me, les a pris
+dans l'ouvrage cit&eacute; plus haut.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">BLASON DE LA BELLE FILLE.</span></div></div>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Une dame d'excellente beaut&eacute;<br /></span>
+<span class="i0">En tous ses faits doit estre mod&eacute;r&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">Avoir le c&oelig;ur rempli de loyaut&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Maintien rassis, contenance assur&eacute;e;<br /></span>
+<span class="i0">Bouche riant, mignonne, savour&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">&OElig;il verdelet, le front largettement,<br /></span>
+<span class="i0">Clere de vis<a name="FNanchor_3_3" id="FNanchor_3_3"></a><a href="#Footnote_3_3" class="fnanchor">[3]</a>, de couleur proprement.<br /></span>
+<span class="i0">Menton fourchu, la chevelure blonde.<br /></span>
+<span class="i0">Humble regard &agrave; lever doucement,<br /></span>
+<span class="i0">Parfaite en bien seroit la plus du monde.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Ferme tetin sur l'estomac plant&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Large entre-deux, rencontre relev&eacute;e<br /></span>
+<span class="i0">Gorge plaisante, et le col long, sant&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Le nez traitiz<a name="FNanchor_4_4" id="FNanchor_4_4"></a><a href="#Footnote_4_4" class="fnanchor">[4]</a>, sourcille d&eacute;li&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">Mollette main, blanche, bien alli&eacute;e<br /></span>
+<span class="i0">De doigts et bras gresle tant seulement,<br /></span>
+<span class="i0">Gente de corps, taill&eacute;e adroitement.<br /></span>
+<span class="i0">Hauteur moyenne et de belle faconde,<br /></span>
+<span class="i0">Gorriere<a name="FNanchor_5_5" id="FNanchor_5_5"></a><a href="#Footnote_5_5" class="fnanchor">[5]</a> un peu, parler courtoyement,<br /></span>
+<span class="i0">Parfaite en bien seroit la plus du monde.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Parmy les rains bien fournis &agrave; plant&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Grosse cuisse et devant haut enc...&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">Motte &agrave; plein poing, sans &ecirc;tre trop hant&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">De doux accueil et de rebelle entr&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">Le ventre &eacute;pais, barbe de frais ras&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">Tenir l'escu au besoing droitement,<br /></span>
+<span class="i0">Et son bourdon serrer estroitement,<br /></span>
+<span class="i0">Je ne m'enquiers du trop ou peu profonde,<br /></span>
+<span class="i0">Le compagnon porter joyeusement<br /></span>
+<span class="i0">Parfaite en bien seroit la plus du monde.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+<span class="i0"><br /></span>
+<span class="i0"><br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">ENVOY.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Prince gentil, pour vostre esbatement<br /></span>
+<span class="i0">Si vous trouvez un tel appointement<br /></span>
+<span class="i0">Au petit pied, jambe grossette et ronde,<br /></span>
+<span class="i0">Montez dessus et picquez hardiment,<br /></span>
+<span class="i0">Parfaite en bien seroit le plus du monde.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">PIERRE DANCRE<br /></span>
+</div></div>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">&Eacute;PIGRAMME PAR LE SIEUR MOTIN.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Si les esprits sont amusez<br /></span>
+<span class="i0">A jo&uuml;er aux Champs Elisez,<br /></span>
+<span class="i0">Quand ils veulent jouer aux quilles,<br /></span>
+<span class="i0">Les boules sont tetins de filles.<br /></span>
+<span class="i0">Il est bien vray qu'en cet esbat<br /></span>
+<span class="i0">La boule les quilles abbat,<br /></span>
+<span class="i0">Mais icy c'est une autre affaire,<br /></span>
+<span class="i0">Car aux quilles vient le contraire,<br /></span>
+<span class="i0">Puisqu'au lieu de les renverser<br /></span>
+<span class="i0">Les tetins les font redresser.<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">CHANSON.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">J'ayme une fille de village,<br /></span>
+<span class="i0">De qui le gros sein pommel&eacute;<br /></span>
+<span class="i0">Monstre qu'elle tient recel&eacute;<br /></span>
+<span class="i0">Sous sa cotte un gros pucelage.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Aussi est-ce &agrave; elle qu'on baille<br /></span>
+<span class="i0">De son village tout l'honneur,<br /></span>
+<span class="i0">Capable d'allumer un c&oelig;ur<br /></span>
+<span class="i0">D'une autre flamme que de paille.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Le plus galant des troubadours fran&ccedil;ais, le c&eacute;l&egrave;bre Marot, nous instruit
+particuli&egrave;rement de la beaut&eacute; des t&eacute;tons dans l'&eacute;pigramme suivante:</p>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">SUR LE BEAU TETIN.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Tetin refait, plus blanc qu'un &oelig;uf,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin de satin blanc tout neuf,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin qui fait honte &agrave; la rose,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin plus beau que nulle chose,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin dur (non pas tetin, voire,<br /></span>
+<span class="i0">Mais petite boule d'yvoire)<br /></span>
+<span class="i0">Au milieu duquel est assise<br /></span>
+<span class="i0">Une fr&egrave;ze, ou une cerise,<br /></span>
+<span class="i0">Que nul ne void ne touche aussi;<br /></span>
+<span class="i0">Mais je gage qu'il est ainsi,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin donc au petit bout rouge,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin qui jamais ne se bouge,<br /></span>
+<span class="i0">Soit pour venir, soit pour aller,<br /></span>
+<span class="i0">Soit pour courir, soit pour baller,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin gauche, tetin mignon,<br /></span>
+<span class="i0">Tousjours loing de son compagnon,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin qui portes tesmoignage<br /></span>
+<span class="i0">Du demeurant du personnage.<br /></span>
+<span class="i0">Quand on te void il vient &agrave; maints<br /></span>
+<span class="i0">Une envie dedans les mains<br /></span>
+<span class="i0">De te taster, de te tenir:<br /></span>
+<span class="i0">Mais il se faut bien contenir<br /></span>
+<span class="i0">D'en approcher, bon gr&eacute; ma vie,<br /></span>
+<span class="i0">Car il viendroit une autre envie.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">O tetin ne grand, ne petit,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin meur, tetin d'app&eacute;tit,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin qui nuict et jour criez,<br /></span>
+<span class="i0">Mariez moy tost mariez.<br /></span>
+<span class="i0">Tetin qui t'enfles et repousses<br /></span>
+<span class="i0">Ton gorgias de deux bons pousses,<br /></span>
+<span class="i0">A bon droit heureux on dira<br /></span>
+<span class="i0">Celui qui de laict t'emplira<br /></span>
+<span class="i0">Faisant d'un tetin de pucelle,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin de femme enti&egrave;re et belle.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Nous croyons faire plaisir au lecteur en mettant &agrave; la suite de la pi&egrave;ce
+de Marot celle de Guichard, qui lui sert de r&eacute;ponse.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">LES T&Eacute;TONS.&mdash;&Agrave; CL&Eacute;MENT MAROT.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Sur les t&eacute;tons, Marot, je pense comme vous:<br /></span>
+<span class="i2">C'est l'ornement, le tr&eacute;sor d'une belle.<br /></span>
+<span class="i2">A des t&eacute;tons qui peut &ecirc;tre rebelle?<br /></span>
+<span class="i4">L'&oelig;il ne peut voir rien de plus doux.<br /></span>
+<span class="i0">Bienheureuse la main qui les tient &agrave; son aise!<br /></span>
+<span class="i0">Et plus heureuse encor la bouche qui les baise!<br /></span>
+<span class="i2">H&eacute;las! pourquoi g&ecirc;ner leur libert&eacute;?<br /></span>
+<span class="i4">Nul ajustement ne les pare<br /></span>
+<span class="i4">Comme l'enti&egrave;re nudit&eacute;.<br /></span>
+<span class="i0">Ce qu'il faut d'embonpoint, leur &eacute;lasticit&eacute;,<br /></span>
+<span class="i4">L'intervalle qui les s&eacute;pare,<br /></span>
+<span class="i2">Ce poli du satin, cette aimable rondeur,<br /></span>
+<span class="i0">Du bouton incarnat de la rose naissante,<br /></span>
+<span class="i0">Ce bouton surpassant la forme et la couleur,<br /></span>
+<span class="i0">Ce transparent tissu de neige &eacute;blouissante,<br /></span>
+<span class="i0">Et l'azur qui dessous se divise et serpente.<br /></span>
+<span class="i4">Tout est vu, press&eacute;, d&eacute;vor&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Le BEAU TETIN, par vous gentiment c&eacute;l&eacute;br&eacute;<br /></span>
+<span class="i0">Valoit-il les t&eacute;tons pour lesquels je soupire?<br /></span>
+<span class="i0">Mon cher Marot, eh quoi! ces t&eacute;tons pleins d'appas<br /></span>
+<span class="i2">Ne vous font point revoler ici-bas!<br /></span>
+<span class="i2">J'en remettrois la gloire &agrave; votre lyre.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">O de tous les t&eacute;tons, t&eacute;tons victorieux,<br /></span>
+<span class="i0">Chef-d'&oelig;uvre de l'amour, t&eacute;tons.... t&eacute;tons des Dieux!<br /></span>
+<span class="i0">Foible mortel, renonce &agrave; chanter leur empire;<br /></span>
+<span class="i0">Tout l'Olympe assembl&eacute; n'y pourroit pas suffire;<br /></span>
+<span class="i0">Et, ce qui fait leur prix, ce qui fait mon bonheur,<br /></span>
+<span class="i0">Aupr&egrave;s de ces t&eacute;tons je sens.... je sens un c&oelig;ur.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Benserade a rivalis&eacute; avec Marot dans l'apoth&eacute;ose des beaux t&eacute;tons; car
+quel po&euml;te ne les a pas chant&eacute;s! et voici la belle d&eacute;finition qu'il en
+donne dans un sonnet:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Beau sein d&eacute;j&agrave; presque rempli,<br /></span>
+<span class="i0">Bien qu'il ne commence qu'&agrave; poindre,<br /></span>
+<span class="i0">T&eacute;tons qui ne font pas un pli,<br /></span>
+<span class="i0">Et qui n'ont garde de se joindre.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">De jeunesse ouvrage accompli,<br /></span>
+<span class="i0">Que de fard il ne faut pas oindre;<br /></span>
+<span class="i0">Si l'un est rond, dur et poli,<br /></span>
+<span class="i0">L'autre l'&eacute;gale et n'est pas moindre.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Sein par qui les dieux sont tent&eacute;s,<br /></span>
+<span class="i0">Digne &eacute;chantillon de beaut&eacute;s,<br /></span>
+<span class="i0">Que le jour n'a point regard&eacute;es;<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Il garantit ce qu'il promet,<br /></span>
+<span class="i0">Et remplit toutes les id&eacute;es<br /></span>
+<span class="i0">Du paradis du Mahomet<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>La blancheur, la rondeur et la fermet&eacute; sont donc trois qualit&eacute;s
+essentiellement requises pour m&eacute;riter aux t&eacute;tons le nom de beaux. Marot,
+qui &eacute;tait connaisseur dans cette sorte de friandise, les aimait ronds,
+comme on le voit dans ces vers, qui renferment des conseils sur le choix
+d'une ma&icirc;tresse.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Quand vous voudrez faire une amie,<br /></span>
+<span class="i0">Prenez-la de belle grandeur:<br /></span>
+<span class="i0">En son esprit non endormie,<br /></span>
+<span class="i0">Et son tetin bonne rondeur.<br /></span>
+<span class="i4">Douceur<br /></span>
+<span class="i4">En c&oelig;ur,<br /></span>
+<span class="i4">Langage<br /></span>
+<span class="i4">Bien sage,<br /></span>
+<span class="i0">Dansant, chantant par bons accords,<br /></span>
+<span class="i0">Et ferme de c&oelig;ur et de corps.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Si vous la prenez trop jeunette,<br /></span>
+<span class="i0">Vous en aurez peu d'entretien;<br /></span>
+<span class="i0">Pour durer, prenez-la brunette,<br /></span>
+<span class="i0">En bon poinct d'asseur&eacute; maintien:<br /></span>
+<span class="i4">Tel bien<br /></span>
+<span class="i4">Vaut bien<br /></span>
+<span class="i4">Qu'on fasse<br /></span>
+<span class="i4">La chasse<br /></span>
+<span class="i0">Du plaisant gibier amoureux:<br /></span>
+<span class="i0">Qui prend telle proye est heureux.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Marot le prouve encore par ce rondeau:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Toutes les nuicts, je ne pense qu'en celle<br /></span>
+<span class="i0">Qui a le corps plus gent qu'une pucelle<br /></span>
+<span class="i0">De quatorze ans, sur le point d'enrager,<br /></span>
+<span class="i0">Et au dedans un c&oelig;ur, pour abbr&eacute;ger,<br /></span>
+<span class="i0">Autant joyeux qu'eut onques demoiselle.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Elle a beau teint, un parler de bon z&egrave;le,<br /></span>
+<span class="i0">Et le tetin rond comme une groiselle,<br /></span>
+<span class="i0">N'ay-je donq pas bien cause de songer<br /></span>
+<span class="i6">Toutes les nuicts?<br /></span>
+<span class="i0">Touchant son c&oelig;ur, je l'ay dans ma cordelle,<br /></span>
+<span class="i0">Et son mary n'a, sinon le corps d'elle;<br /></span>
+<span class="i0">Mais toutefois, quand il voudra changer,<br /></span>
+<span class="i0">Prenne le c&oelig;ur, et pour le soulager,<br /></span>
+<span class="i0">J'auray pour moi le gent corps de la belle<br /></span>
+<span class="i6">Toutes les nuicts.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Bois-Robert, n&eacute; &agrave; Caen, en 1592, a aussi chant&eacute; le sein dans les stances
+suivantes:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Beau sein, belles bouches d'yvoire,<br /></span>
+<span class="i0">Vivants objects de ma memoire,<br /></span>
+<span class="i0">Cheres delices de mes jours,<br /></span>
+<span class="i0">Qui dedans vos rondes espaces<br /></span>
+<span class="i0">Cachez la demeure des Graces<br /></span>
+<span class="i0">Et la retraicte des Amours.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Gorge de lys, pommes d'albatre<br /></span>
+<span class="i0">De qui mon &oelig;il est idolatre,<br /></span>
+<span class="i0">Source des amoureux desirs.<br /></span>
+<span class="i0">Parfait assemblage de charmes,<br /></span>
+<span class="i0">Digne sujet de tant de larmes,<br /></span>
+<span class="i0">De tant de vers et de soupirs:<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Objects d'eternelle allegresse,<br /></span>
+<span class="i0">Petits messagers de jeunesse,<br /></span>
+<span class="i0">Petits gemeaux ambitieux,<br /></span>
+<span class="i0">Qui desja pour vous trop cognestre<br /></span>
+<span class="i0">Ne faisant encor que de naistre,<br /></span>
+<span class="i0">Vous enflez d'orgueil &agrave; nos yeux.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Plus heureux qui pour vous soupire;<br /></span>
+<span class="i0">Le mal qu'il se plaist d'endurer:<br /></span>
+<span class="i0">Mais, &ocirc; merveille que j'adore,<br /></span>
+<span class="i0">Je tiens bien plus heureux encore<br /></span>
+<span class="i0">Celuy qui vous fait souspirer.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Charles Cotin nous fait voir dans le sonnet suivant <i>sur les t&eacute;tons</i>,
+qu'ils doivent &ecirc;tre fermes, ronds, et bien &eacute;cart&eacute;s l'un de l'autre.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Tandis que deux voisins sans se joindre v&eacute;quirent,<br /></span>
+<span class="i0">Tous deux &eacute;galement de tous furent aimez;<br /></span>
+<span class="i0">Tous deux enflez d'orgueil et de grace animez.<br /></span>
+<span class="i0">Partag&egrave;rent entr'eux l'honneur qu'ils acquirent;<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Tous deux avoient quinze ans &agrave; l'&acirc;ge qu'ils naquirent;<br /></span>
+<span class="i0">Tous deux sur m&ecirc;me moule ils paraissoient formez;<br /></span>
+<span class="i0">L'un l'autre ils se fuyoient de d&eacute;pit enflammez,<br /></span>
+<span class="i0">L'un &agrave; l'autre enviant les conqu&ecirc;tes qu'ils firent.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Bien qu'un prince pass&acirc;t, ils ne s'&eacute;branloient point;<br /></span>
+<span class="i0">Mais enfin leur orgueil s'enfla jusqu'&agrave; ce point,<br /></span>
+<span class="i0">Que leur triste union commen&ccedil;a de paro&icirc;tre.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Ils se bais&egrave;rent tant, qu'ils en firent piti&eacute;;<br /></span>
+<span class="i0">L'amour de tous naquit de leur inimiti&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Et de leur union le m&eacute;pris vint &agrave; na&icirc;tre.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>M. Le Pays para&icirc;t &ecirc;tre du m&ecirc;me go&ucirc;t, quand il dit &agrave; son Iris, dans le
+portrait qu'il fait d'elle:</p>
+
+<p>&laquo;Votre gorge semble avoir &eacute;t&eacute; faite au tour; et l'on peut dire que c'est
+une beaut&eacute; achev&eacute;e. Votre sein est digne de votre gorge; il est blanc,
+gras et potel&eacute;. Les deux petits globes qui le composent ne sont &eacute;loignez
+que de deux doigts, et cependant je suis assur&eacute; que de leur vie ils ne
+se sont baisez, quoi qu'ils soient fr&egrave;res, et qu'ils deussent bien
+s'aimer, si la ressemblance fait l'amiti&eacute;.&raquo;</p>
+
+<p>L'auteur de la chanson picarde, qui commence par ces mots: <i>Ton himeur
+est, Catherene</i>, les aimait aussi avec cette qualit&eacute;; il fait dire &agrave;
+l'amant:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Pour ta bouche elle est plus rouge<br /></span>
+<span class="i0">Que n'est la creste d'un cocq;<br /></span>
+<span class="i0">Et ta gorge qui ne bouge,<br /></span>
+<span class="i0">Paroit plus ferme qu'un roc.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Une belle gorge &eacute;tant la meilleure recommandation que puisse avoir une
+femme, elle ne saurait trop la voiler pour la garantir du h&acirc;le; car il
+en est peu de privil&eacute;gi&eacute;es aujourd'hui &agrave; qui l'on puisse adresser ce
+madrigal:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">On a beau dire, Iris, pour louer votre teint,<br /></span>
+<span class="i4">Que sa blancheur est sans seconde:<br /></span>
+<span class="i0">Pour moi qui ne dis rien de flatteur ni de feint,<br /></span>
+<span class="i0">Je soutiens qu'il en est une plus grande au monde.<br /></span>
+<span class="i4">N'en d&eacute;plaise &agrave; la vanit&eacute;<br /></span>
+<span class="i4">De votre superbe visage;<br /></span>
+<span class="i0">Vos t&eacute;tons, belle Iris, en bonne v&eacute;rit&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Voudroient-ils en blancheur lui c&eacute;der l'avantage?<br /></span>
+</div></div>
+
+<p><i>La Puce de M<sup>me</sup> des Roches</i>, Paris, 1583, in-4<sup>o</sup>; 1610, in-8<sup>o</sup>.
+R&eacute;imprim&eacute;, 1868, Paris, Jouaust, petit in-8<sup>o</sup>.</p>
+
+<p>On sait quelle fut l'origine de ce recueil. La haute soci&eacute;t&eacute; de Poitiers
+s'honorait alors de deux dames appartenant &agrave; la race des <i>Pr&eacute;cieuses</i>,
+de Moli&egrave;re, c'&eacute;taient M<sup>me</sup> des Roches et sa fille Catherine. Po&euml;tes
+elles-m&ecirc;mes, mais dans une mesure tr&egrave;s-restreinte, elles r&eacute;unissaient
+autour d'elles une soci&eacute;t&eacute; de beaux esprits. Les Grands-Jours, tenus &agrave;
+Poitiers en 1579, amen&egrave;rent autour de ces dames tous les magistrats que
+cette solennit&eacute; avait appel&eacute;s dans cette ville. Un jour, &Eacute;tienne
+Pasquier aper&ccedil;ut une puce qui s'&eacute;tait &laquo;parqu&eacute;e au beau milieu du sein&raquo;
+de M<sup>lle</sup> des Roches; il fit remarquer la t&eacute;m&eacute;rit&eacute; de l'animal; il
+s'ensuivit quelques propos badins; l'incident provoqua d'abord l'&eacute;change
+de deux pi&egrave;ces de vers entre Pasquier et M<sup>lle</sup> des Roches; les savants
+magistrats, prenant fait et cause, se mirent &agrave; c&eacute;l&eacute;brer la puce en
+fran&ccedil;ais, en latin, en espagnol, en grec m&ecirc;me. Pasquier recueillit ces
+divers morceaux; de l&agrave; vint le volume qui devait avoir pour titre: <i>la
+Puce de M<sup>lle</sup> des Roches</i>, car ce ne fut pas madame sa m&egrave;re qui fut
+l'h&eacute;ro&iuml;ne de l'aventure. L'uniformit&eacute; du sujet donne &agrave; ces compositions
+une teinte de monotonie, mais la forme en est toujours agr&eacute;able, et on y
+trouve de gracieux d&eacute;tails. L'&eacute;diteur de 1868 a suivi le texte de
+l'&eacute;dition de 1610, en notant les principales variantes (les pr&eacute;faces des
+deux &eacute;ditions sont tout &agrave; fait diff&eacute;rentes); il s'est born&eacute; &agrave; reproduire
+les pi&egrave;ces fran&ccedil;aises.</p>
+
+<p>Nous nous contenterons de citer la pi&egrave;ce ci-dessous, d'&Eacute;tienne Pasquier.
+Elle r&eacute;sume &agrave; elle seule tout ce que les autres po&euml;tes en ont pu dire.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">LA PUCE.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Ainsi que dedans le pr&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">D'un vert &eacute;mail diapr&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">On voit que la blonde avette<br /></span>
+<span class="i0">Sur les belles fleurs volette,<br /></span>
+<span class="i0">Pillant la manne du ciel,<br /></span>
+<span class="i0">Dont elle forme son miel;<br /></span>
+<span class="i0">Ainsi, petite pucette,<br /></span>
+<span class="i0">Ainsi, puce pucelette,<br /></span>
+<span class="i2">Tu voles &agrave; t&acirc;ton<br /></span>
+<span class="i0">Sur l'un et l'autre t&eacute;ton;<br /></span>
+<span class="i0">Or, ayant pris ta posture,<br /></span>
+<span class="i0">Tu t'en viens &agrave; l'aventure.<br /></span>
+<span class="i0">Soudain apr&egrave;s h&eacute;berger<br /></span>
+<span class="i0">Au milieu d'un beau verger,<br /></span>
+<span class="i0">Paradis qui me r&eacute;veille,<br /></span>
+<span class="i0">Lorsque plus elle sommeille:<br /></span>
+<span class="i0">L&agrave;, prenant ton bel &eacute;bat,<br /></span>
+<span class="i0">Tu lui livres un combat,<br /></span>
+<span class="i0">Combat qui aussi l'&eacute;veille,<br /></span>
+<span class="i0">Lorsque plus elle sommeille.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Je ne veux ni du taureau,<br /></span>
+<span class="i0">Ni du cygne, blanc oiseau,<br /></span>
+<span class="i0">Ni d'Amphytrion la forme,<br /></span>
+<span class="i0">Ni qu'en pluye on me transforme.<br /></span>
+<span class="i0">Puisque ma dame se paist<br /></span>
+<span class="i0">Sans plus de ce qui te plaist,<br /></span>
+<span class="i0">Plust or &agrave; Dieu que je pusse<br /></span>
+<span class="i0">Seulement devenir puce!<br /></span>
+<span class="i0">Tantost je prendrois mon vol<br /></span>
+<span class="i0">Tout au plus haut de ton col,<br /></span>
+<span class="i0">Ou, d'une douce rapine,<br /></span>
+<span class="i0">Je sucerois ta poitrine,<br /></span>
+<span class="i0">Ou lentement, pas &agrave; pas,<br /></span>
+<span class="i0">Je me glisserois plus bas,<br /></span>
+<span class="i0">Et d'un muselin folastre,<br /></span>
+<span class="i0">Je serois puce idolastre,<br /></span>
+<span class="i0">Pin&ccedil;ottant je ne s&ccedil;ais quoi,<br /></span>
+<span class="i0">Que j'aime trop plus que moi!<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Mais las! malheureux po&euml;te!<br /></span>
+<span class="i0">Qu'est-ce qu'en vain je souhaite?<br /></span>
+<span class="i0">Cet &eacute;change affiert &agrave; ceux<br /></span>
+<span class="i0">Qui font leur s&eacute;jour aux cieux.<br /></span>
+<span class="i0">Et partant, puce pucette,<br /></span>
+<span class="i0">Partant, puce pucelette,<br /></span>
+<span class="i0">Petite puce, je veux<br /></span>
+<span class="i0">Adresser vers toi mes v&oelig;ux.<br /></span>
+<span class="i0">Si tu piques les plus belles,<br /></span>
+<span class="i0">Si tu as aussi des aisles<br /></span>
+<span class="i0">Tout ainsi que Cupidon,<br /></span>
+<span class="i0">Je te requiers un seul don<br /></span>
+<span class="i0">Pour ma pauvre &acirc;me alt&eacute;r&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">O puce! &ocirc; ma Cyth&eacute;r&eacute;e!<br /></span>
+<span class="i0">C'est que ma dame, par toi,<br /></span>
+<span class="i0">Se puisse &eacute;veiller pour moi!<br /></span>
+<span class="i0">Que pour moi elle s'&eacute;veille,<br /></span>
+<span class="i0">Et ait la puce en l'oreille!<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">&Eacute;TIENNE PASQUIER<a name="FNanchor_6_6" id="FNanchor_6_6"></a><a href="#Footnote_6_6" class="fnanchor">[6]</a>.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">MADRIGAL.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Le t&eacute;ton de Babet est plus blanc que l'albastre;<br /></span>
+<span class="i0">Pour estre ferme et rond il n'a point de pareil;<br /></span>
+<span class="i0">On ne peut sans amour voir son bouton vermeil,<br /></span>
+<span class="i0">Faut-il donc s'estonner si j'en suis idolastre!<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i2">Quand j'y porte la main de son consentement<br /></span>
+<span class="i0">Rien ne peut estre &eacute;gal &agrave; mon contentement,<br /></span>
+<span class="i0">Je suis ravy d'avoir ce charmant privil&eacute;ge,<br /></span>
+<span class="i0">Mais quand elle s'oppose &agrave; mon ardent dessein,<br /></span>
+<span class="i0">O Babet! &ocirc; friponne, aussitost, m'escriay-je,<br /></span>
+<span class="i0">Vous faites bien la fi&egrave;re avec votre beau sein,<br /></span>
+<span class="i0">Ah! vrayment vostre sein est un beau sein de neige.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">(<i>Nouveau m&eacute;lange de pi&egrave;ces curieuses, tant en prose</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>qu'en vers</i>. Paris, A. de Sommaville, 1664, in-12.)<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Il existe un po&euml;me all&eacute;gorique et moral, intitul&eacute;: <i>Architrenius</i>,
+publi&eacute; &agrave; Paris en 1517, in-4<sup>o</sup>, et dont l'auteur, Jean d'Hanteville ou
+d'Hanville, &eacute;tait un moine qui vivait &agrave; la fin du douzi&egrave;me si&egrave;cle. Ce
+bon religieux mettait, dans ses vers, sans y entendre malice, des traits
+un peu vifs; il se pla&icirc;t, par exemple, &agrave; tracer le portrait d'une jeune
+beaut&eacute;; un passage est relatif au sein, il tombe dans notre domaine:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>Non implet longoeva sinum, puerilibus annis</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Castigata sedes, teneroque rotundula botro....</i><br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Nous avons sous les yeux une traduction in&eacute;dite de ce fragment:</p>
+
+<p>&laquo;Tel qu'une graine vermeille de raisin, un petit tetin, frais et poli,
+s'&eacute;l&egrave;ve mollement sur un sein arrondi, et la couleur de rose contraste
+avec cette touffe de lys. Ces deux globes charmants sont grossis par
+l'effet de leur jeunesse, et non par le lait qui ne les a pas encore
+remplis. Un l&eacute;ger n&oelig;ud de ruban les serre sans en comprimer la fermet&eacute;.
+Elev&eacute;s au milieu d'une surface plane, ces monticules font voir au milieu
+d'eux comme un vallon.&raquo;</p>
+
+
+<p>LES D&Eacute;LICES DE LA PO&Eacute;SIE GALANTE. Paris, Ribou, 1666, in-12.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">SIXAIN.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>En envoyant un bouquet de jassemin.</i><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Allez, doux jassemin o&ugrave; l'amour vous appelle,<br /></span>
+<span class="i0">Et si vous approchez du beau sein de Philis,<br /></span>
+<span class="i0">Dont la blancheur ternit celle des plus beaux lis,<br /></span>
+<span class="i0">Avant que de mourir, dites &agrave; cette belle<br /></span>
+<span class="i4">Que je croirais mon sort bien doux<br /></span>
+<span class="i4">D'y pouvoir mourir avec vous.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">SOMAISE.<br /></span>
+</div></div>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">SUR UNE SANGSUE QUI PIQUE LE SEIN DE SYLVIE.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Quel objet de courroux se pr&eacute;sente &agrave; ma vue?<br /></span>
+<span class="i0">Un insecte cruel, une noire sangsue<br /></span>
+<span class="i4">Pique un sein plus blanc que les lys,<br /></span>
+<span class="i4">Dont tous les traits sont accomplis.<br /></span>
+<span class="i0">Crois-tu bien te souler du sang de ma Silvie?<br /></span>
+<span class="i0">Sa blancheur te devrait d&eacute;tourner du dessein<br /></span>
+<span class="i6">De lui piquer le sein.<br /></span>
+<span class="i0">Si tu veux contenter ta malheureuse envie,<br /></span>
+<span class="i4">La peine suivra ton souhait,<br /></span>
+<span class="i4">Car soudain tu perdras la vie<br /></span>
+<span class="i0">Et tu n'auras suc&eacute; que des gouttes de lait.<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">LE BUSC.</span></div></div>
+
+<p>Cette pi&egrave;ce &eacute;tant un peu longue et assez m&eacute;diocre, nous n'en
+reproduirons qu'un fragment:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Ce bois touche par privilege<br /></span>
+<span class="i0">Un double petit mont de neige<br /></span>
+<span class="i0">Qui, par un joli mouvement<br /></span>
+<span class="i0">Se soul&egrave;ve fort mollement<br /></span>
+<span class="i0">Et puis mollement se rabaisse,<br /></span>
+<span class="i0">Allant et revenant sans cesse<br /></span>
+<span class="i0">D'un air charmant et gracieux,<br /></span>
+<span class="i0">Comme s'il s'approchait des yeux<br /></span>
+<span class="i0">Pour ses beaut&eacute;s faire connoistre<br /></span>
+<span class="i0">Et puis mollement disparoistre.<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">L'AMOUR SUR UNE GORGE REBONDIE.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">SONNET.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">C'est ici qu'on peut voir qu'en l'un et l'autre monde<br /></span>
+<span class="i0">Je r&egrave;gne &eacute;galement et je donne des loix;<br /></span>
+<span class="i0">J'en ai deux aujourd'hui que j'habite &agrave; mon choix<br /></span>
+<span class="i0">Et dans chacun des deux ma gloire est sans seconde.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Sur deux fermes t&eacute;tons mon empire se fonde;<br /></span>
+<span class="i0">J'y soumets sans efforts les plus superbes rois;<br /></span>
+<span class="i0">Il n'en est point qui puisse &eacute;viter mes exploits<br /></span>
+<span class="i0">Et que ma politique &agrave; la fin ne confonde.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Je ne crains pas, comme eux, les moindres changemens;<br /></span>
+<span class="i0">J'aime &agrave; voir remuer, et les soul&egrave;vemens<br /></span>
+<span class="i0">Servent &agrave; ma grandeur, s'ils font leur d&eacute;cadence.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Et quoy que les prudens et les plus advis&eacute;s<br /></span>
+<span class="i0">Imputent la faiblesse aux &Eacute;tats divis&eacute;s,<br /></span>
+<span class="i0">Si les miens ne l'&eacute;toient, j'aurois moins de puissance.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Louis XV demanda un jour &agrave; Bouret, secr&eacute;taire du cabinet, comment il
+trouvait la dauphine et si elle avait de la gorge. Il r&eacute;pondit que
+Marie-Antoinette &eacute;tait charmante de figure et qu'elle avait de beaux
+yeux. &laquo;Ce n'est pas cela dont je vous parle, r&eacute;pondit Sa Majest&eacute;, je
+vous demande si elle a de la gorge.&mdash;Sire, je n'ai pas pris la libert&eacute;
+de porter mes regards jusque-l&agrave;.&mdash;Vous &ecirc;tes un sot, continua le monarque
+en riant, c'est la premi&egrave;re chose qu'on regarde aux femmes.&raquo;</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">RONDEAU.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i2">Au doulx chant de ces alouettes<br /></span>
+<span class="i0">En ces moys dauril et de may<br /></span>
+<span class="i0">Je me mettois en grand esmoy<br /></span>
+<span class="i0">De dire plusieurs bergerettes<br /></span>
+<span class="i1">La desirois mes amourettes<br /></span>
+<span class="i0">A les tenir aupres de moy<br /></span>
+<span class="i5">Au doulx chant.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i1">Pour manier les mammelettes<br /></span>
+<span class="i0">Et leur bailler soubdain la foy<br /></span>
+<span class="i0">Tout ainsi que faire le doy<br /></span>
+<span class="i0">Dessus ces belles herbelettes<br /></span>
+<span class="i5">Au doulx chant.<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">MARINO.</span></div></div>
+<p>Les t&eacute;tons des belles sont deux tours vivantes d'alb&acirc;tres d'o&ugrave; l'Amour
+blesse les amants. Ce sont deux &eacute;cueils contre lesquels nos libert&eacute;s
+vont agr&eacute;ablement faire naufrage; deux mondes de beaut&eacute; &eacute;clair&eacute;s par
+deux beaux soleils qui sont les yeux. Un auteur fran&ccedil;ais les compare &agrave;
+deux pommes et s'&eacute;crie:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Heureux qui peut monter sans bruit<br /></span>
+<span class="i0">Sur l'arbre qui porte ce fruit.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Au commencement du <span class="smcap">XVIII</span><sup>e</sup> si&egrave;cle, les dames portaient sur leur gorge
+d&eacute;couverte des croix et des petits Saint-Esprit en diamants. Aussi, un
+pr&eacute;dicateur s'&eacute;cria-t-il un jour en chaire: &laquo;Bon Dieu! peut-on plus mal
+placer la croix qui repr&eacute;sente la mortification, et le Saint-Esprit,
+auteur de toutes bonnes pens&eacute;es.&raquo;</p>
+
+<p>Voici une pi&egrave;ce manuscrite attribu&eacute;e &agrave; Voisenon; j'ignore si elle a &eacute;t&eacute;
+imprim&eacute;e, mais comme elle est peu connue, les lecteurs seront sans
+doute charm&eacute;s de la trouver ici.</p>
+
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">LES TETONS DE MA COUSINE.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Il te souvient de ce Pygmalion,<br /></span>
+<span class="i0">De la statue &eacute;l&eacute;gante qu'il aime,<br /></span>
+<span class="i0">Et que V&eacute;nus, pour sa d&eacute;votion,<br /></span>
+<span class="i0">Avoit chang&eacute;e en une autre elle-m&ecirc;me.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">En toi le cas pareil est arriv&eacute;;<br /></span>
+<span class="i0">Tu fus statue; car, par exp&eacute;rience<br /></span>
+<span class="i0">J'en suis certain, et ce qu'ici j'avance<br /></span>
+<span class="i0">Est dans ces vers un peu plus bas prouv&eacute;.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">&Eacute;tant encor bloc de marbre insensible<br /></span>
+<span class="i0">Tout &eacute;toit dur; tu n'avois nul ressort;<br /></span>
+<span class="i0">V&eacute;nus voulut t'amollir tout le corps<br /></span>
+<span class="i0">Pour te le rendre aux plaisirs plus flexible.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Pour recevoir et donner un baiser<br /></span>
+<span class="i0">Bien tendrement &agrave; l'amant qui te presse,<br /></span>
+<span class="i0">Elle amollit ta bouche enchanteresse,<br /></span>
+<span class="i0">Elle amollit tes bras pour l'embrasser.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Jambes d'abord et ce qui les surmonte<br /></span>
+<span class="i0">Gardent encor un peu de duret&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Moins que le marbre, et si plus haut on monte,<br /></span>
+<span class="i0">On trouvera de l'&eacute;lasticit&eacute;.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Mais ce qui peut mieux prouver mon syst&egrave;me,<br /></span>
+<span class="i0">Elle oublia de changer tes t&eacute;tons;<br /></span>
+<span class="i0">Ils sont taill&eacute;s aussi juste, aussi ronds<br /></span>
+<span class="i0">Et blancs et durs comme le marbre m&ecirc;me.<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">MADRIGAL.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Tout ici baise, Jeanneton,<br /></span>
+<span class="i0">Ton mouchoir baise ton t&eacute;ton,<br /></span>
+<span class="i0">Tes cheveux se baisent et rebaisent,<br /></span>
+<span class="i0">Je vois tes l&egrave;vres se baiser;<br /></span>
+<span class="i0">Et si toutes choses se baisent<br /></span>
+<span class="i0">Voudrais-tu bien me refuser?<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Je n'ai pas envie de d&eacute;terminer positivement ici de quelle taille
+doivent &ecirc;tre les t&eacute;tons, ni prendre parti dans le diff&eacute;rend qui pourrait
+s'&eacute;lever sur la longueur, la largeur et la distance de ces deux parties
+du corps des belles; je dirai seulement que si les hommes ont raison de
+donner la pr&eacute;f&eacute;rence aux plus gros, d'autres n'ont pas tort de pr&eacute;f&eacute;rer
+un sein qui n'est pas fort garni. Il faut croire, sur ce point, que Le
+Pays parlait s&eacute;rieusement et sans flatterie &agrave; sa Caliste, lorsqu'il
+s'exprimait ainsi:</p>
+
+<p>&laquo;Votre sein n'est pas des plus remplis, mais ce que vous en avez est
+blanc; et, s'il m'est permis de le dire comme je le pense, le morceau,
+pour &ecirc;tre petit, ne laisse pas d'&ecirc;tre d&eacute;licat.&raquo;</p>
+
+<p>Une chose au moins que je puis avancer hardiment, c'est qu'une femme ne
+saurait &ecirc;tre belle, si elle n'a une belle gorge et un beau sein. Aussi
+voyons-nous que de tous les faiseurs de portraits, aucun n'oublie les
+t&eacute;tons, quand il veut peindre une beaut&eacute; parfaite.</p>
+
+<p>M. Victor Cousin, dans son ouvrage sur <i>M<sup>me</sup> de Longueville</i>, parle &agrave;
+diverses reprises de l'objet qui nous occupe. D&eacute;crit-il (t. I<sup>er</sup>, p.
+321) un portrait de la duchesse par Anselme van Hull, il observe que &laquo;le
+sein &agrave; demi-d&eacute;couvert, para&icirc;t dans sa beaut&eacute; modeste.&raquo; A-t-il l'occasion
+de retracer les traits d'Anne d'Autriche, de la duchesse de Chevreuse,
+de M<sup>me</sup> de Montbazon, il n'oublie pas de vanter la perfection de leur
+gorge. Le philosophe &eacute;clectique, le traducteur de <i>Platon</i>, l'&eacute;diteur de
+l'infortun&eacute; <i>Abailard</i>, &eacute;tait connaisseur.</p>
+<div class="center">
+ <img src="images/051.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<div class="center">
+ <img src="images/052.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+<h2><a name="CHAPITRE_III" id="CHAPITRE_III"></a><a href="#table">CHAPITRE III.</a></h2>
+
+<h3>S'IL EST DE LA BIENS&Eacute;ANCE QUE LES DAMES LAISSENT VOIR LEURS T&Eacute;TONS, ET
+S'IL EST PERMIS AUX AMANTS DE LES TOUCHER.</h3>
+
+
+<p>La solution de ce probl&egrave;me pr&eacute;sente de grandes difficult&eacute;s, et pourrait
+&ecirc;tre la mati&egrave;re d'une longue et savante dissertation; mais les longs
+ouvrages me font peur:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">&laquo;Au lieu d'&eacute;puiser la mati&egrave;re,<br /></span>
+<span class="i0">Il n'en faut prendre que la fleur.&raquo;<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Moli&egrave;re fait dire au Tartuffe, qu'un sein d&eacute;couvert blesse l'&acirc;me, et
+fait na&icirc;tre de coupables pens&eacute;es. Le petit-p&egrave;re Andr&eacute; se r&eacute;criait
+l&agrave;-dessus avec beaucoup de z&egrave;le dans un de ses sermons: &laquo;Quand vous
+voyez, disait-il, ces t&eacute;tons rebondis et qui se montrent avec tant
+d'impudence, bandez, messieurs, bandez-vous les yeux.&raquo; Un autre
+pr&eacute;dicateur turlupin, si ce n'est pas le m&ecirc;me, d&eacute;fendait aux filles de
+d&eacute;couvrir leurs seins, et d'en laisser approcher la main entreprenante
+des amants; &laquo;car, disait-il pour terminer une violente sortie &laquo;quand la
+Hollande est prise, adieu les Pays-Bas.&raquo; Il faisait, par ce mot de
+Hollande, allusion au fichu de batiste ou de toile de Hollande qui
+couvrait alors le sein de nos belles, un peu plus que leur gaze
+tr&egrave;s-claire ne le fait aujourd'hui.</p>
+
+<p>On trouve dans le <i>Cabinet satyrique</i>, les vers suivants:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">SUR LES FEMMES QUI MONTRENT LEUR SEIN.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">&Eacute;PIGRAMME.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Les filles qui, au temps pass&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Souloient descouvrir leur visage,<br /></span>
+<span class="i0">Ceste coustume ont d&eacute;laiss&eacute;<br /></span>
+<span class="i0">Pour de leur sein nous faire hommage;<br /></span>
+<span class="i0">S'elles en continuent l'usage,<br /></span>
+<span class="i0">Descouvertes jusqu'&agrave; l'ar&ccedil;on,<br /></span>
+<span class="i0">Sus, sus! enfants, prenons courage,<br /></span>
+<span class="i0">Nous leur verrons bientost le c..<br /></span>
+</div></div>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">QUATRAINS SUR LE MESME SUBJECT.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">A vostre advis, si celle-l&agrave;<br /></span>
+<span class="i0">Qui va la gorge descouverte<br /></span>
+<span class="i0">Ne faic pas signe par cela<br /></span>
+<span class="i0">Qu'elle voudroit estre couverte?<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Madame, cachez vostre sein<br /></span>
+<span class="i0">Avec ce beau tetin de rose,<br /></span>
+<span class="i0">Car si quelqu'un y met la main,<br /></span>
+<span class="i0">Il y voudra mettre autre chose.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Les dames qui monstrent leurs seins,<br /></span>
+<span class="i0">Leurs tetins, leurs poictrines nu&euml;s,<br /></span>
+<span class="i0">Doit-on demander si tels saincts<br /></span>
+<span class="i0">Demandent chandelles menu&euml;s?<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">STANCES SUR LA D&Eacute;FENSE DES GORGES DESCOUVERTES DES DAMES.</span></div></div>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Je ne s&ccedil;ay par quelle malice<br /></span>
+<span class="i0">On dit aujourd'huy que c'est vice<br /></span>
+<span class="i0">De montrer son sein rondelet,<br /></span>
+<span class="i0">Veu qu'au temps premier d'innocence<br /></span>
+<span class="i0">La femme n'eut onc cognoissance<br /></span>
+<span class="i0">N'y de robe ny de colet.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Elle cheminoit toute nu&euml;<br /></span>
+<span class="i0">Par les pr&eacute;s, sur l'herbe menu&euml;,<br /></span>
+<span class="i0">Parlant avec son amoureux:<br /></span>
+<span class="i0">Blasmerons-nous les femmes belles<br /></span>
+<span class="i0">Qui commencent par leurs mamelles<br /></span>
+<span class="i0">A ramener ce temps heureux?<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Il faut cacher la main sauvage,<br /></span>
+<span class="i0">Pleine de sang et de carnage,<br /></span>
+<span class="i0">Et couvrir la bouche qui ment,<br /></span>
+<span class="i0">Mais une mamelle gentille<br /></span>
+<span class="i0">Et le blanc tetin d'une fille<br /></span>
+<span class="i0">Ne se doit cacher nullement.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Il faut enfermer sans lumi&egrave;re,<br /></span>
+<span class="i0">Au plus profond d'une tani&egrave;re<br /></span>
+<span class="i0">Le serpent et l'ours affam&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Mais un beau sein que l'on descouvre<br /></span>
+<span class="i0">N'a le venin d'une couleuvre,<br /></span>
+<span class="i0">Pour estre clos et renferm&eacute;.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Fol est l'usurier qui resserre<br /></span>
+<span class="i0">Ses facultez dedans la terre<br /></span>
+<span class="i0">Et tient son or ensevely;<br /></span>
+<span class="i0">Mais les pucelles lib&eacute;rales,<br /></span>
+<span class="i0">Entre deux pommes bien esgales,<br /></span>
+<span class="i0">Montrent l'ivoire bien poly.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Tout aussi tost que nos d&eacute;esses<br /></span>
+<span class="i0">Voulurent monstrer les richesses<br /></span>
+<span class="i0">De leurs beaux t&eacute;tons pr&eacute;cieux,<br /></span>
+<span class="i0">Amour, aveugle de nature,<br /></span>
+<span class="i0">Ne vola plus &agrave; l'aventure,<br /></span>
+<span class="i0">Et se desbanda les deux yeux.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Il rougit une double fraise<br /></span>
+<span class="i0">Dedans le feu de sa fournaise,<br /></span>
+<span class="i0">Deux soufflets furent les t&eacute;tons,<br /></span>
+<span class="i0">Qui de chaudes vapeurs s'enfl&egrave;rent<br /></span>
+<span class="i0">Et dedans nos &acirc;mes souffl&egrave;rent<br /></span>
+<span class="i0">Le feu d'amour que nous sentons.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Mais que servent ces jardinages,<br /></span>
+<span class="i0">Tant de couleurs et de feuillages,<br /></span>
+<span class="i0">Si l'&oelig;il humain en est absent?<br /></span>
+<span class="i0">Et voyons-nous dessus l'espine<br /></span>
+<span class="i0">Fleurir une rose pourprine<br /></span>
+<span class="i0">Pour la cacher lorsqu'elle sent?<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Quand Aquilon par l'air galope<br /></span>
+<span class="i0">Et qu'en janvier il envelope<br /></span>
+<span class="i0">La terre d'un pasle bandeau,<br /></span>
+<span class="i0">Tous ses plaisirs elle abandonne,<br /></span>
+<span class="i0">Elle g&eacute;mit, elle frissonne,<br /></span>
+<span class="i0">Comme un prisonnier au cordeau.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Mais quand Z&eacute;phire la courtise,<br /></span>
+<span class="i0">Lui despouillant sa robe grise<br /></span>
+<span class="i0">Pleine de cent mille gla&ccedil;ons,<br /></span>
+<span class="i0">Elle est du soleil penetr&eacute;e<br /></span>
+<span class="i0">Et enfante d'une ventr&eacute;e<br /></span>
+<span class="i0">Mille fleurs de mille fa&ccedil;ons.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">V&eacute;nus honteusement traict&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">Devant les dieux fut garott&eacute;e<br /></span>
+<span class="i0">Avecques Mars, son favory;<br /></span>
+<span class="i0">Promptement accourut Jeunesse<br /></span>
+<span class="i0">Qui vint destacher sa maistresse,<br /></span>
+<span class="i0">En despit du cocu mary.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Pour &eacute;ternelle r&eacute;compense,<br /></span>
+<span class="i0">La m&egrave;re d'Amour &agrave; Jouvence<br /></span>
+<span class="i0">Despo&uuml;illa ces deux monts charnus:<br /></span>
+<span class="i0">De l&agrave; vient que les damoiselles,<br /></span>
+<span class="i0">Quand on leur taste leurs mamelles,<br /></span>
+<span class="i0">Ont souvenance de V&eacute;nus.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Je ne pr&eacute;tends pas m'&eacute;riger en casuiste pour d&eacute;cider si les femmes
+peuvent et doivent montrer leur sein; mais quand je pourrais prouver,
+d'une mani&egrave;re p&eacute;remptoire, qu'il est plus &agrave; propos que les femmes se le
+couvrent, je ne sais si j'aurais le courage de l'entreprendre. Je vois,
+d'un c&ocirc;t&eacute;, tous les amants d&eacute;cha&icirc;n&eacute;s contre moi, si je m'oppose ainsi &agrave;
+leurs plaisirs; et, d'un autre c&ocirc;t&eacute;, toutes nos &eacute;l&eacute;gantes, furieuses de
+me voir condamner une mode qu'elles suivent presque g&eacute;n&eacute;ralement. Je
+citerai donc seulement ces vers de Mercier de Compi&egrave;gne, qui me
+paraissent justes. Il dit, en parlant aux auteurs, au sujet du po&euml;me de
+la <i>Guerre des Dieux</i>, dans lequel Parny s'&eacute;gaye sur les t&eacute;tons de la
+sainte Vierge, et ne gaze pas assez ses tableaux:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Revenez, le go&ucirc;t vous rappelle,<br /></span>
+<span class="i0">Mais gazez un peu vos tableaux;<br /></span>
+<span class="i0">Drapez V&eacute;nus: elle est plus belle<br /></span>
+<span class="i0">Quand un nuage la rec&egrave;le;<br /></span>
+<span class="i0">Le demi-jour sied &agrave; Paphos.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Voici les vers auxquels Mercier fait allusion:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Junon, V&eacute;nus et d'autres immortelles<br /></span>
+<span class="i0">Se moquaient de la brune Marie:<br /></span>
+<span class="i0">Son embarras, son air de modestie,<br /></span>
+<span class="i0">Servaient de texte aux illustres belles.<br /></span>
+<span class="i0">Mais n'en d&eacute;plaise &agrave; ces juges s&eacute;v&egrave;res,<br /></span>
+<span class="i0">De grands yeux noirs, doux et voluptueux,<br /></span>
+<span class="i0">Des yeux voil&eacute;s par de longues paupi&egrave;res,<br /></span>
+<span class="i0">Quoique baiss&eacute;s, sont toujours de beaux yeux.<br /></span>
+<span class="i0">Lorsqu'elle parle, une bouche de rose<br /></span>
+<span class="i0">Est &eacute;loquente et m&ecirc;me on lui suppose<br /></span>
+<span class="i0">Beaucoup d'esprit. De pudiques t&eacute;tons,<br /></span>
+<span class="i0">Bien s&eacute;par&eacute;s, bien fermes et bien ronds,<br /></span>
+<span class="i0">Et couronn&eacute;s par une double fraise,<br /></span>
+<span class="i0">Chr&eacute;tiens ou juifs, pour celui qui les baise,<br /></span>
+<span class="i0">N'en sont pas moins de fort jolis t&eacute;tons.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">PARNY.&mdash;<i>Guerre des Dieux</i>, ch. I<sup>er</sup>.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Le Pays est pour la mode qui trotte, quand il parle de cet air &agrave; sa
+Margoton:</p>
+
+<p>&laquo;J'ai un nouvel avis &agrave; vous donner sur ce que je vis hier que vous
+teniez vos petits t&eacute;tons enfermez aussi exactement qu'une religieuse.
+Vous avez tort, Margoton, de tenir ainsi en prison deux jeunes innocens
+qui n'ont point encore commis de crime. Je vous assure qu'ils souffrent
+cette cl&ocirc;ture &agrave; contrec&oelig;ur. Malgr&eacute; le linge qui les resserre, j'ai
+remarqu&eacute; qu'ils en soupirent de tristesse, et qu'ils en sont tout enfl&eacute;s
+de col&egrave;re. A cause que vous &ecirc;tes sage de bonne heure, vous voulez
+peut-&ecirc;tre qu'ils vous imitent; mais ne savez-vous pas qu'ils sont plus
+jeunes que vous: que vous avez quatorze ans, qu'ils n'ont que quatorze
+mois; et qu'ainsi, quand vous seriez d&eacute;j&agrave; s&eacute;rieuse, il leur seroit
+permis de faire encore les badins? Lorsque vous n'&eacute;tiez pas plus &acirc;g&eacute;e
+qu'ils le sont pr&eacute;sentement, votre nourrice n'avoit point de honte de
+vous montrer toute nue; pourquoi en auriez-vous donc de nous montrer &agrave;
+nud deux jeunes enfans qui ne sont jamais si beaux que quand ils sont
+d&eacute;couverts? N'est-ce point que la tante qui vous gouverne a peur que, si
+vous les laissiez sans contrainte, ils n'usassent mal de leur libert&eacute;,
+et qu'ils ne l'employassent &agrave; attaquer la n&ocirc;tre? Si c'est pour cette
+raison qu'elle vous les fait couvrir si soigneusement, elle devroit
+aussi vous obliger &agrave; cacher vos yeux et vos autres appas, puisque vous
+n'en avez aucun qui ne d&eacute;robe tous les jours quelque c&oelig;ur ou quelque
+libert&eacute;. Mais je veux lui apprendre que vos t&eacute;tons en deviendront plus
+malicieux, plus ils seront enferm&eacute;s. Car si, dans leur prison, ils
+d&eacute;couvrent quelque trou par o&ugrave; ils puissent voir le jour, ils se
+mettront l&agrave; en sentinelle, pour assassiner le premier homme qui les
+regardera: si bien qu'on fera mieux de leur donner libert&eacute; toute
+enti&egrave;re; car alors on s'apprivoisera avec eux tout de bon, ils en
+deviendront moins dangereux.&raquo;</p>
+
+<p>Louis XIII ne fut point de cet avis, lui qui ne pouvait souffrir la vue
+d'un sein d&eacute;couvert, ainsi qu'on en peut juger par l'anecdote suivante:</p>
+
+<p>Chacun sait que Louis XIII &eacute;tait impuissant ou &agrave; peu pr&egrave;s. Un conseil de
+m&eacute;decins, apr&egrave;s l'avoir visit&eacute;, d&eacute;clara que jamais post&eacute;rit&eacute; ne
+sortirait de lui. Aussi, ce fils atrabilaire d'un p&egrave;re si galant,
+ha&iuml;ssait le sexe en g&eacute;n&eacute;ral. Les femmes lui inspiraient un &eacute;loignement
+qui tenait de l'aversion. La vue d'un sein m&ecirc;me jeune, frais et ferme le
+d&eacute;go&ucirc;tait. Il ressentait le m&ecirc;me d&eacute;go&ucirc;t et presque de l'effroi &agrave; la vue
+d'autres charmes plus secrets. Chez lui, la nature ne se taisait pas
+seulement &agrave; leur approche, elle se r&eacute;voltait. De l&agrave; cette r&eacute;putation de
+chastet&eacute; que les courtisans ont faite &agrave; ce monarque; de l&agrave; l'inf&eacute;condit&eacute;
+d'Anne d'Autriche apr&egrave;s dix ann&eacute;es de mariage, et le d&eacute;laissement
+d&eacute;plorable de cette voluptueuse princesse.</p>
+
+<p>L'inclination que Louis XIII &eacute;prouva pour M<sup>lle</sup> d'Hautefort ne d&eacute;ment
+point cette assertion; elle l'appuie au contraire d'un sensible
+t&eacute;moignage. Louis s'&eacute;tait attach&eacute; &agrave; cette jeune personne parce qu'elle
+&eacute;tait organis&eacute;e comme lui. Elle ne laissait voir aucune des faiblesses
+naturelles aux dames. Un &eacute;crivain ing&eacute;nieux a dit que Louis XIII n'&eacute;tait
+amoureux que depuis la ceinture jusqu'en haut, et que ses amours &eacute;taient
+vierges. Cette pruderie &eacute;tait pouss&eacute;e si loin qu'elle donna lieu &agrave; une
+impolitesse qui trouve naturellement sa place ici. Dans un voyage que
+fit Louis XIII, il s'arr&ecirc;ta &agrave; Poitiers. Il y eut un grand couvert; on
+recherchait avidement alors ces exhibitions de souverain, comparables &agrave;
+celles des m&eacute;nageries, sauf l'argent donn&eacute; &agrave; la porte. Une jeune
+spectatrice de l'app&eacute;tit royal avait le sein d&eacute;couvert; Louis XIII,
+ayant arr&ecirc;t&eacute; un moment sa vue sur cette indignit&eacute;, enfon&ccedil;a son chapeau
+sur ses yeux et les tint baiss&eacute;s pendant tout le reste du d&icirc;ner.
+Jusque-l&agrave; ce n'&eacute;tait que de la chastet&eacute;, voici quelque chose de plus. La
+derni&egrave;re fois que le prince pudibond but, il retint une gorg&eacute;e de vin
+dans sa bouche, puis, visant en chasseur habile, lan&ccedil;a cette r&eacute;serve sur
+les appas indiscr&egrave;tement expos&eacute;s. La pauvre fille, d&eacute;gouttante du
+liquide projectile, sortit toute confuse et s'&eacute;vanouit dans la pi&egrave;ce
+voisine. Un &eacute;crivain j&eacute;suite, le p&egrave;re Barri, en rapportant cette
+anecdote, assure que &laquo;cette <i>gorge</i> d&eacute;couverte m&eacute;ritait bien cette
+<i>gorg&eacute;e</i>.&raquo; Jeu de mots pitoyable, qui ne persuadera point qu'un
+souverain, encore m&ecirc;me que ce ne soit pas tout &agrave; fait un homme, puisse
+se conduire de la sorte avec une femme.</p>
+
+<p>On trouve le quatrain suivant, dans un livre fort rare, intitul&eacute;:
+<i>Proc&egrave;s et amples examinations sur la vie de Car&ecirc;me-Prenant</i>, et dans le
+<i>Momus Redivivus</i>, que j'ai d&eacute;j&agrave; cit&eacute;s:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Fille qui fait t&eacute;tin paroir,<br /></span>
+<span class="i0">Son corps par &eacute;troite v&ecirc;ture,<br /></span>
+<span class="i0">On se peut bien apercevoir<br /></span>
+<span class="i0">Que son c.. demande pature.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Claude de Pontoux, po&euml;te et m&eacute;decin, n&eacute; en 1530, &agrave; Ch&acirc;lons-sur-Sa&ocirc;ne,
+n'a gu&egrave;re chant&eacute; que l'amour. Il nous a laiss&eacute; une chanson que nous
+rapportons ici parce qu'elle est relative au sujet que nous traitons:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Ma petite Jeanneton<br /></span>
+<span class="i0">Me permet bien que je taste<br /></span>
+<span class="i0">Son beau col et son menton,<br /></span>
+<span class="i0">Et veut bien que je m'ebaste:<br /></span>
+<span class="i0">Mais sit&ocirc;t que je me haste<br /></span>
+<span class="i0">De ravir le beau bouton<br /></span>
+<span class="i0">Qui fleurit sur son t&eacute;ton<br /></span>
+<span class="i0">Et les fraisettes jumelles,<br /></span>
+<span class="i0">Elle me dit en riant:<br /></span>
+<span class="i0">Ne touchez pas l&agrave;, friand;<br /></span>
+<span class="i0">C'est le joyau des pucelles.<br /></span>
+</div></div>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">LA PUDEUR.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Pourquoi, belle Agla&eacute;, nous faire apercevoir<br /></span>
+<span class="i0">Ce sein &eacute;blouissant o&ugrave; le regard s'attache?<br /></span>
+<span class="i0">On aime le fichu qui le laisse entrevoir;<br /></span>
+<span class="i0">Mais on aime encor plus la pudeur qui le cache.<br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i15">Ed. Corbi&egrave;re.</span></div></div>
+
+<p>Charles Cotin soutient, dans les jolis vers suivants, que c'est une
+pr&eacute;caution inutile que de cacher les t&eacute;tons.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Vous cachez votre sein, mais vous montrez vos yeux,<br /></span>
+<span class="i2">Qui de tout vaincre ont le beau privil&egrave;ge;<br /></span>
+<span class="i0">N'est-ce pas me sauver du milieu de la neige,<br /></span>
+<span class="i2">Pour m'exposer au feu des cieux?<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Montreuil semble &eacute;pouser le parti contraire, lorsqu'il fait le reproche
+suivant &agrave; sa ma&icirc;tresse:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i4">Pourquoi me montrer votre sein,<br /></span>
+<span class="i0">Puisqu'un f&acirc;cheux jaloux s'oppose &agrave; mon dessein?<br /></span>
+<span class="i0">Votre bont&eacute; me tue autant qu'elle me pla&icirc;t;<br /></span>
+<span class="i0">Mes yeux sont trop heureux, ma bouche est malheureuse,<br /></span>
+<span class="i0">Et pour mon pauvre c&oelig;ur, il ne sait ce qu'il est.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Boursault trouve que les t&eacute;tons des belles sont tr&egrave;s-bien, quand ils ne
+sont ni trop cach&eacute;s, ni trop d&eacute;couverts. Il s'exprime ainsi dans une
+lettre o&ugrave; il fait &agrave; M<sup>lle</sup> de Beaumont le portrait de sa ma&icirc;tresse, qu'il
+nomme Clim&egrave;ne: &laquo;Clim&egrave;ne a les cheveux aussi noirs que vous les avez
+blonds; et, comme vous les avez du plus beau blond qui ait jamais &eacute;t&eacute;,
+elle les a du plus beau noir du monde. Elle a le front assez grand,
+assez &eacute;lev&eacute;, pour &ecirc;tre admirablement beau; et les sourcils qui sont au
+bas sont si noirs, et la sym&eacute;trie en est si d&eacute;licate, que pour les
+arranger avec tant de justesse, il semble que la nature ait emprunt&eacute; les
+mains de l'art. Ses yeux ravissent la franchise, quand ils ont toute
+leur vivacit&eacute;, et touchent l'&acirc;me, quand ils ont toute leur langueur. Son
+nez, qui passe pour un peu gros parmi ceux qui ne s'y connoissent pas,
+passe pour tout &agrave; fait beau parmi ceux qui s'y connoissent. Ses joues
+inspirent de l'amour, quand elles ont de la rougeur; et, quand elles
+n'en ont point, elles donnent de la tendresse. C'est dommage que sa
+bouche soit si petite, parce qu'il en sortiroit en foule toutes les
+bonnes choses qui n'en sortent que l'une apr&egrave;s l'autre, &agrave; cause des
+limites du passage; et si j'osois me servir du mot pr&eacute;cieux
+d'ameublement de bouche, pour dire ce que je pense de ses dents, je vous
+protesterois qu'il n'y en a jamais eu de plus riche que le sien. Elle a
+les l&egrave;vres d'une couleur fort vive, et elle ne les mord jamais. Son
+menton passeroit pour impertinent, s'il avoit l'audace d'&ecirc;tre laid, et
+de se m&ecirc;ler avec toutes les beaut&eacute;s qui sont sur un si charmant visage.
+<i>Le point dont elle se couvre la gorge, est assez raisonnable pour en
+laisser voir assez peu, pour ne point causer de desirs qui blessent le
+respect que l'on doit &agrave; Clim&egrave;ne: et toutefois il en montre assez pour
+donner envie de voir le reste. Tout le d&eacute;faut qu'elle a, cette gorge,
+c'est qu'elle est aussi dure que son c&oelig;ur.</i> Au reste, malgr&eacute; la peine
+que lui cause un amour qui la chagrine, et qui la rend plus maigre
+qu'elle ne devroit l'&ecirc;tre, elle a les mains si belles, que je ne suis
+jamais si ravi que lorsqu'elle m'en donne des soufflets, etc., etc.&raquo;</p>
+
+<p>Marot, dans cette &eacute;pigramme sur Barbe et sur Jacquette, pr&eacute;tend que le
+sein, couvert ou non, fait la m&ecirc;me impression sur les c&oelig;urs.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Quand je voy Barbe, en habit bien duisant,<br /></span>
+<span class="i0">Qui l'estomac blanc et poly <i>desc&oelig;uvre</i>,<br /></span>
+<span class="i0">Je la compare &agrave; maint rubis luisant,<br /></span>
+<span class="i0">Fort bien taill&eacute;, mis de mesmes en &oelig;uvre.<br /></span>
+<span class="i0">Mais quand je voy Jacquette qui se c&oelig;uvre<br /></span>
+<span class="i0">Le dur tetin, le corps de bonne prise,<br /></span>
+<span class="i0">D'un simple gris accoustrement de frise,<br /></span>
+<span class="i0">Adonc je dy pour la beaut&eacute; d'icelle,<br /></span>
+<span class="i0">Ton habit gris est une cendre grise<br /></span>
+<span class="i0">Couvrant un feu qui tousjours estincelle.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>La meilleure raison qui puisse excuser les femmes qui d&eacute;couvrent leur
+sein, c'est qu'il y a longtemps que cela se pratique ainsi; or, une
+ancienne coutume passe pour une loi parmi les jurisconsultes.
+D'ailleurs, elles tiennent pour maxime qu'il suffit &agrave; une femme d'&ecirc;tre
+chaste de la ceinture en bas. Cependant je doute fort que cette derni&egrave;re
+raison pr&eacute;val&ucirc;t, quand m&ecirc;me on n'aurait pas lu ces vers sur une femme
+trop libre dans ses discours:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i4">Une belle et galante dame,<br /></span>
+<span class="i0">&Eacute;coutant volontiers les contes un peu gras,<br /></span>
+<span class="i0">Disoit pour s'excuser: il suffit qu'une femme<br /></span>
+<span class="i0">Soit chaste seulement de la ceinture en bas.<br /></span>
+<span class="i0">&mdash;Oh! oh! dit un railleur, la maxime est commode,<br /></span>
+<span class="i0">Et sur un tel avis, le sexe f&eacute;minin<br /></span>
+<span class="i6">Pourra bien amener la mode<br /></span>
+<span class="i6">De la ceinture d'arlequin.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Enfin, je suppose, et j'avoue si l'on veut, que les dames ont la libert&eacute;
+de mettre leurs t&eacute;tons au jour pour vous proposer un autre cas. S'il est
+permis de les voir, n'aurons-nous pas aussi la permission de les
+toucher? La main et la bouche ne peuvent-elles pas avoir le m&ecirc;me
+privil&egrave;ge que la vue? Vous m'allez r&eacute;pondre que non: tous les amants
+sont cependant d'un autre avis, hormis Scarron et fort peu d'autres. Ce
+sale et burlesque auteur, dans son &eacute;p&icirc;tre chagrine au mar&eacute;chal d'Albert,
+d&eacute;clare que</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Les <i>patineurs</i> sont tr&egrave;s-insupportables,<br /></span>
+<span class="i0">M&ecirc;me aux beautez qui sont tr&egrave;s-<i>patinables</i>.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Dans son <i>Roman comique</i>, il condamne encore Ragotin, d'avoir voulu un
+peu patiner, et il dit que <i>c'est une galanterie provinciale qui tient
+plus du satyre que de l'honn&ecirc;te homme.</i> J'appelle de ses d&eacute;cisions.
+Peut-on bl&acirc;mer le proc&eacute;d&eacute; d'un galant homme, qui, voyant un sein
+charmant, deux globes d'alb&acirc;tre, voudrait, par le tact, s'assurer s'ils
+ont la duret&eacute; d&eacute;sirable, et cela uniquement pour s'instruire? J'approuve
+le proc&eacute;d&eacute; d'un homme galant qui, apr&egrave;s avoir patin&eacute; les t&eacute;tons d'une
+dame, improvisa encore cette chanson par-dessus le march&eacute;:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i6">Mort de ma vie!<br /></span>
+<span class="i4">En voyant ces t&eacute;tons,<br /></span>
+<span class="i6">Belle Sylvie,<br /></span>
+<span class="i4">Si beaux, si blancs, si ronds;<br /></span>
+<span class="i0">Pour savoir s'ils sont durs, j'ai form&eacute; le dessein<br /></span>
+<span class="i4">De passer mon envie,<br /></span>
+<span class="i4">Et d'y porter la main,<br /></span>
+<span class="i6">Mort de ma vie!<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>N'est-ce pas, en effet, une cruaut&eacute; inouie de nous mettre devant les
+yeux ces beaux meubles, et de nous d&eacute;fendre de les regarder et d'y
+toucher? J'en prends le galant abb&eacute; Cotin &agrave; t&eacute;moin; &eacute;coutez-le se
+plaindre &agrave; sa ma&icirc;tresse:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Vous me d&eacute;fendez d'approcher<br /></span>
+<span class="i0">De votre bouche sans pareille:<br /></span>
+<span class="i0">Votre gorge est une merveille,<br /></span>
+<span class="i0">Qu'on n'ose ni voir, ni toucher,<br /></span>
+<span class="i0">Le moins coupable des humains,<br /></span>
+<span class="i0">Et qui souffre le plus de peine,<br /></span>
+<span class="i0">C'est, &ocirc; trop aimable inhumaine,<br /></span>
+<span class="i0">Un amant sans yeux et sans mains.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>C'est, h&eacute;las! nous faire &eacute;prouver l'affreux supplice de Tantale; c'est
+nous condamner &agrave; la mort de Moyse, qui expira en voyant la terre
+promise, et qui n'y put entrer. Un autre po&euml;te qui n'avait pu commander
+&agrave; ses mains, se justifia de cette distraction, avec beaucoup d'esprit,
+par la pi&egrave;ce suivante:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Je suis un imprudent, un sot, un t&eacute;m&eacute;raire,<br /></span>
+<span class="i0">Je n'ai point de raison, j'ai l'esprit mal tourn&eacute;;<br /></span>
+<span class="i0">Je n'ai pour tout talent que celui de d&eacute;plaire;<br /></span>
+<span class="i0">Indigne de vous voir, digne d'&ecirc;tre bern&eacute;.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i4">Voil&agrave;, Philis, les &eacute;pith&egrave;tes<br /></span>
+<span class="i0">Que je re&ccedil;ois de vous, en l'humeur o&ugrave; vous &ecirc;tes;<br /></span>
+<span class="i0">Et de tout ce courroux vous avez pour raison,<br /></span>
+<span class="i0">Que ma main a voulu toucher votre t&eacute;ton.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">C'est trop punir, Philis, une main criminelle:<br /></span>
+<span class="i0">Que nous sommes, h&eacute;las! bien diff&eacute;rens d'humeur!<br /></span>
+<span class="i0">Pour toucher votre sein vous me faites querelle,<br /></span>
+<span class="i0">Moi, je ne vous dis rien d'avoir touch&eacute; mon c&oelig;ur!<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Si, par hasard, la main s'&eacute;gare dans le transport que fait na&icirc;tre une
+gorge rivale de celle de L&eacute;da ou d'H&eacute;b&eacute;, apr&egrave;s que l'on a fait le
+serment d'&ecirc;tre circonspect, croyez-vous que ce parjure soit
+irr&eacute;missible? Non, sans doute; ces sermens ne lient pas; je suis
+persuad&eacute; que Jupiter a absous l'amant qui va parler:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">&laquo;Je promets tous les jours de ne jamais toucher<br /></span>
+<span class="i0">Les neiges du beau sein dont l'amour me consume,<br /></span>
+<span class="i6">Mais je ne saurais m'emp&ecirc;cher<br /></span>
+<span class="i0">De suivre une si douce et si belle coutume.<br /></span>
+<span class="i4">Cruels devoirs! injustes ennemis!<br /></span>
+<span class="i6">Pensez-vous qu'Amarante ignore<br /></span>
+<span class="i0">Qu'amour, comme un enfant qui n'a pas l'&acirc;ge encore,<br /></span>
+<span class="i0">Doit &ecirc;tre dispens&eacute; de ce qu'il a promis?&raquo;<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i2">&laquo;<i>Jupiter &egrave; coelo perjuria ridet amantum.</i>&raquo;<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Je sais bon gr&eacute; &agrave; Boursault d'&ecirc;tre pour les patineurs.</p>
+
+<p>&laquo;Ah! juste Dieu, dit-il &agrave; M. Charpentier, que la ma&icirc;tresse &agrave; qui je ne
+suis que par votre moyen est vertueuse! Pour lui avoir aujourd'hui bais&eacute;
+deux ou trois fois la main, elle m'a vigoureusement querell&eacute;; voyez ce
+qui m'arriveroit, si je faisois pis. Je n'ai os&eacute; lui dire que je ne
+faisois l'amour que pour <i>baiser</i>, et que j'aimerais autant &ecirc;tre
+amoureux <i>ad honores</i>, que de ne pas faire les fonctions requises &agrave; la
+qualit&eacute; que ses yeux m'ont contraint de prendre. Je croyois, en v&eacute;rit&eacute;,
+qu'&eacute;tant amant d&eacute;clar&eacute; d'une fille, c'en &eacute;toit &ecirc;tre plus d'&agrave; moiti&eacute; le
+mari, et qu'on faisoit toujours quelques pas du c&ocirc;t&eacute; de l'amour d&eacute;fendu,
+avant que d'en venir &agrave; l'amour permis. A vous dire le vrai, je me lasse
+d'&ecirc;tre amant, s'il n'y a que cela &agrave; faire. Il est juste, si j'ai la
+discr&eacute;tion de ne rien demander &agrave; la belle, qui lui co&ucirc;te quelque chose,
+qu'elle ait la complaisance de me laisser prendre ce qui ne lui co&ucirc;te
+rien. La charmante Clotilde, que vous connoissez pour avoir autant de
+vertu que fille du monde, en use d'une fa&ccedil;on bien plus galante. Quand,
+lundi, je revins de la campagne, apr&egrave;s deux baisers qu'elle re&ccedil;ut aussi
+goul&ucirc;ment que je les lui donnois, son fichu qui vint &agrave; tomber, m'ayant
+oblig&eacute; de couvrir sa gorge de mes deux mains, de peur que d'autres ne la
+vissent, elle m'en remercia le plus civilement qu'il lui fut possible,
+et me demanda si je n'avois besoin que de cela. Il n'y a rien qui
+satisfasse tant, ni qui revienne &agrave; si peu de frais.&raquo;</p>
+
+<p>&laquo;Si vous mettez la main au devant d'une fillette, elle la repoussera
+vite, et dira: laissez cela. Quand je dis le devant, je l'entends comme
+faisoit monsieur le feu premier m&eacute;decin, qui ayant t&acirc;tonn&eacute; l'estomac
+d'une belle demoiselle couch&eacute;e et un peu malade, coule sa main plus bas,
+et, venant &agrave; l'intersection du corps, s'y avan&ccedil;oit, quand elle lui dit:
+&laquo;H&eacute;! monsieur, que pensez-vous faire?&mdash;Mademoiselle, je croyois que vous
+fussiez comme les vaches de notre pays; que vous eussiez les tetins
+entre les jambes.&raquo;</p>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i15"><i>Moyen de parvenir</i>, ch. IX.</span></div></div>
+
+<p>De tout temps le clerg&eacute; s'escrima en termes plus ou moins crus sur
+l'ind&eacute;cence de la toilette des femmes. Vers 1700, la duchesse de
+Bourgogne (Marie-Ad&eacute;la&iuml;de de Savoie) devait tenir un enfant avec
+<i>Monseigneur</i>; mais au moment de proc&eacute;der &agrave; la c&eacute;r&eacute;monie, l'officiant ne
+trouva pas que la marraine, qui avait une robe de chasse, se pr&eacute;sent&acirc;t &agrave;
+l'&eacute;glise en <i>habit d&eacute;cent</i>, et le bapt&ecirc;me fut remis. Or, veut-on savoir
+ce qu'on appelle &agrave; la cour l'<i>habit d&eacute;cent</i>? Il consiste &agrave; se montrer
+avec la gorge et les &eacute;paules enti&egrave;rement d&eacute;couvertes, la chute des reins
+bien marqu&eacute;e, les bras nus jusqu'au coude, et un pied de rouge sur le
+visage. L'habit de chasse cache toutes ces nudit&eacute;s, et les dames le
+portent sans rouge.... Cependant le cur&eacute; appelle ce costume
+<i>ind&eacute;cent</i>.... Il n'y a que mani&egrave;re de s'entendre sur les mots.</p>
+
+<p>On trouve dans les <i>Chroniques de l'Oeil de B&oelig;uf</i>, &agrave; l'ann&eacute;e 1711, le
+passage suivant:</p>
+
+<p>&laquo;La morale donna le jour de l'an des &eacute;trennes de sa fa&ccedil;on aux dames de
+Paris; c'est un ouvrage en 2 volumes in-12, intitul&eacute;: <i>De l'abus des
+nudit&eacute;s de gorge</i>. Je n'aurais jamais cru qu'on p&ucirc;t en &eacute;crire si long
+sur une telle mati&egrave;re; mais elle s'est &eacute;tendue sous la main de l'auteur.
+Chaque tentation que cet usage immodeste peut faire na&icirc;tre est trait&eacute;e
+dans un chapitre &agrave; part, o&ugrave; se d&eacute;roule une longue &eacute;num&eacute;ration de
+cons&eacute;quences dont la moindre entra&icirc;ne le p&eacute;ch&eacute; mortel; on peut juger des
+autres. Il faut convenir que les femmes de notre &eacute;poque accusent le nu
+d'une mani&egrave;re toute lac&eacute;d&eacute;monienne; point de refuge pour les regards
+d&eacute;vots, vainement leur chaste prunelle semble-t-elle dire:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">&laquo;Ah! cachez-moi ce sein, que je ne saurais voir&raquo;,<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>on persiste &agrave; le leur montrer: ici, c'est une robe sans ceinture, telle
+qu'on la met en sautant du lit; l&agrave;, c'est une gorge d&eacute;bordant du corset
+complaisant; plus loin, ce sont des bras et des &eacute;paules dont la nudit&eacute;
+se r&eacute;unit &agrave; celle des poitrines pour assaillir les continences
+eccl&eacute;siastiques. Forc&eacute; dans les derniers retranchements de sa pudeur
+sacr&eacute;e, le cur&eacute; de Saint-&Eacute;tienne-du-Mont s'&eacute;criait l'autre jour en
+chaire:</p>
+
+<p>&laquo;Pourquoi, mesdames, ne pas vous couvrir en notre pr&eacute;sence; sachez que
+nous sommes de chair et d'os comme les autres hommes!&raquo;</p>
+
+<p>L'auditoire s'&eacute;tant mis &agrave; rire, le pr&eacute;dicateur ajouta: &laquo;Quand on vous
+parle &agrave; mots couverts, vous faites la sourde oreille; quand on vous
+parle en termes clairs, vous riez: comment donc vous prendre?</p>
+
+<p>&laquo;Vous verrez qu'il faudra que le roi envoie ses mousquetaires par la
+ville, matin et soir, afin de faire rentrer nos coquettes dans le
+devoir, et les gorges dans les corsets.&raquo;</p>
+
+<p>Les robes des femmes, longues dans les premiers si&egrave;cles de la monarchie,
+se raccourcirent sous Philippe de Valois, et rest&egrave;rent tr&egrave;s-ferm&eacute;es
+jusqu'&agrave; Charles VI, et serr&eacute;es de mani&egrave;re &agrave; dessiner les formes de la
+taille. Alors seulement les femmes commenc&egrave;rent &agrave; se d&eacute;couvrir les bras,
+la gorge et les &eacute;paules, et comme la pente est rapide dans le
+rel&acirc;chement des m&oelig;urs, elles renouvel&egrave;rent sous Charles VII l'antique
+usage des bracelets et des colliers.</p>
+
+<p>La cour d&eacute;cente et s&eacute;v&egrave;re d'Anne de Bretagne arr&ecirc;ta un moment le torrent
+de ce luxe; mais celles de Charles IX et surtout de Henri III, trop
+fameux par ses go&ucirc;ts honteux, h&acirc;t&egrave;rent le d&eacute;bordement; Henri IV,
+quoique tr&egrave;s-galant, s'y opposa vainement. Fran&ccedil;ois 1<sup>er</sup> vint y mettre
+le comble en favorisant le luxe et la galanterie, et pr&ecirc;chant lui-m&ecirc;me
+d'exemple. La cour de Louis XIV acheva ce que ses pr&eacute;d&eacute;cesseurs avaient
+si bien commenc&eacute;; l'opulence et la volupt&eacute; y r&eacute;gn&egrave;rent souverainement.
+Nous avons dit plus haut ce qu'on entendait dans cette cour d&eacute;bauch&eacute;e
+par <i>habit d&eacute;cent</i>.</p>
+
+<p>Nous ne pouvons terminer ce chapitre sans parler de cette fameuse secte
+qui se forma en Hollande et dont Bayle, dans son <i>Dictionnaire
+critique</i>, au mot <i>Mammillaires</i>, nous instruit fort amplement. Voici,
+sans y rien changer, cet article qui trouve ici naturellement sa place:</p>
+
+<p>MAMMILLAIRES, secte parmi les anabaptistes. On ne sait pas bien le temps
+o&ugrave; ce nouveau schisme se forma; mais on donne la ville de Harlem pour le
+lieu natal de cette subdivision. Elle doit son origine &agrave; la libert&eacute;
+qu'un jeune homme se donna de mettre la main au sein d'une fille qu'il
+aimait, et qu'il voulait &eacute;pouser. Cet attouchement parvint &agrave; la
+connaissance de l'&Eacute;glise, et l&agrave;-dessus on d&eacute;lib&eacute;ra sur les peines que le
+d&eacute;linquant devait souffrir; les uns soutinrent qu'il devait &ecirc;tre
+excommuni&eacute;, les autres dirent que sa faute m&eacute;ritait gr&acirc;ce, et ne
+voulurent jamais consentir &agrave; son excommunication. La dispute s'&eacute;chauffa
+de telle sorte qu'il se forma une rupture totale entre les tenans. Ceux
+qui avaient t&eacute;moign&eacute; de l'indulgence pour le jeune homme furent nomm&eacute;s
+Mammillaires<a name="FNanchor_7_7" id="FNanchor_7_7"></a><a href="#Footnote_7_7" class="fnanchor">[7]</a>. En un certain sens, cela fait honneur aux anabaptistes;
+car c'est une preuve qu'ils portent la s&eacute;v&eacute;rit&eacute; de la morale beaucoup
+plus loin que ceux que l'on nomme rigoristes dans les Pays-Bas<a name="FNanchor_8_8" id="FNanchor_8_8"></a><a href="#Footnote_8_8" class="fnanchor">[8]</a>. Je
+rapporterai &agrave; ce propos un certain conte que l'on fait du sieur Labadie.</p>
+
+<p>&laquo;Tous ceux qui ont ou&iuml; parler de ce personnage savent qu'il recommandait
+&agrave; ses d&eacute;vots et &agrave; ses d&eacute;votes quelques exercices spirituels, et qu'il
+les dressait au recueillement int&eacute;rieur et &agrave; l'oraison mentale. On dit
+qu'ayant marqu&eacute; &agrave; l'une de ses d&eacute;votes un point de m&eacute;ditation, et lui
+ayant fort recommand&eacute; de s'appliquer tout enti&egrave;re pendant quelques
+heures &agrave; ce grand objet, il s'approcha d'elle lors qu'il la crut la plus
+recueillie, et lui mit la main au sein. Elle le repoussa brusquement, et
+lui t&eacute;moigna beaucoup de surprise de ce proc&eacute;d&eacute;, et se pr&eacute;parait &agrave; lui
+faire des censures, lorsqu'il la pr&eacute;vint: &laquo;Je vois bien, ma fille, lui
+dit-il sans &ecirc;tre d&eacute;concert&eacute;, et avec un air d&eacute;vot, que vous &ecirc;tes encore
+bien &eacute;loign&eacute;e de la perfection: reconnoissez humblement v&ocirc;tre foiblesse;
+demandez pardon &agrave; Dieu d'avoir &eacute;t&eacute; si peu attentive aux myst&egrave;res que
+vous deviez m&eacute;diter. Si vous y aviez apport&eacute; toute l'attention
+n&eacute;cessaire, vous ne vous fussiez pas aper&ccedil;ue de ce qu'on faisoit &agrave; votre
+gorge. Mais vous &eacute;tiez si peu d&eacute;tach&eacute;e des sens, si peu concentr&eacute;e avec
+la Divinit&eacute;, que vous n'avez pas &eacute;t&eacute; un moment &agrave; reconno&icirc;tre que je vous
+touchois. Je voulois &eacute;prouver si votre ferveur dans l'oraison vous
+&eacute;levoit au-dessus de la mati&egrave;re, et vous unissoit au Souverain-&Ecirc;tre, la
+vive source de l'immortalit&eacute; et de la spiritualit&eacute;, et je vois avec
+beaucoup de douleur que vos progr&egrave;s sont tr&egrave;s-petits; vous n'allez que
+terre &agrave; terre. Que cela vous donne de la confusion, ma fille, et vous
+porte &agrave; mieux remplir d&eacute;sormais les saints devoirs de la pri&egrave;re
+mentale.&raquo; On dit que la fille, ayant autant de bon sens que de vertu, ne
+fut pas moins indign&eacute;e de ces paroles que de l'action de Labadie, et
+qu'elle ne voulut plus ou&iuml;r parler d'un tel directeur. Je ne garantis
+point la certitude de tous ces faits, je me contente d'assurer qu'il y a
+beaucoup d'apparence que quelques-uns de ces d&eacute;vots si spirituels, qui
+font esp&eacute;rer qu'une forte m&eacute;ditation ravira l'&acirc;me et l'emp&ecirc;chera de
+s'apercevoir des actions du corps, se proposent de patiner impun&eacute;ment
+leurs d&eacute;votes, et de faire encore pis. C'est de quoi l'on accuse les
+Molinosistes. En g&eacute;n&eacute;ral, il n'y a rien de plus dangereux pour l'esprit
+que les d&eacute;votions trop mystiques et trop quintessenci&eacute;es, et sans doute
+le corps y court quelques risques, et plusieurs y veulent bien &ecirc;tre
+tromp&eacute;s.</p>
+
+<p>&laquo;J'ai ou&iuml; dire que des gens d'esprit soutinrent un jour dans une
+conversation qu'il n'y aura jamais de <i>Basiaires</i>, ou d'<i>Osculaires</i>,
+entre les Anabaptistes. Ce seraient des gens qu'on retrancherait de sa
+communion, parce qu'ils n'auroient pas voulu consentir que l'on
+excommuni&acirc;t ceux qui donnent des baisers &agrave; leurs ma&icirc;tresses. Or voici le
+fondement de ceux qui nioient qu'on puisse attendre un tel schisme. Il
+n'est pas possible, disoient-ils, qu'au cas qu'il y e&ucirc;t des casuistes
+assez s&eacute;v&egrave;res pour vouloir que l'excommunication f&ucirc;t la peine d'un
+baiser, comme il s'en est trouv&eacute; d'assez rigides pour vouloir faire
+subir cette p&eacute;nitence &agrave; celui qui avoit touch&eacute; les t&eacute;tons de sa
+ma&icirc;tresse. Ces deux cas ne sont point pareils. Les lois de la galanterie
+de certains peuples, continuoient-ils, ont &eacute;tabli de g&eacute;n&eacute;ration en
+g&eacute;n&eacute;ration, et surtout parmi les personnes du Tiers-&Eacute;tat, que les
+baisers soient presque la premi&egrave;re faveur, et que l'attouchement des
+t&eacute;tons soit presque la derni&egrave;re, ou la p&eacute;nulti&egrave;me. Quand on est &eacute;lev&eacute;
+sous de tels principes, on ne croit faire, on ne croit souffrir que peu
+de chose par des baisers, et l'on croit faire ou souffrir beaucoup par
+le maniement du sein. Ainsi, quoique les administrateurs des lois
+canoniques ayent fort cri&eacute; contre le jeune homme qui fut prot&eacute;g&eacute; par les
+Mammillaires, il ne s'en suit pas qu'ils crieroient contre l'autre
+esp&egrave;ce de galanterie. Ils def&eacute;reroient &agrave; l'usage, ils pardonneroient des
+libert&eacute;s qui ne passent que pour les premiers &eacute;l&eacute;mens ou pour l'alphabet
+des civilit&eacute;s caressantes. Je ne rapporte ces choses que pour faire voir
+qu'il n'y a point de mati&egrave;re sur quoi la conversation des personnes de
+m&eacute;rite ne descende quelquefois. Il n'est pas inutile de faire conno&icirc;tre
+cette foiblesse des gens d'esprit. En conscience, une telle sp&eacute;culation
+m&eacute;ritoit-elle d'&ecirc;tre examin&eacute;e? Et, apr&egrave;s tout, n'e&ucirc;t-il pas bien mieux
+valu ne point r&eacute;pondre d&eacute;cisivement de l'avenir? <i>De futuro contingenti
+non est quoad nos determinata veritas</i>, disent judicieusement les
+ma&icirc;tres dans les &eacute;coles de philosophie.</p>
+
+<p>&laquo;Notez en passant qu'il y a eu des pays o&ugrave; l'on supposoit que le premier
+baiser qu'une fille recevoit de son galant &eacute;tait celui des fian&ccedil;ailles.
+Voici ce qu'on lit dans l'<i>Histoire de Marseille</i>: &laquo;Le fianc&eacute; donnoit
+ordinairement un anneau &agrave; la fianc&eacute;e le jour des fian&ccedil;ailles, et lui
+faisoit encore quelque pr&eacute;sent consid&eacute;rable en reconnoissance du baiser
+qu'il lui donnoit. En effet, Fulco, vicomte de Marseille, fit donation,
+l'an 1005, &agrave; Odile, sa fianc&eacute;e, pour le premier baiser, de tout le
+domaine qu'il avoit aux terres de Sixfours, de Cireste, de Soliers, de
+Cuge et d'Olieres. Cet usage &eacute;toit fond&eacute; &agrave; ce que j'estime sur la loi
+<i>Si &agrave; sponso</i>, qui ordonnoit que lorsque le mariage n'avoit pas son
+effet, la fianc&eacute;e gagnoit la moiti&eacute; des pr&eacute;sens qu'elle avoit re&ccedil;us du
+fianc&eacute;, car les anciens croioient que la puret&eacute; d'une fille &eacute;toit
+fl&eacute;trie par un seul baiser, mais cette loi est pr&eacute;sentement abrog&eacute;e en
+ce royaume.&raquo;</p>
+<div class="center">
+ <img src="images/076.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+<hr style="width: 65%;" />
+<div class="center">
+ <img src="images/078.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+<h2><a name="CHAPITRE_IV" id="CHAPITRE_IV"></a><a href="#table">CHAPITRE IV.</a></h2>
+
+<h3>DU LANGAGE DES T&Eacute;TONS.</h3>
+
+
+<p>Tous les &ecirc;tres cr&eacute;&eacute;s ont un langage, depuis les roseaux du barbier de
+Midas, jusqu'aux hydrophobes auteurs des plates brochures qui inondent
+cette capitale.</p>
+
+<p>Le p&egrave;re Bougeant s'est immortalis&eacute; par son charmant ouvrage <i>Sur le
+langage des b&ecirc;tes</i>, qui a &eacute;t&eacute; traduit en italien. Les yeux ont une
+rh&eacute;torique connue de tout le monde. Les mains ont leur idiome; les pieds
+des amans font merveille dans leur myst&eacute;rieux quatuor sous la table; les
+genoux s'en m&ecirc;lent aussi; les fleurs parlent en Asie; et les c&oelig;urs, les
+c&oelig;urs! on sait combien ils sont &eacute;loquens, bavards et tyrans. J'en
+dirais long sur ce chapitre, et l'ami Boufflers, qui a dit de si jolies
+choses sur le <i>c&oelig;ur</i>, embellirait bien mon texte. Doit-on &ecirc;tre surpris,
+d'apr&egrave;s cela, que les t&eacute;tons aient aussi re&ccedil;u de la nature un organe
+expressif, et des moyens oratoires? Non, sans doute; ils ont une langue,
+et Le Pays est mon autorit&eacute;, dans le r&eacute;cit d'un songe qu'il fit sur deux
+beaux t&eacute;tons. Il &eacute;crit &agrave; une dame de ses amies:</p>
+
+<p>&laquo;Je n'ai point dormi cette nuit, Madame, ou du moins, le songe que j'ai
+fait occupoit si sensiblement mon esprit, que j'ai cru veiller en fort
+bonne compagnie. J'ai cru avoir toujours aupr&egrave;s de moi les deux t&eacute;tons
+de Madonte, et les voir avec ce m&ecirc;me &eacute;clat qui me surprit hier au soir
+quand votre main obligeante les d&eacute;livra de la prison qui les enfermoit.
+Vous pouvez bien croire, Madame, que je n'ai pas gard&eacute; le silence dans
+une si belle occasion de parler: mais, pourrez-vous croire que ces jolis
+t&eacute;tons m'ont aussi parl&eacute;, et que notre conversation a &eacute;t&eacute; fort agr&eacute;able?
+Que ceci ne vous surprenne point, les t&eacute;tons ont, pour ceux qui les
+entendent, leur langage, aussi bien que les yeux. Comme je les ai
+trouvez en humeur de causer, j'ai eu la curiosit&eacute; de leur faire cent
+questions sur leurs aventures, auxquelles ils m'ont r&eacute;pondu le plus
+galamment du monde. J'aurois bien envie de vous redire ici tout notre
+entretien, mais il sera plus ais&eacute; de vous l'&eacute;crire. Voici pourtant
+quelques-unes de leurs paroles que j'ai impatience de vous apprendre,
+parce qu'elles m'ont sembl&eacute; les plus jolies. C'est la r&eacute;ponse qu'ils
+m'ont faite sur l'&eacute;tonnement que je leur ai t&eacute;moign&eacute; qu'ils fussent
+ainsi s&eacute;parez, et qu'ayant l'un avec l'autre tant de rapport, ils
+v&eacute;cussent en mauvais voisins, sans s'approcher, sans se baiser, enfin
+comme des ennemis irr&eacute;conciliables. Il est vrai, m'ont-ils dit, nous
+sommes ennemis, et la ressemblance ne fait point chez nous ce qu'elle
+fait partout ailleurs. Elle nous oblige &agrave; nous ha&iuml;r; et notre r&eacute;ciproque
+jalousie nous tiendra toujours &eacute;loignez. Quoique nous n'ayons qu'un m&ecirc;me
+c&oelig;ur et qu'un m&ecirc;me int&eacute;r&ecirc;t, nous n'avons aucune disposition &agrave; nous
+unir. L'Amour, qui est un petit boute-feu, nourrit entre nous cette
+division. Il nous promet de nous aimer tous deux pendant que nous nous
+ha&iuml;rons, et jure de nous quitter aussit&ocirc;t que notre haine cessera. Mais,
+de bonne foi, aimables t&eacute;tons, ai-je r&eacute;pliqu&eacute;, ne seriez-vous point
+comme quelques-uns de vos fr&egrave;res, qui jamais ne se touchent le jour, et
+qui se baisent pendant toute la nuit; qui ont inclination &agrave; s'approcher,
+et qui ne vivent &eacute;loignez que par contrainte? Vous serez &eacute;tonn&eacute;e,
+Madame, que j'aye os&eacute; leur parler d'une mani&egrave;re si d&eacute;sobligeante, mais
+sachez que ce n'a &eacute;t&eacute; que par adresse. Car quoique je n'eusse point de
+pareils sentimens, je voulois les obliger &agrave; m'&ocirc;ter le doute que je
+t&eacute;moignois, en souffrant que mes doigts fussent avec mes yeux t&eacute;moins de
+leur division. Ma ruse a r&eacute;ussi comme je l'avois d&eacute;sir&eacute;; les deux t&eacute;tons
+de Madonte s'&eacute;tant un peu enflez de col&egrave;re et d'orgueil, &agrave; cause de mon
+injuste soup&ccedil;on, ont consenti que je fisse l'&eacute;preuve que je souhaitois,
+et cette &eacute;preuve a d'abord fait sentir &agrave; mes mains la v&eacute;rit&eacute; qui avait
+paru &agrave; mes yeux.</p>
+
+<p>Apr&egrave;s cela, je ne me suis plus &eacute;tonn&eacute; qu'ils eussent tant de disposition
+&agrave; la haine; car j'ai trouv&eacute; tant de duret&eacute; dans l'un et dans l'autre,
+qu'il n'y a pas apparence que rien les puisse jamais attendrir. Au
+reste, Madame, je gage que votre belle parente ne sait rien de ce qu'ont
+fait chez moi ses t&eacute;tons. J'ai appris d'eux-m&ecirc;mes qu'ils font bien
+d'autres choses, sans son cong&eacute;; ils m'ont dit que lorsqu'elle y pense
+le moins, ils se divertissent &agrave; prendre des c&oelig;urs, partout o&ugrave; ils
+trouvent des yeux, et que c'est leur passe-temps le plus ordinaire. Ils
+m'ont dit m&ecirc;me que quand ils ont pris quelqu'un, et que Madonte s'en
+apper&ccedil;oit, elle le traite aussi cruellement que si sa prise l'avoit
+offens&eacute;e. Elle l'insulte, dans son esclavage, elle ne lui donne aucun
+secours, et prend plaisir &agrave; le voir mourir de langueur.&raquo;</p>
+
+<p>Ce Le Pays &eacute;tait un tr&egrave;s-rude patineur. Sa Caliste lui avait promis de
+l'aller voir, dans le tems qu'une cruelle fi&egrave;vre le travailloit et
+l'avait mis dans un &eacute;tat pitoyable. Il lui fait premi&egrave;rement le portrait
+de son visage de cette sorte:</p>
+
+<p>&laquo;Pour ma mine, vous ne v&icirc;tes jamais rien de si &eacute;trange: mes yeux sont
+devenus plus grands que tout le reste de mon visage, et il vous sera
+facile, s'il vous en prend fantaisie, de compter mes dents au travers de
+la peau de mes joues. Il ne faudra pas vous &eacute;tonner, si je vous fais
+froide mine; je la fais &agrave; tout le monde, et me la fais &agrave; moi-m&ecirc;me, quand
+je me regarde au miroir. Quelqu'envie que j'aye de vous plaire, je ne
+pourrai point m'emp&ecirc;cher de vous faire laide grimace.&raquo; Il ajoute
+ensuite:</p>
+
+<p>&laquo;Ce qu'il y a de bon, Caliste, c'est que mes mains, dont vous vous &ecirc;tes
+plainte tant de fois, ne vous donneront aucun sujet de me quereller. Je
+vous jure qu'en l'humeur o&ugrave; je suis, les t&eacute;tons de la belle H&eacute;l&egrave;ne, qui
+assur&eacute;ment devoient &ecirc;tre des plus beaux, puisqu'ils firent tant jouer
+des mains les Troyens et les Grecs, ne me feroient pas pr&eacute;sentement
+tirer les miennes de dessous ma fourrure. Jugez, par l&agrave;, si vous auriez
+&agrave; craindre du reste, et si vous ne vous en irez pas de chez moi sans
+avoir cri&eacute; contre mes emportemens!&raquo;</p>
+
+<p>Marot avait le m&ecirc;me d&eacute;faut que Le Pays, et ne laissait &eacute;chapper aucune
+occasion de mettre ses yeux au bout de ses doigts. Il aurait bien
+souhait&eacute;, un jour des Innocents, de savoir o&ugrave; &eacute;tait le lit de sa belle,
+pour la faire passer par l'&eacute;tamine. N'en pouvant venir &agrave; bout, il se
+contenta de lui &eacute;crire ces vers:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Tr&egrave;s-ch&egrave;re s&oelig;ur si je savois o&ugrave; couche<br /></span>
+<span class="i0">Vostre personne au jour des innocens,<br /></span>
+<span class="i0">De bon matin j'irais &agrave; vostre couche.<br /></span>
+<span class="i0">Voir ce gent corps que j'ayme entre cinq cens:<br /></span>
+<span class="i0">Adonc, ma main (veu l'ardeur que je sens),<br /></span>
+<span class="i0">Ne se pourrait bonnement contenter,<br /></span>
+<span class="i0">Sans vous toucher, tenir, t&acirc;ter, tenter;<br /></span>
+<span class="i0">Et si quelqu'un survenoit d'adventure,<br /></span>
+<span class="i0">Semblant ferois de vous innocenter:<br /></span>
+<span class="i0">Seroit-ce pas honneste couverture?<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Apr&egrave;s tout, si ce qu'on vient d'all&eacute;guer, n'engage point les belles &agrave;
+laisser aux amans les coud&eacute;es franches et les mains libres, il n'en est
+pas moins vrai que toutes n'ont pas cette aust&eacute;rit&eacute;. La Corine du tendre
+Ovide ne faisait pas tant la rench&eacute;rie. Elle alla un jour trouver ce
+po&euml;te dans un &eacute;quipage tr&egrave;s-galant, et dans ce d&eacute;sordre voluptueux qui
+favorise et provoque si bien la libert&eacute; des mains: Ovide lui-m&ecirc;me nous
+l'apprend dans une de ses &eacute;l&eacute;gies amoureuses:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Le chaud que le midi fait na&icirc;tre sur la terre,<br /></span>
+<span class="i0">Aux plaisirs d'exercice avoit livr&eacute; la guerre:<br /></span>
+<span class="i0">Quand je m'allai jeter tout fatigu&eacute;, tout las,<br /></span>
+<span class="i0">Sur un lit de repos qui ne m'en servit pas.<br /></span>
+<span class="i0">J'attendois la Beaut&eacute; dont mon &acirc;me est charm&eacute;e.<br /></span>
+<span class="i0">Ma fen&ecirc;tre n'&eacute;toit ouverte, ni ferm&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">Et ces deux changements se c&eacute;dant tour-&agrave;-tour,<br /></span>
+<span class="i0">Laissoient voir un combat de la nuit et du jour.<br /></span>
+<span class="i0">L'on voit dans les for&ecirc;ts de ces sombres lumi&egrave;res,<br /></span>
+<span class="i0">Qui ne sont ni clartez, ni t&eacute;n&egrave;bres enti&egrave;res,<br /></span>
+<span class="i0">Et tels sont du soleil les timides flambeaux,<br /></span>
+<span class="i0">Lorsqu'il vient sur la terre, ou qu'il va sous les eaux.<br /></span>
+<span class="i0">Tel est le tems obscur qu'il faut donner aux dames;<br /></span>
+<span class="i0">De peur que la clart&eacute; ne trahisse leurs fl&acirc;mes.<br /></span>
+<span class="i0">L'Amour est un enfant qu'on nous a peint sans yeux,<br /></span>
+<span class="i0">Et ce dieu veut toujours &ecirc;tre aveugle en ses jeux.<br /></span>
+<span class="i0">Apr&egrave;s quelques momens, je vis entrer Corine;<br /></span>
+<span class="i0">Sous l'habit du plaisir, qu'elle avoit bonne mine!<br /></span>
+<span class="i0">Un voile transparent, de ses rares beaut&eacute;s<br /></span>
+<span class="i0">Dans un l&eacute;ger nuage &eacute;touffoit les clart&eacute;s.<br /></span>
+<span class="i0">Il faisoit &agrave; ma vue enti&egrave;re violence,<br /></span>
+<span class="i0">Sans sauver mes desirs de leur impatience:<br /></span>
+<span class="i0">Et ses cheveux, pouss&eacute;s d'un mouvement jaloux,<br /></span>
+<span class="i0">Cachoient toute sa gorge &agrave; mes transports si doux.<br /></span>
+<span class="i0">Corine valoit bien qu'ils me fissent querelle.<br /></span>
+<span class="i0">Jamais S&eacute;miramis n'avoit paru si belle;<br /></span>
+<span class="i0">Et ceux qui de La&iuml;s chant&egrave;rent les attraits,<br /></span>
+<span class="i0">N'avoient, pour les toucher, form&eacute; tant de souhaits.<br /></span>
+<span class="i0">Le linge me d&eacute;plut, quoiqu'assez favorable;<br /></span>
+<span class="i0">J'en fis avec Corine un combat agr&eacute;able,<br /></span>
+<span class="i0">Sa main vint au secours; mais je lus dans ses yeux,<br /></span>
+<span class="i0">Que son c&oelig;ur et sa main se trahissoient entr'eux.<br /></span>
+<span class="i0">Sa vertu vouloit faire une honn&ecirc;te retraite,<br /></span>
+<span class="i0">Ses efforts languissans demandoient sa d&eacute;faite<br /></span>
+<span class="i0">Et je vis peu d'obstacles en ce plaisir &eacute;gal<br /></span>
+<span class="i0">A vaincre un ennemi qui se d&eacute;fendoit mal.<br /></span>
+<span class="i0">Quand son voile en tombant la laissa toute nue,<br /></span>
+<span class="i0">Jamais rien de si beau ne s'offrit &agrave; ma vue.<br /></span>
+<span class="i0">La nature sans art fait honte aux ornemens,<br /></span>
+<span class="i0">Jamais de si beaux bras n'unirent deux amans.<br /></span>
+<span class="i0">Jamais de deux couleurs gorge si bien m&ecirc;l&eacute;e<br /></span>
+<span class="i0">Ne fut par les baisers doucement accabl&eacute;e.<br /></span>
+<span class="i0">Et jamais les voisins de ce qu'on ne dit pas,<br /></span>
+<span class="i0">N'&eacute;tal&egrave;rent aux yeux de si charmans appas.<br /></span>
+<span class="i0">Je regardai longtems, mais en pareil myst&egrave;re,<br /></span>
+<span class="i0">L'on ne peut pas toujours regarder sans rien faire.<br /></span>
+<span class="i0">Je fis donc ce qu'on fait loin des regards f&acirc;cheux,<br /></span>
+<span class="i0">Et lorsque des amants le veulent bien tous deux.<br /></span>
+<span class="i0">Quand j'eus fait mon devoir, en homme de courage,<br /></span>
+<span class="i0">Corine pour dormir me pr&ecirc;ta son visage:<br /></span>
+<span class="i0">Je pris un doux repos sur ce lit de corail,<br /></span>
+<span class="i0">Mais certes le repos ne vaut pas le travail,<br /></span>
+<span class="i0">Grands Dieux! qui me voyez peut-&ecirc;tre avec envie;<br /></span>
+<span class="i0">Laissez-moi me choisir les plaisirs de la vie.<br /></span>
+<span class="i0">Je renonce au sommeil, et le milieu du jour,<br /></span>
+<span class="i0">Comme il est le plus chaud, est plus propre &agrave; l'amour.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>O femmes auxquelles il est si difficile d'&eacute;chapper aux moyens de
+s&eacute;ductions multipli&eacute;es contre vous, je pense que la mode que vous avez
+&eacute;tablie de nous d&eacute;couvrir gratuitement ce que vous avez de plus beau,
+est un excellent moyen de diminuer nos d&eacute;sirs par l'habitude de voir, et
+par la sati&eacute;t&eacute;; mais si, dans le t&ecirc;te-&agrave;-t&ecirc;te, vous voulez conserver
+toute votre raison, et ne point donner de droits sur vous, en faisant un
+ingrat ou un inconstant, n'oubliez pas de d&eacute;fendre les jeux de mains,
+dont les cons&eacute;quences sont funestes &agrave; la vertu; retenez bien le sens de
+ces vers, que vous vous ferez expliquer avant de rien permettre, et vous
+me remercierez:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>Post visum, risus, post risum, venit ad usum:</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Post usum tactus: post tactum, venit ad actum.</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Post actum, fructus: post fructum, poenitet actum.</i><br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Toutes les gradations de l'audace sont expliqu&eacute;es dans le distique
+suivant, et toute la tactique de l'amour y est d&eacute;velopp&eacute;e:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>Visus et alloquium: tactus, post oscula, factum:</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Ni fugias tactus, vix evitabitur actus.</i><br /></span>
+</div></div>
+
+<p>La chair est faible, l'esprit est prompt. La pudeur a contre elle cinq
+ennemis terribles, d&eacute;sign&eacute;s ci-dessus, c'est-&agrave;-dire la vue, l'entretien,
+le toucher, le baiser et le fait. Si vous n'&eacute;vitez pas le toucher, vous
+n'&eacute;viterez pas le fait. Un amant qui a obtenu un baiser, est un sot s'il
+reste en chemin; songez-y.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>Oscula qui sumpsit, si non et coetera sumpsit,</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>H&aelig;c quoque quae data sunt, perdere dignus erit.</i><br /></span>
+</div></div>
+
+<div class="center">
+ <img src="images/086.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="CHAPITRE_V" id="CHAPITRE_V"></a><a href="#table">CHAPITRE V.</a></h2>
+
+<h3>DES LAIDS T&Eacute;TONS.</h3>
+
+
+<p>Il est possible que ce chapitre ne plaise pas &agrave; toutes les femmes; mais
+sera-ce leur faute? sera-ce la n&ocirc;tre? N'y en aura-t-il pas beaucoup qui
+voudront en appeler de notre jugement? Nous touchons la corde sensible,
+et nous sommes de plus en plus effray&eacute;s des pr&eacute;cautions &agrave; prendre pour
+m&eacute;nager l'amour-propre. Comment un sein doit-il &ecirc;tre, pour &ecirc;tre laid?
+Voyons ce qu'en ont dit les diff&eacute;rents auteurs qui ont trait&eacute; cette
+belle mati&egrave;re. C'est &agrave; pr&eacute;sent que je sens tout ce qu'a de p&eacute;nible
+l'emploi d'historiographe des t&eacute;tons; que ne puis-je sauter &agrave;
+pied-joints sur ce maudit chapitre! Pourquoi ne marche-t-on pas toujours
+sur des fleurs dans cette vie? Pourquoi? pourquoi?... Eh, mon Dieu!
+tous ces pourquoi-l&agrave; allongeraient mon chapitre; h&acirc;tons-nous de glisser
+sur les difficult&eacute;s, courons dans une mauvaise route, pour nous reposer
+et nous rafra&icirc;chir, quand nous serons arriv&eacute;s &agrave; son terme.</p>
+
+<p>Je compte d'abord pour laids t&eacute;tons, ceux d'une taille &eacute;norme, par
+exemple, ceux de M<sup>me</sup> de Bouillon, du <i>Roman comique, qui en avait la
+valeur de vingt livres distribu&eacute;es &agrave; poids &eacute;gaux sous chaque aisselle</i>.</p>
+
+<p>Ceux de Paquette, &agrave; qui Le Pays dit: <i>&laquo;Pour votre gorge et vos t&eacute;tons,
+ils ne sont pas blancs; mais, certes, il y a de la chair et si les
+t&eacute;tons s'achetoient &agrave; la livre, vous pourriez vous vanter d'&ecirc;tre plus
+riche que votre ma&icirc;tresse.&raquo;</i></p>
+
+<p>Le <i>Po&euml;te sans fard</i> drape comp&eacute;temment une femme, qui avait des t&eacute;tons
+aussi gros que des pis de vache. Il lui dit:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i2">Philis, tu demandes pourquoi<br /></span>
+<span class="i2">Je ne sens point d'amour pour toi?<br /></span>
+<span class="i2">La raison est, que tes mamelles<br /></span>
+<span class="i2">Te vont jusques sous les aisselles;<br /></span>
+<span class="i2">Que ton nez est des plus punais,<br /></span>
+<span class="i2">Et que ta bouche sent mauvais!<br /></span>
+<span class="i2">Je crois d'ailleurs, &ocirc; vieille vache!<br /></span>
+<span class="i2">Puisqu'enfin tu le veux savoir,<br /></span>
+<span class="i2">Que tout ce que l'habit me cache<br /></span>
+<span class="i0">Est encor plus vilain que ce qu'il laisse voir.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Je mets encore au nombre des t&eacute;tons d&eacute;go&ucirc;tants, ceux qui ressemblent &agrave;
+la suie, comme ceux de Tisiphone: Despr&eacute;aux, dans son <i>Dialogue des
+morts</i>, fait ainsi faire &agrave; Sapho, l'un des personnages du <i>Grand
+Cyrus</i><a name="FNanchor_9_9" id="FNanchor_9_9"></a><a href="#Footnote_9_9" class="fnanchor">[9]</a>, le portrait de cette blonde du royaume de Pluton:</p>
+
+<p>&laquo;Vous croyez que je ne connois pas Tisiphone; c'est une de mes
+meilleures amies. Vous ne serez peut-&ecirc;tre pas f&acirc;ch&eacute; que je vous en fasse
+le portrait. L'illustre fille dont j'ai &agrave; vous parler, a quelque chose
+de <i>si furieusement</i> beau, elle est si terriblement agr&eacute;able, que je
+suis <i>&eacute;pouvantablement</i> emp&ecirc;ch&eacute;e, quand il vous en faut faire la
+description. Elle a les yeux vifs et per&ccedil;ans, petits, bord&eacute;s d'un
+certain incarnat qui en rel&egrave;ve <i>&eacute;trangement</i> l'&eacute;clat. Comme elle est
+naturellement propre, est-elle aussi naturellement n&eacute;glig&eacute;e; et cette
+n&eacute;gligence fait qu'on peut voir souvent sa gorge, qui est toute
+semblable &agrave; celle d'une Amazone, &agrave; la r&eacute;serve que les Amazones n'avaient
+qu'une mamelle br&ucirc;l&eacute;e, et que l'aimable Tisiphone les a toutes deux. Ses
+cheveux sont longs et annelez, et semblent autant de serpenteaux qui se
+jouent autour de sa t&ecirc;te, et qui se viennent jouer sur son visage.&raquo;</p>
+
+<p>De plus, je trouve laids des t&eacute;tons, quoique beaux, quand la personne
+qui en est pourvue est trop coquette, ou plut&ocirc;t impudique. Ce caract&egrave;re
+efface toutes les beaut&eacute;s qu'elle pourrait avoir. Telle &eacute;tait la
+Macette, &agrave; laquelle le satyrique Regnier, plut&ocirc;t par ironie que
+s&eacute;rieusement, donne des &eacute;loges plaisants, quand il lui dit, pour la
+louer, que ses cheveux sont aussi dor&eacute;s qu'une orange, plus fris&eacute;s qu'un
+chardon; que le soleil n'est aupr&egrave;s du brillant de ses yeux, qu'un
+cierge de la Chandeleur, et que sa mine de poup&eacute;e prend les esprits &agrave; la
+pip&eacute;e et les app&eacute;tits &agrave; la glu. Ensuite, lui parlant de ses t&eacute;tons qui
+ne marquent que de la lascivit&eacute;, il s'exprime ainsi:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Les Gr&acirc;ces, d'amour &eacute;chauff&eacute;es,<br /></span>
+<span class="i0">Nud-pieds, sans juppes, d&eacute;coiff&eacute;es,<br /></span>
+<span class="i0">Se tiennent toutes par la main,<br /></span>
+<span class="i0">Et d'une fa&ccedil;on sadinette<br /></span>
+<span class="i0">Se branlant &agrave; l'escarpolette,<br /></span>
+<span class="i0">Sur les ondes de votre sein.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Outre cela, je d&eacute;clare que des t&eacute;tons me paraissent laids, quelque bien
+tourn&eacute;s qu'ils puissent &ecirc;tre, quand le sexe les fait servir de pr&eacute;texte
+pour &ecirc;tre infid&egrave;le. Une Cloris dit &agrave; une Philis, dans Regnier que je
+viens de citer:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">La foi n'est plus aux c&oelig;urs qu'une chim&egrave;re vaine,<br /></span>
+<span class="i0">Tu dois, sans t'arr&ecirc;ter &agrave; la fid&eacute;lit&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Te servir des amans comme des fleurs d'&eacute;t&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Qui ne plaisent aux yeux qu'&eacute;tant toutes nouvelles:<br /></span>
+<span class="i0">Nous avons de nature au sein doubles mamelles,<br /></span>
+<span class="i0">Deux oreilles, deux yeux et divers sentimens,<br /></span>
+<span class="i0">Comment ne pourrions-nous avoir divers amans?<br /></span>
+<span class="i0">Je connois mainte femme &agrave; qui tout est de mise,<br /></span>
+<span class="i0">Qui changent plus souvent d'amant que de chemise.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Pour voir la laideur d'un t&eacute;ton dans toute son &eacute;tendue, on n'a qu'&agrave; lire
+l'&eacute;pigramme que voici, faite par Marot, sur le laid t&eacute;tin:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Tetin qui n'a rien que la peau,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin fine, tetin de drapeau,<br /></span>
+<span class="i0">Grand'tetine, longue tetasse,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin, doy-je dire bezace;<br /></span>
+<span class="i0">Tetin au grand vilain bout noir,<br /></span>
+<span class="i0">Comme celui d'un entonnoir.<br /></span>
+<span class="i0">Tetin qui brimballe &agrave; tous coups<br /></span>
+<span class="i0">Sans estre esbranl&eacute;, ne secous,<br /></span>
+<span class="i0">Bien se peut vanter qui te taste,<br /></span>
+<span class="i0">D'avoir mis la main &agrave; la paste.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Tetin grill&eacute;, tetin pendant,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin flestry, tetin rendant<br /></span>
+<span class="i0">Vilaine bourbe en lieu de laict,<br /></span>
+<span class="i0">Le diable te fit bien si laid.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Tetin pour tripe reput&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin, ce cuide-je, emprunt&eacute;<br /></span>
+<span class="i0">Ou desrobb&eacute; en quelque sorte,<br /></span>
+<span class="i0">De quelque vieille chevre morte,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin propre pour en enfer<br /></span>
+<span class="i0">Nourrir l'enfant de Lucifer.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Tetin boyau long d'une gaule,<br /></span>
+<span class="i0">Tetasse &agrave; jetter sur l'espaule,<br /></span>
+<span class="i0">Pour faire (tout bien compass&eacute;)<br /></span>
+<span class="i0">Un chaperon du temps pass&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Quand on te void, il vient &agrave; maints<br /></span>
+<span class="i0">Une envie dedans les mains,<br /></span>
+<span class="i0">De te prendre avec les gants doubles,<br /></span>
+<span class="i0">Pour en donner cinq ou six couples<br /></span>
+<span class="i0">De souflets sur le nez de celle<br /></span>
+<span class="i0">Qui te cache sous son aisselle.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Va, grand vilain tetin puant,<br /></span>
+<span class="i0">Tu fournirois bien en suant<br /></span>
+<span class="i0">De civettes et de parfums<br /></span>
+<span class="i0">Pour faire cent mille defuncts.<br /></span>
+<span class="i0">Tetin de laideur despiteuse,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin, dont nature est honteuse,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin des vilains le plus brave,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin, dont le bout toujours bave,<br /></span>
+<span class="i0">Tetin fait de poix et de glus:<br /></span>
+<span class="i0">Bran, ma plume, n'en parlez plus,<br /></span>
+<span class="i0">Laissez-le l&agrave;, ventre Saint-George,<br /></span>
+<span class="i0">Vous me feriez rendre ma gorge.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Bon Dieu! le vilain objet!... h&eacute;las! le suivant, peint par Benserade,
+n'est pas plus gracieux; pourquoi des po&euml;tes se plaisent-ils ainsi &agrave;
+tremper leurs plumes dans l'ordure? c'est qu'il faut des ombres aux
+tableaux.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Pendantes et longues mamelles,<br /></span>
+<span class="i0">O&ugrave; les perles et l'oripeau,<br /></span>
+<span class="i0">N'imposent &agrave; pas un chapeau;<br /></span>
+<span class="i0">Molles et tremblantes jumelles.<br /></span>
+<span class="i0">Tetasses de grosses femelles,<br /></span>
+<span class="i0">A couvrir d'un &eacute;pais drapeau,<br /></span>
+<span class="i0">Peau bouffie et rude, moins peau<br /></span>
+<span class="i0">Que cuir &agrave; faire des semelles,<br /></span>
+<span class="i0">De vieille vache aride pis:<br /></span>
+<span class="i0">Que ne puis-je dire encor pis<br /></span>
+<span class="i0">D'un sein qui tombe en pourriture!<br /></span>
+<span class="i0">Sein d'o&ugrave; s'exhale par les airs,<br /></span>
+<span class="i0">Un air qui corrompt la nature;<br /></span>
+<span class="i0">Sein propre &agrave; nourrir des cancers.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Cl&eacute;ment Marot et Benserade ne sont pas les seuls qui se soient occup&eacute;s
+de d&eacute;crire les vilains t&eacute;tons; Rabelais, dans son &eacute;p&icirc;tre &agrave; une vieille,
+Motin, Regnier, Sygognes, Maynard, se sont plu &agrave; nous d&eacute;tailler ces
+horreurs.</p>
+
+<p>Maynard passant en revue tout le corps d'une vieille rid&eacute;e, arriv&eacute; &agrave; ses
+t&eacute;tons, s'&eacute;crie:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Vos tetins, dont la peau craquette<br /></span>
+<span class="i0">Comme laurier qu'au feu l'on jette,<br /></span>
+<span class="i0">A toucher ne sont point plus doux<br /></span>
+<span class="i0">Que le dessus d'un vieux registre,<br /></span>
+<span class="i0">Et comme un bissoc de belistre,<br /></span>
+<span class="i0">Ils vous tombent sur les genoux.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Un peu plus loin, Sygogne, dans sa satyre contre une vieille sorci&egrave;re,
+dit:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Vostre estomach faict en estrille<br /></span>
+<span class="i0">Pourroit encor servir de grille,<br /></span>
+<span class="i0">Vos flancs de herse on de rateau,<br /></span>
+<span class="i0">Et de vos pendantes mamelles<br /></span>
+<span class="i0">Un bissac ou des escarcelles<br /></span>
+<span class="i0">Pour mettre l'argent du bordeau.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>En voil&agrave; assez sur ce sujet peu rago&ucirc;tant; nous renvoyons les lecteurs
+amoureux de ces sortes d'&eacute;crits, au <i>Cabinet satyrique</i>; ils trouveront
+l&agrave;-dedans de quoi se satisfaire.</p>
+
+<p>Les t&eacute;tons sont la derni&egrave;re beaut&eacute; qui vient au sexe, et la premi&egrave;re qui
+est confisqu&eacute;e: il est peu de ces femmes privil&eacute;gi&eacute;es qui les conservent
+comme Ninon et Gabrielle B.... C'est pour cela qu'elles en ont un soin
+tout particulier, et qu'elles confient leurs enfants au sein mercenaire
+des nourrices.</p>
+
+<p>Malgr&eacute; cela, vingt ans de mariage g&acirc;tent les t&eacute;tons les mieux faits. Ils
+ne sont pas non plus &agrave; l'&eacute;preuve de la vieillesse. Comme elle ternit le
+teint le plus vif, qu'elle &eacute;teint les yeux les plus brillants, elle
+amollit les t&eacute;tons les plus rebondis. C'est ce que nous apprennent ces
+stances contre une dame qui avait vieilli &agrave; la cour, et qui se voulait
+marier:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Quoi! vous vous mariez! douce et tendre mignonne,<br /></span>
+<span class="i6">Et ne l'avez encore &eacute;t&eacute;!<br /></span>
+<span class="i0">Je ne vois rien du tout dessus votre personne,<br /></span>
+<span class="i6">Qui ne pr&ecirc;che la chastet&eacute;.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Pour de l'&acirc;ge, on sait bien que vous n'en manquez gu&egrave;re,<br /></span>
+<span class="i6">Votre visage &eacute;tant garant<br /></span>
+<span class="i0">Que ce qu'on fait pour vous, se pouvoit fort bien faire<br /></span>
+<span class="i6">Du r&egrave;gne de Henri-le-Grand.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Vous &eacute;loignant d'ici, les beaut&eacute;s de la reine<br /></span>
+<span class="i6">Ont purg&eacute; ce noble s&eacute;jour:<br /></span>
+<span class="i0">De m&ecirc;me qu'un torrent, votre sortie entra&icirc;ne<br /></span>
+<span class="i6">Toute l'ordure de la Cour.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Celui qui vous &eacute;pouse, en t&eacute;moignant sa flamme,<br /></span>
+<span class="i6">N'&eacute;tablit pas mal son renom:<br /></span>
+<span class="i0">Qui s'est bien pu r&eacute;soudre &agrave; vous prendre pour femme,<br /></span>
+<span class="i6">Ira bien aux coups de canon.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Comme vous n'&ecirc;tes plus qu'une vieille relique.<br /></span>
+<span class="i6">Objet de la compassion.<br /></span>
+<span class="i0">D&egrave;s qu'on dit que sur vous un sacrement s'applique,<br /></span>
+<span class="i6">On pense &agrave; l'Extr&ecirc;me-Onction.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Qui se lie avec vous esp&egrave;re un prompt veuvage,<br /></span>
+<span class="i6">Ou, peut-&ecirc;tre, ce pauvre amant<br /></span>
+<span class="i0">Entend que le contrat de votre mariage<br /></span>
+<span class="i6">Passe pour votre testament.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Vous seriez bien sa m&egrave;re, et la foi conjugale<br /></span>
+<span class="i6">Est mal plac&eacute;e entre vous deux:<br /></span>
+<span class="i0">L'inceste est en effet une chose si sale,<br /></span>
+<span class="i6">Que le portrait en est hideux.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Les plus intemperez de votre bonne gr&acirc;ce,<br /></span>
+<span class="i6">Ne donneroient pas un teston,<br /></span>
+<span class="i0">Et l'on doit s'avouer qu'on est &agrave; la besace,<br /></span>
+<span class="i6">Quand on vous touche le t&eacute;ton.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Souffrez ce petit mot, sans traiter de satire,<br /></span>
+<span class="i6">Un stile si franc et si doux:<br /></span>
+<span class="i0">Vous &ecirc;tes en un point o&ugrave; l'on ne peut m&eacute;dire,<br /></span>
+<span class="i6">Quelque mal qu'on dise de vous.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Urbain Chevreau<a name="FNanchor_10_10" id="FNanchor_10_10"></a><a href="#Footnote_10_10" class="fnanchor">[10]</a>, dans ses stances <i>sur une vieille amoureuse</i>, p.
+150 de ses po&eacute;sies, &eacute;dition de 1656, in-12, d&eacute;crit ainsi sa gorge:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Cependant, vous vous ajustez,<br /></span>
+<span class="i0">Et votre gorge aux libert&eacute;s<br /></span>
+<span class="i0">Semble encor faire des menaces:<br /></span>
+<span class="i0">Mais chaque jour nous regrettons<br /></span>
+<span class="i0">Qu'il n'en reste plus que les traces:<br /></span>
+<span class="i0">Et que vous ayez des besaces<br /></span>
+<span class="i0">O&ugrave; vous avez eu des t&eacute;tons.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Antoine Legrand nous d&eacute;montre le pouvoir des ans d'une mani&egrave;re
+tr&egrave;s-path&eacute;tique:</p>
+
+<p>&laquo;L'arri&egrave;re-saison, dit-il, a ses plaisirs: son utilit&eacute; &eacute;gale bien les
+incommodit&eacute;s qu'elle nous apporte. Elle est l'attente des laboureurs, et
+la r&eacute;compense des vignerons; si elle d&eacute;peuple les campagnes et leurs
+collines, elle remplit leurs caves de vin, leurs greniers de grains et
+leurs granges de moissons. Mais, d&egrave;s qu'une femme approche de la
+vieillesse, que ses cheveux prennent la couleur des cendres, que les
+rides sillonnent son front, que ses yeux commencent &agrave; jetter de la cire,
+que ses joues lui tombent sur le menton et que ces deux montagnes de
+lait deviennent une double besace pleine de sang; elle cesse d'&ecirc;tre le
+souhait des hommes, ses amants en ont horreur: ceux qui la recherchaient
+auparavant la ha&iuml;ssent.&raquo;</p>
+
+<p>Tout le monde conna&icirc;t la r&eacute;ponse ing&eacute;nieuse et maligne de Voltaire &agrave; une
+dame qui pr&eacute;sumait trop de sa gorge. Deguerle, auteur de l'<i>Eloge des
+perruques</i>, l'a mise en vers. La voici:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Dans certain cercle assez galant,<br /></span>
+<span class="i0">Certaine dame fort coquette,<br /></span>
+<span class="i6">Allait chantant<br /></span>
+<span class="i6">Papillonnant<br /></span>
+<span class="i6">En d&eacute;bitant<br /></span>
+<span class="i6">Mainte sornette.<br /></span>
+<span class="i0">L'espi&egrave;gle, comme une autre, avait &eacute;t&eacute; jeunette<br /></span>
+<span class="i6">Un demi-si&egrave;cle auparavant.<br /></span>
+<span class="i6">Vieille, laide et coquette! autant<br /></span>
+<span class="i6">Vaudroit, ma foi, singe en cornette.<br /></span>
+<span class="i6">Un gros chanoine, aux yeux d&eacute;vots,<br /></span>
+<span class="i0">Du v&eacute;n&eacute;rable sein de la V&eacute;nus antique,<br /></span>
+<span class="i0">Lorgnoit en tapinois les vieux d&eacute;bris jumeaux,<br /></span>
+<span class="i0">Qu'agitait avec art maint soupir m&eacute;thodique,<br /></span>
+<span class="i6">Sous la gaze trop v&eacute;ridique.<br /></span>
+<span class="i0">&mdash;Fripon, dit l'&eacute;ternelle, o&ugrave; vont donc vos regards?<br /></span>
+<span class="i0">Ces petits coquins-ci feront damner votre &acirc;me<br /></span>
+<span class="i0">Voltaire l'entendit:&mdash;Petits coquins, madame<br /></span>
+<span class="i6">Dites plut&ocirc;t de grands pendards.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>La voici autrement:</p>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">LA M&Eacute;TAMORPHOSE.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Gertrude &agrave; vingt ans fut jolie:<br /></span>
+<span class="i0">Elle avoit deux petits tettons<br /></span>
+<span class="i0">Qu'Ariste aimoit &agrave; la folie<br /></span>
+<span class="i0">Et nommoit ses petits frippons.<br /></span>
+<span class="i0">Ariste fit un long voyage,<br /></span>
+<span class="i0">Et revint apr&egrave;s vingt-cinq ans.<br /></span>
+<span class="i0">Je laisse &agrave; penser quel ravage<br /></span>
+<span class="i0">Chez Gertrude avoit fait le temps.<br /></span>
+<span class="i0">Sur les frippons, par habitude,<br /></span>
+<span class="i0">Ariste jeta ses regards:<br /></span>
+<span class="i0">&mdash;Ah! mes petits frippons, Gertrude,<br /></span>
+<span class="i0">Sont devenus de grands pendards.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Apr&egrave;s avoir parl&eacute; des femmes qui ont une laide gorge, il est &agrave; propos de
+parler de celles qui n'en ont pas du tout. Un renard pris au pi&egrave;ge, au
+moment o&ugrave; il se propose de croquer une poule, un cr&eacute;ancier qui se repa&icirc;t
+avec volupt&eacute; de l'esp&eacute;rance de faire saisir les meubles d'un malheureux
+d&eacute;biteur et trouve la maison vide, &eacute;prouvent moins d'humeur et de
+surprise qu'un galant qui, apr&egrave;s mille efforts pour d&eacute;couvrir et d&eacute;vorer
+de son &oelig;il furtif une belle gorge, n'en trouve que la place.</p>
+
+<p>Le citoyen Mercier de Compi&egrave;gne, auteur de la traduction du
+<i>Vendangeur</i>, de <i>Rosalie et Gerblois</i>, de <i>G&eacute;rard de Velsen</i>, etc.,
+raconte ainsi dans un volume de ses <i>Soir&eacute;es de l'Automne</i>, la
+vengeance d'un galant, qui avait &eacute;prouv&eacute; un pareil &eacute;chec:</p>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">LE FICHU MENTEUR.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">CONTE.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i2">Pr&egrave;s d'une ci-devant beaut&eacute;,<br /></span>
+<span class="i2">Dorval fatiguant sa visi&egrave;re,<br /></span>
+<span class="i2">Cherchoit si le double h&eacute;misph&egrave;re<br /></span>
+<span class="i0">Apparo&icirc;trait &agrave; son &oelig;il enchant&eacute;.<br /></span>
+<span class="i2">Vains efforts! la recherche avide<br /></span>
+<span class="i2">Que trompe un gros fichu menteur,<br /></span>
+<span class="i2">N'offre &agrave; ses regards que du vide<br /></span>
+<span class="i2">Dont enrage l'observateur.<br /></span>
+<span class="i0">Bref, il n'&eacute;toit rest&eacute; le moindre at&ocirc;me<br /></span>
+<span class="i2">A la dame de ses appas.<br /></span>
+<span class="i2">Pour se venger, que fait notre homme?<br /></span>
+<span class="i2">O&ugrave; fut log&eacute; ce qu'il ne trouve pas,<br /></span>
+<span class="i2">Adroitement une carte est gliss&eacute;e;<br /></span>
+<span class="i0">De l'action la dame embarrass&eacute;e<br /></span>
+<span class="i2">Lui dit: Dorval, que faites vous?...<br /></span>
+<span class="i0">&mdash;Ah! de gr&acirc;ce, point de courroux!<br /></span>
+<span class="i0">Il ne faut pas que ceci vous &eacute;tonne,<br /></span>
+<span class="i2">Je voulois voir un mien ami,<br /></span>
+<span class="i2">Mais, h&eacute;las! n'y trouvant personne,<br /></span>
+<span class="i2">Ainsi que l'usage l'ordonne,<br /></span>
+<span class="i2">Je laisse ma carte chez lui.&raquo;<br /></span>
+</div></div>
+<div class="center">
+ <img src="images/097.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<div class="center">
+ <img src="images/098.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+<h2><a name="CHAPITRE_VI" id="CHAPITRE_VI"></a><a href="#table">CHAPITRE VI.</a></h2>
+
+<h3>DES CONTR&Eacute;ES O&Ugrave; LES FEMMES SONT LE MIEUX PARTAG&Eacute;ES DE T&Eacute;TONS.</h3>
+
+
+<p>C'est ici qu'il nous faudrait les talents de Tavernier, de Paul Lucas,
+de Levaillant, de Christophe Colomb, de Bougainville et de Pallas, il
+faudrait avoir vu tous les pays du monde pour d&eacute;cider quels sont ceux
+pour lesquels les t&eacute;tons viennent le mieux, et je n'ai voyag&eacute; qu'en
+Suisse et en Allemagne. J'ai vu &agrave; Neufchatel et &agrave; Berne les t&eacute;tons les
+plus jolis que l'on puisse voir, tr&egrave;s-bien apprivois&eacute;s, et qui, dans le
+t&ecirc;te-&agrave;-t&ecirc;te, ne se refusaient jamais &agrave; l'hommage que les mains voulaient
+leur rendre.</p>
+
+<p>Le Corr&eacute;ge, l'Albane, le Titien, prirent le type des beaut&eacute;s qu'ils
+peignirent, dans les Italiennes de leur temps. Rome et son territoire
+en offrent encore d'&eacute;clatants exemples; et, &agrave; l'&acirc;ge du retour, les
+Romaines ont de superbes &eacute;paules. Mais c'est en Sicile et en Toscane, &agrave;
+Florence et &agrave; Sienne, m&ecirc;me &agrave; Venise, que naissent les plus s&eacute;duisantes
+beaut&eacute;s de l'Italie; car, dans la Lombardie et le voisinage des Alpes,
+les formes plus volumineuses et plus massives, sont bien moins
+enchanteresses. Les belles Fran&ccedil;aises vivent surtout vers Avignon,
+Marseille, et dans l'ancienne Provence, peupl&eacute;e jadis par une colonie
+grecque de Phoc&eacute;ens. Plus au nord, le sang des Cauchoises, des Picardes
+et des Belges est plus beau, et la peau est d'une blancheur plus
+&eacute;clatante, mais il y a certainement moins de finesse dans les contours
+et de d&eacute;licatesse dans les formes. A Paris, l'on rencontre en g&eacute;n&eacute;ral
+moins de beaut&eacute;s que de gr&acirc;ces dans la d&eacute;marche et toutes les mani&egrave;res.
+Les Marseillaises et la plupart des Languedociennes ont aussi moins de
+gorge que les Normandes, les Belges, les Suissesses. Les plus grandes
+beaut&eacute;s de l'Espagne sont dans l'Andalousie et &agrave; Cadix: on les dit
+tr&egrave;s-exigeantes en plus d'un genre, capricieuses, et pourtant
+tr&egrave;s-constantes dans leur attachement; elles concilient le d&eacute;r&egrave;glement
+des m&oelig;urs avec l'observance la plus scrupuleuse des devoirs religieux.
+La ville de Guimanarez et ses environs sont peupl&eacute;s des plus charmantes
+Portugaises, la plupart courtes et vives, qui pr&eacute;sentent en g&eacute;n&eacute;ral
+beaucoup de gorge, tandis que les Castillanes n'en ont presque pas.
+Toutes ont ces beaux yeux noirs, cette taille svelte et souple, ce teint
+p&acirc;le, cet air s&eacute;rieux, d&eacute;daigneux m&ecirc;me, qui peuvent enflammer les
+grandes passions, et rebuter les hommages frivoles et vulgaires.</p>
+
+<p>On conna&icirc;t le teint &eacute;blouissant, les traits expressifs, la physionomie
+fine et touchante des Anglaises; plusieurs ont la gorge et l'&eacute;l&eacute;gant
+corsage des Normandes; elles sont presque toutes blondes, quelquefois
+m&ecirc;me rousses. En &Eacute;cosse, leur teint devient d'un blanc fade comme aux
+Hollandaises: mais celles-ci montrent souvent de l'embonpoint, beaucoup
+de gorge, une carnation p&acirc;le et molle. De toutes les Allemandes, les
+Saxonnes emportent le prix de la beaut&eacute;; on ne rencontre peut-&ecirc;tre pas
+un laid visage dans le territoire d'Hildesheim; le teint charmant de
+tous les habitants fait dire en proverbe que les femmes y croissent
+comme les fleurs. Quoique les Autrichiennes ne soient pas laides, les
+Hongroises paraissent g&eacute;n&eacute;ralement plus belles; mais, dans toutes les
+nations germaniques, elles p&egrave;chent souvent par un exc&egrave;s d'embonpoint.</p>
+
+<p>A Gratz, en Styrie, une infinit&eacute; de femmes et de demoiselles ont des
+amants et en changent publiquement sans qu'on y trouve &agrave; redire;
+cependant elles sont tr&egrave;s-d&eacute;votes. Les femmes y ont un beau teint blanc,
+de gros t&eacute;tons, mais un peu trop massifs.</p>
+
+<p>Plus au nord, les Polonaises m&eacute;ritent d'&ecirc;tre remarqu&eacute;es. Elles ont la
+blancheur mais aussi, dit-on, la froideur de la neige. Les femmes
+russes sont, au contraire, fort amoureuses, mais l'abus des bains de
+vapeur, ou plut&ocirc;t l'atmosph&egrave;re chaude o&ugrave; elles vivent, rend bient&ocirc;t mous
+et flasques tous leurs appas; sous leurs chaudes pelisses elles couvent
+d'ardentes passions, aussi les accuse-t-on de pr&eacute;f&eacute;rer toujours en amour
+le physique au moral.</p>
+
+<p>Les Albanaises sont plus agr&eacute;ables que les Morlaques; celles-ci portent
+une peau tann&eacute;e, de longues mamelles pendantes, avec un mamelon noir.</p>
+
+<p>On trouve &agrave; Dresde, &agrave; Leipsik, &agrave; Halle, de simples grisettes dont les
+t&eacute;tons blancs, rebondis et bien taill&eacute;s, seraient capables d'orner le
+sein des reines du monde; la Saxe est surtout le climat o&ugrave; ces
+dariolettes sont de la meilleure qualit&eacute;. Il para&icirc;t que le sexe de la
+Souabe est aussi abondamment pourvu de ces attraits, si l'on en doit
+croire l'apologie qu'a faite d'eux certain &eacute;tudiant de l'universit&eacute; de
+Tubingue, et que l'on a trouv&eacute;e &eacute;crite &agrave; la t&ecirc;te de son <i>Corpus juris
+civilis</i>:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>H&aelig;c Tubingiacis dos est perpulchra puellis,</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Ubera magna, pudor tenuis, vulv&aelig;que patentes,</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Res angusta domi, foris ampla, et splendida dixi.</i><br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Si nous en croyons la comtesse d'Aulnoy, les Espagnoles n'ont point de
+gorge et n'en veulent point avoir; voici comme elle en parle: &laquo;C'est une
+beaut&eacute; pour les dames espagnoles de n'avoir point de gorge, et elles
+prennent de bonne heure des pr&eacute;cautions pour l'emp&ecirc;cher de venir.
+Lorsque le sein commence &agrave; para&icirc;tre, elles mettent dessus de petites
+plaques de plomb, et se bandent comme les enfants que l'on emmaillote.
+Il est vrai qu'il s'en faut peu qu'elles n'ayent la gorge aussi unie
+qu'une feuille de papier, &agrave; la r&eacute;serve des trous que la maigreur y
+creuse, et ils sont toujours en grand nombre.&raquo;</p>
+
+<p>Plaignons l'aveuglement de ces Espagnoles qui outragent la nature, en
+refusant des bienfaits dont elle est si avare; plaignons aussi ces
+Fran&ccedil;aises que la manie de rev&ecirc;tir les habits d'homme porte tous les
+jours &agrave; d&eacute;truire ce chef-d'&oelig;uvre si gracieux et si attrayant de leur
+sexe; le d&eacute;lire de cette esp&egrave;ce d'hermaphrodites me fait piti&eacute; et
+m'irrite. Vite, &eacute;loignons cette id&eacute;e affligeante en admirant les beaux
+t&eacute;tons de l'Angleterre. Tous les connaisseurs qui ont voyag&eacute; dans cette
+partie de l'Europe s'accordent &agrave; dire que la Grande-Bretagne est la m&egrave;re
+nourrice des beaux t&eacute;tons. Voil&agrave; ce que Le Pays &eacute;crivait de Londres &agrave; un
+de ses amis:</p>
+
+<p>&laquo;Ce que nous avons vu de plus qu'&agrave; Paris, &ccedil;'a &eacute;t&eacute; un grand nombre de
+fort belles femmes, qui sont toutes copieusement partag&eacute;es de t&eacute;tons.
+Comme c'est une marchandise qui est ici &agrave; grand march&eacute;, et assez
+pr&eacute;cieuse en France, nous avions r&eacute;solu d'en acheter un bon nombre, et
+de vous les envoyer tous dans une barque, attach&eacute;s deux &agrave; deux avec du
+ruban couleur de feu, qui est ici, comme vous savez tr&egrave;s-beau et en
+tr&egrave;s-grande abondance. Nous &eacute;tions persuad&eacute;s que cette marchandise vous
+plairait, et que vous seriez bien aise d'en fournir &agrave; quantit&eacute; de vos
+amies, qui en ont bon besoin, et qui les ach&egrave;teraient volontiers. Mais
+comme les commis des Traites foraines ne laissent rien passer sans le
+visiter, nous avons chang&eacute; de dessein, sachant fort bien que c'est une
+marchandise qui se g&acirc;te, pour peu qu'on la visite, et qu'ainsi elle
+auroit bient&ocirc;t perdu toute sa beaut&eacute; et tout son &eacute;clat quand elle seroit
+entre vos mains.&raquo;</p>
+
+<p>Dans une autre lettre qu'il &eacute;crit de la m&ecirc;me ville &agrave; une dame, il lui
+donne cette commission:</p>
+
+<p>&laquo;Dites &agrave; M<sup>me</sup> de la L. G. que si elle &eacute;toit en Angleterre, elle ne seroit
+pas la reine des t&eacute;tons, comme elle l'est &agrave;..., puisque les dames de ce
+royaume en ont qui ne c&egrave;dent point aux siens. La diff&eacute;rence qu'il y a,
+c'est qu'on patine les t&eacute;tons d'Angleterre d&egrave;s la premi&egrave;re connoissance,
+et sans grande c&eacute;r&eacute;monie; que pour elle, elle ne laisse pas seulement
+voir les siens apr&egrave;s six mois de soins et de services.&raquo;</p>
+
+<p>Pavillon, dans un endroit de sa lettre &agrave; M<sup>me</sup> Pelissari, sur le voyage de
+sa fille en Angleterre, dit:</p>
+
+<p>&laquo;Le d&eacute;funt pays de Cocagne, de tr&egrave;s-heureuse m&eacute;moire, ne valoit gu&egrave;re
+mieux que celui-ci.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Le Prince<a name="FNanchor_11_11" id="FNanchor_11_11"></a><a href="#Footnote_11_11" class="fnanchor">[11]</a> qu'en sa cour peu de monde environne,<br /></span>
+<span class="i2">Peut &ecirc;tre ais&eacute;ment abord&eacute;:<br /></span>
+<span class="i2">Il n'est presque jamais gard&eacute;<br /></span>
+<span class="i0">Que par le seul respect qu'on porte &agrave; sa personne.<br /></span>
+<span class="i0">On le voit aussit&ocirc;t qu'on vous a pr&eacute;sent&eacute;.<br /></span>
+<span class="i2">Malgr&eacute; l'&eacute;clat de la couronne,<br /></span>
+<span class="i2">Celui que sa grandeur &eacute;tonne,<br /></span>
+<span class="i2">Est rassur&eacute; par sa bont&eacute;.<br /></span>
+<span class="i2">Ses sujets sont dans l'opulence.<br /></span>
+<span class="i2">Ses champs produisent &agrave; souhait,<br /></span>
+<span class="i2">Et vous ne sentez sa puissance<br /></span>
+<span class="i2">Que par les biens qu'elle vous fait.<br /></span>
+<span class="i0">La terre sans imp&ocirc;ts et le ciel sans col&egrave;re<br /></span>
+<span class="i0">Nous laissent en repos jouir de notre bien.<br /></span>
+<span class="i2">Le Roi ne l&egrave;ve presque rien,<br /></span>
+<span class="i2">Et Jupiter n'y tonne gu&egrave;re.<br /></span>
+<span class="i2">Tout votre sexe &agrave; cheveux blonds,<br /></span>
+<span class="i2">&Agrave; teint de lys, &agrave; beau corsage,<br /></span>
+<span class="i0">Magnifique en habits, en train, en &eacute;quipage,<br /></span>
+<span class="i2">Fait marcher devant son visage<br /></span>
+<span class="i2">Une infinit&eacute; de t&eacute;tons.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Il dit encore dans un autre endroit de la m&ecirc;me lettre:</p>
+
+<p>&laquo;Nous m&egrave;nerons au premier jour votre fille &agrave; Windsor; c'est un lieu
+charmant o&ugrave; le bon roi Stuart tient maintenant cour pl&eacute;ni&egrave;re. Elle
+pr&eacute;tend lui demander un don, qui est la r&eacute;formation des t&eacute;tons dans
+toute l'&eacute;tendue de son royaume, suivant le mod&egrave;le qu'elle lui en
+pr&eacute;sentera elle-m&ecirc;me. Vous saurez, madame, qu'en tous ces quartiers, la
+plupart des t&eacute;tons, sous pr&eacute;texte qu'ils sont blancs comme neige, n'ont
+point honte d'aller tout nuds dans les rues, et qui plus est, de se
+baiser hardiment &agrave; la vue de tout le monde, sans crainte de Dieu et des
+hommes. Les gens du pays pensent que cette r&eacute;forme sera facile &agrave;
+&eacute;tablir, parce que les t&eacute;tons de ce territoire &eacute;tant de leur nature fort
+dociles, on peut ais&eacute;ment les r&eacute;duire &agrave; en faire tout ce qu'on voudra.&raquo;</p>
+
+<p>Avant de finir, je dois encore dire que j'ai vu dans des couvents toutes
+sortes de beaux t&eacute;tons; il est vrai que ce n'est que la figure et non la
+forme. J'y ai trouv&eacute; des t&eacute;tons naissants et des t&eacute;tons form&eacute;s, o&ugrave; rien
+ne manquait que la permission de les voir &agrave; d&eacute;couvert et de sentir s'ils
+&eacute;taient durs. Peindrai-je ces touffes de lys et de roses mollement
+comprim&eacute;es par la guimpe, ces sph&egrave;res de neige qui croissaient &agrave; l'ombre
+des autels, et qui ne pouvaient &ecirc;tre accessibles qu'aux doigts sacr&eacute;s du
+pater et du directeur, ou d'un jardinier discret et charmant? Comme je
+ne produirais rien de neuf et de piquant dans ces descriptions d'objets
+que j'ai toujours aim&eacute;s, et que j'ai tr&egrave;s-rarement vus, tels que ma
+muse les voudrait peindre, je crois plus sage de renvoyer mon lecteur,
+pour qu'il n'y perde rien, aux friandes peintures qu'en ont faites
+Voltaire, dans sa <i>Pucelle</i>, Piron, Dorat, et autres po&euml;tes &eacute;rotiques
+modernes, et je me borne &agrave; dire: vive un sein de couvent!...</p>
+
+<p>Ceci me remet dans l'esprit un sonnet pour une belle personne, &agrave; qui les
+t&eacute;tons &eacute;taient venus depuis qu'elle &eacute;tait religieuse.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Ci gisent les t&eacute;tons de la jeune Sylvie,<br /></span>
+<span class="i0">Pito&iuml;able passant, admire et plains leur sort.<br /></span>
+<span class="i0">Ils n'avoient pas du ciel encor re&ccedil;u la vie,<br /></span>
+<span class="i0">Qu'on les avoit d&eacute;j&agrave; destinez &agrave; la mort.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">On ne consulta point leur naturelle envie:<br /></span>
+<span class="i0">Leur courroux fait bien voir qu'on leur a fait grand tort,<br /></span>
+<span class="i0">Puisqu'on les voit s'enfler contre la tyrannie<br /></span>
+<span class="i0">Qui les mit au tombeau par un barbare effort.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Mais ce qui te fera plaindre leur aventure,<br /></span>
+<span class="i0">C'est qu'on les tient vivants dans cette s&eacute;pulture,<br /></span>
+<span class="i0">Comme &eacute;tant convaincus d'un horrible forfait.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Tout leur crime pourtant n'est que d'avoir s&ccedil;u plaire;<br /></span>
+<span class="i0">Peur moi, ne voyant pas quel mal ils avoient fait,<br /></span>
+<span class="i0">Je crois qu'on les punit de ceux qu'ils pouvoient faire.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Si des Europ&eacute;ennes nous passons aux femmes de la race, o&ugrave; plut&ocirc;t de
+l'esp&egrave;ce n&egrave;gre, nous leur trouverons g&eacute;n&eacute;ralement une disposition
+extr&ecirc;me &agrave; la lascivet&eacute; et m&ecirc;me une conformation particuli&egrave;re dans les
+organes sexuels. Comme cette esp&egrave;ce d'hommes est moins propre au
+d&eacute;veloppement des facult&eacute;s intellectuelles, elle est aussi plus dispos&eacute;e
+aux fonctions purement animales, et la plupart des n&egrave;gres sont <i>bene
+mutonati</i>. Les n&eacute;gresses paraissent conform&eacute;es dans la m&ecirc;me proportion,
+de sorte que les europ&eacute;ens les trouvent fort larges. Toutes ont, comme
+on sait, une gorge tr&egrave;s-volumineuse, et bient&ocirc;t molle et pendante, m&ecirc;me
+dans les climats o&ugrave; l'on ne peut pas en accuser la chaleur
+atmosph&eacute;rique, comme au nord des &Eacute;tats-Unis; mais ce qui surtout les
+distingue de la race blanche, c'est le prolongement naturel des nymphes,
+et quelquefois du clitoris, bien moins commun chez les femmes blanches
+que chez les n&eacute;gresses.</p>
+
+<p>Les femmes cafres, les mieux constitu&eacute;es de toutes les n&eacute;gresses, et les
+plus fortes, ont un caract&egrave;re plus ardent et plus viril; les n&eacute;gresses
+joloffes et mandingues, sans &ecirc;tre aussi bien form&eacute;es, et avec un sein
+plus tombant, une transpiration d'odeur porrac&eacute;e, paraissent cependant
+encore agr&eacute;ables dans leur premi&egrave;re jeunesse. Leur peau est douce et
+soyeuse comme le satin. Mais elles d&eacute;ploient une lubricit&eacute; et des
+passions inou&iuml;es dans nos climats; elles semblent porter dans leur sein
+enflamm&eacute; tous les feux de l'Afrique. Pour exciter davantage l'ardeur de
+l'homme, les &Eacute;gyptiennes coptes se frottent les parties sexuelles de
+parfums stimulants, comme d'ambre, de civette et de musc. Aussi, un
+proverbe des Turcs dit: Prends une blanche pour les yeux; mais pour le
+plaisir, prends une &Eacute;gyptienne, ou une n&eacute;gresse.</p>
+
+<p>On convient cependant que les n&eacute;gresses sont excellentes m&egrave;res; la
+plupart ont beaucoup de lait; les mamelles des &Eacute;gyptiennes &eacute;taient
+renomm&eacute;es par leur volume extr&ecirc;me d&egrave;s le temps de Juv&eacute;nal:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>In Meroe crasso majorem infante papillam.</i><br /></span>
+</div></div>
+
+<p>A la Nouvelle-Hollande, la parure d'une belle Malaie consiste toute en
+sa peau, &eacute;trangement bariol&eacute;e de piq&ucirc;res de diverses couleurs, et c'est
+ce qu'on appelle <i>tatouage</i>; toutes ont soin d'assouplir leur peau par
+le bain et par l'huile de coco; elles se v&ecirc;tissent de tissus de
+feuillage ou d'&eacute;corces l&eacute;g&egrave;res qui ne d&eacute;robent point la vue de leurs
+charmes secrets. Elles n'ont pas toujours la gorge pendante des
+n&eacute;gresses; elle est m&ecirc;me assez petite dans les premiers temps de la
+pubert&eacute;.</p>
+
+<p>Ne pensons pas que les n&eacute;gresses soient toujours d&eacute;pourvues de beaut&eacute;;
+elles ont aussi leur prix. On en a vu de fort jeunes, ayant un nez droit
+et presque aquilin, et avec une figure qui, si nous en exceptons la
+couleur, n'aurait pas d&eacute;par&eacute; une Europ&eacute;enne: on n'y remarquait point
+cette vilaine moue des &Eacute;thiopiens; l'avancement des joues y &eacute;tait
+presque insensible, et le sein, parfaitement plac&eacute;, n'y &eacute;tait pas
+flasque et pendant, mais d'une agr&eacute;able rotondit&eacute;. Consid&eacute;rons ces
+l&egrave;vres d'un rouge &eacute;clatant de corail sur un fond d'&eacute;b&egrave;ne soyeux, cette
+petite bouche, qui ressemble &agrave; un bouton vermeil et frais de rose, pos&eacute;
+sur du velours noir; contemplons cette double rang&eacute;e de perles
+brillantes, ces grands et beaux yeux pleins de feu; admirons la douce
+am&eacute;nit&eacute; du visage, cette suavit&eacute; des formes, cette voluptueuse
+flexibilit&eacute;, ce balancement, cette souplesse d&eacute;gag&eacute;e de tous les
+mouvements, bien plus sensible dans les n&eacute;gresses que dans les
+Europ&eacute;ennes; et s'il m'&eacute;tait permis de peindre tant d'autres attraits
+qui ne sont ordinairement couverts, dans ces esclaves infortun&eacute;es, que
+du voile de la simple innocence, &agrave; combien de femmes laides, quoique
+blanches, para&icirc;traient-elles pr&eacute;f&eacute;rables pour des yeux non pr&eacute;venus!</p>
+<div class="center">
+ <img src="images/109.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<div class="center">
+ <img src="images/110.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+<h2><a name="CHAPITRE_VII" id="CHAPITRE_VII"></a><a href="#table">CHAPITRE VII.</a></h2>
+
+<h3>DE L'&Eacute;LOQUENCE DES T&Eacute;TONS.</h3>
+
+
+<p>Il y a eu deux Phryn&eacute;, outre celle qui est c&eacute;l&egrave;bre par la statue d'or
+massif qu'elle donna au temple de Jupiter, avec cette inscription: <i>De
+l'intemp&eacute;rance des Grecs</i>; et les murailles de Th&egrave;bes qu'elle avait
+reb&acirc;ties. Il ne faut pas confondre cette illustre courtisane grecque
+avec une autre Phryn&eacute; que l'on avait surnomm&eacute;e ainsi d'un mot grec, qui
+signifie <i>crible</i>, parce qu'elle criblait et ruinait ses amants, sans en
+&ecirc;tre plus riche; comme font presque toutes celles que nous voyons
+aujourd'hui briller sur les mille et un th&eacute;&acirc;tres de notre luxurieuse
+capitale.</p>
+
+<p>Une troisi&egrave;me (celle dont je veux parler), fut accus&eacute;e d'impi&eacute;t&eacute; par les
+Ath&eacute;niens, et traduite devant l'ar&eacute;opage, pour subir la peine capitale
+que m&eacute;ritait ce crime. Les juges, impassibles comme la loi, admiraient
+sans en &ecirc;tre &eacute;mus, les gr&acirc;ces les plus attrayantes, la toilette la plus
+voluptueusement raffin&eacute;e, des yeux qui avaient fait tomber aux pieds de
+la nymphe les personnages les plus distingu&eacute;s, les philosophes, les
+sages et les chefs de la R&eacute;publique. L'auditoire &eacute;tait nombreux. La
+piti&eacute;, le tendre int&eacute;r&ecirc;t se peignait sur tous les visages, et rien ne
+pouvait soustraire la courtisane au supplice; la d&eacute;position des nombreux
+t&eacute;moins ne laissait plus d'espoir, le crime &eacute;tait av&eacute;r&eacute;, les juges
+allaient, en g&eacute;missant tout bas, prononcer la redoutable sentence;
+l'avocat de l'accus&eacute;e avait &eacute;puis&eacute; toutes les ressources de l'art
+oratoire, mais toute son &eacute;loquence &eacute;tait perdue. Tout &agrave; coup une id&eacute;e
+lumineuse et hardie, produite par la tentative la plus d&eacute;sesp&eacute;r&eacute;e,
+exalte sa t&ecirc;te, et lui fournit un moyen de gagner sa cause. Il d&eacute;couvre
+brusquement le sein de sa belle cliente, et ce spectacle inattendu a
+produit dans toute l'assembl&eacute;e une esp&egrave;ce de d&eacute;lire; on croit voir V&eacute;nus
+elle-m&ecirc;me, qui sous les traits d'une mortelle, a quitt&eacute; Chypre et
+Amathonte, pour recueillir l'hommage des Grecs, et demander la gr&acirc;ce de
+l'accus&eacute;e. La gravit&eacute; des juges c&egrave;de au charme vainqueur de
+l'&eacute;tonnement, du plaisir et de l'admiration. La bouche ne trouve pas
+d'expression pour rendre le sentiment, mais le silence et l'avidit&eacute; des
+regards, un cri g&eacute;n&eacute;ral d'int&eacute;r&ecirc;t et de compassion, tout compl&egrave;te le
+triomphe de Phryn&eacute;. Elle &eacute;tait suppliante, &eacute;plor&eacute;e, courb&eacute;e sous le
+poids de l'improbation: un sein para&icirc;t, la chance tourne, elle commande
+en souveraine, elle asservit tout ce qui porte les yeux sur elle: &laquo;Eh
+bien, ajoute le d&eacute;fenseur, profitant du succ&egrave;s de son stratag&egrave;me, si
+elle est coupable, qui de vous, Ath&eacute;niens, osera condamner &agrave; la mort ce
+que la nature a form&eacute; de plus beau? Osez regarder celle dont vous voulez
+verser le sang, et si vous le pouvez, oubliez que vous &ecirc;tes hommes.&raquo; Il
+dit, et l'Ar&eacute;opage, quittant son auguste caract&egrave;re, a repris unanimement
+les sentiments d'humanit&eacute;. Phryn&eacute; est d&eacute;clar&eacute;e innocente, et port&eacute;e chez
+elle en triomphe.</p>
+
+<p>Cette mani&egrave;re de justifier n'est pas encore abolie, dit &agrave; ce sujet le
+galant Saint-Evremont; il y a bien de belles femmes, coupables quand on
+ne les voit pas, qui deviennent innocentes aussit&ocirc;t, quand on les voit.
+Souvent m&ecirc;me, les juges punissent les femmes pour un certain crime
+qu'ils voudraient bien avoir commis avec elles.</p>
+
+<p>Ceux de mes lecteurs qui aiment la po&eacute;sie, liront avec plaisir cette
+m&ecirc;me anecdote, racont&eacute;e avec plus de gr&acirc;ce par le citoyen Deguerle, d&eacute;j&agrave;
+cit&eacute;.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">PHRYN&Eacute; DEVANT L'AR&Eacute;OPAGE.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Phryn&eacute; plaidoit devant l'Ar&eacute;opage;<br /></span>
+<span class="i0">Si l'on en croit plus d'un docte &eacute;crivain<a name="FNanchor_12_12" id="FNanchor_12_12"></a><a href="#Footnote_12_12" class="fnanchor">[12]</a>.<br /></span>
+<span class="i0">Grave parut le cas en arbitrage:<br /></span>
+<span class="i0">Il s'agissait du service divin.<br /></span>
+<span class="i0">&laquo;Quoi! de Vesta (criait un peuple nain)<br /></span>
+<span class="i0">Oser railler l'immortel pucelage!<br /></span>
+<span class="i0">Et des &eacute;poux rire au nez de Vulcain!<br /></span>
+<span class="i0">Au feu, l'impie! au feu! de par Jupin.&raquo;<br /></span>
+<span class="i0">La gent d&eacute;vote au s&eacute;nat faisait rage:<br /></span>
+<span class="i0">La belle Grecque y perdit son latin.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Vous connaissez ces deux formes jumelles<br /></span>
+<span class="i0">Qu'en demi-globe, &agrave; l'ombre de ses ailes,<br /></span>
+<span class="i0">L'Amour assied sur un tr&ocirc;ne pareil:<br /></span>
+<span class="i0">Pommes de neige o&ugrave; couvent &eacute;tincelles:<br /></span>
+<span class="i0">La gaze y voit, loin de l'&oelig;il du soleil,<br /></span>
+<span class="i0">Poindre &agrave; quinze ans la fraise au teint vermeil.<br /></span>
+<span class="i0">Froide raison, &agrave; genoux devant elles!<br /></span>
+<span class="i0">Que de proc&egrave;s, en maint sage conseil,<br /></span>
+<span class="i0">N'ont point gagn&eacute; ces avocats femelles?<br /></span>
+<span class="i0">Si plaideuse onc en connut le talent,<br /></span>
+<span class="i0">C'&eacute;tait la n&ocirc;tre. Or &ccedil;a (dit la rus&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i0">Quand elle vit sa rh&eacute;torique us&eacute;e):<br /></span>
+<span class="i0">&laquo;Mettons en jeu mon dernier argument.&raquo;<br /></span>
+<span class="i0">Et la voil&agrave; qui garde un long silence....<br /></span>
+<span class="i0">Puis on la voit et sourire et rougir;<br /></span>
+<span class="i0">Couleur de rose! &eacute;quivoque nuance!<br /></span>
+<span class="i0">Peins-tu la honte, ou peins-tu le plaisir?<br /></span>
+<span class="i0">Sa main distraite a d&eacute;rang&eacute; la gaze<br /></span>
+<span class="i0">O&ugrave; se cachaient les lys d'un cou charmant.<br /></span>
+<span class="i0">Gr&acirc;ce au hasard d'un second mouvement,<br /></span>
+<span class="i0">L'aiguille d'or a gliss&eacute; de sa base:<br /></span>
+<span class="i0">Adieu le voile au tissu transparent,<br /></span>
+<span class="i0">Fardeau l&eacute;ger dont se charge le vent!<br /></span>
+<span class="i0">Que d'attraits nuds! un feu subit embrase<br /></span>
+<span class="i0">Et spectateurs et s&eacute;nat en extase.<br /></span>
+<span class="i0">Que ne dit pas &agrave; l'&oelig;il qui s'y conna&icirc;t,<br /></span>
+<span class="i0">D'un joli sein le langage muet?<br /></span>
+<span class="i0">Bavards diserts, gens &agrave; brillante emphase,<br /></span>
+<span class="i0">Vous n'avez point le charme de sa phrase!<br /></span>
+<span class="i0">Pour une pomme on vit Pergame en feu;<br /></span>
+<span class="i0">Au Paradis, Eve pour une pomme<br /></span>
+<span class="i0">Sonna l'alarme entre le diable et Dieu.<br /></span>
+<span class="i0">Gr&acirc;ce &agrave; Phryn&eacute;, nos Rhadamante, en somme,<br /></span>
+<span class="i0">Pour une seule en apercevaient deux.<br /></span>
+<span class="i0">Bien qu'on soit juge, on n'en est pas moins homme;<br /></span>
+<span class="i0">Et c'est pour voir, enfin, qu'on a des yeux.<br /></span>
+<span class="i0">Bref: en d&eacute;pit et de Vesta la vierge,<br /></span>
+<span class="i0">Et du bon pr&ecirc;tre, et du pauvre Vulcain,<br /></span>
+<span class="i0">Phryn&eacute; dicta le v&eacute;to du scrutin.<br /></span>
+<span class="i0">Br&ucirc;l&eacute; ne fut, pour cette fois qu'un cierge:<br /></span>
+<span class="i0">Cierge en l'honneur du bienheureux <i>trio</i><br /></span>
+<span class="i0">Mis hors de cour au milieu des <i>bravo</i>.<br /></span>
+<span class="i0">Gens timor&eacute;s diront: &laquo;L'Ar&eacute;opage<br /></span>
+<span class="i0">En ce jour-l&agrave; fit nargue &agrave; l'&eacute;quit&eacute;.&raquo;<br /></span>
+<span class="i0">Mais qui de nous aurait &eacute;t&eacute; plus sage?<br /></span>
+<span class="i0">Il oublia les dieux pour leur image:<br /></span>
+<span class="i0">Est-on de marbre aupr&egrave;s de la beaut&eacute;?<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Or maintenant, gentes Parisiennes,<br /></span>
+<span class="i0">A l'&oelig;il coquet, au teint frais et fleuri:<br /></span>
+<span class="i0">Galant essaim, amour d'une autre Ath&egrave;nes,<br /></span>
+<span class="i0">Mais qui jamais de Vesta n'avez ri:<br /></span>
+<span class="i0">Venez &agrave; moi! venez, vierges pudiques,<br /></span>
+<span class="i0">Douces mamans, et vous femmes uniques,<br /></span>
+<span class="i0">Honneur d'un p&egrave;re, ou tr&eacute;sor d'un mari!<br /></span>
+<span class="i0">Je veux juger vos fredaines honn&ecirc;tes....<br /></span>
+<span class="i0">Quels bras mignons! Quel sein!... Pour m'&eacute;mouvoir,<br /></span>
+<span class="i0">Chastes V&eacute;nus, restez comme vous &ecirc;tes:<br /></span>
+<span class="i0">Pas n'est besoin de jeter le mouchoir.<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>La gorge de Phryn&eacute; a sans donte servi de mod&egrave;le au charmant po&euml;te latin,
+J&eacute;r&ocirc;me Amalth&eacute;e, dans les vers suivants. L'on ne peut rien ajouter &agrave; la
+d&eacute;licatesse de cette petite pi&egrave;ce:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0"><i>Fert nitido duo poma sinu formosa Lycoris</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Illa eadem nitido fert duo fraga sinu.</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>Sunt mamm&aelig; duo poma; duo sunt fraga papill&aelig;:</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Poma nives vincunt, fraga colore rosas.</i><br /></span>
+<span class="i0"><i>H&aelig;c amor exugens: valant, ait, ubera matris!</i><br /></span>
+<span class="i2"><i>Dulcius his manat nectar ab uberibus.</i><br /></span>
+</div></div>
+
+<p>La r&eacute;ponse suivante, remplie d'innocence et de na&iuml;vet&eacute;, prouve que les
+femmes connaissent d&egrave;s leur plus bas &acirc;ge, tout le pouvoir de leurs
+attraits naissants, et que la nature sage et pr&eacute;voyante a mis en elles
+un instinct infaillible pour juger de leurs effets. Or, ces effets n'ont
+lieu que quand leur gorge est &agrave; moiti&eacute; ou tout &agrave; fait d&eacute;couverte: nous
+n'apprendrons jamais aux femmes &agrave; tirer parti de leurs charmes.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Agn&egrave;s, d'un &oelig;il content, voyait d&eacute;j&agrave; paro&icirc;tre<br /></span>
+<span class="i4">Ses jeunes et tendres appas;<br /></span>
+<span class="i4">Quinze printemps l'avaient vu cro&icirc;tre,<br /></span>
+<span class="i0">Et son c&oelig;ur soupirait pour le jeune Lycas.<br /></span>
+<span class="i4">Un jour, &agrave; sa maman aust&egrave;re,<br /></span>
+<span class="i2">Agn&egrave;s parut, le sein &agrave; demi-nu,<br /></span>
+<span class="i4">Pourquoi n'avoir point de fichu?<br /></span>
+<span class="i4">Lui dit-elle d'un ton s&eacute;v&egrave;re.<br /></span>
+<span class="i2">Agn&egrave;s r&eacute;pond, en soupirant tout bas,<br /></span>
+<span class="i0">De beaux habits pour moi, vous &ecirc;tes trop avare,<br /></span>
+<span class="i4">Et si je cache mes appas,<br /></span>
+<span class="i0">Avec quoi voulez-vous, maman, que je me pare?<br /></span>
+</div></div>
+
+<p>Anacr&eacute;on dit que pour &ecirc;tre beau, le sein ne doit pas &ecirc;tre plus gros que
+deux &oelig;ufs de tourterelle; le citoyen Mercier (de Compi&egrave;gne) t. III des
+<i>Soir&eacute;es d'Automne</i>, p. 100, nous donne un tableau gracieux d'une gorge
+de cette esp&egrave;ce, dans le conte suivant, intitule: <i>la Fraise et l'Oeuf</i>:</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i2">De fraises fra&icirc;chement cueillies,<br /></span>
+<span class="i2">H&eacute;l&egrave;ne portait un panier;<br /></span>
+<span class="i2">La ros&eacute;e y faisait briller<br /></span>
+<span class="i2">Mille perles des plus jolies.<br /></span>
+<span class="i2">H&eacute;l&egrave;ne, encore &agrave; ses quinze ans,<br /></span>
+<span class="i2">Autant que ses fruits pouvait plaire<br /></span>
+<span class="i2">Aux connaisseurs les plus friands;<br /></span>
+<span class="i2">Par-ci, par-l&agrave;, notre laiti&egrave;re<br /></span>
+<span class="i2">Avait rang&eacute; de tr&egrave;s-gros &oelig;ufs,<br /></span>
+<span class="i2">Frais pondus, blancs comme batiste,<br /></span>
+<span class="i0">Et dont l'&eacute;clat, sur le fruit am&eacute;tiste,<br /></span>
+<span class="i2">Formait un tout harmonieux.<br /></span>
+<span class="i2">Pour plaire &agrave; l'engageante H&eacute;l&egrave;ne,<br /></span>
+<span class="i0">Qui les offrait d'un air si gracieux,<br /></span>
+<span class="i0">En la lorgnant, de sa corbeille pleine,<br /></span>
+<span class="i2">Au hasard je tire un d'entre eux<br /></span>
+<span class="i2">Que cinq doigts entouraient &agrave; peine,<br /></span>
+<span class="i2">Que vois-je! Effet d&eacute;licieux!<br /></span>
+<span class="i0">Sur le gros bout une fraise &eacute;cras&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i2">Et l&agrave;, par le hasard plac&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i2">Sur l'ar&eacute;ole carmin&eacute;e<br /></span>
+<span class="i2">Forma ce bouton radieux<br /></span>
+<span class="i2">D'o&ugrave; distille l'humeur lact&eacute;e,<br /></span>
+<span class="i2">Impr&eacute;gn&eacute; de l'onde sucr&eacute;e.<br /></span>
+<span class="i2">L'ensemble enfin rendait au mieux<br /></span>
+<span class="i2">Un sein naissant, digne des dieux.<br /></span>
+<span class="i2">Je contemplais, avec avidit&eacute;,<br /></span>
+<span class="i2">Cette image simple et fid&egrave;le<br /></span>
+<span class="i2">Des sources de la volupt&eacute;;<br /></span>
+<span class="i2">Et voulant mettre en parall&egrave;le<br /></span>
+<span class="i2">L'image et la r&eacute;alit&eacute;,<br /></span>
+<span class="i0">Pr&egrave;s des t&eacute;tons d&eacute;voil&eacute;s de la belle,<br /></span>
+<span class="i0">Qui se pr&ecirc;tait, en riant, &agrave; ce jeu,<br /></span>
+<span class="i0">L'&oelig;uf fut plac&eacute;; mais si la pastourelle<br /></span>
+<span class="i2">Y gagna, ce fut de bien peu.<br /></span>
+</div></div>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">L'ORIGINE DU PETIT BOUT DES T&Eacute;TONS.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Au temps pass&eacute; n'avoit, &agrave; ce qu'on dit,<br /></span>
+<span class="i0">Femme au tetin ce rouge boutonnet,<br /></span>
+<span class="i0">Et Priapus qui &eacute;toit en cr&eacute;dit,<br /></span>
+<span class="i0">Oreilles eut sous son petit bonnet;<br /></span>
+<span class="i0">Mais quelque dieu les lui coupa tout net,<br /></span>
+<span class="i0">Puis en forma la retonne gentille<br /></span>
+<span class="i0">Que fait aller mainte superbe fille,<br /></span>
+<span class="i0">Sentant qu'elle a du m&acirc;le la d&eacute;pouille.<br /></span>
+<span class="i0">Et de l&agrave; vient que tous les coups que fouille<br /></span>
+<span class="i0">Au sein de son amie un amoureux ardent,<br /></span>
+<span class="i0">Ce bon galant fr&eacute;mit incontinent<br /></span>
+<span class="i0">De grands plaisirs, et s'&eacute;tend &agrave; merveilles,<br /></span>
+<span class="i0">Comme disant: je prendrai mes oreilles.<br /></span>
+</div></div>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i15">Gr&eacute;court.</span></div></div>
+
+<p>Voltaire, dans <i>Zadig</i>, nous donne un exemple charmant de l'&eacute;loquence
+des t&eacute;tons.</p>
+
+<p>La jeune veuve Almona, sauv&eacute;e du b&ucirc;cher par Zadig, lui en avait vou&eacute;
+beaucoup de reconnaissance. Zadig, accus&eacute; de crimes imaginaires par des
+ministres jaloux de son influence, fut jug&eacute; et condamn&eacute; &agrave; son tour &agrave;
+&ecirc;tre br&ucirc;l&eacute; &agrave; petit feu. Almona r&eacute;solut de le tirer de l&agrave;. Elle roula son
+dessein dans sa t&ecirc;te, sans en parler &agrave; personne. Zadig devait &ecirc;tre
+ex&eacute;cut&eacute; le lendemain; elle n'avait que la nuit pour le sauver: voici
+comme elle s'y pris, en femme charitable et prudente.</p>
+
+<p>Elle se parfuma; elle releva sa beaut&eacute; par l'ajustement le plus riche et
+le plus galant, et alla demander une audience secr&egrave;te au chef des
+pr&ecirc;tres des &eacute;toiles. Quand elle fut devant ce vieillard v&eacute;n&eacute;rable, elle
+lui parla en ces termes: &laquo;Fils a&icirc;n&eacute; de la Grande-Ourse, fr&egrave;re du
+Taureau, cousin du Grand-Chien (c'&eacute;taient les titres de ce pontife), je
+viens vous confier mes scrupules. J'ai bien peur d'avoir commis un p&eacute;ch&eacute;
+&eacute;norme, en ne me br&ucirc;lant pas dans le b&ucirc;cher de mon cher mari. En effet,
+qu'avais-je &agrave; conserver, une chair p&eacute;rissable, et qui est d&eacute;j&agrave; toute
+fl&eacute;trie.&raquo; En disant ces paroles, elle tira de ses longues manches de
+soie, ses bras nus d'une forme admirable et d'une blancheur
+&eacute;blouissante. &laquo;Vous voyez, dit-elle, le peu que cela vaut.&raquo; Le pontife
+trouva dans son c&oelig;ur que cela valait beaucoup. Ses yeux le dirent, et
+sa bouche le confirma; il jura qu'il n'avait vu de sa vie de si beaux
+bras. &laquo;H&eacute;las! lui dit la veuve, les bras peuvent &ecirc;tre un peu moins mal
+que le reste; mais vous m'avouerez que la gorge n'&eacute;tait pas digne de mes
+attentions.&raquo; Alors elle laissa voir le sein le plus charmant que la
+nature e&ucirc;t jamais form&eacute;. Un bouton de rose sur une pomme d'ivoire n'e&ucirc;t
+paru aupr&egrave;s que de la garance sur du buis, et les agneaux sortant du
+lavoir auraient sembl&eacute; d'un jaune brun. Cette gorge, ces grands yeux
+noirs qui languissaient en brillant doucement d'un feu tendre, ces joues
+anim&eacute;es de la plus belle pourpre, m&ecirc;l&eacute;e au blanc de lait le plus pur, ce
+nez, qui n'&eacute;tait pas comme la tour du mont Liban, ces l&egrave;vres, qui
+&eacute;taient comme deux bordures de corail renfermant les plus belles perles
+de la mer d'Arabie, tout cela ensemble fit croire au vieillard qu'il
+avait vingt ans. Il fit, en b&eacute;gayant, une d&eacute;claration tendre. Almona, le
+voyant enflamm&eacute;, lui demanda la gr&acirc;ce de Zadig.</p>
+
+<p>&laquo;H&eacute;las! dit-il, ma belle dame, quand je vous accorderais sa gr&acirc;ce, mon
+indulgence ne servirait de rien, il faut qu'elle soit sign&eacute;e de trois
+autres de mes confr&egrave;res.&mdash;Signez toujours, dit Almona.&mdash;Volontiers, dit
+le pr&ecirc;tre, &agrave; condition que vos faveurs seront le prix de ma
+facilit&eacute;.&mdash;Vous me faites trop d'honneur, dit Almona, ayez seulement
+pour agr&eacute;able de venir dans ma chambre apr&egrave;s que le soleil sera couch&eacute;,
+et d&egrave;s que la brillante &eacute;toile <i>Sheat</i> sera sur l'horizon; vous me
+trouverez sur un sofa couleur de rose, et vous en userez comme vous
+pourrez avec votre servante.&raquo;</p>
+
+<p>Elle sortit alors, emportant avec elle la signature, et laissa le
+vieillard plein d'amour et de d&eacute;fiance de ses forces. Il employa le
+reste du jour &agrave; se baigner; il but une liqueur compos&eacute;e, de la cannelle
+de Ceylan, et des pr&eacute;cieuses &eacute;pices de Tidor et de Ternate, et attendit
+avec impatience que l'&eacute;toile <i>Sheat</i> vint &agrave; para&icirc;tre.</p>
+
+<p>Cependant, la belle Almona alla trouver le second pontife. Celui-ci
+l'assura que le soleil, la lune et tous les feux du firmament n'&eacute;taient
+que des feux follets, en comparaison de ses charmes. Elle lui demanda la
+m&ecirc;me gr&acirc;ce, et on lui proposa d'en donner le prix. Elle se laissa
+vaincre, et donna rendez-vous au second pontife au lever de l'&eacute;toile
+<i>Algenib</i>. De l&agrave;, elle passa chez le troisi&egrave;me et chez le quatri&egrave;me
+pr&ecirc;tre, prenant toujours une signature, et donnant un rendez-vous
+d'&eacute;toile en &eacute;toile. Alors elle fit avertir les juges de venir chez elle
+pour une affaire importante. Ils s'y rendirent: elle leur montra les
+quatre noms, et leur dit &agrave; quel prix les pr&ecirc;tres avaient vendu la gr&acirc;ce
+de Zadig. Chacun d'eux arriva &agrave; l'heure prescrite; chacun fut bien
+&eacute;tonn&eacute; d'y trouver ses confr&egrave;res, et plus encore d'y trouver les juges
+devant qui leur honte fut manifest&eacute;e. Zadig fut sauv&eacute;.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i15">Voltaire, <i>Zadig</i>.</span></div></div>
+<div class="center">
+ <img src="images/120.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+<hr style="width: 65%;" />
+<div class="center">
+ <img src="images/122.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+<h2><a name="CHAPITRE_VIII" id="CHAPITRE_VIII"></a><a href="#table">CHAPITRE VIII.</a></h2>
+
+<h3>MOYEN DE CONSERVER LA GORGE.</h3>
+
+
+<p>Voici, sexe charmant, le chapitre qui doit faire aupr&egrave;s de toi la
+fortune de cet &eacute;loge. Que nous servirait, mesdames, d'avoir chant&eacute; la
+plus belle partie de vous-m&ecirc;me, si notre art ne vous instruisait encore
+&agrave; la conserver dans toute sa fra&icirc;cheur.</p>
+
+<p>Plume aimable et facile du chantre badin des <i>Perruques</i><a name="FNanchor_13_13" id="FNanchor_13_13"></a><a href="#Footnote_13_13" class="fnanchor">[13]</a>, viens pour
+un moment sous mes doigts; et que les gr&acirc;ces, en nous lisant, croyent
+encore lire quelques pages du docteur Akerlio.</p>
+
+<p>Mais d&eacute;j&agrave; mon sujet m'inspire! Or, &eacute;coutez, mesdames; j'ai touss&eacute;, je
+commence.</p>
+
+<p>La parure est &agrave; la beaut&eacute; ce que l'esprit est au savoir. On ne se pla&icirc;t
+gu&egrave;re sans un peu de coquetterie; pour retenir dans ses bras son c&eacute;leste
+&eacute;poux, Junon m&ecirc;me eut besoin un jour de la ceinture de V&eacute;nus. Que l'art
+de la toilette soit donc votre premi&egrave;re &eacute;tude; mais anath&egrave;me &eacute;ternel &agrave;
+ces corps meurtriers, o&ugrave; la taille la plus svelte perd dans sa prison de
+baleine son &eacute;l&eacute;gance naturelle! Un simple corset suffit &agrave; la
+conservation des formes. Qu'une bande l&eacute;g&egrave;re, fix&eacute;e vers la partie
+moyenne de la poitrine, embrasse mollement la r&eacute;gion inf&eacute;rieure de
+chaque h&eacute;misph&egrave;re, en soutienne adroitement le poids sur un support
+invisible, et laisse entrevoir &agrave; l'&oelig;il &eacute;veill&eacute; du d&eacute;sir, cette
+mappemonde mobile, sur laquelle l'imagination la plus froide aime &agrave;
+voyager quelquefois<a name="FNanchor_14_14" id="FNanchor_14_14"></a><a href="#Footnote_14_14" class="fnanchor">[14]</a>. Gloire &agrave; toi, docte et galant Alphonse<a name="FNanchor_15_15" id="FNanchor_15_15"></a><a href="#Footnote_15_15" class="fnanchor">[15]</a>! Le
+premier, tu proclamas courageusement la libert&eacute; des gorges, leurs
+amants te doivent une statue; et j'ai plac&eacute; la tienne dans mon boudoir.</p>
+
+<p>Une <i>douce chaleur</i>, en dilatant les solides, peut aider au
+d&eacute;veloppement d'un sein virginal. Une belle gorge aime &agrave; braver demi-nue
+l'action d'une temp&eacute;rature mod&eacute;r&eacute;e. Mais le froid est son ennemi mortel.
+Qu'elle en &eacute;vite soigneusement les rigoureuses atteintes; ou bient&ocirc;t, au
+lieu de cette &eacute;lastique fermet&eacute; qui fait le premier charme d'un sein de
+lys, elle n'offrira plus au doigt d&eacute;licat de l'amour, qu'une solidit&eacute;
+squirreuse, &eacute;ternel &eacute;cueil des d&eacute;sirs.</p>
+
+<p>Ce sein trop humble n'ose, dites-vous, se montrer au jour. Eh bien!
+connaissez donc les secrets du g&eacute;nie. Le <i>fluide &eacute;lectrique</i> commande &agrave;
+la foudre m&ecirc;me; il peut, &agrave; la voix d'un praticien habile, imprimer aux
+vaisseaux sanguins, une turgescence favorable. Souffrez, mesdames, qu'on
+vous <i>magn&eacute;tise</i>: le docteur Mesmer n'a point d'&eacute;gal dans l'art de
+donner &agrave; certains charmes une expansion d&eacute;licieuse.</p>
+
+<p>Le malade r&eacute;siste-t-il &agrave; la <i>verge</i> &eacute;lectrique, &agrave; la magie du <i>baquet</i>;
+la m&eacute;canique vient pour vous au secours de la physique. Que dans sa
+double cavit&eacute;, une officieuse <i>ventouse</i> embrasse, sans les blesser, vos
+deux globes d'alb&acirc;tre. L'air ainsi rar&eacute;fi&eacute;, h&acirc;tera sans douleur le
+d&eacute;veloppement de la gorge rebelle.... C'est peu: un contact indiscret
+vient-il &agrave; d&eacute;former par accident le bouton de vos roses jumelles?
+retournez, mesdames, &agrave; l'heureuse <i>ventouse</i>: le bouton ranim&eacute; reprendra
+bient&ocirc;t sa forme et sa fra&icirc;cheur.</p>
+
+<p>Belles sans exp&eacute;rience, vous qui pleurez ing&eacute;nuement &agrave; votre quinzi&egrave;me
+ann&eacute;e, l'absence du plus doux attrait dont se pare un buste f&eacute;minin,
+consolez-vous! il n'est point de mal sans rem&egrave;de. Plus d'une pr&ecirc;tresse
+de V&eacute;nus tient magasin de <i>seins postiches</i>. Vous pouvez avoir &agrave; vil
+prix la plus belle gorge du monde, dans une paire de <i>cartons bomb&eacute;s</i>.</p>
+
+<p>Et vous, honneur de votre sexe, femmes int&eacute;ressantes qui voulez unir en
+m&ecirc;me temps le plaisir d'&ecirc;tre &eacute;pouses et l'orgueil d'&ecirc;tre m&egrave;res, ne
+craignez rien: &agrave; l'aide d'une petite ruse, on est maintenant &agrave; la fois
+et <i>nourrice</i> et <i>jolie</i>. D&eacute;j&agrave; l'&oelig;il marital commence-t-il &agrave; lire avec
+peine les ravages de l'allaitement sur un mamelon d&eacute;prim&eacute;? voyez la
+<i>gomme &eacute;lastique</i> se fa&ccedil;onner pour vous en chapeau complaisant<a name="FNanchor_16_16" id="FNanchor_16_16"></a><a href="#Footnote_16_16" class="fnanchor">[16]</a>.
+L'aiguille l'a cribl&eacute; tout expr&egrave;s de l&eacute;gers tuyaux capillaires, pour
+fournir un libre passage au lait nourricier. Sous la <i>forme</i> couleur de
+rose dont il est herm&eacute;tiquement couvert, le sein maternel cache ainsi
+sans p&eacute;ril sa passag&egrave;re laideur; et, par cette innocente imposture, il
+satisfait &agrave; la fois la nature et l'amour.</p>
+
+<p>De graves professeurs d'<i>hygi&egrave;ne</i> ne voient de salut pour les belles
+gorges, que dans un r&eacute;gime d'anachor&egrave;te. A les entendre, il n'est pour
+nos V&eacute;nus qu'un moyen s&ucirc;r de conserver leurs charmes: c'est de n'en
+faire aucun usage<a name="FNanchor_17_17" id="FNanchor_17_17"></a><a href="#Footnote_17_17" class="fnanchor">[17]</a>. Le je&ucirc;ne, selon eux, est encore une recette
+unique: pour &eacute;terniser la beaut&eacute;, vive (disent-ils) l'art de mourir de
+faim.</p>
+
+<p>Quant &agrave; nous, indulgents casuistes, nous sentons combien la chair est
+fragile. Cette <i>abstinence</i> surnaturelle n'appartient qu'aux purs
+esprits; <i>de tout un peu</i>, c'est la devise des corps. Le plus grand des
+philosophes, &Eacute;picure, fut par excellence l'ap&ocirc;tre de la volupt&eacute;, et
+notre rigorisme, mesdames, ne vous d&eacute;fend que l'exc&egrave;s.</p>
+
+<p>Ainsi, bien que l'eau soit, d'apr&egrave;s Hippocrate, la boisson conservatrice
+des belles formes, nos ordonnances moins rigides vous permettent l'usage
+mod&eacute;r&eacute; des liqueurs<a name="FNanchor_18_18" id="FNanchor_18_18"></a><a href="#Footnote_18_18" class="fnanchor">[18]</a>. Nous n'aurons pas la cruaut&eacute; d'interdire aux
+dames le caf&eacute; du matin<a name="FNanchor_19_19" id="FNanchor_19_19"></a><a href="#Footnote_19_19" class="fnanchor">[19]</a>; mais que le sucre et le lait adroitement
+m&eacute;lang&eacute;s, lui servent toujours de correctif. Funeste au syst&egrave;me nerveux,
+l'abus du <i>caf&eacute; &agrave; l'eau</i> a dess&eacute;ch&eacute; plus d'un joli sein<a name="FNanchor_20_20" id="FNanchor_20_20"></a><a href="#Footnote_20_20" class="fnanchor">[20]</a>.</p>
+
+<p>Pourquoi faut-il que le plaisir ait aussi ses regrets? Sexe enchanteur!
+quel feu n'allume pas dans nos sens le seul aspect de tes pommes de
+neige. Il nous faudrait mourir, si les flammes dont tu nous consumes ne
+te br&ucirc;laient toi-m&ecirc;me! Ah! pour le bonheur de l'homme, succombe
+quelquefois aux douces tentations que tu fais na&icirc;tre! mais, pour
+l'honneur de tes charmes, r&eacute;siste plus souvent encore &agrave; l'attrait du
+d&eacute;sir! La fleur des champs que le papillon se pla&icirc;t &agrave; baiser,
+s'effeuille enfin sous l'aile de l'insecte brillant: ainsi la fleur d'un
+beau sein finit par se faner sous les caresses d'un indiscret amour. La
+rose de la volupt&eacute; ressemble &agrave; Titon dans les bras de l'Aurore: chaque
+baiser la vieillit d'un lustre<a name="FNanchor_21_21" id="FNanchor_21_21"></a><a href="#Footnote_21_21" class="fnanchor">[21]</a>, et le bouton du matin, le soir
+n'est plus qu'une &eacute;pine<a name="FNanchor_22_22" id="FNanchor_22_22"></a><a href="#Footnote_22_22" class="fnanchor">[22]</a>.</p>
+
+<p>Vous, dont la fougue &eacute;gar&eacute;e poursuit la jouissance au p&eacute;ril de vos
+charmes! ah! du moins, quand vos sens sont calm&eacute;s, h&acirc;tez-vous de r&eacute;parer
+en secret les outrages du plaisir. Autrefois tributaires du g&eacute;nie
+monacal, la botanique et la chimie opposaient au d&eacute;veloppement des
+gorges nonnettes le froid <i>n&eacute;nuphar</i> et le mystique <i>agnus castus</i>.
+Libres aujourd'hui, ces deux sciences aiment &agrave; pr&eacute;parer de concert
+d'utiles restaurants aux seins d&eacute;bilit&eacute;s. Connaissez l'art des
+<i>frictions</i> r&eacute;paratrices. Elles entretiennent dans sa fra&icirc;cheur le satin
+de la peau; elles rendent aux formes affaiss&eacute;es leur souplesse et leur
+ressort; par elles, les lys disparus sous le feu du baiser, ont retrouv&eacute;
+bient&ocirc;t leur premi&egrave;re blancheur. Salut, savante Tolleret<a name="FNanchor_23_23" id="FNanchor_23_23"></a><a href="#Footnote_23_23" class="fnanchor">[23]</a>! La
+renomm&eacute;e de tes <i>pommades</i> a vol&eacute; des bords de la Seine aux rives du
+Mississipi. Le sein de la belle Popp&eacute;e<a name="FNanchor_24_24" id="FNanchor_24_24"></a><a href="#Footnote_24_24" class="fnanchor">[24]</a> n'eut jadis pour ressource
+que le <i>bain de lait d'&acirc;nesse</i>; les gorges &eacute;gyptiennes ne connaissent
+que <i>l'hermodacte</i><a name="FNanchor_25_25" id="FNanchor_25_25"></a><a href="#Footnote_25_25" class="fnanchor">[25]</a>. Mais ces recettes merveilleuses, les tiennes les
+ont &eacute;clips&eacute;es. C'est &agrave; ta voix que, pour la s&eacute;curit&eacute; d'un sein galant,
+l'olive et l'amande offrent &agrave; la fois leur huile adoucissante; que la
+pimprenelle et la rose prodiguent leur essence aromatique; que la
+cannelle et la fleur d'orange s'unissent &agrave; la cr&ecirc;me en p&acirc;tes odorantes,
+et s'&eacute;tendent en <i>masque</i> officieux<a name="FNanchor_26_26" id="FNanchor_26_26"></a><a href="#Footnote_26_26" class="fnanchor">[26]</a> sur plus d'un sein d&eacute;cr&eacute;pit.</p>
+
+<p>Non, tu n'auras point fait d'ingrates, &ocirc; toi, dont le g&eacute;nie tut&eacute;laire a
+bien m&eacute;rit&eacute; des gorges! Permets que leur chantre, en terminant leur
+&eacute;loge, te proclame leur bienfaitrice. Un grain de leur encens t'est d&ucirc;.
+Puisse ton nom briller d&eacute;sormais en lettres d'or dans les fastes de la
+beaut&eacute;! Puisse, &eacute;ternis&eacute;e par la reconnaissance f&eacute;minine, ta m&eacute;moire ne
+p&eacute;rir qu'avec le dernier t&eacute;ton!</p>
+
+<div class="center">
+ <img src="images/130.png"
+ alt="image" title="image" />
+</div>
+
+<hr style="width: 65%;" />
+<h2><a name="CHAPITRE_IX" id="CHAPITRE_IX"></a><a href="#table">CHAPITRE IX.</a></h2>
+
+<h3>RECETTES VIRGINALES.&mdash;MOYENS A EMPLOYER POUR EFFACER LES RIDES ET
+DIMINUER L'AMPLEUR DU VENTRE ET DE LA GORGE ET DE LA FAIRE CRO&Icirc;TRE A
+CELLES QUI SONT PRIV&Eacute;ES DE CE BEL ORNEMENT.</h3>
+
+
+<p>Quelquefois, apr&egrave;s la grossesse, la gorge et le ventre restent fl&eacute;tris
+et plus volumineux. L'art offre ici plusieurs moyens: ils sont ou
+m&eacute;caniques, ou th&eacute;rapeutiques; les premiers consistent dans
+l'application de bandelettes pour le sein, et de larges bandes sur le
+ventre, aussit&ocirc;t apr&egrave;s les couches, avec la pr&eacute;caution de les resserrer
+graduellement, pour laisser &agrave; l'organe de la g&eacute;n&eacute;ration les moyens de
+contraction qui lui sont alors n&eacute;cessaires. L'habit europ&eacute;en est, &agrave; cet
+effet, plus favorable aux femmes que la veste asiatique qui, ne
+contenant point les intestins, permet &agrave; la texture molle de leurs
+enveloppes, d'acqu&eacute;rir des dimensions &eacute;normes. Plus soigneuses de leur
+gorge et de leurs pieds, les G&eacute;orgiennes, les Ota&iuml;tiennes, les
+Chinoises, les Bayad&egrave;res captivent leur gorge enfantine dans un &eacute;tui,
+qu'elle ne peut d&eacute;passer<a name="FNanchor_27_27" id="FNanchor_27_27"></a><a href="#Footnote_27_27" class="fnanchor">[27]</a>, et emprisonnent, d&egrave;s le berceau, dans une
+<i>babouche</i> &eacute;troite, leur pied qui ne s'accro&icirc;t que tr&egrave;s-peu. On a
+ridiculis&eacute; ce go&ucirc;t fond&eacute; cependant sur quelque raison. En effet, une
+main calleuse, un pied plat et long annoncent une basse extraction, une
+vie exerc&eacute;e aux travaux les plus rudes, tandis qu'un pied mignon,
+pr&eacute;sage flatteur d'attraits plus cach&eacute;s, semble &ecirc;tre le r&eacute;sultat d'une
+&eacute;ducation soign&eacute;e: et ne f&icirc;t-on que retracer cette fameuse Rhodope, d&eacute;j&agrave;
+cit&eacute;e par nous, dont le joli soulier, emport&eacute; par un aigle et tomb&eacute; &agrave;
+Memphis, dans le bain du roi <i>Psamm&eacute;tique</i>, fit marcher son petit pied &agrave;
+si grands pas vers la fortune, et valut &agrave; Rhodope les honneurs du tr&ocirc;ne;
+on avouera qu'on a quelque droit &agrave; placer ce genre d'attrait parmi ceux
+qui exercent sur l'homme un grand empire.</p>
+
+<p>On a vant&eacute; la m&eacute;lisse pil&eacute;e et appliqu&eacute;e sur la gorge, et l'arbrisseau
+de V&eacute;nus, le myrte, s'honore d'offrir aussi un moyen de faire
+dispara&icirc;tre les traces du culte qu'on rendit &agrave; la divinit&eacute; auquel il est
+consacr&eacute;. En g&eacute;n&eacute;ral, les sumacs (<i>rhus coriaria</i>), les ch&ecirc;nes (<i>quercus
+ilex</i>), les &eacute;pines, les arbousiers et tous les v&eacute;g&eacute;taux styptiques
+contiennent un <i>tannin</i> tr&egrave;s-propre &agrave; cet usage.</p>
+
+<p>Enfin, le m&eacute;decin des dames<a name="FNanchor_28_28" id="FNanchor_28_28"></a><a href="#Footnote_28_28" class="fnanchor">[28]</a> dit:</p>
+
+<p><i>Si mulierum sinus pudoris sit nimium dilatatus, quod accidit t&ugrave;m
+propter partus, t&ugrave;m propter frequentes co&iuml;tus, debent mulieres tunc uti
+sequentibus remediis</i><a name="FNanchor_29_29" id="FNanchor_29_29"></a><a href="#Footnote_29_29" class="fnanchor">[29]</a>:</p>
+
+<p>Prenez, dit-il, noix de galle encore vertes, faites-les bouillir dans du
+vin avec quelques clous de girofle, trempez-y un linge et appliquez.</p>
+
+<p>Ou bien: alun, sang-dragon, gomme arabique, suc d'acacia, feuilles de
+plantain, de renou&eacute;e, de tormentille, fleurs et fruits de grenadier,
+capsules de glands, sorbes non m&ucirc;res, roses de Provins, faites bouillir
+dans du vinaigre, et appliquez au moyen de compresses.</p>
+
+<p>Ou: quatre onces d'huile d'amandes am&egrave;res, une once de cire blanche;
+faites fondre au bain-marie; ajoutez deux gros d'alun, une once de suie
+et un gros d'orcanette, vous avez une pommade styptique<a name="FNanchor_30_30" id="FNanchor_30_30"></a><a href="#Footnote_30_30" class="fnanchor">[30]</a>; ou, enfin:
+alun, une once, acide vitriolique, demi-gros; faites fondre dans quatre
+onces de vinaigre et quatre onces d'eau de plantain ferr&eacute;e; ajoutez deux
+onces d'esprit de vin et servez-vous-en, mais avec discr&eacute;tion, pour
+imbiber, avec une &eacute;ponge, certaines parties qui laisseraient des preuves
+non &eacute;quivoques de f&eacute;condit&eacute;, ou au moins, comme disait Fontenelle, que
+l'<i>amour avait pass&eacute; par l&agrave;</i>.</p>
+
+<p>Un moyen plus simple et non moins efficace, c'est d'extraire le tannin,
+en versant de l'eau sur du tan en poudre dans un appareil semblable &agrave;
+celui des salp&ecirc;triers. Cette eau, en traversant le tan, lui enl&egrave;ve une
+portion de son principe styptique; vers&eacute;e sur du nouveau, elle en
+dissout une autre quantit&eacute;, et ainsi de suite jusqu'&agrave; ce que le tan soit
+plus dispos&eacute; &agrave; lui en enlever qu'&agrave; lui en c&eacute;der; alors la concentration
+est parfaite, et on l'emploie comme les d&eacute;coctions ci-dessus
+prescrites; mais tous ces moyens ne peuvent que succ&eacute;der aux
+compressions graduelles des bandes &agrave; sec, et longtemps apr&egrave;s que tous
+les r&eacute;sultats de couche sont termin&eacute;s, ou bien on courrait le risque
+d'une suppression souvent mortelle et toujours douloureuse. Enfin, avec
+les m&ecirc;mes pr&eacute;cautions, les bains froids et r&eacute;p&eacute;t&eacute;s offrent le plus s&ucirc;r
+comme le moins dangereux de tous les topiques.</p>
+
+<h4>POMMADE VIRGINALE DITE A LA COMTESSE.</h4>
+<table summary="pommade">
+<tr>
+<td>Sulfate de zinc</td>
+<td>40 gr.</td>
+</tr>
+<tr>
+<td>Noix de galle</td>
+<td>20 gr.</td>
+</tr>
+<tr>
+<td>Noix de cypr&egrave;s</td>
+<td>20gr.</td>
+</tr>
+<tr>
+<td>&Eacute;corce de grenade</td>
+<td>30 gr.</td>
+</tr>
+<tr>
+<td>Feuilles de myrte</td>
+<td>30 gr.</td>
+</tr>
+<tr>
+<td>Sumac</td>
+<td>30 gr.</td>
+</tr>
+</table>
+
+<p>M&eacute;langez ces substances pulv&eacute;ris&eacute;es avec quantit&eacute; suffisante d'onguent
+rosat. Cette pommade a la propri&eacute;t&eacute; de resserrer le sphyncter ou muscles
+constricteurs de la vulve et du vagin trop rel&acirc;ch&eacute;s.</p>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i6"><i>Formulaire magistral.</i></span></div></div>
+<p>&nbsp;</p>
+
+<p>On doit d'ailleurs scrupuleusement observer que tous ces topiques,
+lotions ou pommades, ne doivent jamais s'employer pendant le tribut
+lunaire, ou toute autre h&eacute;morrhagie ut&eacute;rine; et qu'ils ne sont suivis du
+succ&egrave;s d&eacute;sir&eacute;, qu'en s'imposant la sagesse la plus aust&egrave;re. La femme
+d&eacute;j&agrave; tromp&eacute;e, et qui s'exposerait encore &agrave; l'&ecirc;tre, n'est plus digne de
+notre int&eacute;r&ecirc;t, et du motif bien pur qui nous anime &agrave; consoler son sexe
+des injustices du n&ocirc;tre.</p>
+
+<p>Quant au moyen de s'opposer au d&eacute;veloppement excessif de la gorge, l'art
+offre des proc&eacute;d&eacute;s certains pour r&eacute;primer ce luxe de la nature, de m&ecirc;me
+qu'il en pr&eacute;sente pour la forcer &agrave; accorder ses dons &agrave; celles envers qui
+elle s'est montr&eacute;e trop avare en ce point; et nous croyons faire plaisir
+&agrave; nos lectrices, en publiant, en leur faveur, le manuscrit suivant,
+trouv&eacute; dans les d&eacute;combres du d&eacute;licieux ch&acirc;teau de <i>Cr&eacute;cy</i>, b&acirc;ti pour la
+belle <i>Pompadour</i>, qui para&icirc;t avoir profit&eacute; de la recette qu'il
+contient. On sait qu'elle n'obtint que fort tard, le genre d'attrait
+dont il s'agit ici. On pardonnera &agrave; l'auteur ses peintures un peu vives
+en faveur de son motif.</p>
+
+<p>&laquo;Vous m'ordonnez, madame, de consulter l'oracle d'&Eacute;pidaure, pour ajouter
+&agrave; vos attraits ce que vous seule y trouvez &agrave; d&eacute;sirer: que peut, en
+effet, demander aux dieux, celle qui r&eacute;unit &agrave; la majest&eacute;, la douceur; &agrave;
+l'&eacute;l&eacute;gance des formes, la r&eacute;gularit&eacute; des traits; enfin, &agrave; l'air imposant
+de la reine des dieux, la fra&icirc;cheur des berg&egrave;res du Mont Ida? Heureux
+disciple d'Esculape, je suis appel&eacute;, par votre confiance dans mon art, &agrave;
+embellir la beaut&eacute; m&ecirc;me: plus occup&eacute; de mon bonheur qu'effray&eacute; de ma
+t&eacute;m&eacute;rit&eacute;, je vais tenter d'unir &agrave; vos attraits des charmes nouveaux; et
+j'ose croire au succ&egrave;s, puisque vos beaux yeux m'encouragent d'un
+regard.</p>
+
+<p>&laquo;Dans ce si&egrave;cle fortun&eacute;, o&ugrave;, renon&ccedil;ant au vain luxe des mots, les
+savans s'occupent avec succ&egrave;s des choses, on applaudit au novateur
+heureux qui soul&egrave;ve le voile de la nature, pourvu qu'il en obtienne une
+r&eacute;ponse.... On veut m&ecirc;me que les oracles qu'il surprend &agrave; l'antique
+d&eacute;esse soient pr&eacute;cis, et l'on pardonne &agrave; la nudit&eacute; de ses expressions,
+pourvu que son but soit moral, c'est-&agrave;-dire, tende &agrave; la perfection, au
+bonheur de l'humanit&eacute;. J'ose donc essayer, madame, de vous apprendre
+l'art d'acqu&eacute;rir ce nouvel attrait qui fera de vous le mod&egrave;le de la
+beaut&eacute;, et donnera &agrave; nos jeunes Fran&ccedil;aises la confiance de vous imiter;
+cet attrait qui anime le po&euml;te, enflamme le peintre, ravit le sculpteur,
+inspire le musicien, et fait d&eacute;lirer depuis le simple cultivateur sous
+le chaume, jusqu'au grave philosophe au sein de ses livres poudreux; cet
+attrait, dont les fi&egrave;res amazones consentaient &agrave; sacrifier la moiti&eacute;
+pour gagner en adresse ce qu'elles perdaient en appas; cet attrait, dont
+la pomme de Paris n'offrait qu'une imparfaite image, et qui la fit
+tomber de ses mains; enfin, cet attrait qui date des premiers jours du
+monde, si c'est par lui qu'il faut expliquer cette autre pomme plus
+fatale, auquel le genre humain doit, dit-on, la perte du bien et la
+connaissance du mal.</p>
+
+<p>&laquo;S'il est recherch&eacute; par les hommes, les femmes s'honorent de l'offrir &agrave;
+nos yeux, c'est l'aiguillon du plaisir, le pr&eacute;lude du bonheur!... C'est
+le secret de ce don charmant que, sans m'arr&ecirc;ter &agrave; le depeindre, je
+voudrais conqu&eacute;rir pour les femmes qui en sont priv&eacute;es, et quoique ce ne
+soit point une fiction, c'est dans la fable que je puiserai la le&ccedil;on que
+je viens vous offrir.</p>
+
+
+<h3>LA COUPE D'H&Eacute;B&Eacute; (ALL&Eacute;GORIE).</h3>
+
+<p>&laquo;H&eacute;b&eacute;, trop jeune encore, ne comptait que quatorze printemps: le lys et
+la rose se disputaient ou plut&ocirc;t se partageaient l'honneur de nuancer
+son teint.... de grands yeux bleus, o&ugrave; d&eacute;j&agrave; se peignait l'amour sans
+qu'elle s'en dout&acirc;t, s'ouvraient lentement sous de noires et longues
+paupi&egrave;res; un front uni, un nez droit, une bouche de la couleur et de la
+forme d'un bouton de rose qui s'entrouvre, une haleine qui en avait le
+parfum, des dents d'un &eacute;mail opalin, de charmantes fossettes offrant des
+niches &agrave; l'amour ind&eacute;cis<a name="FNanchor_31_31" id="FNanchor_31_31"></a><a href="#Footnote_31_31" class="fnanchor">[31]</a>, un col blanc et onduleux, une taille et
+flexible et l&eacute;g&egrave;re, des bras arrondis, des doigts d&eacute;licats; enfin de
+petits pieds effleurant &agrave; peine les parvis de l'olympe.... H&eacute;b&eacute; avait
+tout en partage, et les dieux, auxquels elle versait le nectar dans la
+coupe de l'immortalit&eacute;, &eacute;taient plus enivr&eacute;s de ses charmes que de sa
+liqueur &eacute;th&eacute;r&eacute;e.... elle r&eacute;unissait tout.... tout? non.... quelque
+chose manquait &agrave; ses charmes, et ce fut l'orgueilleuse Junon qui s'en
+aper&ccedil;ut. H&eacute;b&eacute; entrait dans cet &acirc;ge o&ugrave; la nature ind&eacute;cise semble n'avoir
+qu'&eacute;bauch&eacute; son chef-d'&oelig;uvre. Offrant &eacute;galement les attraits des deux
+sexes, elle n'avait point encore re&ccedil;u ce double pr&eacute;sent qui d&eacute;c&egrave;le une
+vierge et que caresse l'&oelig;il furtif de l'amant timide.... Le dieu de la
+foudre lui-m&ecirc;me, souriant &agrave; la remarque de l'auguste Junon, t&eacute;moigne le
+d&eacute;sir de voir H&eacute;b&eacute; parfaite.... Il dit, et fils aussi soumis que galant
+&eacute;poux, Vulcain prend la coupe des mains d'H&eacute;b&eacute;; il en couvre l'un des
+h&eacute;misph&egrave;res du sein de V&eacute;nus, et l'arrondit sur ce mod&egrave;le &agrave; la vue des
+dieux fr&eacute;missants d'envie et de volupt&eacute;. Sous son l&eacute;ger marteau le m&eacute;tal
+docile s'&eacute;tend, se contourne, se creuse, et fa&ccedil;onn&eacute;e de m&ecirc;me sur le
+second h&eacute;misph&egrave;re de la belle d&eacute;esse, na&icirc;t une seconde coupe. Le dieu de
+Lemnos les place sur le sein d'H&eacute;b&eacute; qui, ainsi par&eacute;e, ressemble &agrave; la
+chaste Pallas; bient&ocirc;t sous ces deux coupes protectrices son sein
+s'&eacute;l&egrave;ve, un double mont bondit, et sa gorge s'accro&icirc;t sans d&eacute;passer ces
+heureuses limites. Les dieux applaudissent.... Cette ing&eacute;nieuse
+invention passa jusqu'en Gr&egrave;ce; l'Inde s'en fit honneur, mais elle se
+perdit comme tous les usages antiques et fut conserv&eacute;e par les seules
+Bayad&egrave;res.... Ces coupes amoureuses furent r&eacute;serv&eacute;es pour les banquets
+des dieux, et ce sont elles qui, remises depuis aux mains d'H&eacute;b&eacute;,
+d&eacute;salt&egrave;rent encore les fortun&eacute;s habitants de l'Empyr&eacute;e, et leur
+inspirent les d&eacute;sirs, l'esp&eacute;rance et la joie en leur rappelant le moule
+heureux sur lequel elles furent arrondies.</p>
+
+<p>&laquo;C'est ce prodige de la mythologie que l'art veut reproduire pour vous,
+belles, &agrave; qui il ne manque que cet attrait pour &ecirc;tre accomplies, et vous
+aussi pour qui sa possession excusera l'absence des autres.</p>
+
+<p>&laquo;En drapant l&eacute;g&egrave;rement les formes imparfaites de votre douce amie,
+jeunes &eacute;poux, imitez le disque rond de Ph&eacute;b&eacute;; &eacute;chancrez<a name="FNanchor_32_32" id="FNanchor_32_32"></a><a href="#Footnote_32_32" class="fnanchor">[32]</a> l'&eacute;toffe en
+dessinant les contours absents des attraits que vous d&eacute;sirez; que votre
+main utilement caressante et instruite &agrave; la volupt&eacute; par le dieu de
+D&eacute;los, sache promener des doigts mobiles sur l'ar&eacute;ole de ce sein non
+encore d&eacute;velopp&eacute;<a name="FNanchor_33_33" id="FNanchor_33_33"></a><a href="#Footnote_33_33" class="fnanchor">[33]</a>; que de fr&eacute;quentes titillations fassent fr&eacute;mir ses
+fibres; bient&ocirc;t la papille se gonfle, et les esprits appel&eacute;s par ces
+douces frictions enflent les muscles qui, profitant d'une libert&eacute;
+inconnue, se frayent une route nouvelle; une lymphe nourrici&egrave;re baigne
+les glandes qui se dilatent; le r&eacute;seau &eacute;clatant et poli qui les
+renferme, participant de l'&eacute;r&eacute;thisme g&eacute;n&eacute;ral, s'arrondit sous les doigts
+cr&eacute;ateurs: comme la fleur, condamn&eacute;e &agrave; p&eacute;rir sous les gla&ccedil;ons de
+l'hiver, se d&eacute;veloppe et na&icirc;t au jour, sous le verre diaphane, et sous
+les douces influences d'une chaleur factice; de m&ecirc;me les sucs &eacute;labor&eacute;s
+sous la main de l'&eacute;poux fortun&eacute; s'accumuleront en dessinant les
+voluptueux contours des beaux mod&egrave;les que nous a transmis le ciseau des
+Phidias et des Praxitelle.</p>
+
+<p>&laquo;L'une des coupes fameuses dont il s'agit ici, madame, s'est perdue, ou
+plut&ocirc;t aimons &agrave; croire que les dieux l'ont retir&eacute;e pour conserver le
+type du beau, s'il se trouvait perdu sur la terre; l'autre est c&eacute;l&egrave;bre
+par ce banquet o&ugrave; l'amoureuse Cl&eacute;op&acirc;tre fit publiquement aux yeux
+extasi&eacute;s d'Antoine, non la fastueuse exp&eacute;rience de dissoudre une perle
+dans un breuvage qui n'e&ucirc;t pas &eacute;pargn&eacute; l'organe complice de sa
+forfanterie, mais celle bien plus merveilleuse de l'exacte application
+de ce moule divin, sur sa gorge ravissante. Elle orne aujourd'hui un
+<i>Mus&aelig;um</i> fameux en Europe, et nous pourrons la consulter pour donner &agrave;
+vos formes le degr&eacute; d'extension avou&eacute; par le go&ucirc;t, si vous accordez &agrave;
+mes avis le droit de concourir &agrave; la naissance de l'attrait dont vous
+d&eacute;sirez la possession. Je dois vous dire enfin, madame, que c'est de
+l'abus des moyens que je viens de vous indiquer qu'est n&eacute; un singulier
+usage, chez les femmes turques, dont les &eacute;poux, par je ne sais quel go&ucirc;t
+bizarre, pr&eacute;f&egrave;rent une gorge volumineuse et tombante, et qui, pour se
+procurer ce double <i>agr&eacute;ment</i>, usent avec exc&egrave;s des bains chauds et du
+<i>massement</i>, op&eacute;ration inconnue en Europe. Ce n'est, certes, pas &agrave; cette
+esp&egrave;ce de perfection que je d&eacute;sire vous voir atteindre, et la nature
+heureusement vous a form&eacute;e de mani&egrave;re &agrave; ne pas satisfaire les
+inclinations turques; mais l'art hippocratique offre encore des
+ressources aux femmes dont l'accroissement de la gorge aurait besoin
+d'&ecirc;tre pr&eacute;venu, et c'est dans le m&ecirc;me moyen qui favorise son
+d&eacute;veloppement qu'elles trouveront celui de sa r&eacute;pression. Les belles
+favorites du commandeur des croyants, les Circassiennes, les
+G&eacute;orgiennes, les Mingr&eacute;liennes, opposent, d&egrave;s l'&acirc;ge de douze ans, &agrave; leur
+gorge naissante, un l&eacute;ger rempart de bois de santal qu'elle ne peut
+franchir; et ce genre d'attrait acquiert chez elles, par la compression,
+une fermet&eacute; que l'on rencontre difficilement chez les femmes des autres
+peuples.</p>
+
+<p>&laquo;Pardonnez, madame, ces d&eacute;tails que la nature de votre demande a rendus
+n&eacute;cessaires, et puisse l'application de cette th&eacute;orie ajouter encore,
+s'il est possible, aux charmes qui ont m&eacute;rit&eacute; l'hommage d'un autre
+Jupiter. Puiss&eacute;-je alors aussi, jeune encore et m&eacute;decin peu connu,
+obtenir par mes soins votre enti&egrave;re confiance, et par le succ&egrave;s de mes
+recettes, le triomphe d'une nouvelle H&eacute;b&eacute;; d&ucirc;t une moderne Junon
+accabler de sa pers&eacute;cution<a name="FNanchor_34_34" id="FNanchor_34_34"></a><a href="#Footnote_34_34" class="fnanchor">[34]</a> l'inventeur satisfait de sa r&eacute;ussite.&raquo;
+D.M.V.S.M.</p>
+
+<p>Nous ne pouvons mieux terminer ce chapitre qu'en rapportant l'anecdote
+suivante, qui en est le corollaire.</p>
+
+<p>Sous Louis XIV, le supplice de la Brinvilliers fut un exemple
+insuffisant pour arr&ecirc;ter les empoisonnements. Une <i>chambre ardente</i> fut
+institu&eacute;e pour juger de ces crimes. L'arrestation et le proc&egrave;s de la
+Voisin firent d&eacute;couvrir dans les papiers de cette derni&egrave;re, une foule de
+lettres qui compromettaient des gens de la plus haute condition. La
+Voisin &eacute;tait accus&eacute;e d'avoir vendu des poisons, des charmes, et divers
+secrets magiques pour se faire aimer. La duchesse de Foix avait &eacute;t&eacute;
+arr&ecirc;t&eacute;e sur la d&eacute;position d'un simple billet d'elle trouv&eacute; chez la
+Voisin, et dont le sens &eacute;tait plus obscur que propre &agrave; baser une
+accusation. Louis XIV, ne voulant pas que sur un indice si l&eacute;ger une
+dame de haute distinction f&ucirc;t emprisonn&eacute;e, se r&eacute;serva de l'interroger
+lui-m&ecirc;me dans ses cabinets, o&ugrave; elle fut conduite avec son propre
+carrosse par le capitaine des gardes en quartier.</p>
+
+<p>&laquo;Reconnaissez-vous ce billet, madame la duchesse? lui dit Sa Majest&eacute;
+d'un ton s&eacute;v&egrave;re, mais doux.</p>
+
+<p>&mdash;Sire, il est de ma main; je ne puis ni ne veux le nier.</p>
+
+<p>&mdash;A merveille! Maintenant dites-moi, je vous prie, avec la m&ecirc;me
+franchise, ce que signifient ces mots: <i>Plus je frotte, moins ils
+poussent</i>.</p>
+
+<p>&mdash;Ah! sire, s'&eacute;cria la duchesse en se jetant aux pieds du roi, daignez
+m'&eacute;pargner un tel aveu.</p>
+
+<p>&mdash;Je ne le puis, madame, songez que je vous appelle devant moi pour vous
+sauver un affront public; ce motif me donne tous les droits &agrave; votre
+confiance, et dans l'int&eacute;r&ecirc;t de votre honneur je vous ordonne de parler.</p>
+
+<p>&mdash;J'ob&eacute;irai, sire! reprit en tremblant M<sup>me</sup> de Foix, rouge jusqu'aux
+yeux.... Depuis deux ou trois ans je m'aper&ccedil;ois que mon mari me n&eacute;glige
+apr&egrave;s m'avoir souvent reproch&eacute; un d&eacute;faut... non, jamais je n'oserai
+achever....</p>
+
+<p>&mdash;Continuez, duchesse....</p>
+
+<p>&mdash;Il est des charmes, reprit l'accus&eacute;e, dont la nature se montre
+prodigue envers des femmes, avare envers d'autres....</p>
+
+<p>&mdash;Poursuivez, je vous prie.</p>
+
+<p>&mdash;Eh bien! sire, mon mari n'aime que les dames auxquelles la nature a
+prodigu&eacute;....</p>
+
+<p>&mdash;Prodigu&eacute; quoi?</p>
+
+<p>&mdash;Ce qui exc&egrave;de les belles proportions dans M<sup>me</sup> de Montespan et manque &agrave;
+M<sup>me</sup> de La Valli&egrave;re... comme &agrave; moi, sire....</p>
+
+<p>&mdash;Ah! m'y voici, s'&eacute;cria Louis XIV en s'excusant d'un d&eacute;faut trop
+prolong&eacute; de p&eacute;n&eacute;tration.... Et je vois, poursuivit le monarque
+interrogateur, que vous aviez demand&eacute; &agrave; la Voisin....</p>
+
+<p>&mdash;Une pommade dont elle disait des merveilles, ajouta M<sup>me</sup> de Foix en
+baissant les yeux.</p>
+
+<p>&mdash;Cependant <i>plus vous frottiez, moins ils poussaient</i>.</p>
+
+<p>&mdash;H&eacute;las! oui.</p>
+
+<p>&mdash;C'&eacute;tait un malheur; mais ce n'&eacute;tait pas un crime, et je suis enchant&eacute;,
+duchesse, de vous avoir &eacute;pargn&eacute; la honte d'un tel aveu devant la
+<i>chambre ardente</i>. Je vous rends le malheureux billet qui vous causa
+deux heures d'inqui&eacute;tude; retournez tranquillement &agrave; votre h&ocirc;tel. Je ne
+vois de coupable ici que l'&eacute;poux qui d&eacute;laisse une femme aussi jolie que
+vous; je veux en toucher quelques mots au duc. Il est un moyen plus
+heureux que celui dont vous avez fait l'essai pour obtenir de la nature
+elle-m&ecirc;me ce que vous recherchiez par artifice; nous en causerons avec
+votre mari, et j'esp&egrave;re qu'il l'emploiera.&raquo;</p>
+
+<hr style='width: 45%;' />
+
+<h3>&Eacute;TUDE PHYSIOLOGIQUE SUR LES MAMELLES OU SEINS.</h3>
+
+<p>Les mamelles (<i>mamm&aelig;</i>, des Latins; <i>masto&iuml;</i>, des Grecs; <i>poppa</i>, en
+italien; <i>teta</i>, <i>ubre</i>, en espagnol) subissent les m&ecirc;mes phases dans
+leur d&eacute;veloppement, que les organes essentiels de la reproduction. Elles
+sont peu apparentes dans le jeune &acirc;ge et ne commencent &agrave; prendre le
+d&eacute;veloppement qu'elles doivent acqu&eacute;rir que lorsque l'appareil g&eacute;nital
+est apte &agrave; perp&eacute;tuer l'esp&egrave;ce; et comme ce n'est que chez les individus
+femelles qu'elles parviennent &agrave; leur &eacute;tat complet, elles ne pr&eacute;sentent
+pendant les premiers temps de la vie aucune diff&eacute;rence chez l'un et
+l'autre sexe.</p>
+
+<p>C'est donc vers l'&eacute;poque o&ugrave; la femme devient apte aux plaisirs de la
+maternit&eacute;, que les seins commencent &agrave; acqu&eacute;rir tout le d&eacute;veloppement
+dont ils sont susceptibles, ainsi que les formes gracieuses qui en font
+un si brillant ornement: avant la pubert&eacute;, ils n'en forment que le noyau
+et se fl&eacute;trissent apr&egrave;s le temps de la facult&eacute; de reproduire. Cependant
+il n'est pas sans exemple de voir des jeunes filles encore loin de cette
+brillante &eacute;poque, offrir des mamelles parfaitement conform&eacute;es et
+susceptibles de fournir du lait. Les auteurs rapportent, &agrave; cet &eacute;gard,
+des exemples fort curieux; mais tous tendent &agrave; prouver que ce
+d&eacute;veloppement pr&eacute;coce fut toujours le r&eacute;sultat d'irritations exerc&eacute;es
+sur le mamelon.</p>
+
+<p>Le d&eacute;veloppement des mamelles se fait ordinairement en raison de celui
+des organes sp&eacute;ciaux de la g&eacute;n&eacute;ration, en sorte que la bonne
+conformation des seins peut, en g&eacute;n&eacute;ral, servir de mesure &agrave; celle de ces
+derniers. Ainsi, l'homme qui recherche dans la femme, non-seulement ce
+qu'elle peut offrir de gracieux, mais encore tout ce qui peut d&eacute;noter
+une grande puissance g&eacute;n&eacute;ratrice et un vif sentiment de l'amour, est-il
+toujours enthousiaste d'un beau sein. A peine la femme, la plus
+accomplie sous tous les autres rapports, peut-elle &eacute;veiller en lui le
+moindre sentiment de volupt&eacute;, si elle ne se trouve pourvue de ce superbe
+ornement. Cependant, on voit quelquefois des femmes dont les parties
+sexuelles sont parfaitement d&eacute;velopp&eacute;es et propres aux plaisirs ainsi
+qu'&agrave; la propagation, quoiqu'elles n'offrent que quelques traces de ces
+organes, tandis que d'autres, avec le sein le plus volumineux, ne sont
+nullement accessibles aux d&eacute;sirs voluptueux ni aptes &agrave; la g&eacute;n&eacute;ration.</p>
+
+<p>C'est &eacute;videmment en vertu des liens de l'&eacute;troite sympathie qui unissent
+les seins et les organes sexuels, que s'op&egrave;re le d&eacute;veloppement
+simultan&eacute;.</p>
+
+<p>Les mamelles sont situ&eacute;es au milieu de la poitrine, l'une &agrave; droite et
+l'autre &agrave; gauche, directement sur les muscles pectoraux; elles sont au
+nombre de deux: il est rare de trouver des femmes qui en aient trois ou
+quatre donnant toutes du lait. Cependant, les annales de la science
+citent un grand nombre de femmes et m&ecirc;me d'hommes multimammes; le plus
+souvent, le nombre des mamelles est port&eacute; &agrave; trois: deux pr&eacute;sentent la
+position et le volume ordinaires, et la troisi&egrave;me est situ&eacute;e sur la
+ligne m&eacute;diane, un peu plus bas que les deux autres, ou bien au-dessous
+de l'une d'elles &agrave; droite ou &agrave; gauche. Lorsque la mamelle surnum&eacute;raire
+est m&eacute;diane, elle reste ordinairement peu volumineuse, m&ecirc;me pendant
+l'allaitement; les mamelles surnum&eacute;raires lat&eacute;rales diff&egrave;rent au
+contraire fort peu des mamelles normales et peuvent, comme elles,
+fournir du lait. Lorsqu'il existe quatre mamelles, elles sont
+ordinairement bilat&eacute;rales et plac&eacute;es comme les mamelles abdominales des
+animaux, l'une au-dessous de l'autre; cette disposition est moins
+commune que la pr&eacute;c&eacute;dente, et la pr&eacute;sence de cinq mamelles est plus rare
+encore. Percy n'en rapporte qu'un seul cas observ&eacute; par M. Gorre. Ce cas
+fut pr&eacute;sent&eacute; par une femme valaque trouv&eacute;e, en l'an VIII, parmi les
+nombreux prisonniers faits &agrave; l'arm&eacute;e autrichienne et qui ne tarda pas &agrave;
+p&eacute;rir de froid et de mis&egrave;re. Sur les cinq mamelles de cette femme,
+quatre &eacute;taient tr&egrave;s-saillantes, dispos&eacute;es sur deux rangs, gonfl&eacute;es et
+pleines de lait; la cinqui&egrave;me &eacute;tait m&eacute;diane et situ&eacute;e &agrave; cinq pouces de
+l'ombilic; elle n'&eacute;tait pas plus volumineuse que celle d'une fille
+impub&egrave;re.</p>
+
+<p>On a aussi constat&eacute; que des mamelles surnum&eacute;raires pouvaient se
+pr&eacute;senter sur d'autres points du corps; ainsi, M. Robert a fait
+conna&icirc;tre le fait d'une femme multimamme de ce genre, laquelle
+descendait elle-m&ecirc;me d'une m&egrave;re dont les mamelles &eacute;taient plus
+nombreuses que d'habitude. Mais, chez elle, la mamelle surnum&eacute;raire
+&eacute;tait plac&eacute;e &agrave; la partie externe de la cuisse gauche, pr&egrave;s de l'a&icirc;ne.
+Jusqu'&agrave; la premi&egrave;re grossesse, cette mamelle fut prise pour un simple
+<i>noevus</i>; mais &agrave; cette &eacute;poque elle se d&eacute;veloppa et acquit le volume de
+la moiti&eacute; d'un citron; l'enfant t&eacute;tait alternativement l'une des
+mamelles pectorales et celle-ci, qu'on pourrait appeler inguinale.</p>
+
+<p>Thomas Bartholin vit une Danoise qui en offrait trois, dont deux &eacute;taient
+plac&eacute;es dans leur situation naturelle, et l'autre &agrave; la partie inf&eacute;rieure
+du <i>sternum</i>, en sorte qu'elles repr&eacute;sentaient une esp&egrave;ce de pyramide
+renvers&eacute;e. Tout le monde sait que la belle Anne de Boulen, &eacute;pouse de
+Henri VIII, roi d'Angleterre, avait, outre six doigts &agrave; chaque main,
+trois mamelles &agrave; la partie ant&eacute;rieure de sa poitrine. Un moine de Corbie
+rapporte avoir vu une paysanne qui nourrissait trois jumeaux de quatre
+mamelles indistinctement, dont deux &eacute;taient situ&eacute;es au-devant de la
+poitrine, et les deux autres au dos.</p>
+
+<p>Les mamelles bien proportionn&eacute;es sont un des principaux ornements des
+femmes, particuli&egrave;rement lorsqu'elles sont accompagn&eacute;es d'une gorge bien
+taill&eacute;e et recouverte d'une peau fine. Il faut aussi qu'elles soient
+blanches, rondes, et m&eacute;diocrement &eacute;cart&eacute;es l'une de l'autre; qu'elles ne
+soient plac&eacute;es ni trop haut, ni trop proche des aisselles; et enfin
+qu'elles ne soient ni trop grosses, ni pendantes: voil&agrave; les conditions
+qu'elles doivent avoir pour &ecirc;tre belles et propres &agrave; donner de l'amour;
+mais ce ne sont pas les meilleures ni les plus capables de contenir le
+lait.</p>
+
+<p>En nul endroit du corps, la peau n'est si fine, si d&eacute;licate, si lisse,
+si douce au toucher et si blanche qu'aux environs des mamelles. L&agrave; les
+t&eacute;guments ont acquis une telle t&eacute;nuit&eacute;, qu'ils sont enti&egrave;rement
+transparents et laissent facilement apercevoir les ramuscules veineux
+qui serpentent agr&eacute;ablement dessous, notamment dans le voisinage de la
+portion ros&eacute;e, et dont la couleur bleu&acirc;tre, en formant un heureux
+contraste avec la blancheur de la peau, en rel&egrave;ve si fortement l'&eacute;clat,
+et donne tant de lustre &agrave; la beaut&eacute; du sein. Ces globes, au reste,
+plaisent d'autant plus &agrave; la vue que cette belle portion de la peau est
+plus tendue par des glandes mammaires volumineuses, et que la femme
+jouit de plus d'embonpoint. Il est cependant des personnes fort maigres
+naturellement dont ces glandes sont si d&eacute;velopp&eacute;es que, malgr&eacute; cet &eacute;tat,
+elles offrent un sein solide, bien tendu, et de la plus grande beaut&eacute;.</p>
+
+<p>C'est &agrave; la partie centrale de chaque moiti&eacute; des parois thoraciques
+qu'est situ&eacute; le sein dans sa belle conformation. Trop d&eacute;gag&eacute;s en dehors
+et port&eacute;s sous les aisselles, ces organes laissent entre eux un grand
+vide, peu agr&eacute;able &agrave; la vue, et peuvent &eacute;prouver, de la part des bras
+port&eacute;s en bas et surtout en dedans, des pressions plus ou moins fortes
+dont la fr&eacute;quence nuit &agrave; leur d&eacute;veloppement, les d&eacute;forme et m&ecirc;me les
+atrophie. Trop rapproch&eacute;s du centre de la poitrine, ils se confondent
+l'un avec l'autre, et de ce d&eacute;faut de d&eacute;gagement r&eacute;sulte l'imperfection
+de ces rotondit&eacute;s &eacute;l&eacute;gantes qui concourent tant &agrave; la beaut&eacute; physique du
+sexe. Trop relev&eacute;s vers le cou, les seins confondent leurs brillants
+contours avec ceux de l'&eacute;paule, re&ccedil;oivent des chocs continuels des
+mouvements brusques de la clavicule, et sont sans cesse expos&eacute;s &agrave;
+l'influence nuisible de l'atmosph&egrave;re, dont la femme ne peut se garantir
+que par des v&ecirc;tements grotesques et r&eacute;pudi&eacute;s par la v&eacute;ritable
+coquetterie. Situ&eacute;s trop int&eacute;rieurement, ils semblent rapprocher les
+femmes des animaux mammif&egrave;res, et demandent &agrave; &ecirc;tre relev&eacute;s sans cesse
+par des corsets, dont la pression continuelle peut porter les plus
+f&acirc;cheuses atteintes &agrave; ces organes d&eacute;licats.</p>
+
+<p>La figure des beaux seins est ronde, et repr&eacute;sente un demi-globe; mais
+les bons nourriciers, au contraire, sont avanc&eacute;s en dehors, et
+ressemblent &agrave; une poire, tels sont en g&eacute;n&eacute;ral ceux des Comtoises; ce qui
+fait qu'ils ont de la peine &agrave; se soutenir, principalement quand ils sont
+pleins de lait.</p>
+
+<p>On ne peut pas bien d&eacute;terminer leur grandeur; elle varie suivant les
+nations: les Indiennes et les Siamoises les ont si longs, qu'elles
+peuvent les jeter par-dessus leurs &eacute;paules. Ils diff&eacute;rent encore suivant
+les individus; quelques femmes les ont naturellement petits et d'autres
+gros; ces derni&egrave;res sont les meilleures nourrices, pourvus qu'ils ne
+soient pas trop charnus. Leur grosseur d&eacute;pend aussi de l'&acirc;ge; ils
+commencent &agrave; pousser &agrave; 14 ans, ils ont alors la figure d'un demi-globe;
+ils sont petits, mais durs et fermes; ils grossissent &agrave; mesure qu'elles
+avancent en &acirc;ge; ils se fl&eacute;trissent aux femmes qui approchent la
+cinquantaine; et plus une femme vieillit, plus elle les a mous et
+flasques, n'y restant plus &agrave; la fin que des peaux.</p>
+
+<p>Le mamelon est une petite &eacute;minence qui s'&eacute;l&egrave;ve au milieu de la mamelle;
+il est d'une substance spongieuse, assez semblable &agrave; celle du gland de
+la verge, c'est pourquoi il se rel&egrave;ve, se gonfle et se roidit lorsqu'on
+le suce ou bien qu'on le chatouille. Il a un rapport intime avec les
+parties de la g&eacute;n&eacute;ration. Les mamelons se dressent et prennent part aux
+sensations suscit&eacute;es dans l'appareil g&eacute;nital par le co&iuml;t ou autres
+moyens d'excitation. Les titillations de ces boutons ros&eacute;s y font na&icirc;tre
+un sentiment de volupt&eacute; qui, se communiquant en un clin-d'&oelig;il au si&eacute;ge
+sp&eacute;cial de la jouissance, embrase la femme et la sollicite puissamment &agrave;
+l'acte de la reproduction. Quels sont les moyens d'une si frappante
+communication entre des organes si &eacute;loign&eacute;s? Quelques auteurs pr&eacute;tendent
+que ce sentiment si vif, si agr&eacute;able, a &eacute;t&eacute; donn&eacute; &agrave; cette partie afin
+que l'enfant y cause en la su&ccedil;ant un doux chatouillement, et que la
+femme y trouvant un singulier plaisir, elle se porte plus volontiers &agrave;
+donner &agrave; t&eacute;ter &agrave; son enfant aussi souvent qu'il en a besoin.</p>
+
+<p>Il est reconnu que la succion du lait &eacute;veille des sentiments de volupt&eacute;
+au b&eacute;n&eacute;fice de l'appareil g&eacute;n&eacute;rateur. Cabanis disait que des nourrices
+lui avaient fait l'aveu qu'elles devaient &agrave; l'enfant qu'elles
+allaitaient de v&eacute;ritables jouissances. La solidarit&eacute; des seins,
+relativement &agrave; l'appareil sexuel, est un fait constant; aussi la
+s&eacute;cr&eacute;tion du lait augmente-t-elle g&eacute;n&eacute;ralement sous l'influence de
+l'excitation de l'organe g&eacute;n&eacute;rateur. C'est le cas dans lequel &eacute;tait
+cette femme, qui voyait le lait sortir de ses seins quand son mari
+accomplissait avec elle l'acte du co&iuml;t. On a dit aussi que l'observation
+avait utilis&eacute; cet acte physiologique, que, voyant les animaux se pr&ecirc;ter
+avec complaisance &agrave; la man&oelig;uvre par laquelle on leur enlevait leur
+lait, on avait &eacute;tabli, dans le but d'en augmenter la quantit&eacute;, une
+action directe sur l'organe g&eacute;n&eacute;rateur. H&eacute;rodote rapporte que les
+Scythes introduisaient un b&acirc;ton poli dans la vulve de leurs juments
+quand ils leur enlevaient leur lait. Bayeu a racont&eacute; que dans les
+Pyr&eacute;n&eacute;es les gens occup&eacute;s &agrave; traire les vaches pla&ccedil;aient une de leurs
+mains dans la vulve; enfin, s'il faut en croire Levaillant, les
+Hottentots soufflent de l'air dans les parties sexuelles des animaux
+avant de les traire.</p>
+
+<p>La jeune fille devient-elle pub&egrave;re, aussit&ocirc;t les seins r&eacute;pondent &agrave;
+l'appel de la matrice, et cette corr&eacute;lation se reproduit &agrave; chaque nouvel
+&eacute;veil de cet organe. Elle se moule en quelque fa&ccedil;on sur les conditions
+dans lesquelles il se trouve. Dans l'&eacute;tat ordinaire de la vie, une
+action, quelle qu'elle soit, sur l'appareil g&eacute;n&eacute;rateur a toujours du
+retentissement dans les seins, et r&eacute;ciproquement. Ainsi, une sensation
+voluptueuse venant directement de l'ut&eacute;rus et de ses annexes est
+comprise et per&ccedil;ue dans les organes de la lactation; de m&ecirc;me les
+sentiments lascifs peuvent trouver acc&egrave;s pr&egrave;s des voies g&eacute;nitales en
+partant des seins. C'est la raison pour laquelle Hippocrate croyait que
+le lait venait de la matrice.</p>
+
+<p>N'est-ce pas &agrave; cette corr&eacute;lation, &agrave; cette excitation g&eacute;n&eacute;sique provoqu&eacute;e
+par l'allaitement qu'il faut attribuer le fait de luxure inou&iuml;,
+diabolique, que rapporte M. le docteur Andrieux? Un enfant, qu'on avait
+pourvu d'une nourrice jeune et vigoureuse, d&eacute;p&eacute;rissait chaque jour. Les
+parents afflig&eacute;s cherchaient en vain la cause de cet &eacute;tat: on finit par
+la d&eacute;couvrir. Mais o&ugrave; trouver des mots pour exprimer leur surprise et
+leur col&egrave;re, quand ils trouv&egrave;rent cette malheureuse, ext&eacute;nu&eacute;e,
+d&eacute;lirante, avec son nourrisson qui cherchait encore dans une succion
+affreuse, et in&eacute;vitablement st&eacute;rile, un aliment que les seins auraient
+pu seuls donner!!! Pour parvenir facilement &agrave; son but, elle attendait
+que le cri de la faim se f&icirc;t entendre; l'enfant, dans cet instant, ouvre
+la bouche comme pour chercher le sein, il saisit alors avidement le bout
+du doigt, ou tout corps quelconque souple et arrondi qu'on place entre
+ses l&egrave;vres, et exerce imm&eacute;diatement sur lui des efforts r&eacute;p&eacute;t&eacute;s de
+succion.</p>
+
+<p>Les exemples d'une pareille d&eacute;pravation doivent heureusement &ecirc;tre fort
+rares.</p>
+
+<p>La plupart des filles &eacute;lev&eacute;es chez des religieuses ne peuvent, selon ces
+derni&egrave;res, plaire au Cr&eacute;ateur que par des imperfections. Avoir de la
+gorge, &ecirc;tre belle, sont assur&eacute;ment deux sujets de r&eacute;probation; l'enfer,
+ouvert &agrave; celles qui portent un sein arrondi, attend sa proie avec
+impatience; c'est ainsi que s'exprime le fanatisme dans l'int&eacute;rieur des
+maisons d'&eacute;ducation religieuse. Quelques jeunes filles, adoptant ces
+id&eacute;es, prennent chaque jour quelques subtances capables d'interrompre ou
+d'affaiblir la nutrition: tel est, par exemple, l'usage du vinaigre bu &agrave;
+jeun; en alt&eacute;rant les forces digestives, il arr&ecirc;te le cours des
+s&eacute;cr&eacute;tions ou en diminue l'&eacute;nergie, d'o&ugrave; le d&eacute;faut d'accroissement des
+seins avec l'amaigrissement g&eacute;n&eacute;ral qui r&eacute;sulte de cette d&eacute;testable
+coutume. Des rem&egrave;des aussi dangereux, ou plus violents, employ&eacute;s dans
+les m&ecirc;mes vues, doivent donc &ecirc;tre bannis sans retour, puisque ce n'est
+qu'en d&eacute;truisant la sant&eacute; qu'ils am&egrave;nent le changement d'organisation
+qu'on souhaite.</p>
+
+<p>En 1829, le docteur R&eacute;camier publia un ouvrage en deux volumes,
+intitul&eacute;: <i>Recherches sur le traitement du cancer par la compression
+m&eacute;thodique simple et combin&eacute;e.</i> M. R&eacute;camier, appel&eacute; souvent dans les
+couvents, s'est trouv&eacute; &agrave; port&eacute;e d'y faire l'observation suivante:</p>
+
+<p>Dans les couvents, les religieuses, dans le but de r&eacute;primer
+l'envahissement mondain d'une gorge trop volumineuse, compriment les
+glandes mammaires avec des rondelles d'amadou. Les seins, par le fait de
+la compression et de l'iode qui se trouve naturellement dans l'amadou,
+s'atrophient; mais ce que les religieuses de nos jours n'ont pas pr&eacute;vu,
+c'est que, en raison de la solidarit&eacute; dont nous nous entretenons,
+l'appareil reproducteur profite du retrait des glandes mammaires. Or,
+comme le bassin est l'expression de l'&eacute;tat anatomique et physiologique
+de la matrice, il en r&eacute;sulte que les hanches et les muscles fessiers des
+femmes soumises &agrave; cette op&eacute;ration acqui&egrave;rent un &eacute;norme d&eacute;veloppement. Il
+me reste &agrave; savoir si un surcro&icirc;t de nourriture et de d&eacute;veloppement de
+l'appareil g&eacute;n&eacute;rateur n'est pas un obstacle de plus &agrave; la chastet&eacute;; et si
+ces int&eacute;ressantes recluses n'en ressentent pas plus vivement les
+aiguillons de la chair, que la religion leur d&eacute;fend d'&eacute;couter.</p>
+
+<p>Mais il est temps de revenir &agrave; notre sujet, duquel nous nous sommes un
+peu &eacute;cart&eacute;. Le mamelon est rose et petit aux vierges; l'ar&eacute;ole qui
+l'entoure est d'une teinte plus ou moins fonc&eacute;e, suivant les individus;
+elle l'est en g&eacute;n&eacute;ral davantage chez les personnes qui ont la peau
+brune, les yeux et les cheveux noirs, que chez les femmes blondes,
+faibles et d&eacute;licates. L'&eacute;tendue de ce cercle est de deux centim&egrave;tres
+environ; il s'&eacute;largit et prend une teinte plus fonc&eacute;e chez celles qui
+ont fait des enfants; le mamelon devient livide et gros aux nourrices,
+et il est noir et fl&eacute;tri chez les vieilles femmes.</p>
+
+<hr style='width: 45%;' />
+
+<p>Un ouvrage de ce genre ne pouvant se terminer par des mati&egrave;res m&eacute;dicales
+aussi s&eacute;rieuses, nous donnons une fort jolie chanson de M. Aug. Gilles,
+pour le clore convenablement.</p>
+
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">LES T&Eacute;TONS.</span></div></div>
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Air: <i>Elle aime &agrave; rire, elle aime &agrave; boire.</i><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">J'ai pris pour muse une &eacute;grillarde<br /></span>
+<span class="i0">A qui la romance d&eacute;pla&icirc;t;<br /></span>
+<span class="i0">Chaque jour elle se compla&icirc;t<br /></span>
+<span class="i0">A rendre ma muse gaillarde.<br /></span>
+<span class="i0">La gaudriole en mes cartons,<br /></span>
+<span class="i0">A ses yeux offre une lacune,<br /></span>
+<span class="i0">Elle me garderait rancune,<br /></span>
+<span class="i0">Si je ne chantais les t&eacute;tons.<br /></span>
+</div>
+<div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Dans le sein f&eacute;cond qui le porte,<br /></span>
+<span class="i0">L'homme fait neuf mois de s&eacute;jour;<br /></span>
+<span class="i0">Impatient de voir le jour,<br /></span>
+<span class="i0">De ses pieds il frappe &agrave; la porte.<br /></span>
+<span class="i0">A peine est-il n&eacute; qu'&agrave; t&acirc;tons<br /></span>
+<span class="i0">Le jeune espi&egrave;gle entre en licence,<br /></span>
+<span class="i0">Et, sans &eacute;gards pour la d&eacute;cence,<br /></span>
+<span class="i0">A sa m&egrave;re il prend les t&eacute;tons.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Chacun de vous a sa manie,<br /></span>
+<span class="i0">Amis; mais je ne doute point<br /></span>
+<span class="i0">Que votre penchant sur ce point,<br /></span>
+<span class="i0">Avec le mien ne s'harmonie.<br /></span>
+<span class="i0">Et je crois bien que nous go&ucirc;tons<br /></span>
+<span class="i0">M&ecirc;me plaisir et m&ecirc;me ivresse,<br /></span>
+<span class="i0">Quand notre main fr&ocirc;le et caresse<br /></span>
+<span class="i0">Tour-&agrave;-tour deux jolis t&eacute;tons.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Il est un usage contraire<br /></span>
+<span class="i0">A la pudeur qui vous r&eacute;git;<br /></span>
+<span class="i0">Votre modestie en rougit;<br /></span>
+<span class="i0">Mais elle ne peut s'y soustraire.<br /></span>
+<span class="i0">Belles, quand nous vous accostons,<br /></span>
+<span class="i0">De l'arc-boutant de la nature<br /></span>
+<span class="i0">Votre &oelig;il furtif prend la mesure,<br /></span>
+<span class="i0">Le notre toise les t&eacute;tons.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Dumont dit &agrave; son fils Hilaire:<br /></span>
+<span class="i0">&mdash;Il faut enfin te d&eacute;cider,<br /></span>
+<span class="i0">Et conduire, sans plus tarder,<br /></span>
+<span class="i0">Au temple d'hymen Rose ou Claire.<br /></span>
+<span class="i0">&mdash;Papa, mon choix est fait; partons:<br /></span>
+<span class="i0">De Claire la beaut&eacute; me flatte,<br /></span>
+<span class="i0">Mais elle a la poitrine plate<br /></span>
+<span class="i0">Et sa s&oelig;ur a de gros t&eacute;tons.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Paul et Justine se conviennent.<br /></span>
+<span class="i0">L'amour para&icirc;t combler leurs v&oelig;ux;<br /></span>
+<span class="i0">C'est &agrave; leurs mutuels aveux<br /></span>
+<span class="i0">Pourtant que l'un &agrave; l'autre ils tiennent:<br /></span>
+<span class="i0">Gr&acirc;ce &agrave; leurs marchands de cartons,<br /></span>
+<span class="i0">Aux amateurs ils font des niches,<br /></span>
+<span class="i0">L'un avec des mollets postiches<br /></span>
+<span class="i0">Et l'autre avec de faux t&eacute;tons.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">Nature dit &agrave; la fillette,<br /></span>
+<span class="i0">Qui les voit poindre en son corset:<br /></span>
+<span class="i0">Craignez que le n&oelig;ud d'un lacet<br /></span>
+<span class="i0">N'en comprime la peau douillette;<br /></span>
+<span class="i0">Qu'entre leurs deux jolis boutons<br /></span>
+<span class="i0">Le m&ecirc;me espace s'interpose:<br /></span>
+<span class="i0">Dans vingt ans o&ugrave; je les pose<br /></span>
+<span class="i0">Qu'Amour trouve encor les t&eacute;tons.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0"><br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i0">A notre libert&eacute; publique<br /></span>
+<span class="i0">Je tiens par go&ucirc;t et par devoir,<br /></span>
+<span class="i0">Et dans aucun temps le pouvoir<br /></span>
+<span class="i0">Ne m'a fait changer de tactique.<br /></span>
+<span class="i0">Au diable les ventrus gloutons<br /></span>
+<span class="i0">De Vill&egrave;le et de Bonaparte;<br /></span>
+<span class="i0">Car la libert&eacute; sans la Charte<br /></span>
+<span class="i0">C'est une femme sans t&eacute;tons.<br /></span>
+</div><div class="stanza">
+<span class="i6">AUG. GILLES.<br /></span>
+</div></div>
+
+<h3>FIN.</h3>
+
+
+<h3>19193. PARIS.&mdash;TYPOGRAPHIE LAHURE rue de Fleurus, 9</h3>
+
+<div class="footnotes"><h3>NOTES:</h3>
+
+<div class="footnote"><a name="Footnote_1_1" id="Footnote_1_1"></a><a href="#FNanchor_1_1"><span class="label">[1]</span></a> &Eacute;variste Parny, auteur, en l'an VII, du po&euml;me de la <i>Guerre
+des Dieux</i>, dans lequel on ne reconna&icirc;t plus le chantre d&eacute;licatement
+voluptueux d'<i>&Eacute;l&eacute;onore</i>, du <i>Lendemain</i>, et de la <i>Journ&eacute;e champ&ecirc;tre</i>, a
+fait usage de cette anecdote dans le deuxi&egrave;me chant de ce po&euml;me,
+premi&egrave;re &eacute;dition. Il l'a supprim&eacute;e dans la seconde &eacute;dition, et c'est
+peut-&ecirc;tre un second tort. C'est dans cet &Eacute;loge qu'il a trouv&eacute; ce myst&egrave;re
+qu'il fait jouer &agrave; la famille de Dieu: il n'a donc pas eu le m&eacute;rite
+d'une grande invention dans ce po&euml;me.
+<br /><br />
+Pensant que le lecteur en sera satisfait, nous reproduisons ce morceau,
+qui du reste tient ici naturellement sa place:
+
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Du Paradis la troupe infatigable,<br /></span>
+<span class="i0">Pour terminer, joua la Passion,<br /></span>
+<span class="i0">Et joua bien. Les convi&eacute;s, dit-on,<br /></span>
+<span class="i0">Go&ucirc;t&egrave;rent peu ce drame lamentable.<br /></span>
+<span class="i0">Mais un malheur qu'on n'avait pas pr&eacute;vu<br /></span>
+<span class="i0">Du d&eacute;nouement &eacute;gaya la tristesse:<br /></span>
+<span class="i0">Bien flagell&eacute;, le h&eacute;ros de la pi&egrave;ce<br /></span>
+<span class="i0">&Eacute;tait d&eacute;j&agrave; sur la croix &eacute;tendu.<br /></span>
+<span class="i0">On choisissait pour ce r&ocirc;le p&eacute;nible<br /></span>
+<span class="i0">Un jeune acteur intelligent, sensible,<br /></span>
+<span class="i0">Beau, vigoureux, et sachant bien mourir,<br /></span>
+<span class="i0">Il &eacute;tait nu des pieds jusqu'&agrave; la t&ecirc;te:<br /></span>
+<span class="i0">Un blanc papier qu'une ficelle arr&ecirc;te<br /></span>
+<span class="i0">Couvrait pourtant ce que l'on doit couvrir.<br /></span>
+<span class="i0">Charmante encore apr&egrave;s sa p&eacute;nitence,<br /></span>
+<span class="i0">La Magdel&egrave;ne au pied de la potence<br /></span>
+<span class="i0">Versait des pleurs: ses longs cheveux &eacute;pars,<br /></span>
+<span class="i0">Son joli sein qui jamais ne repose,<br /></span>
+<span class="i0">Du crucifi&eacute; attirait les regards.<br /></span>
+<span class="i0">Il voyait tout, jusqu'au bouton de rose;<br /></span>
+<span class="i0">Quelquefois m&ecirc;me il voyait au-del&agrave;.<br /></span>
+<span class="i0">Pr&ecirc;t &agrave; mourir, cet aspect le troubla.<br /></span>
+<span class="i0">Il tenait bon; mais quelle fut sa peine,<br /></span>
+<span class="i0">Quand le feuillet vint &agrave; se soulever!<br /></span>
+<span class="i0">&laquo;Otez, dit-il, &ocirc;tez la Magdel&egrave;ne!<br /></span>
+<span class="i0">Otez-la donc, le papier va crever.&raquo;<br /></span>
+<span class="i0">Soudain il cr&egrave;ve; et la Vierge elle-m&ecirc;me<br /></span>
+<span class="i0">Pour ne pas rire a fait un vain effort.<br /></span>
+<span class="i0">&laquo;Le tour est bon, dit le P&egrave;re supr&ecirc;me,<br /></span>
+<span class="i0">On le voit bien, le dr&ocirc;le n'est pas mort.&raquo;<br /></span>
+</div></div>
+</div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_2_2" id="Footnote_2_2"></a><a href="#FNanchor_2_2"><span class="label">[2]</span></a> Voy. <i>Le Bouquet de roses, ou le Chansonnier des Gr&acirc;ces</i>,
+premi&egrave;re ann&eacute;e, Favre, Palais-&Eacute;galit&eacute;.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_3_3" id="Footnote_3_3"></a><a href="#FNanchor_3_3"><span class="label">[3]</span></a> Visage.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_4_4" id="Footnote_4_4"></a><a href="#FNanchor_4_4"><span class="label">[4]</span></a> Bien fait, joli.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_5_5" id="Footnote_5_5"></a><a href="#FNanchor_5_5"><span class="label">[5]</span></a> Recherch&eacute;e dans sa toilette.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_6_6" id="Footnote_6_6"></a><a href="#FNanchor_6_6"><span class="label">[6]</span></a> &Eacute;tienne Pasquier, avocat,<br />
+<span style="margin-left: 2.5em;">naquit en 1529 et mourut en 1615.</span></p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_7_7" id="Footnote_7_7"></a><a href="#FNanchor_7_7"><span class="label">[7]</span></a> Il n'est pas besoin de faire ici l'&eacute;tymologiste. Tous ceux
+qui entendent le Fran&ccedil;ois savent que le mot <i>mamelle</i>, qui n'est plus du
+bel usage, signifie la m&ecirc;me chose que <i>teton</i>.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_8_8" id="Footnote_8_8"></a><a href="#FNanchor_8_8"><span class="label">[8]</span></a> Les Casuistes les plus rel&acirc;chez, les Sanchez et les
+Escobars, condamnent l'attouchement des t&eacute;tons: ils conviennent que
+c'est une impuret&eacute; et une branche de la luxure, l'un des sept p&eacute;chez
+mortels. Mais si je ne me trompe, ils n'imposent pas au coupable une
+p&eacute;nitence fort s&eacute;v&egrave;re: et il y a plusieurs pa&iuml;s dans l'Europe o&ugrave; ils
+sont presque contraints de traiter cela comme les petites fautes que
+l'on appelle <i>quotidian&aelig; incursiones</i>. On est si acco&ucirc;tum&eacute; &agrave; cette
+mauvaise pratique dans ces pays-l&agrave;, et c'est un spectacle si ordinaire
+jusques au milieu des rues, &agrave; l'&eacute;gard surtout du commun peuple, que les
+casuistes mitig&eacute;s se persuadent que cette habitude efface la moiti&eacute; du
+crime: ils croient qu'on ne l'envisage point sous l'id&eacute;e d'une libert&eacute;
+fort malhonn&ecirc;te, et que le scandale du spectateur est tr&egrave;s-petit. C'est
+pourquoi ils passent l&eacute;g&egrave;rement sur cet article de la confession. Je ne
+pense pas que jamais aucun rigoriste ait diff&eacute;r&eacute; pour un tel sujet
+l'absolution de son p&eacute;nitent, non pas m&ecirc;me dans les climats o&ugrave; cette
+esp&egrave;ce de patinage est peu usit&eacute;e, et passe pour une de ces libert&eacute;s
+dont les personnes de l'autre sexe sont oblig&eacute;es de se f&acirc;cher tout de
+bon. Ainsi les anabaptistes sont les plus rigides de tous les moralistes
+chr&eacute;tiens, puisqu'ils condamnent &agrave; l'excommunication celui qui touche le
+sein d'une ma&icirc;tresse qu'il veut &eacute;pouser, et qu'ils rompent la communion
+eccl&eacute;siastique avec ceux qui ne veulent pas excommunier un tel galant.
+(<i>Notes de Bayle.</i>)</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_9_9" id="Footnote_9_9"></a><a href="#FNanchor_9_9"><span class="label">[9]</span></a> Boileau en a fait une maligne application &agrave; M<sup>lle</sup> de Scud&eacute;ri
+m&ecirc;me, l'auteur de ce roman, &agrave; laquelle tous les auteurs d'alors
+donnaient le nom de Sapho. Le po&euml;te Le Brun nous retrace les &eacute;carts de
+Boileau, dans ses vers contre la citoyenne Th... P..., auteur de <i>Sapho</i>
+et de <i>Camille</i>, et autres femmes auteurs.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_10_10" id="Footnote_10_10"></a><a href="#FNanchor_10_10"><span class="label">[10]</span></a> Le recueil de ses po&eacute;sies est rare. Il s'y trouve quelques
+morceaux faibles, mais on le lit avec plaisir. Voyez ses &eacute;pigrammes et
+son <i>Rem&egrave;de d'amour</i>, dans le recueil intitul&eacute;: <i>le Furet litt&eacute;raire</i> ou
+les <i>Fleurs du Parnasse</i>, 1 vol. in-12.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_11_11" id="Footnote_11_11"></a><a href="#FNanchor_11_11"><span class="label">[11]</span></a> C'est Charles II, prince aussi salace, aussi voluptueux
+que nos Henri III, Charles VII, Henri IV et Fran&ccedil;ois I<sup>er</sup>. Le C. Mercier,
+auteur de l'An 2440, et de tant de drames, a fait sur ce prince un drame
+intitul&eacute;: <i>Charles II dans un certain lieu</i>. Il n'a point avou&eacute; cette
+production, mais nous assurons qu'elle est de lui. Un nomm&eacute; <i>Br&eacute;mont</i> a
+fait l'histoire scandaleuse des amours de ce roi avec Miladi
+Castelmaine, duchesse de Keweland et la femme de Milord Canduche, dans
+un petit roman all&eacute;gorique intitul&eacute; <i>Hattig&eacute;, ou les amours du roi de
+Tamaran</i>, Cologne 1676. 1 vol. in-16 de 120 pages. Le duc de Buckingham
+joue un beau r&ocirc;le dans cette chronique scandaleuse.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_12_12" id="Footnote_12_12"></a><a href="#FNanchor_12_12"><span class="label">[12]</span></a> Quintilien, Aristote, etc.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_13_13" id="Footnote_13_13"></a><a href="#FNanchor_13_13"><span class="label">[13]</span></a> <i>&Eacute;loge des Perruques</i>, enrichi de notes plus amples que le
+texte; par le docteur Akerlio (Deguerle). Paris, an VII, 1 vol. in-12.
+</p><p>
+Cet <i>&Eacute;loge</i> badin a trouv&eacute; gr&acirc;ce aupr&egrave;s des savants comme aupr&egrave;s des
+dames, malgr&eacute; les traits malins qu'il s'est permis de d&eacute;cocher contre
+les t&ecirc;tes &agrave; perruques de toute esp&egrave;ce. Lou&eacute; par tous les journaux sans
+en excepter la <i>D&eacute;cade</i>, il n'a pu fl&eacute;chir le courroux du terrible
+<i>Victor-Campagne</i>, dont l'&oelig;il per&ccedil;ant a vu tout seul, dans cet &eacute;l&eacute;gant
+badinage, une horrible contre-r&eacute;volution, Voy. le <i>Flambeau</i>, du 18
+flor&eacute;al an VII.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_14_14" id="Footnote_14_14"></a><a href="#FNanchor_14_14"><span class="label">[14]</span></a> Gentil Bernard a dit (<i>Art d'aimer</i>, ch. II):</p>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Qu'un sein trop humble &agrave; sa place arr&ecirc;t&eacute;<br /></span>
+<span class="i0">Offre un amour de son fr&egrave;re &eacute;cart&eacute;.<br /></span>
+</div></div>
+</div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_15_15" id="Footnote_15_15"></a><a href="#FNanchor_15_15"><span class="label">[15]</span></a> Alphonse Leroi, m&eacute;decin de la Facult&eacute; de Paris, a publi&eacute;,
+en 1772, de savantes <i>Recherches sur l'habillement des femmes et des
+enfants</i>. L'auteur de cet ouvrage utile s'y d&eacute;cha&icirc;ne avec une sainte
+col&egrave;re contre l'usage des <i>corps balein&eacute;s</i>, dont l'usage &eacute;tait g&eacute;n&eacute;ral &agrave;
+l'&eacute;poque o&ugrave; il &eacute;crivait, et qu'un caprice de la mode menace de
+ressusciter aujourd'hui.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_16_16" id="Footnote_16_16"></a><a href="#FNanchor_16_16"><span class="label">[16]</span></a> Ce <i>chapeau</i> s'appelle, en termes techniques, <i>bout de
+sein</i>.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_17_17" id="Footnote_17_17"></a><a href="#FNanchor_17_17"><span class="label">[17]</span></a> Comme si la gorge la plus <i>respectable</i> ressemblait aux
+cantiques de feu Pompignan dont Voltaire a dit quelque part:</p>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Sacr&eacute;s ils sont, car personne n'y touche.<br /></span>
+</div></div>
+</div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_18_18" id="Footnote_18_18"></a><a href="#FNanchor_18_18"><span class="label">[18]</span></a> M&ecirc;me spiritueuses et ferment&eacute;es: le <i>trop</i> seul est de
+trop.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_19_19" id="Footnote_19_19"></a><a href="#FNanchor_19_19"><span class="label">[19]</span></a> Il y aurait presque autant d'inhumanit&eacute; &agrave; d&eacute;fendre au beau
+sexe le <i>th&eacute; au lait</i>; ainsi, nous lui en permettons l'usage, d'autant
+plus que l'habitude qui, comme on sait, est une seconde nature, a mis,
+gr&acirc;ce &agrave; la mode, presque tous nos estomacs <i>&agrave; l'anglaise</i>.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_20_20" id="Footnote_20_20"></a><a href="#FNanchor_20_20"><span class="label">[20]</span></a> Quelle que soit notre indulgence, nous devons en
+conscience inviter les poitrines d&eacute;licates &agrave; substituer &agrave; l'usage du
+<i>th&eacute;</i> et du <i>caf&eacute;</i>, celui du <i>chocolat</i> ou du <i>cacao</i>. Les liqueurs
+proprement dites peuvent &ecirc;tre, dans le m&ecirc;me cas, remplac&eacute;es avec succ&egrave;s
+par le vin et la bi&egrave;re; mais le vin doit &ecirc;tre <i>g&eacute;n&eacute;reux</i>, et la bi&egrave;re de
+bonne qualit&eacute;. Parmi les aliments les plus amis de la <i>gorge</i> sont les
+v&eacute;g&eacute;taux, les substances <i>amylac&eacute;es</i>, riz, truffes, etc. Les rago&ucirc;ts
+trop &eacute;pic&eacute;s ne sont pas sans p&eacute;rils; ainsi que les acides, ils minent
+l'embonpoint, et produisent enfin la maigreur, hideuse ennemie de la
+beaut&eacute;.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_21_21" id="Footnote_21_21"></a><a href="#FNanchor_21_21"><span class="label">[21]</span></a> En profonds commentateurs, n'oublions pas de dire ici: &laquo;Il
+y a lustre et lustre; le lustre vulgaire est de cinq ann&eacute;es, celui de la
+rose est de cinq minutes.&raquo;</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_22_22" id="Footnote_22_22"></a><a href="#FNanchor_22_22"><span class="label">[22]</span></a> C'est ce qui fait dire &agrave; je ne sais quel po&euml;te, en parlant
+de je ne sais quelle nymphe:</p>
+<div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i0">Lise, &agrave; quinze ans, avait un sein superbe;<br /></span>
+<span class="i0">La pauvre Lise, &agrave; vingt ans, n'en a plus.<br /></span>
+<span class="i0">Pourquoi, dit-on?&mdash;C'est qu'aux chemins battus<br /></span>
+<span class="i0">On ne vit jamais cro&icirc;tre l'herbe.<br /></span>
+</div></div>
+</div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_23_23" id="Footnote_23_23"></a><a href="#FNanchor_23_23"><span class="label">[23]</span></a> Madame Tolleret, c&eacute;l&egrave;bre par ses d&eacute;couvertes dans l'art de
+restaurer les gorges, du temps de Mercier.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_24_24" id="Footnote_24_24"></a><a href="#FNanchor_24_24"><span class="label">[24]</span></a> Popp&eacute;e, imp&eacute;ratrice romaine, seconde femme de N&eacute;ron. Sa
+Majest&eacute; tigre &eacute;ventra d'un coup de pied sa royale &eacute;pouse, sans respect
+pour sa belle gorge.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_25_25" id="Footnote_25_25"></a><a href="#FNanchor_25_25"><span class="label">[25]</span></a> L'hermodacte est l'<i>iris tuberosa</i> des botanistes.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_26_26" id="Footnote_26_26"></a><a href="#FNanchor_26_26"><span class="label">[26]</span></a> Nous ne parlons point ici par m&eacute;taphore. La grande
+toilette exige aujourd'hui deux masques; un, comme on sait, sur le
+visage, l'autre sur la poitrine.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_27_27" id="Footnote_27_27"></a><a href="#FNanchor_27_27"><span class="label">[27]</span></a> Nous n'avons point en France le bois mobile et l&eacute;ger dont
+se servent, pour cet usage, les Bayad&egrave;res, mais nous pouvons le
+remplacer avec avantage par la gomme &eacute;lastique, qui, par sa flexibilit&eacute;
+et sa l&eacute;g&egrave;ret&eacute;, ne peut froisser ni d&eacute;former les contours qu'elle serait
+destin&eacute;e &agrave; faire &eacute;clore. On conna&icirc;t &agrave; pr&eacute;sent le moyen de dissoudre
+cette gomme ou plut&ocirc;t ce <i>gluten</i> animal.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_28_28" id="Footnote_28_28"></a><a href="#FNanchor_28_28"><span class="label">[28]</span></a> Le Camus, homme grave, &eacute;rudit, et qui s'honora cependant
+de tracer l'hygi&egrave;ne de la beaut&eacute; sous le nom d'Abdeker.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_29_29" id="Footnote_29_29"></a><a href="#FNanchor_29_29"><span class="label">[29]</span></a> On pourrait nous reprocher nos citations latines, celle-ci
+s'excuse d'elle-m&ecirc;me, et les m&egrave;res prudentes nous en sauront gr&eacute;; quant
+aux autres, nous avons m&eacute;nag&eacute;, aux jeunes agr&eacute;ables du jour, l'occasion
+de se montrer, aupr&egrave;s des belles, &eacute;rudits &agrave; peu de frais.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_30_30" id="Footnote_30_30"></a><a href="#FNanchor_30_30"><span class="label">[30]</span></a> Cette pommade rappelle l'aventure assez plaisante du jeune
+abb&eacute; de Fl..., qui, en ayant trouv&eacute; sur une toilette et ayant les l&egrave;vres
+gerc&eacute;es, les en frotta innocemment et sans penser &agrave; mal, mais avec un
+tel succ&egrave;s, que le matin, en s'&eacute;veillant, il ne pouvait ouvrir la
+bouche. Pareille aventure arriva &eacute;galement &agrave; M. le comte de Rochefort.
+Voici comment il la raconte dans ses <i>M&eacute;moires</i>. M<sup>lle</sup> de Menneville,
+fille d'honneur de la reine m&egrave;re, ayant demand&eacute; &agrave; ce dernier un habit
+d'homme, en secret:
+</p><p>
+&laquo;Je le lui portai dans sa chambre. Mais comme il n'y avoit personne pour
+le recevoir, je le mis sous son lit o&ugrave; elle m'avoit dit de le mettre, et
+m'en fus causer avec la bonne femme M<sup>me</sup> du Tilleul, sous-gouvernante des
+filles, qui &eacute;toit de mes bonnes amies. Comme toutes les chambres des
+filles, ou, pour parler plus juste, toutes les loges &eacute;toient ouvertes,
+car elles ressembloient proprement &agrave; celles des com&eacute;diens, j'aper&ccedil;us, en
+me promenant avec elle, sur une toilette, des peignes, une bo&euml;te &agrave;
+poudre, et tous les autres ingr&eacute;diens qui servent &agrave; l'ajustement d'une
+fille, et niant remarqu&eacute; entr'autres choses une petite bo&euml;te de pommade,
+j'en voulus prendre pour me frotter les mains que j'avois un peu rudes.
+Je la trouvai toute d'une autre couleur que celle de l'ordinaire, ainsi
+croiant qu'elle pouvoit servir aux l&egrave;vres, o&ugrave; j'avois un peu mal, j'en
+mis assez imprudemment. Mais je ne fus pas longtemps &agrave; m'en repentir, au
+m&ecirc;me temps mes l&egrave;vres me firent un mal enrag&eacute;, ma bouche se r&eacute;tr&eacute;cit,
+mes gencives se rid&egrave;rent, et quand je vins &agrave; vouloir parler, je fis rire
+tellement M<sup>me</sup> du Tilleul, que je jugeai qu'il falloit que je fusse bien
+ridicule. Ce qui fut le pis fut que je ne pus presque articuler aucune
+parole, et, courant promptement &agrave; un miroir, je me fus regarder, et me
+fis tant de honte &agrave; moi-m&ecirc;me, que je m'enfuis pour me cacher. En m'en
+allant je trouvai M. le duc de Roquelaure qui entroit pour venir faire
+la cour &agrave; quelqu'une des filles, et &eacute;tant tout &eacute;tonn&eacute; de me voir de la
+sorte, il me demanda qui m'avoit mis en cet &eacute;tat. Je lui contai
+na&iuml;vement mon infortune, &agrave; quoi il me fit r&eacute;ponse, en se moquant de moi,
+que je n'avois que ce que je m&eacute;ritois, qu'&agrave; mon &acirc;ge je devois savoir
+qu'il y avoit de toutes sortes de pommade; que celle que j'avais prise
+n'&eacute;toit ni pour les mains ni pour les cheveux, et qu'elle &eacute;toit un peu
+plus rare. Il me quitta apr&egrave;s s'&ecirc;tre ainsi raill&eacute; de moi, et s'en allant
+dans la chambre de la reine-m&egrave;re, il lui fit sa cour &agrave; mes d&eacute;pens.
+Aussit&ocirc;t tout le monde accourut pour me voir, et voiant que j'avais
+apr&ecirc;t&eacute; mani&egrave;re de rire, j'en aurois ri, tout le premier, s'il m'avoit
+&eacute;t&eacute; permis d'ouvrir la bouche. Cette aventure fut le sujet de
+l'entretien de toute la cour, pendant plus de huit jours, et on le manda
+m&ecirc;me &agrave; Nantes, o&ugrave; le roi &eacute;toit, qui pour &ecirc;tre si s&eacute;rieux ne put
+s'emp&ecirc;cher de rire. Pour moi, j'en avois tout autant d'envie que les
+autres quand je pensois &agrave; cet accident, mais quoi que je m'&eacute;tuvasse la
+bouche d'eau fra&icirc;che, et tant&ocirc;t de vin ti&egrave;de, il n'y eut que le temps
+qui m'aporta du soulagement.&raquo;</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_31_31" id="Footnote_31_31"></a><a href="#FNanchor_31_31"><span class="label">[31]</span></a> Portrait exact de M<sup>me</sup> de Pompadour.
+</p><div class="poem"><div class="stanza">
+<span class="i2">&laquo;Ainsi qu'H&eacute;b&eacute; la jeune Pompadour<br /></span>
+<span class="i4">A deux jolis trous sur la joue,<br /></span>
+<span class="i0">Deux trous charmans o&ugrave; le plaisir se joue,<br /></span>
+<span class="i0">Qui furent faits par la main de l'Amour.&raquo;<br /></span>
+</div></div>
+<span style="margin-left: 14.5em;"><i>&OElig;uv. de Bernis.</i></span><br /></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_32_32" id="Footnote_32_32"></a><a href="#FNanchor_32_32"><span class="label">[32]</span></a> Ce v&ecirc;tement couvre trop le nu, il faut l'<i>&eacute;chancrer</i>
+davantage.
+</p><p><br />
+<span style="margin-left: 14.5em;"><i>Pygmalion</i>, sc&egrave;ne lyrique. J. J.</span><br />
+</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_33_33" id="Footnote_33_33"></a><a href="#FNanchor_33_33"><span class="label">[33]</span></a> Quant aux jeunes vierges &agrave; qui la d&eacute;cence interdit le
+secours d'une main caressante, il est un moyen qu'elles pourront
+employer sous l'&oelig;il d'une m&egrave;re flatt&eacute;e d'ajouter &agrave; leurs perfections,
+sans admettre un tiers dans leur confidence; le voici: appliquez sur la
+place de la gorge un h&eacute;misph&egrave;re en bois l&eacute;ger et creux ou en gomme
+&eacute;lastique et perc&eacute; &agrave; son milieu, &agrave; peu pr&egrave;s comme les ventouses de
+verre, dont se servent les jeunes accouch&eacute;es pour aspirer le lait; &agrave;
+l'orifice s'adapterait un tube de verre ou un tuyau de gomme &eacute;lastique,
+au moyen duquel une succion plusieurs fois r&eacute;p&eacute;t&eacute;e, chaque jour,
+finirait par d&eacute;velopper l'attrait tant souhait&eacute;.
+</p><p>
+<i>Note du manuscrit.</i>
+</p><p>
+Un de nos amis qui, dans son voyage en &Eacute;gypte, a su &agrave; la fois faire des
+observations sur l'art de gu&eacute;rir et sur les m&oelig;urs, nous assure que les
+femmes de ce pays se servent, avec succ&egrave;s, pour la m&ecirc;me intention, de la
+mie d'un pain arrondi, fa&ccedil;onn&eacute;e au contour de la forme que l'on d&eacute;sire,
+et appliqu&eacute;e encore chaude sur le sein. Cette substance, dit ce savant
+que r&eacute;clame avec honneur la chirurgie fran&ccedil;aise, porte en elle un
+principe v&eacute;g&eacute;to-animal, qui, d&eacute;velopp&eacute; par le calorique, p&eacute;n&egrave;tre
+rapidement le sein, excite l'&eacute;rection de ses papilles nerveuses, gonfle
+le syst&egrave;me glanduleux, et y cause un ferment, un prurit voluptueux,
+bient&ocirc;t suivis du d&eacute;veloppement successif de l'appareil mammaire et du
+tissu cellulaire qui le recouvre. C'est ce m&ecirc;me principe vireux qui agit
+si &eacute;nergiquement comme d&eacute;rivatif de l'humeur goutteuse aux extr&eacute;mit&eacute;s
+inf&eacute;rieures, en appliquant du <i>levain</i> &agrave; la plante des pieds. On
+pourrait activer ce moyen par de l&eacute;g&egrave;res frictions d'huile tr&egrave;s-volatile
+sur le sein, et d'une lotion astringente sur les parties qui
+l'environnent; au reste, le volupt&eacute; fait &eacute;clore la gorge, comme le
+printemps fait &eacute;clore la rose, et tous les praticiens connaissent la
+correspondance de l'<i>ut&eacute;rus</i> au sein.</p></div>
+
+<div class="footnote"><p><a name="Footnote_34_34" id="Footnote_34_34"></a><a href="#FNanchor_34_34"><span class="label">[34]</span></a> La belle Pompadour suivit le conseil du jeune docteur,
+elle acquit en effet l'attrait qui manquait seul &agrave; ses charmes, et
+ouvrit, par reconnaissance, &agrave; son m&eacute;decin une carri&egrave;re qu'il parcourut
+avec &eacute;clat.
+<br />
+Si l'on trouve ce fragment un peu libre, accusons-en plut&ocirc;t nos m&oelig;urs
+que l'auteur qui vivait dans un temps o&ugrave; le Fran&ccedil;ais se scandalisait
+plus des actions que des &eacute;crits; il pense maintenant tout le contraire,
+et l'on ferait aujourd'hui le proc&egrave;s de <i>V&eacute;nette</i>, <i>Tissot</i> et
+<i>Montesquieu</i> s'ils publiaient l'<i>Onanisme</i>, le <i>Tableau de l'amour
+conjugal</i> et le <i>Temple de Gnide</i>; en sommes-nous plus chastes et plus
+vertueux? l'interpr&eacute;tation que l'on donnera &agrave; cet article r&eacute;pondra &agrave;
+cette question. Au surplus, nous protestons de la puret&eacute; de nos motifs,
+et nous n'avons point &eacute;crit pour les <i>Tartuffes de m&oelig;urs</i>, mais pour
+cette belle moiti&eacute; du genre humain qui ne conna&icirc;t de mal que celui que
+les pervers lui enseignent.</p></div>
+
+</div>
+
+
+
+
+
+
+
+<pre>
+
+
+
+
+
+End of the Project Gutenberg EBook of Éloge du sein des femmes, by
+Claude-François-Xavier Mercier de Compiègne
+
+*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK ÉLOGE DU SEIN DES FEMMES ***
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+Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
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+To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
+and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4
+and the Foundation web page at http://www.pglaf.org.
+
+
+Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive
+Foundation
+
+The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
+501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
+state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
+Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
+number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at
+http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg
+Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent
+permitted by U.S. federal laws and your state's laws.
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+Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered
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+works.
+
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+unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
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+metadata, and any other content or labor, has been confirmed to be
+in the PUBLIC DOMAIN IN THE UNITED STATES.
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