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If you are not located in the United States, you -will have to check the laws of the country where you are located before -using this eBook. - -Title: Petit bréviaire de la Gourmandise - -Author: Laurent Tailhade - -Release Date: January 8, 2022 [eBook #67129] - -Language: French - -Produced by: Laurent Vogel and the Online Distributed Proofreading Team - at https://www.pgdp.net (This file was produced from images - generously made available by the Bibliothèque nationale de - France (BnF/Gallica)) - -*** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK PETIT BRÉVIAIRE DE LA -GOURMANDISE *** - - - - - - - LAURENT TAILHADE - - PETIT BRÉVIAIRE - DE LA - GOURMANDISE - - [Illustration] - - PARIS - ALBERT MESSEIN, ÉDITEUR - Successeur de LÉON VANIER - 19, QUAI SAINT-MICHEL, 19 - - 1919 - - - - -DU MÊME AUTEUR - -A LA MÊME LIBRAIRIE - - - La Farce de la Marmite, traduit de Plaute. 1 vol. in-12 - broché avec portrait de E. Gabbart et fleuron de - Rochegrosse 3 fr. 50 - Pour la Paix, suivi de: _Lettres aux Conscrits_. - Frontispice de Destrem. 1 plaquette in-12 1 fr. 50 - La Noire Idole, _Essai de Morphinomanie_. 1 pl. in-12 1 fr. 50 - La Corne et l’Épée, _Étude sur les Courses de Taureaux_, - 1 plaquette in-12 1 fr. 50 - La Feuille à l’envers. _Revue en un acte._ 1 pl. in-12 2 fr. »» - Un Monde qui finit. _La Dévotion à la Croix. Don Quichotte - de la Manche._ 1 vol. in-12 2 fr. »» - Louanges à Sophie Cottin. _Poème_ dit par l’auteur à - Bagnères-de-Bigorre. In-8 1 fr. 50 - La Douleur. _Le vrai mistère de la Passion._ 1 plaquette - in-16. Fleuron de Rochegrosse 2 fr. »» - - - - -IL A ÉTÉ TIRÉ DE CE LIVRE - -10 exemplaires sur Japon impérial numérotés 1 à 10 - -et 20 exemplaires sur Hollande numérotés de 11 à 30 - -Nº - - - - -PETIT BRÉVIAIRE DE LA GOURMANDISE - - -Dans _Le crime de Sylvestre Bonnard_, l’un des premiers et le meilleur -peut-être de ses contes, ravivant la mémoire du sieur Antoine Carême, ce -Napoléon de la cuisine qui mourut tout jeune encore (1784-33), brûlé par -la flamme du génie et le charbon des rôtissoires, Anatole France a tiré -de l’oubli un apophtegme, digne à jamais d’habiter la mémoire des -hommes: - - «Les Beaux-Arts--dit Carême--sont au nombre de cinq, à savoir: la - Peinture, la Poésie, la Musique, la Sculpture et l’Architecture, - laquelle a pour branche principale la Pâtisserie.» - -Le grand homme en veste blanche, qui légua cette phrase rapide et -magnanime aux siècles à venir, qui, s’égalant à Mansard, à Gabriel, à -Claude Perrault, ne voyait entre la Colonnade du Louvre, entre le -Garde-Meuble et les fruits en pyramides ou les pièces montées, aucune -distinction qui ne fût à sa gloire, promulgue un axiome définitif et la -plus solide vérité quand, touché par la Muse des fourneaux, il attribue -à la cuisine un rang d’élection, que dis-je? la première place dans le -royaume des Beaux-Arts. - -Car il serait injuste de borner à la technique, enchanteresse mais -subsidiaire, des Boissier ou des Rebattet, la maxime du vieux maître. -Elle comprend aussi bien que le Petit-four, la broche, la casserole et -toutes les sortes de fourneaux. - -Depuis le temps de la préhistoire, cet Age d’or où le Pithécanthrope mal -évolué se nourrissait de glands, d’herbe verte et de gibier cru, buvait -aux cressonnières l’eau féconde en vilaines bêtes jusqu’à l’ère auguste -des Cambacérès et des Grimod, des goinfres magnanimes dont s’honora la -France, au début du siècle dernier, l’homme n’a pas eu de but plus -constant ni de plus chère étude que le moyen d’accroître et d’améliorer -les passe-temps de bouche qui sont à la fois le premier besoin de la -nature et le plus bel ornement des civilisations. - -La table, en effet, se peut définir le lien civil par excellence. Elle -donne de l’esprit aux niais, du caractère aux timides. Elle oriente nos -humeurs vers l’optimisme, la courtoisie et la libéralité. L’heure de la -digestion est celle où tous les hommes se reconnaissent pour frères, où, -dans l’azur des cigares exquis, leur entendement, de prime abord, -élucide les problèmes dont la discussion a pour effet ordinaire de les -mettre en courroux. - -Le praticien, en veste blanche, qui marmitonne les ragoûts, entérine les -sauces et conquiert sur Héphaistos la gloire des rôtis, quand il ajoute -du poivre ou modère les épices, fomente, du même coup, belle humeur et -sociabilité. - -_C’est un grand poète_, expert à créer des émotions, grâce au langage -péremptoire des papilles gustatives. - -Il combine des saveurs, suscite des aromes. Il dégage le potentiel des -truffes, les arcanes du gibier, comme d’autres élaborent une sonate ou -un sonnet. La cuisine pacificatrice élève l’esprit, adoucit les mœurs. -Elle fait jaillir l’éloquence des lèvres qu’elle a touchées. - -Certains coulis ont la profondeur abstruse des métaphysiques; il est des -sauces à la crème dont la douceur émeut comme le récit d’une bonne -action. - -Les champignons évoquent des sites forestiers, les huîtres des paysages -maritimes, souvenir de Courbet ou de Ruysdaël. - -Mêlé à la pulpe écarlate des pommes d’or, le poivre de Cayenne suggère -une vision d’Afrique ou d’Andalousie, d’_oulels-naïls_ ou de chanteuses -gaditanes, mimant _le jalejo_ dans une de ces _ventas_ où l’ombre de Don -Quichotte semble revenir encore, auberges où l’on dîne, s’il en faut -croire Mérimée, d’un potage aux piments, que suit un poulet aux piments, -avec, pour tout dessert, une salade, à l’huile forte, de piments. Et -l’ail, ce condiment divin, effroi des estomacs valétudinaires, méconnu -par le débile Horace qui, sans doute, enviait les «dures entrailles» des -estivadours, et se privait, à contre-cœur, de bulbes odoriférants, l’ail -avec son frère l’oignon et sa cousine l’échalotte, ne colore-t-il point -de ses vigueurs l’allégresse permanente, l’ironie et le lyrisme -incomparables du Midi français? L’esprit et le cœur, l’imagination et la -sensibilité se délectent pareillement à la mode culinaire. - -La cuisine inspire à ses adeptes des mots délicieux. «On mangerait son -propre père à cette sauce-là», déclare Grimod de la Reynière, auteur des -œufs brouillés à la laitance de carpes, en avalant une chartreuse de -perdreaux. - -«Pour manger une dinde truffée, il convient d’être deux, affirme l’abbé -Morelet. Je n’en use jamais autrement. Ainsi, j’en ai une aujourd’hui. -Nous serons deux, la dinde et moi.» - -Et Montmaur, Montmaur le Grec,--helléniste fameux et non moins illustre -pique-assiette,--coupe court, sous Louis XIII, à des propos -intempestifs. - ---De grâce! réclame-t-il. Un peu de silence. _On ne s’entend pas -manger._ - -Mais la cuisine, ce premier des arts, maître de l’univers, n’a pas en -tout temps relui d’une même splendeur. Il a connu des jours d’éclipse et -de revers. - -Les peuples sobres, nourris d’olives et d’eau claire, les Grecs -d’Aristophane qui, pour un banquet de fête conviaient leurs amis à -partager des figues, un morceau de lièvre et quelques grives (Cf. _La -Paix, les Acharniens_) n’atteignirent jamais à la voracité grandiose, à -l’ampleur des Romains dans la goinfrerie et dans la bonne chère. - -Au _Banquet_ de Platon, il n’est aucunement parlé de nourriture. Le -jeune Alcibiade y paraît seul en pointe de vin. Il trouble à peine le -sublime entretien des convives; puis, ayant posé sur le front de Socrate -sa couronne de violettes, il se mêle gravement à leurs discours. - -Les Hellènes d’à présent n’ont pas renié cette frugalité de leurs pères. -Les compagnons d’Hadji Stavros ont même régime que les soldats de -Léonidas ou les convives d’Agathon. - -M. Georges Clémenceau nous racontait que, lors d’un récent voyage en -Grèce, il coucha dans un bourg du Péloponnèse. Sa chambre--la plus -confortable du pays--ouvrait sur un mail où les hommes du village eurent -l’idée importune de se donner un medianoche. Les cris, les chants, les -altercations et les rires empêchaient le touriste de dormir. On était en -plein mois d’août. Il eut la curiosité de descendre pour voir de près ce -repas tumultueux. Le festin se composait d’eau fraîche et de pétoncles -faisant les trois services, tenant lieu de rôt et d’entremets. Au moyen -d’une épingle, chacun des convives retirait le mollusque de sa coquille, -comme on fait en Bretagne pour les bigorneaux en poussant plus de -clameurs que tous les suppôts de Gargantua et les Argiens d’Homère, -autour d’un bœuf entier posé sur un plat d’or. - -Maîtresse du monde, impératrice des nations, Rome étendit son empire sur -la table et là--comme partout ailleurs--donna des lois à l’Univers. - -La tempérance de la vieille féodalité romaine, le goût des «ognons crus -et du vinaigre militaire» quand la richesse du monde se vint condenser -autour du Capitole, eurent bientôt fait de disparaître. Les noms de -Lucullus, d’Apicius, de Sempronius, Rufus... qui le premier fit servir -sur sa table - - La cigogne au pied rouge et le turbot marin, - -brillent comme des Dieux parmi les classiques de la bouche. On n’a -retenu du premier que la déclaration magnanime: - - «Lucullus dîne chez Lucullus» - -encore qu’il se soit avéré comme un administrateur insigne et l’un des -plus fameux lieutenants de Pompée. Le second reluit davantage, grâce aux -faiseurs d’anas. Le public n’a pas oublié qu’après avoir dissipé en -bombances gigantesques à peu près une centaine de millions, il préféra -mourir que vivre dans la détresse, n’ayant plus que deux millions quatre -cent mille francs pour alimenter sa boulimie. Il se tua plutôt que de -renoncer aux turbots monstrueux, aux sangliers de Venafre ainsi qu’aux -vins de Falerne cachetés dans l’amphore, Manlius étant consul. - -Aulus Vitellius revêtit de la pourpre impériale son insatiable -gourmandise. - -Louis XVIII, qui, sans préjudice des autres mets, absorbait, chaque -matin, dix-huit côtelettes de mouton, semble, auprès du neuvième César, -un mangeur de la petite espèce. - -Vitellius, en effet, connut l’orgueil d’avoir inauguré ce plat -gigantesque, ce plat qu’il nommait, à cause de ses proportions -insolites, _bouclier de Minerve Poliade_. On y mêlait des foies de -scares, des cervelles de faisans et de paons, des langues de -phénicoptères, des laitances de murènes que des navarques allaient -chercher sur leurs trirèmes, depuis le pays des Parthes jusqu’au détroit -espagnol. - -Il faisait régulièrement trois repas et quelquefois quatre, mais dont -aucun ne pouvait passer pour léger. Il se faisait quotidiennement -inviter chez plusieurs personnes: chacun de ces festins ne coûtait pas -moins de quatre cent mille sesterces, cent mille francs de monnaie -française. Le plus somptueux entre les dîners du règne fut le repas que -lui servit son frère, quand il revint de Germanie. On y posa sur table -deux mille poissons et sept mille oiseaux de choix. - -Ce robuste mangeur était d’aspect hideux, ayant le ventre gros, la face -bourgeonnée, tel un ivrogne de la plus basse espèce. - -Pétrone ou l’auteur, quel qu’il soit, du _Satyricon_, nous a transmis -quelques-uns de ces menus prodigieux dont le grotesque Trimalchio, -armateur enrichi et semblable par quelques points aux yankees -milliardaires qui font dîner avec eux des porcs ou des chevaux, -régalait, au IIe siècle de notre ère, ses parasites et ses affranchis. -On y mangeait des œufs en pâte ferme contenant des becquefigues, des -sangliers rôtis dont les flancs recélaient des étourneaux vivants, des -gâteaux d’où giclait une eau safranée aspergeant la face des convives, -des cochons que le maître-queux s’accusait de n’avoir pas vidés et qui, -sous le couteau de l’écuyer tranchant, laissaient échapper des monceaux -de crépinettes, de boudins, le tout au milieu des divertissements les -plus ridicules, des acrobates, des danseurs de corde et des propos -goujats. - -On est loin des Romains de tragédie et des pompiers de David, avec leurs -casques, leurs sentences, leurs tirades qui si lourdement ont pesé sur -nos années de collège, de ces Romains qui, d’après le mot de Vacquerie, -«ne boivent que du poison et ne mangent que leurs enfants». - -Le riche Nasidienus, qui connut la gloire d’héberger Mécène avec Horace -et Fundanius le poète comique, se chamarrait déjà d’assez bons ridicules -ayant le mauvais goût de préconiser la chère qu’il servait, de présenter -à ses convives un sanglier frais, mis à mort par le vent d’autan propre -à mûrir la venaison et d’admettre à sa table des parasites sans -vergogne, tel ce Nomentanus qui, pour talent comique, se vantait -d’absorber, en une bouchée, les plus énormes croustades ou ce Vibidius -Balatro, fier de trinquer «ruineusement», qui, sans cesse, réclamait de -plus grands verres et, comme le Scapin de Regnard, demandait - - ... que la cave épuisée - Lui fournît à pleins brocs une liqueur aisée. - -Si Vitellius fut un goinfre d’une surhumaine capacité, le jeune -Héliogabale--maître du monde, à quinze ans, mais dont l’extravagance -n’avait pas les goûts artistes du fils divin d’Ænobarbus--réalisa, sur -le trône des Césars, les mascarades gastronomiques, imaginées par -l’auteur du _Satyricon_. - -A l’imitation d’Apicius, il mangeait souvent des talons de chameaux, ce -qui nous paraîtrait un mince régal, des crêtes de coqs arrachées à des -coqs vivants, des langues de paons et de rossignols, parce que, -disait-il, ce mets préserve de la peste. - -Il faisait servir aux officiers du palais, en d’énormes plats, des -entrailles de rougets, des cervelles de phénicoptères, des têtes de -perdrix, de faisans et de paons. Il jetait des raisins d’Apamée dans les -mangeoires des chevaux. Les lions étaient nourris avec des faisans et -des perroquets. Il faisait servir à ses parasites des aliments figurés -en cire ou en bois, souvent en ivoire ou en terre cuite, quelquefois -même en marbre ou en pierre; c’est sous cette forme qu’on leur -présentait toute la variété des plats dont il mangeait lui-même; les -invités se lavaient les mains, étant tenus de boire autant que s’ils -avaient mangé. - -Héliogabale, comme les esthètes de Mirbeau, avait le goût superbe de -forcer la nature, de servir des purées en branches et de ne prendre que -des nourritures déguisées avec art. Ce frêle jeune homme aux traits -fanés à l’aspect maladif, avec sa barbe frisottante et ses yeux de -poisson mort ne fit jamais un repas qui lui coûtât moins de vingt-cinq -mille francs. Il ne mangeait pas de marée au bord de la mer, ains la -faisait servir dans les endroits les plus éloignés. Près de la -Méditerranée, il nourrissait les paysans avec la laitance des brochets -et des lamproies. Il combinait des festins en couleurs, bleus, verts ou -jaunes, ainsi qu’ont de nouveau, pendant les belles années du -Symbolisme, tenté de le faire quelques snobs pleins d’imagination. Un -jour la table était émeraude, le lendemain nuancée de pourpre violette -ou de transparent azur, tantôt rose pâle et tantôt vert bouteille. Il -faisait servir des pois avec des parcelles d’or, des lentilles avec des -pierres de foudre, des fèves avec de l’ambre jaune, du riz avec des -perles, truffes et marée étaient saupoudrées, tour à tour, de perles et -de poivre. - -Dans son poème de _Melænis_, Louis Bouilhet, bon latiniste, lecteur -fervent de Plaute, que documentait le grand Flaubert et qui devait à la -tendresse du maître une large et noble culture, une plastique verbale -digne de cette Rome qu’ils aimaient, a consacré des vers pleins de -richesse et de sonorité à la gloire du cuisinier latin (_Melænis_, chant -II, vers 13 et suiv., pp. 164 et suiv., édit. Lemerre). - -Ceci n’est aucunement exagéré. Ne criez pas à l’absurdité, à la -déraison, à la poésie. Aucune grandeur humaine, si magnifique et superbe -qu’on l’imagine, aucune grandeur n’est en possession d’affaiblir le los -du cuisinier. - -Celui qui s’escrime de la broche, qui met les casseroles en batterie, et -conduit à la victoire l’ost ingénu des marmitons, participe aux honneurs -des soldats triomphants. On lui décerne le même nom, le même titre -qu’aux généraux d’armée. Et seul, unique et majestueux entre les -pacifiques, l’empereur de la cuisine porte le nom de «chef» comme les -Scipiades, comme Annibal, comme Jules César. - -Le Moyen âge marque une halte dans l’évolution de la gastronomie. En -dépit des louanges que donnèrent aux bombances féodales M. Karl Huysmans -et quelques autres dyspeptiques de notoriété plus mince, tout porte à -supposer que les viandes et leurs condiments laissaient fort à désirer -dans ce temps de barbarie et de mysticisme à outrance. - -Les dames à long corset, les beaux chevaliers pareils aux figures des -jeux de cartes, les poursuivants d’armes, les convives de la Table Ronde -et les écuyers d’Arthur ou compagnons de Roland, tenaient pour mets des -Dieux la cigogne, le paon, oiseaux coriaces et de plate saveur. Ils -attestaient le héron et le faisaient rôtir; ils engageaient leur foi sur -cette viande immangeable sans doute par idéalisme et pour que leurs -serments ne parussent pas fomentés par les délices de la cuisine, par -«l’humeur communicative des banquets». - -Les bourgeoises ripailles, «compulsoires à beuverie», ainsi que les -nomme Rabelais, manquaient un peu de raffinement; le choix des -nourritures, les propos des convives, exhalaient un fumet de nos -tripières et de grosse gaîté. Ce n’étaient que gras-double, andouilles, -jambonneaux et fumures. La verve n’y faillissait point ni l’appétit. «Je -me porte appelant de soif comme d’abus. Page, relève mon appel!--dit un -des compagnons de Grandgousier. Remède contre la soif? Il est contraire -à celui qui est contre morsure de chien: Courez toujours après le chien, -jamais ne vous mordra; buvez toujours avant la soif, jamais soif vous -poindra.» - -Les _Repues franches_ attribuées à Villon ne témoignent pas non plus -d’une extrême délicatesse. Le maigre écolier de la rue de Fouarre, qui, -pour peindre la famine, a trouvé des images si nettes et si cruelles, -nommant l’hiver «saison où les loups vivent de vent», apitoyé sur les -vagabonds qui «pain ne voient qu’aux fenêtres», connaissait trop la -nécessité, les appels du ventre creux pour manifester de bien grandes -exigences à propos des mets que la Providence, ou, pour mieux dire, -quelque tour de Panurge, en manière de larcin furtivement fait, lui -mettait sous la dent. Les clercs, les écoliers, les hommes d’armes qui -fréquentaient dans les tavernes méritoires de la cité ne raffinaient -guère sur la composition de leur menu: chez la grosse Margot ils -trouvaient pain, fromage, vin et fruits. Ce n’était pas là précisément -le dîner d’Apicius. - -Il faut arriver au siècle de Louis XIV pour que l’art de dîner retrouve -ses honneurs. Sous les Valois, malgré la science des cuisiniers -napolitains venus à la suite des reines _italiennes_, le repas est -affaire d’ostentation et de parade. Les femmes d’alors, précieuses et -renchéries, malgré la brutalité de leurs mœurs et la bassesse de leurs -goûts, les femmes outrageusement serrées dans leurs corps de jupes, -enduites de fards et de pommades, ne faisaient guère en public autre -chose que le simulacre de manger. Alphonse Daudet prétend qu’une -Parisienne moderne, «une vraie mondaine française, trouve toujours le -dîner bon quand elle a une robe seyante à sa beauté.» Il en était un peu -de même à la cour de Nérac, au Louvre des derniers Valois, où l’intrigue -politique, la galanterie et l’amour des sciences occultes, où la -curiosité d’art à son premier éveil tenait en suspens les héroïnes de -Brantôme et de Ronsard. - -Avec les fils d’Anne d’Autriche, la scène évolue et la table reconquiert -soudain un merveilleux prestige. La goinfrerie de Louis XIV a quelque -chose de majestueux, comme sa perruque et son justaucorps doré. Même -quand il joue au billard, il sent qu’il est le maître du monde. On le -voit bien plus quand, prenant place au grand couvert, il mange sur une -estrade entourée de balustres, servi par les premiers gentilshommes du -royaume; quand il promulgue les faveurs et les disgrâces dans un langage -mesuré, plein de convenance, mais pourtant animé par la chaleur du -repas, ou qu’il jette avec une grâce impérieuse des pommes, des oranges -ou même des boulettes de mie aux dames qui ripostent par le même jeu. - -Tout est noble, décent, réglé, superbe comme lui-même. Le monde entier, -le modèle à sa ressemblance. - -L’appétit du monarque ne concourt pas médiocrement à l’éclat de la -Couronne. Louis XIV enseigne à Mansard comment on architecture une -fenêtre, à Coypel comment on peint un tableau, à Bossuet comment on -débite un sermon, à Racine comment on compose une tragédie. Et c’est de -lui que La Quintinie apprend à sucrer les pêches de Montreuil, à -bonifier les poires et les pommes du verger royal. - - «Le Roi, feu Monsieur, Monseigneur le Dauphin et M. le duc de Berri - étaient grands mangeurs, écrit la princesse Palatine; j’ai vu le roi - manger quatre pleines assiettes de soupes diverses, un faisan entier, - une perdrix, une grande assiette de salade, deux grandes tranches de - jambon, du mouton au jus et à l’ail, une assiette de pâtisserie, et - puis encore du fruit et des œufs durs. Le Roi et feu Monsieur aimaient - beaucoup les œufs durs.» - -Louis XIV, dans les divertissements de Molière, dans les tableaux de -Lebrun et les hauts-reliefs de la porte Saint-Martin, c’est Apollon, -c’est Hercule, c’est Neptune; dans la mécanique de ses repas, c’est un -goinfre qui s’empiffre d’œufs durs et demande à Fagon, à Vallot, à la -Faculté entière de combattre la bile noire et les humeurs peccantes, -résultat de cette alimentation gigantesque. Il aime les belles -mangeuses, non pas celles qui grignotent délicatement, celles au -contraire, dit Saint-Simon, qui mangent à crever. - -Ces crevailles sont un rite de la Monarchie absolue. Quand il voyage, -Louis XIV emporte dans son carrosse un en-cas plantureux dont il gave -les duchesses. Mme de Chaulnes en retira quelques désagréments sur -lesquels Saint-Simon, avec un beau sans-gêne de grand seigneur, étranger -à notre hypocrisie verbale, a fourni les détails les plus -circonstanciés. - -Le poulet rôti que l’on servait au roi dans sa chambre à coucher, en -prévision d’une fringale nocturne, lui servit à faire à Molière une -politesse dont la mémoire décore tous les esprits peu coutumiers des -lectures historiques. - -La famille, les favoris de Louis XIV suivaient un si glorieux exemple. -Ce n’étaient que mangeailles, festins et médianoches. Mme de Montespan -buvait du rosolio à plein verre. Les princesses, de liqueurs fortes et -de vins généreux s’enivraient, puis envoyaient chercher au corps de -garde les pipes des suisses et fumaient là-dedans du tabac de -lansquenet. La tradition continue avec Philippe d’Orléans, dont l’amour -paternel se manifeste en gorgeant de vins et de spiritueux la duchesse -de Berri. - ---Philippe d’Orléans, dont Mme de Parabère, «ce petit corbeau noir», -ainsi que dit Madame, achève la conquête en portant le vin comme un fort -de la halle ou comme un buveur de profession. - - * * * * * - -Pour secouer le morne ennui de l’Escurial, Marie-Louise d’Orléans, fille -de Mme Henriette, femme de Charles II, mangeait souvent et beaucoup, -«avec--dit Paul de Saint-Victor--le plaisir animal qu’apportent à leurs -repas les créatures solitaires. Aussi prenait-elle un embonpoint turc, -l’embonpoint d’une sultane enfermée dans les salles basses d’un harem.» - - La reine d’Espagne, écrit M. de Villars, est engraissée au point que, - pour peu qu’elle augmente, son visage sera rond. Sa gorge, au pied de - la lettre, est déjà trop grosse, quoiqu’elle soit une des plus belles - que j’aie jamais vues. Elle dort à l’ordinaire dix à douze heures; - elle mange quatre fois le jour de la viande; il est vrai que son - déjeuner et sa collation sont ses meilleurs repas. Il y a toujours à - sa collation un chapon bouilli sur un potage et un chapon rôti. - -Vers la fin de la monarchie, les plus jeunes filles elles-mêmes ne -rêvaient que soupers. Les filles de France avaient dans leurs armoires -des jambons, des daubes, des mortadelles, du vin d’Espagne; elles -s’enfermaient souvent à toutes heures pour manger. Trente-cinq ans après -la mort de Louis XIV, elles veulent avoir leur petit souper dans leur -cabinet comme le Roi Bien-Aimé, elles s’y crèvent de viande et de vin, -toujours comme le roi, et se plaignent comme lui de continuelles -indigestions. Plus tard, elles empruntent de l’argent pour se procurer -des friandises. - -C’est l’époque chère entre toutes _au moderne bourgeois_ du style -pompadour, des petits vers, des allures chantournées, des tableaux de -Fragonard, des chansons libidineuses et des rimes insuffisantes, où les -belles dames poudrent leurs cheveux, allument d’un soupçon de rouge -leurs yeux tour à tour effrontés et mourants, portent à leurs oreilles -les plus belles pierres, sur leurs paniers les plus riches étoffes et -négligent avec une aristocratique désinvolture l’usage des ablutions, -époque galante des pots à fards, des billets doux et des toilettes en -dentelles, mais à qui les salles de bains font absolument défaut. - -La cuisine participe au bel air qu’ont pris les choses. Elle invente -pour ses préparations les plus ordinaires, des noms savoureux et légers. -Quels jolis substantifs et combien substantiels; profiteroles, -croque-en-bouche, fricandeau, gibelotte, le riz à la financière et le -potage velouté! Elle fricasse des galantines; elle jette des vol-au-vent -par-dessus les moulins. Louis XV fait bouillir son café; le vainqueur de -Mahon bat une sauce à l’huile, tandis que les gardes françaises -chantent vêpres aux Porcherons et que la noblesse--seigneurs et -gentilshommes--s’encanaille à Ramponneau. - -La gloutonnerie des Bourbons éclate chez Louis XVI d’une manière -intempestive. A aucune époque de sa vie, le pauvre homme ne sut modérer -ni contenir son appétit. Quand il se fut déterminé à quitter les -Tuileries, le 21 août 1791, il se détourna de son itinéraire pour -déjeuner à Étoges, chez son premier valet de chambre, M. de Chamilly. -Quand il entra dans Varennes, les troupes du marquis de Bouillé étaient -parties depuis deux heures, mais le postillon Drouet et ses hommes -l’attendaient. A peine de retour aux Tuileries, il soupa, dévora un -poulet comme si rien d’extraordinaire ne s’était passé. Il mangeait -salement; et Buffon, ayant assisté une fois à son grand couvert, laissa -échapper un mot qui n’est pas du style soutenu, devant les sangliers -domestiques élevés par le Jardin des plantes: «Eh bien, le roi, dit-il, -mange comme ces animaux-là!» - -Mais revenons au temps du Roi Soleil. - -La bourgeoisie opulente et vaniteuse prenait modèle sur la Cour; tant -pour la délicatesse que pour l’abondance, la table des gens de robe ou -de négoce égalait celle du roi et des seigneurs. - -Molière nous a donné le menu d’un repas de gala offert par un marchand -drapier, infatué de noblesse à une femme de qualité. - - «Je demeure d’accord avec lui que le repas n’est pas digne de vous. - - «Comme c’est moi qui l’ai ordonné, et que je n’ai pas, sur cette - matière, les clartés de nos amis, vous n’avez pas ici un repas fort - savant. Vous y trouverez des incongruités de bonne chère et des - barbarismes de bon goût. Si Damis s’en était mêlé, tout serait dans - les règles; il y aurait partout de l’élégance et de l’érudition. Il ne - manquerait pas de tout exagérer, lui-même, toutes les pièces du repas - qu’il vous donnerait et de vous faire tomber d’accord de sa haute - capacité dans la science des bons morceaux, de vous parler d’un pain - de rive, à biseau doré, relevé de croûte partout, croquant tendrement - sous la dent; d’un vin à sève veloutée, armé d’un vert qui n’est point - trop commandant: d’un carré de mouton gourmandé de persil; d’une longe - de veau de rivière, longue comme cela, blanche, délicate, et qui, sous - les dents, est une vraie pâte d’amande; de perdrix relevées d’un fumet - surprenant; et pour son opéra, d’une soupe à bouillon perlé, soutenue - d’un jeune gros dindon cantonné de pigeonneaux et couronné d’oignons - blancs, marié avec la chicorée.» - -On trouverait aujourd’hui le régal assez épais. Encore que les jeunes -femmes d’à-présent aient renoncé à l’usage ridicule de ne pas avouer -leur appétit, elles auraient, sans doute, quelque peine à débrider dans -la même séance une longe de veau, un carré de mouton, et, comme dessert, -un potage avec le gros dindon obligatoire, flanqué de ses légumes et -fort semblable, peut-on dire, au «bouilli» contemporain. - -Mais en 1677 on n’y regardait pas de si près. Le classique festin -ridicule de Nicolas Boileau présente le spectacle d’une bombance -formidable, d’un entassement de nourritures à nous lever le cœur. - - «J’allais enfin sortir quand le rôt a paru. Sur un lièvre flanqué de - six poulets étiques s’élevaient trois lapins, animaux domestiques qui, - dès leur tendre enfance, élevés dans Paris, sentaient encore le chou - dont ils furent nourris. Autour de cet amas de viandes entassées, - régnait un long cordon d’alouettes pressées et sur les bords du plat, - six pigeons étalés présentaient un renfort de squelettes brûlés.» - -Madame trouvait encore ces mangeailles trop délicates. - - «Je ne mange, écrit-elle à l’électrice de Hanovre, en fait de soupe, - que la soupe au lait, à la bière ou au vin; je ne peux souffrir le - bouillon et je suis tout de suite malade s’il s’en trouve un peu dans - les plats que je mange... nul ne s’étonne que je me régale de boudins; - j’ai aussi mis à la mode ici les jambons crus. Tout le monde en mange - maintenant. On ne mangeait guère de gibier avant ma venue. Or, j’ai - mis tout cela à la mode, ainsi que les harengs saurs. J’ai appris au - feu roi à les manger. Il les trouvait fort à son goût. J’ai tellement - affriandé ma gueule allemande (veuillez faire état que c’est la - princesse qui parle) à des plats allemands que je ne peux manger un - seul ragoût français. Je ne mange que du bœuf, du veau rôti, - quelquefois du mouton, des perdrix ou bien des poules rôties et jamais - du faisan.» - -La Terreur impose un entr’acte sanglant aux fêtes gastronomiques. Finis -les soupers des buveurs et les soupers des philosophes. Chez le duc de -Choiseul, Cazotte, l’illuminé, a prédit l’exécution des souverains et la -charrette homicide à Mme de Grammont. Il a même annoncé la conversion de -La Harpe. Après cela pourra venir la fin du monde. C’est un monde, en -effet, qui meurt et se décompose pour renaître, demain, plus jeune et -plus fort, comme le vieil Eson après avoir bouilli dans le chaudron -magique. - -Après le Neuf Thermidor, la fête recommence; à la débauche de sang, la -débauche de ripaille ne tarde pas à succéder. Le Directoire inaugure -cette marche triomphale de la gourmandise à laquelle tour à tour -l’Empire et la Restauration vont apporter de nouveaux contingents. - -C’est le beau temps de Carême, de Véfour, des frères Provençaux, du -rocher de Cancale; c’est l’ère du Palais-Royal qui commence, avec ses -galeries de bois, ses traiteurs, ses bijoutiers, maisons de jeux et le -reste! - -Chevet montre à son étalage des turbots dignes d’être offerts à -Domitien, prince des amphitryons, qui demandait au Sénat la sauce la -plus convenable à ce monstre marin. Corcelet, négociant, offre aux -gourmets, dans sa boutique de la galerie Montpensier, le café de -provenance directe échappé au blocus continental et, dans leurs fioles -bizarres, les liqueurs authentiques de la veuve Amphoux. Son enseigne[1] -représente un élégant de l’an IX en possession de trancher une poularde -avec la dignité, l’onction et l’élégance que comporte un pareil geste. - - [1] Que l’on peut voir encore avenue de l’Opéra, dans la boutique - modernisée de ce «négociant» d’autrefois. - -Napoléon, qui sait l’art de gouverner les hommes, regarde la table comme -un instrument de règne. Talleyrand, ministre des Relations étrangères, -Cambacérès, archichancelier de l’Empire, le cardinal Fesch, oncle de -l’Empereur, traitent selon ses ordres, avec une magnificence inouïe, -diplomates, prélats, étrangers de marque, les rois conquis au jeune -Bonaparte, les rois pour qui Talma et Mlle Georges ont l’honneur de -jouer _Phèdre_, _Cinna_, _Mithridate_ et _Britannicus_, premier que le -décret de Moscou ait établi le sort des comédiens. - -Cambacérès est un amphitryon somptueux, une fourchette magnanime. Il -mange comme un prince, ou comme un financier. Ni Fouquet, ni la -Popelinière, ni Grimod, le divin Grimod de la Reynière, qui, pareil aux -princes charmants des contes de fées, avait les doigts palmés comme une -patte d’oie, aucun de ces grands hommes n’a mieux connu que -l’archichancelier cet art glorieux de donner à dîner. Un dessin de Carle -Vernet le montre en habit de cour, promenant sa bedaine, dans une -brouette, sous les rameaux--déjà précaires--du Palais-Royal. - -C’est au cardinal Fesch qu’il convient d’attribuer l’anecdote magnifique -des deux turbots. - -Son maître d’hôtel joignait aux plus beaux talents une imagination rare, -de l’audace et de la clairvoyance. Le prince de l’Église reçut un jour -deux turbots. Ceux du despote romain n’étaient auprès qu’une limande. -Ils arrivaient fort à point. Ce jour-là même plusieurs cardinaux, -évêques, archevêques et autres dignitaires ecclésiastiques dînaient chez -le primat. Le cardinal aurait souhaité que l’un et l’autre poisson -fissent les honneurs de sa table. Quelle gloire pour le clergé! Mais -aussi quelle faute de goût que ce faste, bon à peine chez quelque -parvenu. Ce rendez-vous de turbot eût semblé ridicule aux gens élevés -dans les délicatesses de l’ancien régime. Le cardinal exposa la -difficulté à son maître d’hôtel. - ---«Que votre Éminence se rassure! Ils paraîtront tous deux sans avoir -pour cela besoin de commettre une incongruité dans l’ordonnance du -repas.» On sert le dîner. Un premier turbot relève le potage. -Exclamation! Enthousiasme! Recueillement. Le maître d’hôtel s’avance -alors. Deux officiers de bouche s’emparent du monstre et l’emportent -afin de le servir. Mais l’un d’eux, par un faux pas adroitement calculé, -perd l’équilibre et le turbot, avec lui, roule sur le parquet, à la -grande stupeur des convives. - ---«Qu’on en apporte un autre», ordonne le maître d’hôtel sans se -déconcerter. - -Faut-il parler ici de l’influence qu’a toujours eue la table sur la -production de l’intelligence, dire l’aide que lui donne le café, -énumérer les tasses de Voltaire et les soupières de Balzac? Ironie de la -gloire! Le père du Romantisme, le leader de la Constituante comme on dit -à présent, ont uni leur gloire dans une œuvre de bouche qui survit à -l’éclat des _Martyrs_, au retentissement du _Discours sur la -Banqueroute_. Bien des gens qui ne liront jamais _Atala_ ou les -_Mémoires d’Outre-tombe_, qui ne connaissent même pas de vue un quidam -ayant fréquenté les _Lettres à Sophie_, ont pour le chateaubriand à la -Mirabeau une tendresse légitime. Et Rossini, Giacomo Rossini, dont la -musique de fête induisit en rêve Massimila Doni et la Marianne de -Gambarra, nos aïeules, Rossini dont le _Moïse_, qui nous fait rire, -faisait pleurer les héroïnes de la _Comédie humaine_, que serait-il -aujourd’hui, sinon le parrain oublié de la salle des ventes, s’il -n’avait eu l’idée, ô combien géniale! d’associer la truffe et le foie -gras au bifteck de chaque jour? - -La cuisine a ses écrivains comme la musique ou l’assyriologie. Il -convient de citer avec honneur ces poètes, ces romanciers, ces -essayistes qui donnèrent une voix à la muse des fourneaux. Et je ne -parle pas ici de la pléiade bachique, des membres du _Caveau_, des -faiseurs d’opéra-comique dont la verve s’est épandue en des couplets -sans nombre, en des brindisis dont M. Julien Tiersot, lui-même, ne sait -plus le compte. - -Non, les auteurs culinaires sont les consciencieux, qui, avec des mots -appropriés, ont décrit la poule au riz, la suprême de volaille, -l’omelette à la purée de caille ou le turban d’ananas. Malgré la recette -qu’il donne de la salade japonaise, fort méchante d’ailleurs, Alexandre -Dumas, le deuxième du nom, ne saurait être compté parmi les écrivains -gastronomes; car il s’est--le volage--occupé d’autres choses. - -On en peut dire autant du bruitiste Marinetti. Son _Roi Bombance_, -proche parent du _Roi Ubu_, symbolise un état de la civilisation, mène -les chœurs d’une satire politique, parmi le tourbillon des fautes de -français. Redoutable goinfre, il absorbe dans les abîmes de son gésier, -toute la richesse, tous les fruits du labeur humain: c’est «le Capital» -dévorateur. - -Parmi les écrivains purement adonnés à la belle gastronomie, inscrivons -Berchoux qui rima la _Gastronomie_ sur les patrons de l’abbé Delille, -Brillat-Savarin, à qui l’on doit cette heureuse version de la maxime de -Vauvenargues: «Les grandes pensées viennent de l’estomac», Horace -Raisson de qui le _Code Gourmand_ exhale, peut-on dire, un fumet exquis -de salle à manger sous la Restauration, au beau temps du rocher de -Cancale et des Frères provençaux, enfin Charles Monselet qui dota les -lettres françaises du _Cochon_[2], incomparable sonnet pour lequel je -donnerais tout Pétrarque et pas mal d’autres rimes par surcroît. - - [2] LE COCHON - - Car en toi tout est bon: chair, gresse, muscle, tripe. - On t’aime, galantine, on t’adore, boudin! - Ton pied--dont une sainte a consacré le type-- - Empruntant son arome au sol périgourdin, - Eût réconcilié Socrate avec Xantippe. - - Ton filet qu’embellit le cornichon badin, - Forme le déjeuner de l’humble citadin - Et tu passes avec l’oie au Frère Philippe. - - Mérites précieux et de tous reconnus, - Morceaux marqués d’avance, innombrables, charnus. - Philosophe indolent qui mange - et que l’on mange! - - Comme, dans notre orgueil nous sommes bienvenus - A vouloir, n’est-ce pas? te reprocher ta fange, - Adorable cochon, animal-roi! - CHER ANGE! - -Et ce fut aussi un écrivain digne peut-être qu’on le nommât culinaire, -ce poète d’autrefois qui, par jeu, se plut à rappeler les gargottes de -son adolescence, les tavernes peu méritoires de Toulouse où tant de -jeunes hommes, veufs à présent de tous cheveux, ingurgitaient des -pitances laconiennes et des rôtis sans volupté: le veau Allard. - -Et voici Raoul Gineste qui dépeint la tristesse des vieux chats[3], loin -des tables amiteuses qu’offraient à leur délicatesse les vieilles -demoiselles pour qui les bêtes domestiques sont un dernier amour. - - [3] LES VIEUX CHATS - - Comme ils sont tristes, les matous - De n’être plus sur les genoux - Qui leur faisaient des lits si doux! - - Qu’ils regrettent les longues veilles - Où les doigts secs des bonnes vieilles - Taquinaient leurs frêles oreilles: - - Quand, assises au coin du feu - Et rêvant au bel houzard bleu - Qui reçut leur premier aveu, - - Les tricoteuses de mitaines - Évoquaient les amours lointaines, - Le temps heureux des prétentaines, - - Alors, les mimis adorés, - Prenant des airs enamourés, - Arquaient leurs dos gras et fourrés. - - Ils avaient des façons béates - De se lustrer du bout des pattes, - En songeant aux mignonnes chattes - - Ou, comme des sphynx accroupis, - Ils ronronnaient sur les tapis, - Laissant aux rats de longs répits. - - Fi des rats malins! Les maîtresses - Leur faisaient de grasses paresses - Pleines de lait et de caresses. - - Le bon mou qu’on allait manger, - Cuisait avec un bruit léger: - Fallait-il donc se déranger? - - Mais, ô revers inévitables! - Des héritiers peu charitables - Ont proscrit les chats de leurs tables. - - Les voilà bohêmes! Souvent, - Par les nuits de neige et de vent, - Ils grelottent sous un auvent. - - Ombres étiques et funèbres - Ils profilent dans les ténèbres - Leurs dos où saillent les vertèbres - - Et, quand ils voient passer en bas, - Des bonnes vieilles à cabas, - Qui trottent menu, d’un air las - - Le bon goût des crèmes sucrées - Où trempaient les croûtes dorées, - Revient à leurs lèvres sevrées. - - Et les vieux chats, d’un air dolent, - Hanté par un cruel relent, - Font le gros dos, en miaulant. - -Le chat, animal nerveux, patricien et de goûts relevés, sent -profondément ces choses. - -L’heure du dîner, en effet, est vraiment l’heure de l’exil. Jamais les -saules de Babel ne versent une ombre plus amère qu’au moment où l’on -regrette les oignons d’Égypte. - -La cuisine est la demeure de Vesta. Elle renferme la pierre du foyer -qui, lui-même, sert de fondement et de base à la patrie. - -Omettre ici le nom de la _Cuisinière bourgeoise_, de ce _compendium_ -lumineux qui se peut, à bon droit, nommer le _Code_ et la _Somme_ -gastronomiques, serait un geste de la plus odieuse ingratitude. - -_La Cuisinière bourgeoise!_ Elle abonde en formules savoureuses, en -robustes apophtegmes, comme il convient à un écrit de bouche où le ferme -appétit du Tiers va chercher ses inspirations. - -«Le homard demande à être cuit vivant», affirme l’auteur de cet -irréprochable Manuel. - -Et vraiment l’on est ému, touché aux larmes de voir un crustacé, le -homard, d’ordinaire silencieux et même taciturne, prendre, une seule -fois, la parole pour demander le bain un peu chaud qui bonifiera sa -viande. Auprès d’un tel dévouement, combien mesquins les sacrifices -légendaires d’Œlius Tubero, de Mucius Scævola, de Régulus ou du -chevalier d’Assas? - -Le moderne scepticisme, l’indifférence en matière de religion, l’oubli -dans lequel sont les règles orthodoxes, les coutumes dévotes et les -principes en allés, portent à la cuisine du XXe siècle--affairée, -insipide, quelconque et déloyale--portent à la cuisine d’aujourd’hui, à -celle de demain un coup sournois et pernicieux. Quand il souffle à -travers les fourneaux, le vent du rationalisme tourne en graillon les -sauces et compromet le rôti. Si le divorce par consentement mutuel -émancipe jusqu’à l’union libre tant de belles pécheresses à qui les -frères Margueritte et maître Henri Coulon espèrent, avant peu, donner, -chaque soir, la permission de la nuit, on peut dire que la libre pensée -inflige aux manipulations culinaires un discrédit trop mérité. Cela, -bien entendu, sans exception de doctrine ou de culte. Celui qui n’a pas -mangé, dans une famille israélite et pieuse, la choucroute Kasher, -blonde, onctueuse, aromatique, parfumée de genièvre, rehaussée de vin -blanc et lubrifiée de graisse d’oie, ignore à quel point l’orthodoxie -est favorable aux manipulations culinaires. Et les gâteaux de sésame, le -bœuf fumé, le _pickle fleisch_ de Teumann, capables de convertir au -judaïsme le cœur et même l’esprit d’Édouard Drumont. Hélas! depuis -qu’Israël s’adonne à la chair du pourceau, une vertu s’est retirée de la -choucroute garnie. - -Et le maigre, le maigre, cet éperon du génie, le maigre qui forçait -gouvernantes de prélats et bonnes de vicaires, à jouer la difficulté, à -remplacer le perdreau par la sarcelle, par l’anchois de Collioure, le -jambon interdit, à préparer les œufs de trois cents manières -différentes, n’est-ce pas à proprement dire le maître et l’inspirateur -des suprêmes recherches? Peut-être que, sans lui, la barbue attendrait -encore la sauce mousseline, peut-être les écrevisses à la Nantua -n’auraient-elles pas atteint le degré culminant de leur perfection? Et -nous serions privés aussi des friandises conventuelles: sucres d’orge, -confitures, nonnettes et massepains. - -O splendeurs évanouies! O soleils disparus derrière l’horizon! Hélas! -affairée, insipide, quelconque et déloyale, au début du XXe siècle on -peut dire que la cuisine agonise! Elle est, tout au moins, en pleine -décadence. Les tziganes des cafés où l’on soupe, les hideuses majoliques -des tavernes, la chimie substituée à la probe coction des légumes et des -viandes, le régime hydrique, le végétarisme et, par dessus tout, la -conserve, la sordide conserve qui prête le même goût de fer-blanc aux -petits pois, aux asperges en branches, aux rognons de coq, à la sauce -aux tomates, aux crevettes épluchées, la conserve où les _beef-packers_ -de Chicago laissent traîner des doigts humains, les bouillons tout -faits, les sauces à la minute, ont déshonoré pour jamais l’art de -Carême, de Trompette et du marquis de Béchamel. La cuisine se meurt! La -cuisine est morte! - -Vous connaissez le dialogue des deux confiseurs.--Franchement, dit l’un -de ces augures, avec quoi, mon cher confrère, fabriquez-vous l’exoptable -chocolat qui porte votre nom aux confins de l’Univers?--Mais avec du -sucre, je pense, de la vanille et du cacao.--Eh bien, je peux vous le -dire, il y a longtemps que toutes ces saletés n’entrent plus chez moi! - -En attendant que l’humanité se nourrisse, comme le prédisait Berthelot, -d’une pastille quotidienne renfermant sous le moindre volume tous les -principes nécessaires à la vie, il nous faudra manger encore bien des -galantines artificielles et des poissons traités au sublimé. Le canard à -la rouennaise, que servent les restaurants de troisième ordre, ne -diffère pas sensiblement du marcassin cuisiné par Locuste, à l’usage de -Britannicus. - -Le sang de taureau empoisonnait les empereurs de Suétone; le caneton -étouffé n’est pas moins toxique et les «bouillons» offrent à la -démocratie un genre de mort si redoutable que défunt Huysmans, épouvanté -par les artifices culinaires de son temps, courut tout en pleurs dans -les bras de la religion avec l’espoir d’en obtenir de véridiques petits -pois, des bouillons sincères et des rôtis hâtés à point. Vaine -espérance! On mange, à présent, dans tous les pays habités au sommet des -Alpes et dans la salle des transatlantiques, on mange à Copenhague comme -à Francisco les mêmes sauces chimiques, les mêmes aloyaux spongieux et -délavés, on mange dans le même temple du graillon, le même filet à la -richelieu, le même turbot à la sauce aux câpres, à côté du monsieur en -train de lire le même journal et de tenir les mêmes propos. - -Les belles mangeuses que le Roi Soleil faisait monter dans son carrosse, -les goinfres vigoureux lentement disparaissent, et, comme les grands -chefs de la cuisine française, bientôt ne seront plus qu’un souvenir! - -Pendant longtemps, la province a lutté, gardé pieusement les ragoûts -indigènes, bouillabaisse au Levant, cassoulet au Ponant, et les -croustades, le confit d’oie en Bigorre, et le clafoutis en Limousin. -Mais la contrefaçon de Paris, l’abominable _instar_, ont tout dévoré; -les «chefs» imbéciles ont abâtardi la saine et pure tradition, noyé dans -leur infâme «espagnole» ce qui faisait l’orgueil des sauces autrefois. -Paris, seul, est coupable de cette déchéance. Pour l’avoir imité, la -province et l’étranger (à part cette forte Belgique où l’on dîne encore -aussi vigoureusement que sous Philippe le Bon et Charles-Quint) ont -abdiqué les recettes héréditaires, substitué des «commodes» aux -fourneaux antiques. Les Parisiens, en effet, et surtout les Parisiennes, -mangent d’abord avec les yeux, ce qui fait que l’on tend, de plus en -plus, à remplacer par le décor toute espèce d’aliments. Les fleurs sur -la nappe compensent le beurre suspect et le gibier douteux. «A Paris, -dit Alphonse Daudet, une femme estime toujours le dîner bon, pourvu que -sa robe aille mieux que celle des autres femmes.» - - * - - * * - -Qui s’informe, à présent, du menu dans les maisons qu’il fréquente? - -Les dîners, ô pudeur! ne sont plus que des rendez-vous d’affaires ou -d’amour. - -Le tabac concourt au détraquement des estomacs neurasthéniques. - -On fume, on boit tantôt d’atroces alcools, tantôt les sinistres eaux de -table qui parlent d’intoxication et de gastrites aux appétits -découragés. On déglutit des nourritures suspectes et--sans vêtir le sac -de Jérémie--il est aisé de prévoir un temps où ce carré de mouton que -Dorante proposait à Dorimène, le cordial poulet rôti et jusqu’à l’oie -aux marrons que l’on a vraiment trop rabaissée, n’offriront plus aux -regards qu’une vieillerie ancestrale, une chose d’autrefois bonne à -reléguer, avec le pain du siège, au musée Carnavalet. - - - - - ACHEVÉ D’IMPRIMER - le quinze novembre mil neuf cent dix-neuf par - BUSSIÈRE - A SAINT-AMAND (CHER) - pour le compte de - A. MESSEIN - éditeur - 19, QUAI SAINT-MICHEL, 19 - PARIS - - - - -ALBERT MESSEIN, ÉDITEUR, PARIS - -Dernières Nouveautés - -_LES MANUSCRITS DES MAITRES_ - - -PAUL VERLAINE - -SAGESSE - -_Le manuscrit autographe_ de SAGESSE que nous publions est celui que le -poète avait confié à la Société générale de la Librairie catholique, en -1880. L’ouvrage est imprimé sur papier réglé (cahier scolaire) et d’un -seul côté de la page: ainsi le lecteur a l’illusion de posséder le -manuscrit autographe original. Les corrections mêmes, qui attestent les -scrupules du poète, sont reproduites. - -_922 exemplaires numérotés à_ 20 fr. _l’exemplaire_ - - Vient de Paraître: Arthur Rimbaud. Poésies - Sous presse: Paul Verlaine. Fêtes Galantes - - -CHARLES MORICE - -LETTRES A MES AMIS SUR QUELQUES POINTS DE DURABLE ACTUALITÉ: - - I. Le Retour ou: Mes Raisons. Dédié à Louis Le Cardonnel. - Un volume in-12 broché 2 fr. »» - II. L’amour et La Mort. Dédié à Maurice Barrès. 1 volume - in-12 broché 2 fr. »» - Il est Ressuscité. Nouvelle édition augmentée d’une préface - (6e mille) 3 fr. 50 - Quincaille. Poèmes en prose. 1 vol. 3 fr. 50 - - -SOCIÉTÉ DES “TRENTE” - -Collection de jolis volumes in-8 écu, tirés à 530 exemplaires numérotés, -500 sur papier d’Arches à 5 fr., 20 sur papier du Japon à 15 fr. et 10 -sur papier de Chine à 20 fr. - -La Société des Trente publiera les 30 volumes qui composeront sa -collection en cinq ans à raison de six par an. - -Nous avons déjà publié: - -Maurice Barrès. Pour nos Églises. (_épuisé_) - -Émile Bernard. Souvenirs sur Paul Cézanne. (_épuisé_) - -Henry Martineau. L’itinéraire de Stendhal. - -André Salmon. La Jeune Peinture Française. (_épuisé_) - -Rémy de Gourmont. Le Chat de Misère. (_épuisé_) - -Lucile de Chateaubriand. Œuvres. Étude de L. THOMAS. - -Maurice Barrès. Autour des Églises de Village. - -Laurent Tailhade. Quelques Fantômes de Jadis. - -Alfred Capus. Boulevard et Coulisses. - -A. Sérieyx. Vincent d’Indy. - -Chateaubriand & ***. Journal d’un Conclave. - -Jules Destrée. Wallonie. - -Charles Morice. Quelques Maîtres Modernes. - -Marcel Boulenger. Apologie du Duel. - -Rémy de Gourmont. Trois Légendes du Moyen Age. - -André Salmon. La Jeune Sculpture Française. - - -*** END OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK PETIT BRÉVIAIRE DE LA -GOURMANDISE *** - -Updated editions will replace the previous one--the old editions will -be renamed. - -Creating the works from print editions not protected by U.S. copyright -law means that no one owns a United States copyright in these works, -so the Foundation (and you!) can copy and distribute it in the -United States without permission and without paying copyright -royalties. Special rules, set forth in the General Terms of Use part -of this license, apply to copying and distributing Project -Gutenberg-tm electronic works to protect the PROJECT GUTENBERG-tm -concept and trademark. 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Hart was the originator of the Project -Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be -freely shared with anyone. For forty years, he produced and -distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of -volunteer support. - -Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed -editions, all of which are confirmed as not protected by copyright in -the U.S. unless a copyright notice is included. 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You may copy it, give it away or re-use it under the terms -of the Project Gutenberg License included with this eBook or online -at <a href="https://www.gutenberg.org">www.gutenberg.org</a>. If you -are not located in the United States, you will have to check the laws of the -country where you are located before using this eBook. -</div> -</div> - -<p style='display:block; margin-top:1em; margin-bottom:1em; margin-left:2em; text-indent:-2em'>Title: <span lang='fr' xml:lang='fr'>Petit bréviaire de la Gourmandise</span></p> -<p style='display:block; margin-top:1em; margin-bottom:0; margin-left:2em; text-indent:-2em'>Author: Laurent Tailhade</p> -<p style='display:block; text-indent:0; margin:1em 0'>Release Date: January 8, 2022 [eBook #67129]</p> -<p style='display:block; text-indent:0; margin:1em 0'>Language: French</p> - <p style='display:block; margin-top:1em; margin-bottom:0; margin-left:2em; text-indent:-2em; text-align:left'>Produced by: Laurent Vogel and the Online Distributed Proofreading Team at https://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica))</p> -<div style='margin-top:2em; margin-bottom:4em'>*** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK <span lang='fr' xml:lang='fr'>PETIT BRÉVIAIRE DE LA GOURMANDISE</span> ***</div> -<div class="c x-ebookmaker-drop"><img class="h700" src="images/cover.jpg" alt="" /></div> -<div class="break"></div> -<p class="c large top4em">LAURENT TAILHADE</p> - -<h1>PETIT BRÉVIAIRE<br /> -<span class="xsmall">DE LA</span><br /> -<span class="large">GOURMANDISE</span></h1> - - -<p class="c gap">PARIS<br /> -<span class="large">ALBERT MESSEIN, ÉDITEUR</span><br /> -<span class="small sc">Successeur de LÉON VANIER</span><br /> -19, <span class="xsmall">QUAI SAINT-MICHEL</span>, 19</p> - -<p class="c">1919</p> - -<div class="break"></div> - -<p class="c top4em">DU MÊME AUTEUR</p> - -<p class="c">A LA MÊME LIBRAIRIE</p> - - -<ul> -<li><b>La Farce de la Marmite</b>, traduit de <span class="sc">Plaute</span>. 1 vol. in-12 -broché avec portrait de <span class="sc">E. Gabbart</span> et fleuron de <span class="sc">Rochegrosse</span> -<span class="fl"><b>3</b> fr. <b>50</b></span></li> -<li><b>Pour la Paix</b>, suivi de : <i>Lettres aux Conscrits</i>. Frontispice -de <span class="sc">Destrem</span>. 1 plaquette in-12 -<span class="fl"><b>1</b> fr. <b>50</b></span></li> -<li><b>La Noire Idole</b>, <i>Essai de Morphinomanie</i>. 1 pl. in-12 -<span class="fl"><b>1</b> fr. <b>50</b></span></li> -<li><b>La Corne et l’Épée</b>, <i>Étude sur les Courses de Taureaux</i>, 1 plaquette -in-12 -<span class="fl"><b>1</b> fr. <b>50</b></span></li> -<li><b>La Feuille à l’envers.</b> <i>Revue en un acte</i>. 1 pl. in-12 -<span class="fl"><b>2</b> fr. »»</span></li> -<li><b>Un Monde qui finit.</b> <i>La Dévotion à la Croix. Don Quichotte -de la Manche.</i> 1 vol. in-12 -<span class="fl"><b>2</b> fr. »»</span></li> -<li><b>Louanges à Sophie Cottin.</b> <i>Poème</i> dit par l’auteur à Bagnères-de-Bigorre. -In-8 -<span class="fl"><b>1</b> fr. <b>50</b></span></li> -<li><b>La Douleur.</b> <i>Le vrai mistère de la Passion.</i> 1 plaquette in-16. -Fleuron de <span class="sc">Rochegrosse</span> -<span class="fl"><b>2</b> fr. »»</span></li> -</ul> -<div class="break"></div> - -<p class="c top4em small">IL A ÉTÉ TIRÉ DE CE LIVRE</p> - -<p class="c i">10 exemplaires sur Japon impérial numérotés 1 à 10<br /> -et 20 exemplaires sur Hollande numérotés de 11 à 30</p> - -<p class="c large gap">N<sup>o</sup></p> - -<div class="chapter"></div> - -<h2 class="nobreak">PETIT BRÉVIAIRE -DE LA GOURMANDISE</h2> - - -<p>Dans <i>Le crime de Sylvestre Bonnard</i>, l’un -des premiers et le meilleur peut-être de -ses contes, ravivant la mémoire du sieur Antoine -Carême, ce Napoléon de la cuisine qui -mourut tout jeune encore (1784-33), brûlé -par la flamme du génie et le charbon des rôtissoires, -Anatole France a tiré de l’oubli un -apophtegme, digne à jamais d’habiter la mémoire -des hommes :</p> - -<blockquote> -<p>« Les Beaux-Arts — dit Carême — sont au -nombre de cinq, à savoir : la Peinture, la Poésie, -la Musique, la Sculpture et l’Architecture, -laquelle a pour branche principale la Pâtisserie. »</p> -</blockquote> - -<p>Le grand homme en veste blanche, qui légua -cette phrase rapide et magnanime aux -siècles à venir, qui, s’égalant à Mansard, à -Gabriel, à Claude Perrault, ne voyait entre la -Colonnade du Louvre, entre le Garde-Meuble -et les fruits en pyramides ou les pièces montées, -aucune distinction qui ne fût à sa gloire, -promulgue un axiome définitif et la plus solide -vérité quand, touché par la Muse des -fourneaux, il attribue à la cuisine un rang -d’élection, que dis-je ? la première place dans -le royaume des Beaux-Arts.</p> - -<p>Car il serait injuste de borner à la technique, -enchanteresse mais subsidiaire, des -Boissier ou des Rebattet, la maxime du vieux -maître. Elle comprend aussi bien que le -Petit-four, la broche, la casserole et toutes -les sortes de fourneaux.</p> - -<p>Depuis le temps de la préhistoire, cet Age -d’or où le Pithécanthrope mal évolué se nourrissait -de glands, d’herbe verte et de gibier -cru, buvait aux cressonnières l’eau féconde en -vilaines bêtes jusqu’à l’ère auguste des Cambacérès -et des Grimod, des goinfres magnanimes -dont s’honora la France, au début du -siècle dernier, l’homme n’a pas eu de but -plus constant ni de plus chère étude que le -moyen d’accroître et d’améliorer les passe-temps -de bouche qui sont à la fois le premier -besoin de la nature et le plus bel ornement -des civilisations.</p> - -<p>La table, en effet, se peut définir le lien -civil par excellence. Elle donne de l’esprit -aux niais, du caractère aux timides. Elle -oriente nos humeurs vers l’optimisme, la -courtoisie et la libéralité. L’heure de la -digestion est celle où tous les hommes se -reconnaissent pour frères, où, dans l’azur des -cigares exquis, leur entendement, de prime -abord, élucide les problèmes dont la discussion -a pour effet ordinaire de les mettre en -courroux.</p> - -<p>Le praticien, en veste blanche, qui marmitonne -les ragoûts, entérine les sauces et conquiert -sur Héphaistos la gloire des rôtis, -quand il ajoute du poivre ou modère les -épices, fomente, du même coup, belle humeur -et sociabilité.</p> - -<p><i>C’est un grand poète</i>, expert à créer des -émotions, grâce au langage péremptoire des -papilles gustatives.</p> - -<p>Il combine des saveurs, suscite des aromes. -Il dégage le potentiel des truffes, les arcanes -du gibier, comme d’autres élaborent une sonate -ou un sonnet. La cuisine pacificatrice -élève l’esprit, adoucit les mœurs. Elle fait -jaillir l’éloquence des lèvres qu’elle a touchées.</p> - -<p>Certains coulis ont la profondeur abstruse -des métaphysiques ; il est des sauces à la -crème dont la douceur émeut comme le récit -d’une bonne action.</p> - -<p>Les champignons évoquent des sites forestiers, -les huîtres des paysages maritimes, souvenir -de Courbet ou de Ruysdaël.</p> - -<p>Mêlé à la pulpe écarlate des pommes d’or, -le poivre de Cayenne suggère une vision -d’Afrique ou d’Andalousie, d’<i>oulels-naïls</i> ou -de chanteuses gaditanes, mimant <i>le jalejo</i> -dans une de ces <i>ventas</i> où l’ombre de Don -Quichotte semble revenir encore, auberges -où l’on dîne, s’il en faut croire Mérimée, d’un -potage aux piments, que suit un poulet aux -piments, avec, pour tout dessert, une salade, -à l’huile forte, de piments. Et l’ail, ce condiment -divin, effroi des estomacs valétudinaires, -méconnu par le débile Horace qui, -sans doute, enviait les « dures entrailles » des -estivadours, et se privait, à contre-cœur, de -bulbes odoriférants, l’ail avec son frère l’oignon -et sa cousine l’échalotte, ne colore-t-il -point de ses vigueurs l’allégresse permanente, -l’ironie et le lyrisme incomparables du Midi -français ? L’esprit et le cœur, l’imagination -et la sensibilité se délectent pareillement à la -mode culinaire.</p> - -<p>La cuisine inspire à ses adeptes des mots -délicieux. « On mangerait son propre père à -cette sauce-là », déclare Grimod de la Reynière, -auteur des œufs brouillés à la laitance -de carpes, en avalant une chartreuse de perdreaux.</p> - -<p>« Pour manger une dinde truffée, il convient -d’être deux, affirme l’abbé Morelet. Je -n’en use jamais autrement. Ainsi, j’en ai une -aujourd’hui. Nous serons deux, la dinde et -moi. »</p> - -<p>Et Montmaur, Montmaur le Grec, — helléniste -fameux et non moins illustre pique-assiette, — coupe -court, sous Louis XIII, à -des propos intempestifs.</p> - -<p>— De grâce ! réclame-t-il. Un peu de silence. -<i>On ne s’entend pas manger.</i></p> - -<p>Mais la cuisine, ce premier des arts, maître -de l’univers, n’a pas en tout temps relui -d’une même splendeur. Il a connu des jours -d’éclipse et de revers.</p> - -<p>Les peuples sobres, nourris d’olives et -d’eau claire, les Grecs d’Aristophane qui, -pour un banquet de fête conviaient leurs -amis à partager des figues, un morceau de -lièvre et quelques grives (Cf. <i>La Paix, les -Acharniens</i>) n’atteignirent jamais à la voracité -grandiose, à l’ampleur des Romains dans -la goinfrerie et dans la bonne chère.</p> - -<p>Au <i>Banquet</i> de Platon, il n’est aucunement -parlé de nourriture. Le jeune Alcibiade y -paraît seul en pointe de vin. Il trouble à peine -le sublime entretien des convives ; puis, ayant -posé sur le front de Socrate sa couronne de -violettes, il se mêle gravement à leurs discours.</p> - -<p>Les Hellènes d’à présent n’ont pas renié -cette frugalité de leurs pères. Les compagnons -d’Hadji Stavros ont même régime que -les soldats de Léonidas ou les convives d’Agathon.</p> - -<p>M. Georges Clémenceau nous racontait que, -lors d’un récent voyage en Grèce, il coucha -dans un bourg du Péloponnèse. Sa chambre — la -plus confortable du pays — ouvrait sur un -mail où les hommes du village eurent l’idée -importune de se donner un medianoche. Les -cris, les chants, les altercations et les rires -empêchaient le touriste de dormir. On était -en plein mois d’août. Il eut la curiosité de -descendre pour voir de près ce repas tumultueux. -Le festin se composait d’eau fraîche -et de pétoncles faisant les trois services, tenant -lieu de rôt et d’entremets. Au moyen -d’une épingle, chacun des convives retirait -le mollusque de sa coquille, comme on fait en -Bretagne pour les bigorneaux en poussant -plus de clameurs que tous les suppôts de Gargantua -et les Argiens d’Homère, autour d’un -bœuf entier posé sur un plat d’or.</p> - -<p>Maîtresse du monde, impératrice des nations, -Rome étendit son empire sur la table -et là — comme partout ailleurs — donna des -lois à l’Univers.</p> - -<p>La tempérance de la vieille féodalité romaine, -le goût des « ognons crus et du vinaigre -militaire » quand la richesse du monde se -vint condenser autour du Capitole, eurent -bientôt fait de disparaître. Les noms de Lucullus, -d’Apicius, de Sempronius, Rufus… -qui le premier fit servir sur sa table</p> - -<div class="poetry"> -<div class="verse">La cigogne au pied rouge et le turbot marin,</div> -</div> - -<p class="noindent">brillent comme des Dieux parmi les classiques -de la bouche. On n’a retenu du premier -que la déclaration magnanime :</p> - -<div class="poetry"> -<div class="verse">« Lucullus dîne chez Lucullus »</div> -</div> - -<p class="noindent">encore qu’il -se soit avéré comme un administrateur insigne -et l’un des plus fameux lieutenants de -Pompée. Le second reluit davantage, grâce -aux faiseurs d’anas. Le public n’a pas oublié -qu’après avoir dissipé en bombances gigantesques -à peu près une centaine de millions, -il préféra mourir que vivre dans la détresse, -n’ayant plus que deux millions quatre cent -mille francs pour alimenter sa boulimie. Il se -tua plutôt que de renoncer aux turbots -monstrueux, aux sangliers de Venafre ainsi -qu’aux vins de Falerne cachetés dans l’amphore, -Manlius étant consul.</p> - -<p>Aulus Vitellius revêtit de la pourpre impériale -son insatiable gourmandise.</p> - -<p>Louis XVIII, qui, sans préjudice des -autres mets, absorbait, chaque matin, dix-huit -côtelettes de mouton, semble, auprès du -neuvième César, un mangeur de la petite espèce.</p> - -<p>Vitellius, en effet, connut l’orgueil d’avoir -inauguré ce plat gigantesque, ce plat qu’il -nommait, à cause de ses proportions insolites, -<i>bouclier de Minerve Poliade</i>. On y mêlait -des foies de scares, des cervelles de faisans -et de paons, des langues de phénicoptères, -des laitances de murènes que des navarques -allaient chercher sur leurs trirèmes, -depuis le pays des Parthes jusqu’au détroit -espagnol.</p> - -<p>Il faisait régulièrement trois repas et quelquefois -quatre, mais dont aucun ne pouvait -passer pour léger. Il se faisait quotidiennement -inviter chez plusieurs personnes : chacun -de ces festins ne coûtait pas moins de -quatre cent mille sesterces, cent mille francs -de monnaie française. Le plus somptueux -entre les dîners du règne fut le repas que lui -servit son frère, quand il revint de Germanie. -On y posa sur table deux mille poissons et -sept mille oiseaux de choix.</p> - -<p>Ce robuste mangeur était d’aspect hideux, -ayant le ventre gros, la face bourgeonnée, -tel un ivrogne de la plus basse espèce.</p> - -<p>Pétrone ou l’auteur, quel qu’il soit, du -<i>Satyricon</i>, nous a transmis quelques-uns de -ces menus prodigieux dont le grotesque Trimalchio, -armateur enrichi et semblable par -quelques points aux yankees milliardaires -qui font dîner avec eux des porcs ou des chevaux, -régalait, au <small>II</small><sup>e</sup> siècle de notre ère, ses -parasites et ses affranchis. On y mangeait -des œufs en pâte ferme contenant des becquefigues, -des sangliers rôtis dont les flancs -recélaient des étourneaux vivants, des gâteaux -d’où giclait une eau safranée aspergeant -la face des convives, des cochons que -le maître-queux s’accusait de n’avoir pas -vidés et qui, sous le couteau de l’écuyer tranchant, -laissaient échapper des monceaux de -crépinettes, de boudins, le tout au milieu des -divertissements les plus ridicules, des acrobates, -des danseurs de corde et des propos -goujats.</p> - -<p>On est loin des Romains de tragédie et des -pompiers de David, avec leurs casques, leurs -sentences, leurs tirades qui si lourdement ont -pesé sur nos années de collège, de ces Romains -qui, d’après le mot de Vacquerie, « ne -boivent que du poison et ne mangent que -leurs enfants ».</p> - -<p>Le riche Nasidienus, qui connut la gloire -d’héberger Mécène avec Horace et Fundanius -le poète comique, se chamarrait déjà -d’assez bons ridicules ayant le mauvais goût -de préconiser la chère qu’il servait, de présenter -à ses convives un sanglier frais, mis à -mort par le vent d’autan propre à mûrir la -venaison et d’admettre à sa table des parasites -sans vergogne, tel ce Nomentanus qui, -pour talent comique, se vantait d’absorber, -en une bouchée, les plus énormes croustades -ou ce Vibidius Balatro, fier de trinquer -« ruineusement », qui, sans cesse, réclamait -de plus grands verres et, comme le Scapin -de Regnard, demandait</p> - -<div class="poetry"> -<div class="verse i5">… que la cave épuisée</div> -<div class="verse">Lui fournît à pleins brocs une liqueur aisée.</div> -</div> - -<p>Si Vitellius fut un goinfre d’une surhumaine -capacité, le jeune Héliogabale — maître -du monde, à quinze ans, mais dont -l’extravagance n’avait pas les goûts artistes -du fils divin d’Ænobarbus — réalisa, sur le -trône des Césars, les mascarades gastronomiques, -imaginées par l’auteur du <i>Satyricon</i>.</p> - -<p>A l’imitation d’Apicius, il mangeait souvent -des talons de chameaux, ce qui nous -paraîtrait un mince régal, des crêtes de coqs -arrachées à des coqs vivants, des langues de -paons et de rossignols, parce que, disait-il, -ce mets préserve de la peste.</p> - -<p>Il faisait servir aux officiers du palais, en -d’énormes plats, des entrailles de rougets, -des cervelles de phénicoptères, des têtes de -perdrix, de faisans et de paons. Il jetait des -raisins d’Apamée dans les mangeoires des -chevaux. Les lions étaient nourris avec des -faisans et des perroquets. Il faisait servir à -ses parasites des aliments figurés en cire ou -en bois, souvent en ivoire ou en terre cuite, -quelquefois même en marbre ou en pierre ; -c’est sous cette forme qu’on leur présentait -toute la variété des plats dont il mangeait -lui-même ; les invités se lavaient les mains, -étant tenus de boire autant que s’ils avaient -mangé.</p> - -<p>Héliogabale, comme les esthètes de Mirbeau, -avait le goût superbe de forcer la nature, -de servir des purées en branches et de -ne prendre que des nourritures déguisées avec -art. Ce frêle jeune homme aux traits fanés à -l’aspect maladif, avec sa barbe frisottante et -ses yeux de poisson mort ne fit jamais un -repas qui lui coûtât moins de vingt-cinq -mille francs. Il ne mangeait pas de marée au -bord de la mer, ains la faisait servir dans les -endroits les plus éloignés. Près de la Méditerranée, -il nourrissait les paysans avec la laitance -des brochets et des lamproies. Il combinait -des festins en couleurs, bleus, verts ou -jaunes, ainsi qu’ont de nouveau, pendant les -belles années du Symbolisme, tenté de le faire -quelques snobs pleins d’imagination. Un jour -la table était émeraude, le lendemain nuancée -de pourpre violette ou de transparent -azur, tantôt rose pâle et tantôt vert bouteille. -Il faisait servir des pois avec des parcelles -d’or, des lentilles avec des pierres de foudre, -des fèves avec de l’ambre jaune, du riz avec -des perles, truffes et marée étaient saupoudrées, -tour à tour, de perles et de poivre.</p> - -<p>Dans son poème de <i>Melænis</i>, Louis -Bouilhet, bon latiniste, lecteur fervent de -Plaute, que documentait le grand Flaubert -et qui devait à la tendresse du maître une -large et noble culture, une plastique verbale -digne de cette Rome qu’ils aimaient, a consacré -des vers pleins de richesse et de sonorité -à la gloire du cuisinier latin (<i>Melænis</i>, -chant II, vers 13 et suiv., pp. 164 et suiv., -édit. Lemerre).</p> - -<p>Ceci n’est aucunement exagéré. Ne criez -pas à l’absurdité, à la déraison, à la poésie. -Aucune grandeur humaine, si magnifique et -superbe qu’on l’imagine, aucune grandeur -n’est en possession d’affaiblir le los du cuisinier.</p> - -<p>Celui qui s’escrime de la broche, qui met -les casseroles en batterie, et conduit à la victoire -l’ost ingénu des marmitons, participe -aux honneurs des soldats triomphants. On -lui décerne le même nom, le même titre -qu’aux généraux d’armée. Et seul, unique et -majestueux entre les pacifiques, l’empereur -de la cuisine porte le nom de « chef » comme -les Scipiades, comme Annibal, comme Jules -César.</p> - -<p>Le Moyen âge marque une halte dans l’évolution -de la gastronomie. En dépit des -louanges que donnèrent aux bombances féodales -M. Karl Huysmans et quelques autres -dyspeptiques de notoriété plus mince, tout -porte à supposer que les viandes et leurs condiments -laissaient fort à désirer dans ce -temps de barbarie et de mysticisme à outrance.</p> - -<p>Les dames à long corset, les beaux chevaliers -pareils aux figures des jeux de cartes, -les poursuivants d’armes, les convives de la -Table Ronde et les écuyers d’Arthur ou compagnons -de Roland, tenaient pour mets des -Dieux la cigogne, le paon, oiseaux coriaces -et de plate saveur. Ils attestaient le héron et -le faisaient rôtir ; ils engageaient leur foi sur -cette viande immangeable sans doute par -idéalisme et pour que leurs serments ne parussent -pas fomentés par les délices de la -cuisine, par « l’humeur communicative des -banquets ».</p> - -<p>Les bourgeoises ripailles, « compulsoires à -beuverie », ainsi que les nomme Rabelais, -manquaient un peu de raffinement ; le choix -des nourritures, les propos des convives, -exhalaient un fumet de nos tripières et de -grosse gaîté. Ce n’étaient que gras-double, -andouilles, jambonneaux et fumures. La -verve n’y faillissait point ni l’appétit. « Je -me porte appelant de soif comme d’abus. -Page, relève mon appel ! — dit un des -compagnons de Grandgousier. Remède -contre la soif ? Il est contraire à celui qui -est contre morsure de chien : Courez toujours -après le chien, jamais ne vous mordra ; -buvez toujours avant la soif, jamais -soif vous poindra. »</p> - -<p>Les <i>Repues franches</i> attribuées à Villon ne -témoignent pas non plus d’une extrême délicatesse. -Le maigre écolier de la rue de -Fouarre, qui, pour peindre la famine, a -trouvé des images si nettes et si cruelles, -nommant l’hiver « saison où les loups vivent -de vent », apitoyé sur les vagabonds qui -« pain ne voient qu’aux fenêtres », connaissait -trop la nécessité, les appels du ventre -creux pour manifester de bien grandes exigences -à propos des mets que la Providence, -ou, pour mieux dire, quelque tour de Panurge, -en manière de larcin furtivement fait, -lui mettait sous la dent. Les clercs, les écoliers, -les hommes d’armes qui fréquentaient -dans les tavernes méritoires de la cité ne -raffinaient guère sur la composition de leur -menu : chez la grosse Margot ils trouvaient -pain, fromage, vin et fruits. Ce n’était pas là -précisément le dîner d’Apicius.</p> - -<p>Il faut arriver au siècle de Louis XIV pour -que l’art de dîner retrouve ses honneurs. -Sous les Valois, malgré la science des cuisiniers -napolitains venus à la suite des reines -<i>italiennes</i>, le repas est affaire d’ostentation et -de parade. Les femmes d’alors, précieuses et -renchéries, malgré la brutalité de leurs -mœurs et la bassesse de leurs goûts, les -femmes outrageusement serrées dans leurs -corps de jupes, enduites de fards et de pommades, -ne faisaient guère en public autre -chose que le simulacre de manger. Alphonse -Daudet prétend qu’une Parisienne moderne, -« une vraie mondaine française, trouve toujours -le dîner bon quand elle a une robe -seyante à sa beauté. » Il en était un peu de -même à la cour de Nérac, au Louvre des derniers -Valois, où l’intrigue politique, la galanterie -et l’amour des sciences occultes, où la -curiosité d’art à son premier éveil tenait en -suspens les héroïnes de Brantôme et de Ronsard.</p> - -<p>Avec les fils d’Anne d’Autriche, la scène -évolue et la table reconquiert soudain un -merveilleux prestige. La goinfrerie de -Louis XIV a quelque chose de majestueux, -comme sa perruque et son justaucorps doré. -Même quand il joue au billard, il sent qu’il -est le maître du monde. On le voit bien plus -quand, prenant place au grand couvert, il -mange sur une estrade entourée de balustres, -servi par les premiers gentilshommes du -royaume ; quand il promulgue les faveurs et -les disgrâces dans un langage mesuré, plein -de convenance, mais pourtant animé par la -chaleur du repas, ou qu’il jette avec une grâce -impérieuse des pommes, des oranges ou -même des boulettes de mie aux dames qui -ripostent par le même jeu.</p> - -<p>Tout est noble, décent, réglé, superbe -comme lui-même. Le monde entier, le modèle -à sa ressemblance.</p> - -<p>L’appétit du monarque ne concourt pas -médiocrement à l’éclat de la Couronne. -Louis XIV enseigne à Mansard comment on -architecture une fenêtre, à Coypel comment -on peint un tableau, à Bossuet comment on -débite un sermon, à Racine comment on -compose une tragédie. Et c’est de lui que -La Quintinie apprend à sucrer les pêches de -Montreuil, à bonifier les poires et les pommes -du verger royal.</p> - -<blockquote> -<p>« Le Roi, feu Monsieur, Monseigneur le Dauphin -et M. le duc de Berri étaient grands mangeurs, -écrit la princesse Palatine ; j’ai vu le roi -manger quatre pleines assiettes de soupes diverses, -un faisan entier, une perdrix, une grande -assiette de salade, deux grandes tranches de -jambon, du mouton au jus et à l’ail, une assiette -de pâtisserie, et puis encore du fruit et -des œufs durs. Le Roi et feu Monsieur aimaient -beaucoup les œufs durs. »</p> -</blockquote> - -<p>Louis XIV, dans les divertissements de -Molière, dans les tableaux de Lebrun et les -hauts-reliefs de la porte Saint-Martin, c’est -Apollon, c’est Hercule, c’est Neptune ; dans -la mécanique de ses repas, c’est un goinfre -qui s’empiffre d’œufs durs et demande à Fagon, -à Vallot, à la Faculté entière de combattre -la bile noire et les humeurs peccantes, -résultat de cette alimentation gigantesque. -Il aime les belles mangeuses, non pas celles -qui grignotent délicatement, celles au contraire, -dit Saint-Simon, qui mangent à crever.</p> - -<p>Ces crevailles sont un rite de la Monarchie -absolue. Quand il voyage, Louis XIV emporte -dans son carrosse un en-cas plantureux -dont il gave les duchesses. M<sup>me</sup> de Chaulnes -en retira quelques désagréments sur lesquels -Saint-Simon, avec un beau sans-gêne de -grand seigneur, étranger à notre hypocrisie -verbale, a fourni les détails les plus circonstanciés.</p> - -<p>Le poulet rôti que l’on servait au roi dans -sa chambre à coucher, en prévision d’une -fringale nocturne, lui servit à faire à Molière -une politesse dont la mémoire décore tous -les esprits peu coutumiers des lectures historiques.</p> - -<p>La famille, les favoris de Louis XIV suivaient -un si glorieux exemple. Ce n’étaient -que mangeailles, festins et médianoches. -M<sup>me</sup> de Montespan buvait du rosolio à plein -verre. Les princesses, de liqueurs fortes et de -vins généreux s’enivraient, puis envoyaient -chercher au corps de garde les pipes des -suisses et fumaient là-dedans du tabac de -lansquenet. La tradition continue avec Philippe -d’Orléans, dont l’amour paternel se -manifeste en gorgeant de vins et de spiritueux -la duchesse de Berri.</p> - -<p>— Philippe d’Orléans, dont M<sup>me</sup> de Parabère, -« ce petit corbeau noir », ainsi que dit -Madame, achève la conquête en portant le -vin comme un fort de la halle ou comme un -buveur de profession.</p> - -<hr /> - - -<p>Pour secouer le morne ennui de l’Escurial, -Marie-Louise d’Orléans, fille de M<sup>me</sup> Henriette, -femme de Charles II, mangeait souvent -et beaucoup, « avec — dit Paul de Saint-Victor — le -plaisir animal qu’apportent à -leurs repas les créatures solitaires. Aussi -prenait-elle un embonpoint turc, l’embonpoint -d’une sultane enfermée dans les -salles basses d’un harem. »</p> - -<blockquote> -<p>La reine d’Espagne, écrit M. de Villars, est engraissée -au point que, pour peu qu’elle augmente, -son visage sera rond. Sa gorge, au pied -de la lettre, est déjà trop grosse, quoiqu’elle soit -une des plus belles que j’aie jamais vues. Elle -dort à l’ordinaire dix à douze heures ; elle mange -quatre fois le jour de la viande ; il est vrai que -son déjeuner et sa collation sont ses meilleurs -repas. Il y a toujours à sa collation un chapon -bouilli sur un potage et un chapon rôti.</p> -</blockquote> - -<p>Vers la fin de la monarchie, les plus jeunes -filles elles-mêmes ne rêvaient que soupers. -Les filles de France avaient dans leurs armoires -des jambons, des daubes, des mortadelles, -du vin d’Espagne ; elles s’enfermaient -souvent à toutes heures pour manger. Trente-cinq -ans après la mort de Louis XIV, elles -veulent avoir leur petit souper dans leur -cabinet comme le Roi Bien-Aimé, elles s’y -crèvent de viande et de vin, toujours comme -le roi, et se plaignent comme lui de continuelles -indigestions. Plus tard, elles empruntent -de l’argent pour se procurer des -friandises.</p> - -<p>C’est l’époque chère entre toutes <i>au moderne -bourgeois</i> du style pompadour, des petits -vers, des allures chantournées, des tableaux -de Fragonard, des chansons libidineuses -et des rimes insuffisantes, où les belles -dames poudrent leurs cheveux, allument -d’un soupçon de rouge leurs yeux tour à tour -effrontés et mourants, portent à leurs oreilles -les plus belles pierres, sur leurs paniers les -plus riches étoffes et négligent avec une aristocratique -désinvolture l’usage des ablutions, -époque galante des pots à fards, des billets -doux et des toilettes en dentelles, mais à qui -les salles de bains font absolument défaut.</p> - -<p>La cuisine participe au bel air qu’ont pris -les choses. Elle invente pour ses préparations -les plus ordinaires, des noms savoureux et -légers. Quels jolis substantifs et combien -substantiels ; profiteroles, croque-en-bouche, -fricandeau, gibelotte, le riz à la financière et -le potage velouté ! Elle fricasse des galantines ; -elle jette des vol-au-vent par-dessus -les moulins. Louis XV fait bouillir son café ; -le vainqueur de Mahon bat une sauce à -l’huile, tandis que les gardes françaises -chantent vêpres aux Porcherons et que la -noblesse — seigneurs et gentilshommes — s’encanaille -à Ramponneau.</p> - -<p>La gloutonnerie des Bourbons éclate chez -Louis XVI d’une manière intempestive. -A aucune époque de sa vie, le pauvre homme -ne sut modérer ni contenir son appétit. -Quand il se fut déterminé à quitter les Tuileries, -le 21 août 1791, il se détourna de son -itinéraire pour déjeuner à Étoges, chez son -premier valet de chambre, M. de Chamilly. -Quand il entra dans Varennes, les troupes du -marquis de Bouillé étaient parties depuis -deux heures, mais le postillon Drouet et ses -hommes l’attendaient. A peine de retour aux -Tuileries, il soupa, dévora un poulet comme -si rien d’extraordinaire ne s’était passé. Il -mangeait salement ; et Buffon, ayant assisté -une fois à son grand couvert, laissa échapper -un mot qui n’est pas du style soutenu, devant -les sangliers domestiques élevés par le -Jardin des plantes : « Eh bien, le roi, dit-il, -mange comme ces animaux-là ! »</p> - -<p>Mais revenons au temps du Roi Soleil.</p> - -<p>La bourgeoisie opulente et vaniteuse prenait -modèle sur la Cour ; tant pour la délicatesse -que pour l’abondance, la table des gens -de robe ou de négoce égalait celle du roi et -des seigneurs.</p> - -<p>Molière nous a donné le menu d’un repas -de gala offert par un marchand drapier, infatué -de noblesse à une femme de qualité.</p> - -<blockquote> -<p>« Je demeure d’accord avec lui que le repas -n’est pas digne de vous.</p> - -<p>« Comme c’est moi qui l’ai ordonné, et que je -n’ai pas, sur cette matière, les clartés de nos amis, -vous n’avez pas ici un repas fort savant. Vous y -trouverez des incongruités de bonne chère et des -barbarismes de bon goût. Si Damis s’en était -mêlé, tout serait dans les règles ; il y aurait partout -de l’élégance et de l’érudition. Il ne manquerait -pas de tout exagérer, lui-même, toutes les -pièces du repas qu’il vous donnerait et de vous -faire tomber d’accord de sa haute capacité dans -la science des bons morceaux, de vous parler d’un -pain de rive, à biseau doré, relevé de croûte partout, -croquant tendrement sous la dent ; d’un -vin à sève veloutée, armé d’un vert qui n’est -point trop commandant : d’un carré de mouton -gourmandé de persil ; d’une longe de veau de rivière, -longue comme cela, blanche, délicate, et -qui, sous les dents, est une vraie pâte d’amande ; -de perdrix relevées d’un fumet surprenant ; et -pour son opéra, d’une soupe à bouillon perlé, -soutenue d’un jeune gros dindon cantonné de -pigeonneaux et couronné d’oignons blancs, marié -avec la chicorée. »</p> -</blockquote> - -<p>On trouverait aujourd’hui le régal assez -épais. Encore que les jeunes femmes d’à-présent -aient renoncé à l’usage ridicule de ne pas -avouer leur appétit, elles auraient, sans doute, -quelque peine à débrider dans la même -séance une longe de veau, un carré de mouton, -et, comme dessert, un potage avec le -gros dindon obligatoire, flanqué de ses légumes -et fort semblable, peut-on dire, au -« bouilli » contemporain.</p> - -<p>Mais en 1677 on n’y regardait pas de si -près. Le classique festin ridicule de Nicolas -Boileau présente le spectacle d’une bombance -formidable, d’un entassement de nourritures -à nous lever le cœur.</p> - -<blockquote> -<p>« J’allais enfin sortir quand le rôt a paru. Sur -un lièvre flanqué de six poulets étiques s’élevaient -trois lapins, animaux domestiques qui, -dès leur tendre enfance, élevés dans Paris, sentaient -encore le chou dont ils furent nourris. Autour -de cet amas de viandes entassées, régnait un -long cordon d’alouettes pressées et sur les bords -du plat, six pigeons étalés présentaient un renfort -de squelettes brûlés. »</p> -</blockquote> - -<p>Madame trouvait encore ces mangeailles -trop délicates.</p> - -<blockquote> -<p>« Je ne mange, écrit-elle à l’électrice de -Hanovre, en fait de soupe, que la soupe au lait, -à la bière ou au vin ; je ne peux souffrir le bouillon -et je suis tout de suite malade s’il s’en trouve un -peu dans les plats que je mange… nul ne s’étonne -que je me régale de boudins ; j’ai aussi mis à la -mode ici les jambons crus. Tout le monde en -mange maintenant. On ne mangeait guère de gibier -avant ma venue. Or, j’ai mis tout cela à la -mode, ainsi que les harengs saurs. J’ai appris au -feu roi à les manger. Il les trouvait fort à son -goût. J’ai tellement affriandé ma gueule allemande -(veuillez faire état que c’est la princesse -qui parle) à des plats allemands que je ne peux -manger un seul ragoût français. Je ne mange que -du bœuf, du veau rôti, quelquefois du mouton, -des perdrix ou bien des poules rôties et jamais -du faisan. »</p> -</blockquote> - -<p>La Terreur impose un entr’acte sanglant -aux fêtes gastronomiques. Finis les soupers -des buveurs et les soupers des philosophes. -Chez le duc de Choiseul, Cazotte, l’illuminé, -a prédit l’exécution des souverains et la charrette -homicide à M<sup>me</sup> de Grammont. Il a -même annoncé la conversion de La Harpe. -Après cela pourra venir la fin du monde. -C’est un monde, en effet, qui meurt et se décompose -pour renaître, demain, plus jeune -et plus fort, comme le vieil Eson après avoir -bouilli dans le chaudron magique.</p> - -<p>Après le Neuf Thermidor, la fête recommence ; -à la débauche de sang, la débauche -de ripaille ne tarde pas à succéder. Le Directoire -inaugure cette marche triomphale de la -gourmandise à laquelle tour à tour l’Empire -et la Restauration vont apporter de nouveaux -contingents.</p> - -<p>C’est le beau temps de Carême, de Véfour, -des frères Provençaux, du rocher de Cancale ; -c’est l’ère du Palais-Royal qui commence, -avec ses galeries de bois, ses traiteurs, ses -bijoutiers, maisons de jeux et le reste !</p> - -<p>Chevet montre à son étalage des turbots -dignes d’être offerts à Domitien, prince des -amphitryons, qui demandait au Sénat la -sauce la plus convenable à ce monstre marin. -Corcelet, négociant, offre aux gourmets, -dans sa boutique de la galerie Montpensier, -le café de provenance directe échappé au -blocus continental et, dans leurs fioles bizarres, -les liqueurs authentiques de la veuve -Amphoux. Son enseigne<a id="FNanchor_1" href="#Footnote_1" class="fnanchor">[1]</a> représente un -élégant de l’an IX en possession de trancher -une poularde avec la dignité, l’onction et -l’élégance que comporte un pareil geste.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_1" href="#FNanchor_1"><span class="label">[1]</span></a> Que l’on peut voir encore avenue de l’Opéra, dans la -boutique modernisée de ce « négociant » d’autrefois.</p> -</div> -<p>Napoléon, qui sait l’art de gouverner les -hommes, regarde la table comme un instrument -de règne. Talleyrand, ministre des Relations -étrangères, Cambacérès, archichancelier -de l’Empire, le cardinal Fesch, oncle -de l’Empereur, traitent selon ses ordres, avec -une magnificence inouïe, diplomates, prélats, -étrangers de marque, les rois conquis au -jeune Bonaparte, les rois pour qui Talma et -M<sup>lle</sup> Georges ont l’honneur de jouer <i>Phèdre</i>, -<i>Cinna</i>, <i>Mithridate</i> et <i>Britannicus</i>, premier que -le décret de Moscou ait établi le sort des comédiens.</p> - -<p>Cambacérès est un amphitryon somptueux, -une fourchette magnanime. Il mange -comme un prince, ou comme un financier. -Ni Fouquet, ni la Popelinière, ni Grimod, le -divin Grimod de la Reynière, qui, pareil aux -princes charmants des contes de fées, avait -les doigts palmés comme une patte d’oie, -aucun de ces grands hommes n’a mieux -connu que l’archichancelier cet art glorieux -de donner à dîner. Un dessin de Carle Vernet -le montre en habit de cour, promenant sa bedaine, -dans une brouette, sous les rameaux — déjà -précaires — du Palais-Royal.</p> - -<p>C’est au cardinal Fesch qu’il convient d’attribuer -l’anecdote magnifique des deux turbots.</p> - -<p>Son maître d’hôtel joignait aux plus beaux -talents une imagination rare, de l’audace et -de la clairvoyance. Le prince de l’Église reçut -un jour deux turbots. Ceux du despote romain -n’étaient auprès qu’une limande. Ils -arrivaient fort à point. Ce jour-là même plusieurs -cardinaux, évêques, archevêques et -autres dignitaires ecclésiastiques dînaient -chez le primat. Le cardinal aurait souhaité -que l’un et l’autre poisson fissent les honneurs -de sa table. Quelle gloire pour le -clergé ! Mais aussi quelle faute de goût que -ce faste, bon à peine chez quelque parvenu. -Ce rendez-vous de turbot eût semblé ridicule -aux gens élevés dans les délicatesses de l’ancien -régime. Le cardinal exposa la difficulté -à son maître d’hôtel.</p> - -<p>— « Que votre Éminence se rassure ! Ils -paraîtront tous deux sans avoir pour cela -besoin de commettre une incongruité dans -l’ordonnance du repas. » On sert le dîner. Un -premier turbot relève le potage. Exclamation ! -Enthousiasme ! Recueillement. Le -maître d’hôtel s’avance alors. Deux officiers -de bouche s’emparent du monstre et l’emportent -afin de le servir. Mais l’un d’eux, par -un faux pas adroitement calculé, perd l’équilibre -et le turbot, avec lui, roule sur le parquet, -à la grande stupeur des convives.</p> - -<p>— « Qu’on en apporte un autre », ordonne -le maître d’hôtel sans se déconcerter.</p> - -<p>Faut-il parler ici de l’influence qu’a toujours -eue la table sur la production de l’intelligence, -dire l’aide que lui donne le café, -énumérer les tasses de Voltaire et les soupières -de Balzac ? Ironie de la gloire ! Le -père du Romantisme, le leader de la Constituante -comme on dit à présent, ont uni leur -gloire dans une œuvre de bouche qui survit -à l’éclat des <i>Martyrs</i>, au retentissement du -<i>Discours sur la Banqueroute</i>. Bien des gens -qui ne liront jamais <i>Atala</i> ou les <i>Mémoires -d’Outre-tombe</i>, qui ne connaissent même pas -de vue un quidam ayant fréquenté les -<i>Lettres à Sophie</i>, ont pour le chateaubriand -à la Mirabeau une tendresse légitime. Et -Rossini, Giacomo Rossini, dont la musique -de fête induisit en rêve Massimila Doni et la -Marianne de Gambarra, nos aïeules, Rossini -dont le <i>Moïse</i>, qui nous fait rire, faisait pleurer -les héroïnes de la <i>Comédie humaine</i>, que -serait-il aujourd’hui, sinon le parrain oublié -de la salle des ventes, s’il n’avait eu l’idée, -ô combien géniale ! d’associer la truffe et le -foie gras au bifteck de chaque jour ?</p> - -<p>La cuisine a ses écrivains comme la musique -ou l’assyriologie. Il convient de citer -avec honneur ces poètes, ces romanciers, -ces essayistes qui donnèrent une voix à la -muse des fourneaux. Et je ne parle pas ici -de la pléiade bachique, des membres du -<i>Caveau</i>, des faiseurs d’opéra-comique dont -la verve s’est épandue en des couplets -sans nombre, en des brindisis dont -M. Julien Tiersot, lui-même, ne sait plus le -compte.</p> - -<p>Non, les auteurs culinaires sont les consciencieux, -qui, avec des mots appropriés, -ont décrit la poule au riz, la suprême de volaille, -l’omelette à la purée de caille ou le -turban d’ananas. Malgré la recette qu’il -donne de la salade japonaise, fort méchante -d’ailleurs, Alexandre Dumas, le deuxième -du nom, ne saurait être compté parmi -les écrivains gastronomes ; car il s’est — le -volage — occupé d’autres choses.</p> - -<p>On en peut dire autant du bruitiste Marinetti. -Son <i>Roi Bombance</i>, proche parent du -<i>Roi Ubu</i>, symbolise un état de la civilisation, -mène les chœurs d’une satire politique, -parmi le tourbillon des fautes de français. -Redoutable goinfre, il absorbe dans les abîmes -de son gésier, toute la richesse, tous les fruits -du labeur humain : c’est « le Capital » dévorateur.</p> - -<p>Parmi les écrivains purement adonnés à -la belle gastronomie, inscrivons Berchoux qui -rima la <i>Gastronomie</i> sur les patrons de -l’abbé Delille, Brillat-Savarin, à qui l’on doit -cette heureuse version de la maxime de Vauvenargues : -« Les grandes pensées viennent -de l’estomac », Horace Raisson de qui le -<i>Code Gourmand</i> exhale, peut-on dire, un -fumet exquis de salle à manger sous la Restauration, -au beau temps du rocher de Cancale -et des Frères provençaux, enfin Charles -Monselet qui dota les lettres françaises du -<i>Cochon</i><a id="FNanchor_2" href="#Footnote_2" class="fnanchor">[2]</a>, incomparable sonnet pour lequel -je donnerais tout Pétrarque et pas -mal d’autres rimes par surcroît.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_2" href="#FNanchor_2"><span class="label">[2]</span></a> <span class="small">LE COCHON</span></p> - -<div class="poetry"> -<div class="verse">Car en toi tout est bon : chair, gresse, muscle, tripe.</div> -<div class="verse">On t’aime, galantine, on t’adore, boudin !</div> -<div class="verse">Ton pied — dont une sainte a consacré le type —</div> -<div class="verse">Empruntant son arome au sol périgourdin,</div> -<div class="verse">Eût réconcilié Socrate avec Xantippe.</div> - -<div class="verse stanza">Ton filet qu’embellit le cornichon badin,</div> -<div class="verse">Forme le déjeuner de l’humble citadin</div> -<div class="verse">Et tu passes avec l’oie au Frère Philippe.</div> - -<div class="verse stanza">Mérites précieux et de tous reconnus,</div> -<div class="verse">Morceaux marqués d’avance, innombrables, charnus.</div> -<div class="verse">Philosophe indolent qui mange</div> -<div class="verse i14">et que l’on mange !</div> - -<div class="verse stanza">Comme, dans notre orgueil nous sommes bienvenus</div> -<div class="verse">A vouloir, n’est-ce pas ? te reprocher ta fange,</div> -<div class="verse">Adorable cochon, animal-roi !</div> -<div class="verse i14"><span class="small">CHER ANGE</span> !</div> -</div> -</div> -<p>Et ce fut aussi un écrivain digne peut-être -qu’on le nommât culinaire, ce poète d’autrefois -qui, par jeu, se plut à rappeler les gargottes -de son adolescence, les tavernes peu -méritoires de Toulouse où tant de jeunes -hommes, veufs à présent de tous cheveux, -ingurgitaient des pitances laconiennes et -des rôtis sans volupté : le veau Allard.</p> - -<p>Et voici Raoul Gineste qui dépeint la tristesse -des vieux chats<a id="FNanchor_3" href="#Footnote_3" class="fnanchor">[3]</a>, loin des tables amiteuses -qu’offraient à leur délicatesse les vieilles -demoiselles pour qui les bêtes domestiques -sont un dernier amour.</p> - -<div class="footnote"><p><a id="Footnote_3" href="#FNanchor_3"><span class="label">[3]</span></a> LES VIEUX CHATS</p> - -<div class="poetry"> -<div class="verse">Comme ils sont tristes, les matous</div> -<div class="verse">De n’être plus sur les genoux</div> -<div class="verse">Qui leur faisaient des lits si doux !</div> - -<div class="verse stanza">Qu’ils regrettent les longues veilles</div> -<div class="verse">Où les doigts secs des bonnes vieilles</div> -<div class="verse">Taquinaient leurs frêles oreilles :</div> - -<div class="verse stanza">Quand, assises au coin du feu</div> -<div class="verse">Et rêvant au bel houzard bleu</div> -<div class="verse">Qui reçut leur premier aveu,</div> - -<div class="verse stanza">Les tricoteuses de mitaines</div> -<div class="verse">Évoquaient les amours lointaines,</div> -<div class="verse">Le temps heureux des prétentaines,</div> - -<div class="verse stanza">Alors, les mimis adorés,</div> -<div class="verse">Prenant des airs enamourés,</div> -<div class="verse">Arquaient leurs dos gras et fourrés.</div> - -<div class="verse stanza">Ils avaient des façons béates</div> -<div class="verse">De se lustrer du bout des pattes,</div> -<div class="verse">En songeant aux mignonnes chattes</div> - -<div class="verse stanza">Ou, comme des sphynx accroupis,</div> -<div class="verse">Ils ronronnaient sur les tapis,</div> -<div class="verse">Laissant aux rats de longs répits.</div> - -<div class="verse stanza">Fi des rats malins ! Les maîtresses</div> -<div class="verse">Leur faisaient de grasses paresses</div> -<div class="verse">Pleines de lait et de caresses.</div> - -<div class="verse stanza">Le bon mou qu’on allait manger,</div> -<div class="verse">Cuisait avec un bruit léger :</div> -<div class="verse">Fallait-il donc se déranger ?</div> - -<div class="verse stanza">Mais, ô revers inévitables !</div> -<div class="verse">Des héritiers peu charitables</div> -<div class="verse">Ont proscrit les chats de leurs tables.</div> - -<div class="verse stanza">Les voilà bohêmes ! Souvent,</div> -<div class="verse">Par les nuits de neige et de vent,</div> -<div class="verse">Ils grelottent sous un auvent.</div> - -<div class="verse stanza">Ombres étiques et funèbres</div> -<div class="verse">Ils profilent dans les ténèbres</div> -<div class="verse">Leurs dos où saillent les vertèbres</div> - -<div class="verse stanza">Et, quand ils voient passer en bas,</div> -<div class="verse">Des bonnes vieilles à cabas,</div> -<div class="verse">Qui trottent menu, d’un air las</div> - -<div class="verse stanza">Le bon goût des crèmes sucrées</div> -<div class="verse">Où trempaient les croûtes dorées,</div> -<div class="verse">Revient à leurs lèvres sevrées.</div> - -<div class="verse stanza">Et les vieux chats, d’un air dolent,</div> -<div class="verse">Hanté par un cruel relent,</div> -<div class="verse">Font le gros dos, en miaulant.</div> -</div> -</div> -<p>Le chat, animal nerveux, patricien et de -goûts relevés, sent profondément ces choses.</p> - -<p>L’heure du dîner, en effet, est vraiment -l’heure de l’exil. Jamais les saules de Babel -ne versent une ombre plus amère qu’au moment -où l’on regrette les oignons d’Égypte.</p> - -<p>La cuisine est la demeure de Vesta. Elle -renferme la pierre du foyer qui, lui-même, -sert de fondement et de base à la patrie.</p> - -<p>Omettre ici le nom de la <i>Cuisinière bourgeoise</i>, -de ce <i>compendium</i> lumineux qui se -peut, à bon droit, nommer le <i>Code</i> et la -<i>Somme</i> gastronomiques, serait un geste de la -plus odieuse ingratitude.</p> - -<p><i>La Cuisinière bourgeoise !</i> Elle abonde en -formules savoureuses, en robustes apophtegmes, -comme il convient à un écrit de -bouche où le ferme appétit du Tiers va chercher -ses inspirations.</p> - -<p>« Le homard demande à être cuit vivant », -affirme l’auteur de cet irréprochable Manuel.</p> - -<p>Et vraiment l’on est ému, touché aux -larmes de voir un crustacé, le homard, d’ordinaire -silencieux et même taciturne, prendre, -une seule fois, la parole pour demander le -bain un peu chaud qui bonifiera sa viande. -Auprès d’un tel dévouement, combien mesquins -les sacrifices légendaires d’Œlius Tubero, -de Mucius Scævola, de Régulus ou du -chevalier d’Assas ?</p> - -<p>Le moderne scepticisme, l’indifférence en -matière de religion, l’oubli dans lequel sont -les règles orthodoxes, les coutumes dévotes -et les principes en allés, portent à la cuisine -du <small>XX</small><sup>e</sup> siècle — affairée, insipide, quelconque -et déloyale — portent à la cuisine d’aujourd’hui, -à celle de demain un coup sournois et -pernicieux. Quand il souffle à travers les -fourneaux, le vent du rationalisme tourne en -graillon les sauces et compromet le rôti. Si -le divorce par consentement mutuel émancipe -jusqu’à l’union libre tant de belles pécheresses -à qui les frères Margueritte et maître -Henri Coulon espèrent, avant peu, donner, -chaque soir, la permission de la nuit, on peut -dire que la libre pensée inflige aux manipulations -culinaires un discrédit trop mérité. -Cela, bien entendu, sans exception de doctrine -ou de culte. Celui qui n’a pas mangé, -dans une famille israélite et pieuse, la choucroute -Kasher, blonde, onctueuse, aromatique, -parfumée de genièvre, rehaussée de -vin blanc et lubrifiée de graisse d’oie, ignore -à quel point l’orthodoxie est favorable aux -manipulations culinaires. Et les gâteaux de -sésame, le bœuf fumé, le <i>pickle fleisch</i> de -Teumann, capables de convertir au judaïsme -le cœur et même l’esprit d’Édouard -Drumont. Hélas ! depuis qu’Israël s’adonne -à la chair du pourceau, une vertu s’est retirée -de la choucroute garnie.</p> - -<p>Et le maigre, le maigre, cet éperon du génie, -le maigre qui forçait gouvernantes de -prélats et bonnes de vicaires, à jouer la difficulté, -à remplacer le perdreau par la sarcelle, -par l’anchois de Collioure, le jambon -interdit, à préparer les œufs de trois cents -manières différentes, n’est-ce pas à proprement -dire le maître et l’inspirateur des suprêmes -recherches ? Peut-être que, sans lui, -la barbue attendrait encore la sauce mousseline, -peut-être les écrevisses à la Nantua -n’auraient-elles pas atteint le degré culminant -de leur perfection ? Et nous serions privés -aussi des friandises conventuelles : sucres -d’orge, confitures, nonnettes et massepains.</p> - -<p>O splendeurs évanouies ! O soleils disparus -derrière l’horizon ! Hélas ! affairée, insipide, -quelconque et déloyale, au début du <small>XX</small><sup>e</sup> siècle -on peut dire que la cuisine agonise ! Elle est, -tout au moins, en pleine décadence. Les tziganes -des cafés où l’on soupe, les hideuses -majoliques des tavernes, la chimie substituée -à la probe coction des légumes et des viandes, -le régime hydrique, le végétarisme et, par -dessus tout, la conserve, la sordide conserve -qui prête le même goût de fer-blanc aux petits -pois, aux asperges en branches, aux rognons -de coq, à la sauce aux tomates, aux -crevettes épluchées, la conserve où les <i>beef-packers</i> -de Chicago laissent traîner des doigts -humains, les bouillons tout faits, les sauces à -la minute, ont déshonoré pour jamais l’art de -Carême, de Trompette et du marquis de Béchamel. -La cuisine se meurt ! La cuisine est -morte !</p> - -<p>Vous connaissez le dialogue des deux confiseurs. — Franchement, -dit l’un de ces augures, -avec quoi, mon cher confrère, fabriquez-vous -l’exoptable chocolat qui porte -votre nom aux confins de l’Univers ? — Mais -avec du sucre, je pense, de la vanille et -du cacao. — Eh bien, je peux vous le dire, -il y a longtemps que toutes ces saletés n’entrent -plus chez moi !</p> - -<p>En attendant que l’humanité se nourrisse, -comme le prédisait Berthelot, d’une pastille -quotidienne renfermant sous le moindre volume -tous les principes nécessaires à la vie, il -nous faudra manger encore bien des galantines -artificielles et des poissons traités au -sublimé. Le canard à la rouennaise, que servent -les restaurants de troisième ordre, ne -diffère pas sensiblement du marcassin cuisiné -par Locuste, à l’usage de Britannicus.</p> - -<p>Le sang de taureau empoisonnait les empereurs -de Suétone ; le caneton étouffé n’est -pas moins toxique et les « bouillons » offrent -à la démocratie un genre de mort si redoutable -que défunt Huysmans, épouvanté par -les artifices culinaires de son temps, courut -tout en pleurs dans les bras de la religion -avec l’espoir d’en obtenir de véridiques petits -pois, des bouillons sincères et des rôtis hâtés -à point. Vaine espérance ! On mange, à présent, -dans tous les pays habités au sommet -des Alpes et dans la salle des transatlantiques, -on mange à Copenhague comme à -Francisco les mêmes sauces chimiques, les -mêmes aloyaux spongieux et délavés, on -mange dans le même temple du graillon, le -même filet à la richelieu, le même turbot à la -sauce aux câpres, à côté du monsieur en train -de lire le même journal et de tenir les mêmes -propos.</p> - -<p>Les belles mangeuses que le Roi Soleil faisait -monter dans son carrosse, les goinfres -vigoureux lentement disparaissent, et, comme -les grands chefs de la cuisine française, bientôt -ne seront plus qu’un souvenir !</p> - -<p>Pendant longtemps, la province a lutté, -gardé pieusement les ragoûts indigènes, -bouillabaisse au Levant, cassoulet au Ponant, -et les croustades, le confit d’oie en Bigorre, -et le clafoutis en Limousin. Mais la -contrefaçon de Paris, l’abominable <i>instar</i>, -ont tout dévoré ; les « chefs » imbéciles ont -abâtardi la saine et pure tradition, noyé dans -leur infâme « espagnole » ce qui faisait l’orgueil -des sauces autrefois. Paris, seul, est -coupable de cette déchéance. Pour l’avoir -imité, la province et l’étranger (à part cette -forte Belgique où l’on dîne encore aussi vigoureusement -que sous Philippe le Bon et -Charles-Quint) ont abdiqué les recettes héréditaires, -substitué des « commodes » aux -fourneaux antiques. Les Parisiens, en effet, -et surtout les Parisiennes, mangent d’abord -avec les yeux, ce qui fait que l’on tend, de -plus en plus, à remplacer par le décor toute -espèce d’aliments. Les fleurs sur la nappe -compensent le beurre suspect et le gibier -douteux. « A Paris, dit Alphonse Daudet, -une femme estime toujours le dîner bon, -pourvu que sa robe aille mieux que celle des -autres femmes. »</p> - -<div class="asterism">*<br />* *</div> -<p>Qui s’informe, à présent, du menu dans les -maisons qu’il fréquente ?</p> - -<p>Les dîners, ô pudeur ! ne sont plus que des -rendez-vous d’affaires ou d’amour.</p> - -<p>Le tabac concourt au détraquement des -estomacs neurasthéniques.</p> - -<p>On fume, on boit tantôt d’atroces alcools, -tantôt les sinistres eaux de table qui parlent -d’intoxication et de gastrites aux appétits -découragés. On déglutit des nourritures suspectes -et — sans vêtir le sac de Jérémie — il -est aisé de prévoir un temps où ce carré de -mouton que Dorante proposait à Dorimène, -le cordial poulet rôti et jusqu’à l’oie aux marrons -que l’on a vraiment trop rabaissée, -n’offriront plus aux regards qu’une vieillerie -ancestrale, une chose d’autrefois bonne à -reléguer, avec le pain du siège, au musée -Carnavalet.</p> - -<div class="break"></div> - - -<p class="c top4em"><i>ACHEVÉ D’IMPRIMER</i><br /> -<span class="small">le quinze novembre mil neuf cent dix-neuf par</span><br /> -<span class="large">BUSSIÈRE</span><br /> -<span class="xsmall">A SAINT-AMAND</span> (<span class="xsmall">CHER</span>)<br /> -pour le compte de<br /> -<span class="large">A. MESSEIN</span><br /> -<i class="small">éditeur</i><br /> -19, <span class="xsmall">QUAI SAINT-MICHEL</span>, 19<br /> -PARIS (V<sup>e</sup>)</p> - -<div class="break"></div> - -<p class="c large top4em">ALBERT MESSEIN, ÉDITEUR, PARIS</p> - -<p class="sign u b">Dernières Nouveautés</p> - -<p class="c"><i>LES MANUSCRITS DES MAITRES</i></p> - - -<p class="c">PAUL VERLAINE</p> - -<p class="c xlarge">SAGESSE</p> - -<p><b><i>Le manuscrit autographe</i></b> de <span class="sc">Sagesse</span> que nous publions est celui -que le poète avait confié à la Société générale de la Librairie -catholique, en 1880. L’ouvrage est imprimé sur papier réglé (cahier -scolaire) et d’un seul côté de la page : ainsi le lecteur a l’illusion -de posséder le manuscrit autographe original. Les corrections -mêmes, qui attestent les scrupules du poète, sont reproduites.</p> - -<p class="c"><i>922 exemplaires numérotés à</i> <b>20 fr.</b> <i>l’exemplaire</i></p> - -<table summary=""> -<tr><td><i>Vient de Paraître</i> :</td><td><b>Arthur Rimbaud.</b> Poésies</td></tr> -<tr><td><i>Sous presse</i> :</td><td><b>Paul Verlaine.</b> Fêtes Galantes</td></tr> -</table> - -<p class="c">CHARLES MORICE</p> - -<p class="c">LETTRES A MES AMIS SUR QUELQUES POINTS DE DURABLE ACTUALITÉ :</p> - -<table summary=""> -<tr><td class="drap"><b>I. Le Retour ou : Mes Raisons.</b> Dédié à <i>Louis Le Cardonnel</i>. -Un volume in-12 broché</td> -<td class="bot r"><div><b>2 fr.</b> »»</div></td></tr> -<tr><td class="drap"><b>II. L’amour et La Mort.</b> Dédié à <i>Maurice Barrès</i>. 1 volume -in-12 broché</td> -<td class="bot r"><div><b>2 fr.</b> »»</div></td></tr> -<tr><td class="drap"><b>Il est Ressuscité.</b> Nouvelle édition augmentée d’une préface -(6<sup>e</sup> mille)</td> -<td class="bot r"><div><b>3 fr. 50</b></div></td></tr> -<tr><td class="drap"><b>Quincaille.</b> Poèmes en prose. 1 vol.</td> -<td class="bot r"><div><b>3 fr. 50</b></div></td></tr> -</table> - -<p class="c xlarge"><span class="sc">Société des</span> “TRENTE”</p> - -<p class="drap">Collection de jolis volumes in-8 écu, tirés à 530 exemplaires numérotés, -500 sur papier d’Arches à <b>5</b> fr., 20 sur papier du Japon -à <b>15</b> fr. et 10 sur papier de Chine à <b>20</b> fr.</p> - -<p class="drap">La Société des Trente publiera les 30 volumes qui composeront -sa collection en cinq ans à raison de six par an.</p> - -<p class="ind i">Nous avons déjà publié :</p> - -<ul><li><b>Maurice Barrès. <span class="small">Pour nos Églises</span></b>. (<i>épuisé</i>)</li> -<li><b>Émile Bernard. <span class="small">Souvenirs sur Paul Cézanne</span></b>. (<i>épuisé</i>)</li> -<li><b>Henry Martineau. <span class="small">L’itinéraire de Stendhal</span></b>.</li> -<li><b>André Salmon. <span class="small">La Jeune Peinture Française</span></b>. (<i>épuisé</i>)</li> -<li><b>Rémy de Gourmont. <span class="small">Le Chat de Misère</span></b>. (<i>épuisé</i>)</li> -<li><b>Lucile de Chateaubriand. <span class="small">Œuvres</span></b>. Étude de <span class="sc">L. Thomas</span>.</li> -<li><b>Maurice Barrès. <span class="small">Autour des Églises de Village</span></b>.</li> -<li><b>Laurent Tailhade. <span class="small">Quelques Fantômes de Jadis</span></b>.</li> -<li><b>Alfred Capus. <span class="small">Boulevard et Coulisses</span></b>.</li> -<li><b>A. Sérieyx. <span class="small">Vincent d’Indy</span></b>.</li> -<li><b>Chateaubriand & ***. <span class="small">Journal d’un Conclave</span></b>.</li> -<li><b>Jules Destrée. <span class="small">Wallonie</span></b>.</li> -<li><b>Charles Morice. <span class="small">Quelques Maîtres Modernes</span></b>.</li> -<li><b>Marcel Boulenger. <span class="small">Apologie du Duel</span></b>.</li> -<li><b>Rémy de Gourmont. <span class="small">Trois Légendes du Moyen Age</span></b>.</li> -<li><b>André Salmon. <span class="small">La Jeune Sculpture Française</span></b>.</li></ul> - -<div lang='en' xml:lang='en'> -<div style='display:block; margin-top:4em'>*** END OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK <span lang='fr' xml:lang='fr'>PETIT BRÉVIAIRE DE LA GOURMANDISE</span> ***</div> -<div style='text-align:left'> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -Updated editions will replace the previous one—the old editions will -be renamed. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -Creating the works from print editions not protected by U.S. copyright -law means that no one owns a United States copyright in these works, -so the Foundation (and you!) can copy and distribute it in the United -States without permission and without paying copyright -royalties. 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Redistribution is subject to the trademark -license, especially commercial redistribution. -</div> - -<div style='margin:0.83em 0; font-size:1.1em; text-align:center'>START: FULL LICENSE<br /> -<span style='font-size:smaller'>THE FULL PROJECT GUTENBERG LICENSE<br /> -PLEASE READ THIS BEFORE YOU DISTRIBUTE OR USE THIS WORK</span> -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -To protect the Project Gutenberg™ mission of promoting the free -distribution of electronic works, by using or distributing this work -(or any other work associated in any way with the phrase “Project -Gutenberg”), you agree to comply with all the terms of the Full -Project Gutenberg™ License available with this file or online at -www.gutenberg.org/license. -</div> - -<div style='display:block; font-size:1.1em; margin:1em 0; font-weight:bold'> -Section 1. General Terms of Use and Redistributing Project Gutenberg™ electronic works -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -1.A. By reading or using any part of this Project Gutenberg™ -electronic work, you indicate that you have read, understand, agree to -and accept all the terms of this license and intellectual property -(trademark/copyright) agreement. If you do not agree to abide by all -the terms of this agreement, you must cease using and return or -destroy all copies of Project Gutenberg™ electronic works in your -possession. If you paid a fee for obtaining a copy of or access to a -Project Gutenberg™ electronic work and you do not agree to be bound -by the terms of this agreement, you may obtain a refund from the person -or entity to whom you paid the fee as set forth in paragraph 1.E.8. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -1.B. “Project Gutenberg” is a registered trademark. It may only be -used on or associated in any way with an electronic work by people who -agree to be bound by the terms of this agreement. 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If any disclaimer or limitation set forth in this agreement -violates the law of the state applicable to this agreement, the -agreement shall be interpreted to make the maximum disclaimer or -limitation permitted by the applicable state law. The invalidity or -unenforceability of any provision of this agreement shall not void the -remaining provisions. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -1.F.6. INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the -trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone -providing copies of Project Gutenberg™ electronic works in -accordance with this agreement, and any volunteers associated with the -production, promotion and distribution of Project Gutenberg™ -electronic works, harmless from all liability, costs and expenses, -including legal fees, that arise directly or indirectly from any of -the following which you do or cause to occur: (a) distribution of this -or any Project Gutenberg™ work, (b) alteration, modification, or -additions or deletions to any Project Gutenberg™ work, and (c) any -Defect you cause. -</div> - -<div style='display:block; font-size:1.1em; margin:1em 0; font-weight:bold'> -Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg™ -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -Project Gutenberg™ is synonymous with the free distribution of -electronic works in formats readable by the widest variety of -computers including obsolete, old, middle-aged and new computers. It -exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations -from people in all walks of life. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -Volunteers and financial support to provide volunteers with the -assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg™’s -goals and ensuring that the Project Gutenberg™ collection will -remain freely available for generations to come. In 2001, the Project -Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure -and permanent future for Project Gutenberg™ and future -generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see -Sections 3 and 4 and the Foundation information page at www.gutenberg.org. -</div> - -<div style='display:block; font-size:1.1em; margin:1em 0; font-weight:bold'> -Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non-profit -501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the -state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal -Revenue Service. The Foundation’s EIN or federal tax identification -number is 64-6221541. Contributions to the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by -U.S. federal laws and your state’s laws. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -The Foundation’s business office is located at 809 North 1500 West, -Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact links and up -to date contact information can be found at the Foundation’s website -and official page at www.gutenberg.org/contact -</div> - -<div style='display:block; font-size:1.1em; margin:1em 0; font-weight:bold'> -Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -Project Gutenberg™ depends upon and cannot survive without widespread -public support and donations to carry out its mission of -increasing the number of public domain and licensed works that can be -freely distributed in machine-readable form accessible by the widest -array of equipment including outdated equipment. Many small donations -($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt -status with the IRS. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -The Foundation is committed to complying with the laws regulating -charities and charitable donations in all 50 states of the United -States. Compliance requirements are not uniform and it takes a -considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up -with these requirements. We do not solicit donations in locations -where we have not received written confirmation of compliance. To SEND -DONATIONS or determine the status of compliance for any particular state -visit <a href="https://www.gutenberg.org/donate/">www.gutenberg.org/donate</a>. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -While we cannot and do not solicit contributions from states where we -have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition -against accepting unsolicited donations from donors in such states who -approach us with offers to donate. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -International donations are gratefully accepted, but we cannot make -any statements concerning tax treatment of donations received from -outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -Please check the Project Gutenberg web pages for current donation -methods and addresses. Donations are accepted in a number of other -ways including checks, online payments and credit card donations. To -donate, please visit: www.gutenberg.org/donate -</div> - -<div style='display:block; font-size:1.1em; margin:1em 0; font-weight:bold'> -Section 5. General Information About Project Gutenberg™ electronic works -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -Professor Michael S. Hart was the originator of the Project -Gutenberg™ concept of a library of electronic works that could be -freely shared with anyone. For forty years, he produced and -distributed Project Gutenberg™ eBooks with only a loose network of -volunteer support. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -Project Gutenberg™ eBooks are often created from several printed -editions, all of which are confirmed as not protected by copyright in -the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not -necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper -edition. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -Most people start at our website which has the main PG search -facility: <a href="https://www.gutenberg.org">www.gutenberg.org</a>. -</div> - -<div style='display:block; margin:1em 0'> -This website includes information about Project Gutenberg™, -including how to make donations to the Project Gutenberg Literary -Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to -subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks. -</div> - -</div> -</div> -</body> -</html> diff --git a/old/67129-h/images/cover.jpg b/old/67129-h/images/cover.jpg Binary files differdeleted file mode 100644 index dfc7d95..0000000 --- a/old/67129-h/images/cover.jpg +++ /dev/null |
